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Copyright Board
Canada

Canada Coat of Arms/Armoiries du Canada

Commission du droit d’auteur
Canada

 

Date

1990-10-02

Référence

DOSSIER : 1989-1

Régime

Retransmission de signaux éloignés de radio et de télévision

Loi sur le droit d’auteur, article 70.63

Commissaires

M. le juge Donald Medhurst

Michel Hétu, c.r.

Mme Judith Alexander

Me Michel Latraverse

Tarif des droits à payer pour la retransmission de signaux éloignés de radio et de télévision en 1990 et 1991

Motifs de la décision

TABLE DES MATIÈRES

I. HISTORIQUE ET DESCRIPTION - 1 -

A. LA PROCÉDURE - 1 -

B. LES DISPOSITIONS LÉGISLATIVES PERTINENTES - 2 -

C. DONNÉES SUR LES SYSTÈMES DE TÉLÉDISTRIBUTION - 3 -

D. LES PARTIES AUX AUDIENCES - 7 -

i. Les producteurs d’émissions : la SPDAC et la SCR - 7 -

ii. Les radiodiffuseurs : l’ADRC, l’ADRRC et la BBC - 7 -

iii. Les ligues sportives : la FWS, la LBM et l’ACS - 8 -

iv. Les titulaires du droit d’auteur sur les œuvres musicales : la SDE et la CAPAC - 8 -

v. Les opposants : l’ACTC, la CANCOM et la C1 - 8 -

E. LES PROJETS DE TARIF DES PARTIES - 8 -

i. Le projet de la SPDAC - 9 -

ii. Les projets de la SCR et de l’ADRRC - 10 -

iii. Le projet de l’ADRC - 10 -

iv. Les autres projets - 10 -

II. LES PRINCIPES DIRECTEURS APPLIQUÉS POUR FIXER LES DROITS DE RETRANSMISSION - 11 -

A. LES PRINCIPES PROPOSÉS PAR LES PARTIES - 11 -

i. La définition et l’évaluation du caractère juste et équitable des droits - 11 -

ii. Comparaison avec le régime américain de retransmission - 12 -

iii. L’augmentation de l’auditoire qui résulte de la retransmission - 12 -

iv. La sortie des droits du Canada - 12 -

B. LES PRINCIPES DIRECTEURS RETENUS PAR LA COMMISSION - 13 -

i. Les retransmetteurs - 13 -

ii. Les abonnés - 13 -

iii. Les sociétés de perception - 14 -

III. LES DROITS À PAYER POUR LA RETRANSMISSION DE SIGNAUX DE TÉLÉVISION - 14 -

A. LES PETITS SYSTÈMES - 14 -

B. LES GRANDS SYSTÈMES : I – LA VALEUR DES SIGNAUX ÉLOIGNÉS - 15 -

i. La valeur des services comparables - 15 -

ii. La valeur de la programmation potentielle écartée - 19 -

iii. La valeur des droits de licence perdus - 19 -

iv. La comparaison avec le régime américain - 20 -

v. Les conclusions de la Commission - 22 -

C. LES GRANDS SYSTÈMES : II – LES DROITS À PAYER - 23 -

i. Les propositions des parties - 23 -

ii. La répartition des droits entre les retransmetteurs - 25 -

iii. La formule tarifaire - 27 -

D. L’IMPACT DES DROITS D’AUTEUR SUR L’INDUSTRIE - 29 -

i. La capacité de l’industrie d’absorber le coût des droits - 29 -

ii. La réaction des retransmetteurs et des abonnés - 30 -

iii. La capacité relative de certains sous-secteurs de l’industrie d’assumer le coût des droits - 31 -

IV. LA RÉPARTITION DES DROITS ENTRE LES SOCIÉTÉS DE PERCEPTION - 31 -

A. LES QUESTIONS DE DROIT - 31 -

i. La compilation de la journée de radiodiffusion - 32 -

ii. La revendication de l’ADRRC concernant l’exclusivité territoriale - 35 -

iii. Les émissions sportives - 35 -

iv. Les œuvres musicales - 36 -

B. LES MODES DE RÉPARTITION - 37 -

i. La répartition fondée sur le temps d’antenne - 37 -

ii. La répartition fondée sur les cotes d’écoute - 38 -

iii. Le coût des émissions et les recettes qu’elles rapportent - 40 -

iv. L’opinion des télédistributeurs et des abonnés - 41 -

C. LES AJUSTEMENTS AUX DONNÉES SUR L’ÉCOUTE - 41 -

i. La distinction entre les signaux canadiens et américains - 41 -

ii. Les quote-parts de la SDE et de la CAPAC - 42 -

iii. La quote-part de la LBM - 42 -

D. LES LITIGES CONCERNANT LA PROPRIÉTÉ DU DROIT D’AUTEUR - 42 -

i. Les litiges sur le droit d’auteur pour les émissions sportives - 43 -

ii. Le litige sur les comédies et les émissions dramatiques en souscription - 43 -

E. LA RÉPARTITION FINALE - 43 -

V. LES DROITS À PAYER POUR LA RETRANSMISSION DE SIGNAUX DE RADIO - 44 -

VI. LES TARIFS - 45 -

A. LA CONSOLIDATION DES TARIFS - 45 -

B. LES PRINCIPES DE RÉDACTION - 45 -

C. NOTES EXPLICATIVES - 47 -

i. Les définitions - 47 -

ii. Le concept d’abonné - 47 -

iii. L’inclusion par renvoi d’autres dispositions législatives - 47 -

iv. Les petits systèmes [Tarif pour la télévision, article 4; tarif pour la radio, article 4] - 48 -

v. Les services de radiodiffusion directe du satellite au foyer - 48 -

vi. La façon de déterminer le montant des droits - 49 -

vii. Les abonnés indirects - 49 -

viii. Le droit des sociétés de perception de recevoir leur quote- part [Tarif pour la télévision, article 12; tarif pour la radio, article 7] - 49 -

ix. Les exigences de rapport [Tarif pour la télévision, article 13; tarif pour la radio, article 8] - 50 -

x. Les erreurs [Tarif pour la télévision, article 14; tarif pour la radio, article 9] - 51 -

xi. Le remboursement de paiements excédentaires [Tarif pour la télévision, paragraphe 14(2); tarif pour la radio, paragraphe 9(2)] - 51 -

xii. Les vérifications [Tarif pour la télévision, article 15; tarif pour la radio, article 10] - 51 -

xiii. L’intérêt sur les sommes dues [Tarif pour la télévision, article 16; tarif pour la radio, article 11] - 52 -

xiv. L’expédition des avis [Tarif pour la télévision, article 18; tarif pour la radio, article 13] - 53 -

xv. Les dispositions transitoires [Tarif pour la télévision, article 19; tarif pour la radio, article 14] - 53 -

D. LES ASPECTS PARTICULIERS DU TARIF POUR LA RADIO - 54 -

VII. ANNEXE – CALCUL DÉTAILLÉ DE LA RÉPARTITION FINALE - 55 -

A. Cotes d’écoute des émissions pour lesquelles le droit d’auteur n’est pas contesté, tout genre d’émission (tirées de CCC-72). - 55 -

B. Cotes d’écoute des émissions pour lesquelles le droit d’auteur est contesté (dans le même ordre que celui qui paraît dans CCC-72). - 55 -

C. Cotes d’écoute de toutes les émissions (cumul des tableaux A et B). - 56 -

D. Cotes d’écoute rajustées en fonction du temps d’antenne des signaux canadiens et américains (tirées de CCC-73). - 57 -

E. La répartition finale - 57 -

VIII. DISSIDENCE DU COMMISSAIRE LATRAVERSE - 58 -

Préambule - 58 -

A. ANALYSE DES PRINCIPES DIRECTEURS ÉNONCÉS DANS LA DÉCISION MAJORITAIRE - 59 -

B. UNE ANALYSE DIFFÉRENTE - 61 -

C. COMMENTAIRES SUR LA PARTIE 3B DE LA DÉCISION MAJORITAIRE : LES DROITS À VERSER POUR LA RETRANSMISSION DE LA TÉLÉVISION; LES GRANDS SYSTÈMES : I – LA VALEUR DES SIGNAUX ÉLOIGNÉS - 78 -

D. LA RÉCLAMATION POUR LA COMPILATION DU JOUR DE DIFFUSION - 81 -

E. DES CONCLUSIONS DIFFÉRENTES - 86 -

IX. NOTE – DISSIDENCE - 88 -

 


I. HISTORIQUE ET DESCRIPTION

A. LA PROCÉDURE

Le 30 juin 1989, onze sociétés de perception ont déposé, auprès de la Commission du droit d’auteur, quatorze projets de tarif pour la retransmission de signaux éloignés de radio et de télévision, conformément à l’article 70.61 de la Loi sur le droit d’auteur (ci-après, la « Loi »). Ces sociétés sont l’American College Sports Collective of Canada (ACS), la Border Broadcasters’ Collective (BBC), l’Agence des droits de retransmission des radiodiffuseurs canadiens Inc. (ADRRC), la Canadian Reprography Collective (CANCOPY), la Société collective de retransmission du Canada (SCR), l’Association du droit de retransmission canadien (ADRC), l’Association des compositeurs, auteurs et éditeurs du Canada, Limitée (CAPAC), la Société de perception de droit d’auteur du Canada (SPDAC), la Société de perception de la ligue de baseball majeure du Canada, Inc. (LBM); NHL Services, Inc. (maintenant connue sous le nom de FWS Joint Sports Claimants (FWS)), et la Société de droits d’exécution du Canada, Limitée (SDE). Toutes ont présenté des projets de tarif pour des œuvres retransmises sur des signaux éloignés de télévision et trois d’entre elles, soit l’ADRRC, la CAPAC et la SDE ont également présenté des projets de tarif pour des œuvres retransmises sur des signaux éloignés de radio.

Les projets de tarif ont été publiés dans la Gazette du Canada, le 12 août 1989. L’Association canadienne de télévision par câble (ACTC), Les Communications par satellite canadien Inc. (CANCOM) et la C1 Cablesystems Inc. (C1) se sont opposées aux projets.

La Commission a établi une directive sur la procédure fixant les dates limites pour le dépôt et l’échange de documents. Le 29 septembre 1989, toutes les sociétés de perception, à l’exception de l’ACS, avaient déposé leurs réponses aux oppositions. L’échange des interrogatoires par écrit et des réponses à ces interrogatoires s’est terminé le 6 novembre 1989. Le 27 octobre 1989, la signification des mémoires préalables aux audiences avait été effectuée.

La Commission a établi l’ordre des présentations lors d’une conférence préparatoire tenue le 10 novembre 1989. Le 20 novembre 1989, la Commission a tranché les questions découlant des interrogatoires par écrit. Le 21 novembre 1989, toutes les parties ont passé en revue les données fournies par l’ADRC et la SPDAC sur les systèmes de télédistribution.

Les audiences se sont échelonnées sur 57 jours entre le 27 novembre 1989 et le 10 mai 1990. La Commission a entendu plus de 80 témoins et reçu en preuve plus de 350 documents. La preuve a porté exclusivement sur les projets de tarif pour la retransmission de signaux éloignés de télévision. La question des signaux de radio n’a pas été abordée. Les sociétés de perception qui proposaient des tarifs pour la retransmission de signaux éloignés de radio ont conclu une entente avec l’ACTC en mars 1990. Elles ont déposé cette entente auprès de la Commission et lui demandent de l’approuver.

Les intervenants ont reçu l’autorisation de faire valoir leur point de vue uniquement par écrit. Les 22 intervenants qui se sont prévalus de ce droit ont appuyé, de façon générale, la position exprimée par l’ACTC.

La Commission a reçu l’argumentation écrite des parties le 20 avril 1990 et les réponses à celles-ci le 4 mai 1990. Le 9 et le 10 mai 1990, la Commission a adressé des questions aux parties. Une année s’étant écoulée depuis le dépôt initial des projets de tarif, la Commission a permis aux parties de lui faire connaître les révisions dont elles voulaient qu’elle tienne compte. Ces révisions lui ont été communiquées au cours de la deuxième semaine de mai 1990.

La Commission a convoqué à nouveau les parties le 19 septembre 1990, pour obtenir des précisions quant à l’identité du titulaire du droit d’auteur sur les émissions dont l’écoute a servi de fondement à l’une des propositions pour la répartition des droits.

B. LES DISPOSITIONS LÉGISLATIVES PERTINENTES

Jusqu’à tout récemment, la protection du droit d’auteur prévue à l’alinéa 3(1)(f) de la Loi se limitait à la communication d’une œuvre par radiophonie, c’est-à-dire par radiodiffusion. L’obligation de verser des droits d’auteur pour la retransmission de signaux éloignés découle des modifications apportées à la Loi par la Loi de mise en œuvre de l’Accord de libre- échange entre le Canada et les États-Unis, (L.C. 1988, c. 65), entrées en vigueur par proclamation le 13 février 1989.

Depuis la modification de l’alinéa 3(1)(f), l’expression « droit d’auteur » s’entend en outre du droit « de communiquer [une œuvre] au public, par télécommunication ». Le terme « télécommunication », selon l’article 2, vise « toute transmission de signes, signaux, écrits, images, sons ou renseignements de toute nature par fil, radio, procédé visuel ou optique, ou autre système électromagnétique ». Par conséquent, les utilisateurs de la technologie par câble ou par satellite sont maintenant assujettis au paiement de droits d’auteur.

La Loi de mise en œuvre de l’Accord de libre- échange a également établi un régime de licence obligatoire pour les droits de retransmission et c’est la Commission qui est responsable de sa mise en œuvre. Les articles 70.61 à 70.67 de la Loi prescrivent la marche à suivre pour l’établissement des droits à payer, du dépôt des projets de tarif par les sociétés de perception jusqu’à la décision de la Commission fixant les droits pour la retransmission de signaux éloignés.

Les expressions « signal local », « signal éloigné », et « aire de transmission » ont été définies par le règlement DORS/89-254, intitulé Règlement sur la définition de signal local et signal éloigné. Ces définitions établissent l’obligation de verser des droits d’auteur pour la retransmission du signal d’une station de télévision à tout endroit situé à plus de 32 kilomètres du périmètre de rayonnement de classe B de cette station.

En vertu du paragraphe 70.63(1) de la Loi, la Commission :

« a) établit, compte tenu notamment des critères réglementaires, la formule tarifaire qui permet de déterminer les droits à payer par chaque catégorie de retransmetteurs et fixe, à son appréciation, les modalités afférentes aux droits;

b) détermine la quote-part de chaque société de perception dans ces droits;

c) modifie en conséquence chacun des projets de tarif;

d) certifie ceux-ci qui sont dès lors les tarifs homologués applicables à chaque société en cause ».

Le paragraphe 70.63(4) habilite le gouverneur en conseil à fixer, par règlement, des critères dont la Commission doit tenir compte, pour l’application de l’alinéa 70.63(1) a), mais aucun règlement de cet ordre n’a été adopté.

Le paragraphe 70.64(1) oblige la Commission à établir un taux préférentiel pour les petits systèmes de retransmission. Il s’agit, en vertu du Règlement sur la définition de petit système de retransmission, DORS/89-255, de tout système retransmettant un signal à au plus 1 000 locaux situés dans la même localité. Cette définition exclut un système à antenne collective situé dans la zone de desserte d’un grand système de retransmission.

En vertu du paragraphe 70.67(1), le gouverneur en conseil peut modifier la formule tarifaire établie par la Commission.

C. DONNÉES SUR LES SYSTÈMES DE TÉLÉDISTRIBUTION

Les signaux éloignés ont joué un rôle déterminant dans le développement et la croissance de l’industrie de la télédistribution. Nombreuses sont les communautés où le service par câble a augmenté le nombre de stations disponibles; ailleurs, il a permis une réception meilleure ou plus fiable de signaux qui pouvaient déjà être captés au moyen d’antennes aériennes directionnelles. À l’époque, la plupart des communautés situées à l’extérieur de la région de Toronto étaient desservies par seulement deux stations locales commerciales canadiennes diffusant dans la langue de la majorité.

Aujourd’hui, les abonnés au service par câble ont accès à une variété beaucoup plus grande de signaux et de services, et l’importance des signaux éloignés a diminué d’autant. La plupart des abonnés peuvent recevoir au moins trois signaux locaux de stations commerciales canadiennes affiliées à des réseaux différents et diffusant dans la langue de la majorité de la communauté, un service éducatif, cinq ou six services canadiens par satellite, deux services canadiens de télévision payante, de nombreux services spécialisés américains offerts en bloc avec des services canadiens, un canal communautaire et plusieurs services alphanumériques.

Par contre, le nombre de signaux éloignés offerts n’a presque pas changé. Ils représentent maintenant environ 25 pour cent de tous les services disponibles, les autres étant des signaux locaux et des services hors antenne. [1] Le tableau I indique quel est le nombre moyen de signaux locaux et éloignés que captent les grands systèmes et le nombre total d’abonnés qu’ils rejoignent.

TABLE I: DISTRIBUTION OF DISTANT AND LOCAL SIGNALS
TABLEAU I: RÉPARTITION DES SIGNAUX ÉLOIGNÉS ET LOCAUX

 

 

 

 

BASIC SIGNALS ONLY

SIGNAUX DE BASE SEULEMENT

 

Basic Signals

Discretionary Signals

Total

Average Signals/ System

Average Signals/ Subscriber

Total Signals/ Subscriber

 

Signaux de base

Signaux facultatifs

Total

Moyenne de signaux par système

Moyenne de signaux par abonné

Total des signaux/ abonné

LOCAL/LOCAUX

2,227

0

2,227

5.75

8.30

52,471,432

DISTANT/ÉLOIGNÉS

2,275

61

2,336

5.88

4.56

28,798,592

TOTAL

4,502

61

4,563

11.63

12.86

81,270,024 [2]

La preuve établit que la cote d’écoute des signaux éloignés, en novembre 1988, s’élevait à 21,9 pour cent au Canada.

La SPDAC a présenté à la Commission des statistiques tirées des données de Mediastats. [3] Les données présentées par la SPDAC décrivent beaucoup plus clairement l’industrie de la télédistribution que celles de l’ADRC; ces dernières sont axées plutôt sur les signaux et ne contiennent aucun renseignement sur la retransmission des signaux facultatifs. Il n’a donc pas été possible d’établir une comparaison directe entre les renseignements présentés par les deux sociétés, mais celles-ci reconnaissent que, dans l’ensemble, leurs données concordent. Toutes les parties conviennent d’ailleurs que ces renseignements ont permis des échanges plus éclairés lors des audiences. La Commission les a trouvés très utiles et espère que les sociétés de perception continueront de lui faire parvenir des mises à jour.

La SPDAC a d’abord déposé ses données le 4 octobre 1989, puis a produit des versions révisées le 2 novembre 1989 et le 14 mars 1990. Ces données fournissent un assez bon aperçu de l’industrie en date du 31 mars 1989. Pour chaque système de télédistribution canadien, elles indiquent le nom du système et sa localité, le nombre d’abonnés au service de base, le tarif minimum de l’abonnement mensuel, les recettes annuelles provenant des abonnements, ainsi que l’indicatif et le réseau de chaque station terrestre de télévision qui est retransmise. Pour les systèmes comptant plus de 1 000 abonnés, elles indiquent tous les signaux éloignés et le degré d’éloignement de chacun.

Le tableau II représente la répartition des systèmes de télédistribution et de leurs abonnés. Il a été préparé par la Commission à partir des données de la SPDAC mises à jour. Tant le tableau II que le tableau III révèlent qu’un nombre important de systèmes ont peu d’abonnés : les deux tiers des systèmes ne desservent pas plus de 5 pour cent des abonnés.

TABLE II: DISTRIBUTION OF SUBSCRIBERS (ALL SYSTEMS)
TABLEAU II : RÉPARTITION DES ABONNÉS (TOUS LES SYSTÈMES)

System Size

(Number of Subscribers)

Number of Systems

Number of Subscribers

Percentage of Subscribers

Taille du système

(Nombre d’abonnés)

Nombre de systèmes

Nombre d’abonnés

Pourcentage des abonnés

OVER/PLUS DE 500,000

1

582,718

8.85

250,000 –

 

 

499,999

1

360,442

5.47

100,000 –

 

 

249,999

12

1,728,016

26.25

50,000

 

99,999

13

962,732

14.62

25,000

 

49,999

28

980,777

14.89

10,000

 

24,999

56

836,010

12.69

6,000

 

9,999

28

224,801

3.41

1,001

 

5,999

248

643,127

9.76

0

 

1,000

1,082

267,738

4.07

 

______

_________

______

TOTAL

1,469

6,586,361

100.01

TABLE III: DISTRIBUTION OF SUBSCRIBERS (SMALL SYSTEMS)
TABLEAU III : RÉPARTITION DES ABONNÉS (PETITS SYSTÈMES)

System Size

Taille du système

Number of Systems

Nombre de systèmes

Number of Subscribers

Nombre d’abonnés

901 – 1000

24

23,016

801 – 900

17

14,543

701 – 800

26

19,676

601 – 700

33

21,670

501 – 600

55

30,366

401 – 500

57

25,595

301 – 400

92

31,446

201 – 300

151

37,470

101 – 200

306

44,921

1 – 100

300

19,035

0

21

0

 

_____

_______

TOTAL

1,082

267,738

Le nombre moyen de signaux éloignés reçus par l’abonné d’un grand système est de 4,56 (28 798 592/ 6 318 623), bien que les télédistributeurs retransmettent, en moyenne, 6,04 signaux (2 336/387) dont 5,88 signaux de base (2 275/387). On retrouve ces chiffres au tableau IV qui représente la répartition des signaux éloignés entre les 387 grands systèmes canadiens. La portée des grands systèmes s’entend ici de la somme, pour tous les abon- nés, du nombre de signaux reçus par chaque abonné. De ces 28,8 millions de signaux distincts, 4,5 millions sont des signaux canadiens de langue anglaise, 2,2 millions, des signaux canadiens de langue française, et 22,1 millions, des signaux américains. Notons enfin que la programmation d’origine étrangère représente près de 85 pour cent du temps d’antenne et plus de 90 pour cent de la cote d’écoute des signaux éloignés. [4]

TABLE IV: DISTRIBUTION OF DISTANT SIGNALS
TABLEAU IV: RÉPARTITION DES SIGNAUX ÉLOIGNÉS

BASIC AND DISCRETIONARY DISTANT SIGNALS

SIGNAUX ÉLOIGNÉS DE BASE ET FACULTATIFS

BASIC ONLY

SIGNAUX DE BASE SEULEMENT

Number of Distant Signals

Nombre de signaux éloignés

Number of Systems

Nombre de systèmes

Total of Signals Carried

Total des signaux retransmis

Number of Subscribers

Nombre d’abonnés

Total of Distant Signals/Subscriber

Total des signaux éloignés/abonné

1

13

13

700,832

679,665

2

11

22

215,013

271,010

3

14

42

133,834

388,133

4

57

228

724,004

2,538,688

5

58

290

1,768,527

7,057,870

6

76

456

1,193,181

6,380,737

7

69

483

933,862

5,986,397

8

43

344

254,148

1,957,259

9

20

180

294,757

2,543,862

10

15

150

76,961

715,176

11

6

66

9,633

105,963

12

4

48

10,181

122,172

13

0

0

0

0

14

1

14

3,690

51,660

 

___

_____

________

_________

TOTAL

387

2,336

6,318,623

28,798,592 [5]

La SPDAC et la SCR ont également fourni des renseignements sur les différents types de signaux. Certains télédistributeurs reçoivent deux signaux, émanant de villes différentes, mais qui font partie du même réseau. La programmation de ces signaux jumeaux est en partie identique. Des 28,8 millions de signaux de base offerts, 5,3 millions (ou 18,2 pour cent) sont des signaux jumeaux. Un peu moins du quart de tous les abonnés ne reçoivent aucun signal jumeau et 11 pour cent n’en reçoivent qu’un. Le nombre de signaux jumeaux augmente avec le nombre de signaux éloignés; par ailleurs, huit des 387 systèmes ou 2,98 pour cent des abonnés ne reçoivent pour seuls signaux éloignés que des jumeaux de signaux locaux.

À l’aide des données de la SPDAC, la Commission a produit des statistiques sur les tarifs d’abonnement mensuel au service par câble. Le tarif d’abonnement mensuel des grands systèmes canadiens est de 14,25 $, en moyenne. Ce tarif tend à être plus élevé pour les plus petits systèmes. On note également des écarts moins importants entre les tarifs exigés par les grands systèmes.

TABLE V: MONTHLY CABLE FEES IN CANADA, BY SIZE OF SYSTEM
TABLEAU V: TARIFS D’ABONNEMENT MENSUEL AU SERVICE PAR CÂBLE AU CANADA SELON LA TAILLE DES SYSTÈMES

 

Small Systems

Over 1000 Subscribers

All Systems

 

Petits systèmes

Plus de 1000 abonnés

Tous les systèmes

Mean/Moyenne

$18.23

$14.25

$17.18

Median/Médiane

$19.50

$13.33

$18.33

Standard Deviation/Écart type

$ 5.50

$ 3.88

$ 5.42

Minimum

$ 0.00

$ 5.00

$ 0.00

Maximum

$70.00

$29.57

$70.00

La SPDAC estime à 1,03 milliard de dollars les recettes brutes de l’industrie de la télédistribution en 1989. Ce chiffre est compatible avec la preuve produite par la SPDAC concernant les recettes de l’industrie entre 1978 et 1988. Nous examinerons ces recettes dans la section intitulée : « L’impact des droits d’auteur sur l’industrie ».

D. LES PARTIES AUX AUDIENCES

Mis à part les contreprojets proposés par les opposants, la Commission a été saisie de onze projets de tarif pour la télévision. Le 2 février 1990, la CANCOPY retirait le sien. Les projets de tarif déposés par la CAPAC et la SDE sont identiques sauf en ce qui concerne le taux. L’ACS n’a pas retiré son projet de tarif mais s’est abstenue de toute participation active et n’a présenté aucune preuve.

Les sociétés de perception représentent quatre types de créateurs : les producteurs d’émissions, les radiodiffuseurs, les ligues sportives et les titulaires du droit d’auteur sur les œuvres musicales.

i. Les producteurs d’émissions : la SPDAC et la SCR

La SPDAC représente les titulaires du droit d’auteur sur la majeure partie des œuvres dramatiques et des comédies produites par l’industrie américaine indépendante du cinéma et de la télévision, à l’exception de la programmation des stations du réseau PBS. Elle revendique les droits pour l’ensemble de cette programmation, sauf pour les émissions qu’elle reconnaît explicitement comme faisant partie du répertoire d’une autre société de perception.

La SCR représente l’ensemble de la programmation de PBS et de TVOntario sans égard à son origine ainsi que les titulaires du droit d’auteur sur les longs métrages, sur les œuvres dramatiques et sur les comédies produites pour la télévision à l’extérieur des États-Unis.

ii. Les radiodiffuseurs : l’ADRC, l’ADRRC et la BBC

Ces sociétés représentent les radiodiffuseurs en qualité de créateurs d’émissions diffusées soit sur les ondes de leurs propres stations, soit en souscription sur celles d’autres signaux éloignés.

L’ADRC revendique les droits d’auteur sur la programmation appartenant aux cinq réseaux suivants : CBC/Radio- Canada, Radio-Québec, ABC, CBS et NBC. L’ADRRC défend les intérêts de stations de télévision commerciales et de réseaux commerciaux canadiens qui sont titulaires du droit d’auteur sur des émissions, y compris les réseaux CTV, TVA et Quatre-Saisons, et leurs stations affiliées, le Global Television Network, des stations de télévision indépendantes et les stations privées affiliées à CBC ou à Radio-Canada.

La BBC revendique des droits d’auteur sur les émissions appartenant à des stations de télévision commerciales aux États-Unis.

Tant l’ADRRC que la BBC revendiquent des droits sur les œuvres résultant des efforts de compilation. Par ailleurs, l’ADRRC revendique des droits pour la retransmission d’émissions dont les titulaires originaux du droit d’auteur lui ont cédé les droits exclusifs de radiodiffusion pour un territoire donné. Dans l’éventualité où la Commission reconnaîtrait l’existence d’un droit d’auteur sur la compilation, tant l’ADRC que la SCR demandent une quote-part de sa valeur.

iii. Les ligues sportives : la FWS, la LBM et l’ACS

La FWS et la LBM représentent les équipes sportives des ligues majeures dont les matchs sont télédiffusés régulièrement au Canada et aux États- Unis. Ces ligues sont : la Ligue nationale de hockey, la National Basketball Association, la Ligue canadienne de football, la National Football League, l’American Football League et les ligues majeures de baseball. L’ACS représente les collèges américains qui font partie de la National College Athletic Association of the U.S.A.

iv. Les titulaires du droit d’auteur sur les œuvres musicales : la SDE et la CAPAC

Ces sociétés de perception représentent les titulaires du droit d’auteur sur la musique intégrée à la programmation. La SDE et la CAPAC ne revendiquent pas de droits pour des émissions spécifiques mais réclament plutôt une quote-part des droits pour l’ensemble des œuvres.

v. Les opposants : l’ACTC, la CANCOM et la C1

Les opposants constituent ou regroupent des entreprises qui livrent des signaux de télévision au public. Ce sont eux qui verseront les droits d’auteur pour la retransmission. Les trois opposants sont : l’ACTC, qui représente environ 545 entreprises de réception de radiodiffusion ou systèmes de télédistribution titulaires d’une licence; la CANCOM, qui livre, par satellite, huit signaux de télévision et dix signaux de radio soit à des systèmes de retransmission notamment par câble, soit directement à des abonnés en milieu rural où il n’y a pas de service de télédistribution; et la C1 Cablesystems, qui possède et exploite cinq entreprises régionales.

E. LES PROJETS DE TARIF DES PARTIES

La SPDAC, l’ADRC, la SCR et l’ADRRC proposent des « scénarios globaux », c’est-à- dire des formules fondées sur la valeur totale de la programmation transmise par des signaux éloignés et sur la quote-part qui devrait leur revenir. La BBC, la SDE et la CAPAC se contentent d’établir la valeur de leur propre répertoire sans faire état de sa valeur relative par rapport à l’ensemble de la programmation transmise par des signaux éloignés. Deux opposants ont également des propositions à offrir. Le tableau VI, ci-après, indique le montant total des droits qui auraient été versés en 1989 suivant chacun des projets de tarif. Les droits mensuels par abonné indiqués ne représentent pas nécessairement le montant que les abonnés auraient été tenus de payer, car ils n’auraient pas nécessairement eu à absorber la totalité de l’augmentation des coûts occasionnée par le paiement des droits d’auteur.

TABLE VI: AMOUNT OF ROYALTIES PROPOSED BY THE PARTIES
TABLEAU VI: MONTANT DE DROITS PROPOSÉS PAR LES PARTIES

Party

Partie

Total in $ Millions

Total en millions de $

Average Monthly Royalty in $ per Subscriber

Moyenne des droits mensuels par abonné en $

Maximum Royalty in $ per Subscriber

Maximum des droits mensuels par abonné en $

CCC/SPDAC

78.2

1.03

1.89

CRC-CBRRA/ SCR-ADRRC

67.9

0.90

1.39

CRRA/ADRC

50.3

0.665

1.00 [6]

BBC-CAPAC-PROCAN/ BBC-CAPAC-SDE

92.0

1.22

 

CCTA/ACTC

18.1

0.24

0.54

CANCOM

18.0

0.24

0.28

i. Le projet de la SPDAC

La SPDAC a proposé que chaque retransmetteur verse mensuellement 25 ¢ par abonné pour chacune des six premières valeurs de signaux éloignés retransmis (les VSE) et 6,25 ¢ pour chaque valeur additionnelle. Si un signal éloigné est un signal jumeau d’un autre signal, local ou éloigné, du même réseau, la VSE de ce signal serait de 0,5 et les droits à verser pour ce signal seraient réduits de moitié. Les droits à verser en 1989, selon la formule proposée, auraient été d’environ 78,2 millions de dollars.

Pour calculer sa quote-part des droits, la SPDAC a établi trois groupes différents de signaux (canadiens, américains commerciaux et PBS); elle réclame une quote-part différente pour chaque groupe, le temps d’antenne des émissions de la SPDAC n’étant pas le même sur les signaux éloignés canadiens et américains. La SPDAC revendique 12,46 ¢, soit presque 50 pour cent des droits, pour la retransmission de signaux éloignés canadiens. Elle revendique 18,5 ¢ pour la retransmission de signaux commerciaux éloignés américains, soit 75 pour cent des droits. Elle ne revendique pas de droits pour la retransmission des signaux éloignés de PBS, parce que leur programmation ne comprend aucune de ses œuvres. Ces demandes représentent 56 pour cent du montant total des droits, soit 44 millions de dollars.

ii. Les projets de la SCR et de l’ADRRC

En vertu de ce projet, les droits exigibles d’un grand système de télédistribution dépendraient de la VSE des signaux qu’il retransmet et du nombre de ses abonnés. Les taux mensuels proposés sont : 35 ¢ par abonné pour la première VSE, 32 ¢ pour la deuxième, 24 ¢ pour la troisième, 10 ¢ pour la quatrième, et 5 ¢ pour chaque VSE additionnelle. Le taux pour chaque VSE facultative s’élèverait à 35 ¢.

Les VSE qu’attribue la SCR peuvent, en théorie, atteindre 1,0 pour une station en ondes au moins 18 heures par jour et dont la programmation n’est pas diffusée simultanément où que ce soit. Elle est d’aussi peu que 0,5 pour les stations de TVA, CBC et SRC, dont une partie importante de la programmation est diffusée simultanément sur plusieurs stations, locales ou éloignées, du même réseau. La VSE de ABC est de 0,7, tandis que celle de CBS et de NBC est de 0,8. Ces niveaux reflètent la substitution de signaux identiques et la diffusion simultanée qui peuvent survenir lorsqu’un système de télédistribution retransmet des stations différentes qui présentent la même émission en même temps.

En 1989, selon les formules de la SCR et de l’ADRRC, les droits auraient atteint 64,8 millions de dollars pour les signaux de base et 2,5 millions de dollars pour les signaux facultatifs. La SRC revendique 27,848 pour cent des droits pour les signaux de base et 80,069 pour cent des droits pour les signaux facultatifs. L’ADRRC revendique 6,197 pour cent pour les émissions qu’elle produit, 3,346 pour cent pour les efforts de compilation de ses membres et 2,5 pour cent pour l’exclusivité territoriale qui lui a été cédée, ce qui représente un total de 12,043 pour cent pour les signaux de base. En ce qui a trait aux signaux facultatifs, l’ADRRC revendique 9,384 pour cent des droits.

iii. Le projet de l’ADRC

Le projet de tarif de l’ADRC établit un taux fondé sur un pourcentage des recettes des retransmetteurs imputables au service de base. Il varie de deux pour cent pour le premier signal éloigné à 0,1 pour cent pour tous les signaux éloignés à compter du sixième. Dans son projet de tarif modifié, l’ADRC a proposé un plafond de 1 $ par abonné pour les droits qu’auraient à verser les systèmes de classe 2. [7] ces œuvres.

iv. Les autres projets

L’ACTC a déposé un contreprojet de tarif prévoyant l’adoption d’une formule unique, sans préciser la quote-part de chaque société de perception. La CANCOM propose aussi une formule unique, sans préciser comment se ferait la répartition, mais n’a pas disposé de contreprojet complet. En 1989, ces deux propositions auraient produit environ 18 millions de dollars.

Les six autres projets sont fondés uniquement sur le montant que les sociétés qui les ont présentés entendent percevoir. Aucune de ces sociétés ne s’attend à recevoir des droits pour un signal qui ne transmet aucune de ses œuvres.

La BBC propose que chaque retransmetteur lui verse mensuellement 4 ¢ par abonné pour chaque signal éloigné qui transmet ses œuvres.

LA CAPAC et la SDE réclament au total 2 ¢ par mois par abonné pour chaque signal éloigné.

La FWS propose que chaque retransmetteur lui verse des droits au taux uniforme de 30,5 ¢ par abonné, pour chaque mois au cours duquel il retransmet au moins une de ses œuvres.

La LBM propose un taux mensuel de 15 ¢ par abonné pour chaque signal éloigné qui présente, à l’exclusion de tout autre signal, au moins une partie des ligues majeures de baseball.

L’ACS propose elle aussi un taux mensuel de 15 ¢ par abonné pour chaque signal éloigné qui, au cours du mois, présente au moins une partie de la NCAA.

II. LES PRINCIPES DIRECTEURS APPLIQUÉS POUR FIXER LES DROITS DE RETRANSMISSION

Toutes les parties reconnaissent que le choix des principes directeurs appliqués par la Commission pour fixer les droits d’auteur pour la retransmission est laissé à sa seule appréciation. La Commission doit tout de même s’assurer que les droits soient justes et équitables et qu’ils ne soient pas discriminatoires. Elle est également tenue de prévoir un taux préférentiel pour les petits systèmes de retransmission.

La Commission a invité les parties à lui proposer des principes directeurs. La présente section expose les principes qui lui ont été proposés et ceux qu’elle a décidé de retenir.

A. LES PRINCIPES PROPOSÉS PAR LES PARTIES

i. La définition et l’évaluation du caractère juste et équitable des droits

L’argumentation des parties a porté principalement sur le caractère « juste et équitable » des droits. Elles ont demandé à la Commission de donner une interprétation large à cette expression. La BBC, la CAPAC et la SDE ont fait valoir que les mots « justes » et « équitables » ont chacun un sens qui leur est propre; elles ont soutenu que les droits doivent être justes à l’endroit des consommateurs et des titulaires du droit d’auteur, et équitables dans leur impact sur les systèmes de télédistribution et les sociétés de perception.

La CANCOM prétend que l’obligation légale de la Commission d’établir des droits justes et équitables l’oblige à tenir compte des objectifs de la politique gouvernementale, de la nécessité d’une transition harmonieuse et du déclin de l’importance des signaux éloignés.

La SPDAC a préconisé une formule fondée sur la juste valeur marchande. Elle a donné des exemples de taux qui pourraient être représentatifs, dont les tarifs des services spécialisés et ceux de la CANCOM.

La SCR a suggéré que les droits soient établis en fonction de deux facteurs complémentaires; l’enrichissement sans cause des retransmetteurs et le préjudice subi par les titulaires du droit d’auteur.

La FWS a suggéré d’établir la valeur de ses propres œuvres en se fondant sur les montants que lui versent les réseaux de télédistribution et les radiodiffuseurs des États-Unis pour ses œuvres, sur les droits versés pour les services spécialisés offrant une programmation similaire, sur la valeur que les gestionnaires de systèmes de télédistribution et leurs abonnés attribuent aux œuvres de la FWS et, enfin, sur le coût de production de ces œuvres.

Pareillement, la MLB a invité la Commission, pour évaluer sa revendication, à se fonder sur les droits versés par la ESPN (un service spécialisé axé sur les sports) pour la télédiffusion des matchs de la MLB aux États-Unis.

La SCR a soulevé aussi la question de la répartition dans les principes qu’elle a proposés. Elle prétend que la Commission devrait se fonder sur le temps d’antenne des œuvres et sur des données dont l’exactitude serait reconnue, recueillies pour une année témoin donnée.

ii. Comparaison avec le régime américain de retransmission

La MLB a souligné que le Copyright Royalty Tribunal, aux États-Unis, fixe les droits d’auteur d’après le préjudice subi par les titulaires du droit d’auteur, l’avantage tiré par les systèmes de télédistribution et la valeur marchande des œuvres, en évitant toute évaluation fondée sur le temps d’antenne ou la qualité.

L’ACTC a fait valoir que les droits doivent à la fois être équitables et ne pas être discriminatoires, comme l’exige la Loi sur la mise en œuvre de l’Accord de libre-échange. Selon elle, l’intention du législateur commande que les systèmes de télédistribution et les abonnés reçoivent tous le même traitement, qu’ils se trouvent au Canada ou aux États-Unis. D’ailleurs, tous les opposants ont demandé à la Commission d’interpréter les termes « juste et équitable » comme signifiant juste et équitable entre le Canada et les États-Unis. L’ACTC a aussi recommandé que la Commission tienne compte des caractéristiques particulières de l’industrie canadienne de la télédistribution, faisant d’elle à la fois une composante précieuse de notre infrastructure sociale et une industrie dont les coûts sont élevés.

iii. L’augmentation de l’auditoire qui résulte de la retransmission

L’ACTC fait valoir que les radiodiffuseurs tirent avantage de l’augmentation de leur auditoire qui résulte de la retransmission, et que la Commission devrait en tenir compte pour fixer les droits d’auteur pour la retransmission. Il n’est pas clair en quoi cet avantage pourrait consister, à moins que le créateur d’une émission n’en soit également le radiodiffuseur.

iv. La sortie des droits du Canada

L’ACTC demande à la Commission de prendre en considération le fait que la majeure partie des droits seront versés à des intérêts non canadiens. Bien que cela soit exact, la Commission ne peut faire de discrimination entre les titulaires du droit d’auteur fondée sur leur nationalité ou leur lieu de résidence. Pour diminuer la sortie des droits du Canada, la Commission serait obligée de fixer un tarif qui priverait l’ensemble des titulaires du droit d’auteur (y compris les titulaires canadiens) d’une juste rémunération.

La Commission croit que les Canadiens sont prêts à payer le juste prix des produits qu’ils consomment, quelle qu’en soit la provenance.

B. LES PRINCIPES DIRECTEURS RETENUS PAR LA COMMISSION

Beaucoup de tarifs peuvent être justes et équitables; la Commission doit seulement s’assurer que celui qu’elle adopte le soit. D’autres caractéristiques peuvent s’avérer souhaitables et la Loi n’interdit pas à la Commission d’en tenir compte. La Commission est d’avis que le tarif devrait:

  1. être juste et équitable;

  2. refléter la situation canadienne;

  3. être, de tous les tarifs qui assureraient aux titulaires du droit d’auteur une même rémunération, celui qui perturbe le moins les services offerts aux abonnés du service par câble;

  4. être fondé sur un ensemble de données pour une année témoin donnée;

  5. refléter fidèlement la retransmission des émissions et reconnaître que certaines émissions ont plus de valeur que d’autres;

  6. être facile à administrer, à appliquer et à comprendre.

La Commission a également tenu compte de l’impact du tarif sur trois groupes : les retransmetteurs, les abonnés et les sociétés de perception.

i. Les retransmetteurs

Un tarif juste et équitable devrait imposer aux retransmetteurs des droits qui correspondent à l’avantage qu’ils tirent de l’utilisation des signaux éloignés. De plus, le montant des droits d’auteur que les retransmetteurs verseront aux titulaires du droit d’auteur ne devrait pas être inférieur à la valeur du préjudice que ces derniers subissent en raison de l’utilisation de leurs œuvres.

Un tarif juste et équitable peut traiter différemment les retransmetteurs exposés à des situations différentes. Le nombre d’abonnés, la localité desservie et le nombre de signaux éloignés qui sont offerts sont des facteurs qui ont une incidence sur la situation des retransmetteurs. Ce sont souvent les systèmes qui retransmettent un nombre élevé de signaux éloignés qui ont le moins d’abonnés. Plus les systèmes sont petits, plus leurs frais fixes, leurs frais d’exploitation et leurs tarifs d’abonnement sont élevés. Le législateur a prévu un traitement préférentiel pour certains petits systèmes. La preuve a confirmé qu’ils ont besoin d’un traitement de faveur.

ii. Les abonnés

Au-delà des différences, la situation de tous les abonnés canadiens est comparable et ils devraient être traités de la même façon. Ainsi, des droits justes et équitables ne devraient pas accentuer les écarts déjà existants entre les tarifs d’abonnement au service par câble. Il faut, notamment, réduire au minimum les écarts importants qui sont le résultat d’accidents géographiques.

L’industrie de la télédistribution a évolué au fil des ans. Toutefois, l’objectif de donner à tous un accès égal aux services demeure. Il faut éviter que le tarif fasse obstacle à cette pierre angulaire de la politique en matière de communications.

iii. Les sociétés de perception

Un régime de droits juste et équitable doit produire une rémunération appropriée et la répartir de façon juste entre les sociétés de perception. Les droits canadiens pour la retransmission sont prospectifs et sont fonction de la retransmission de signaux au cours de l’année d’application du tarif. La répartition, par contre, est fondée sur la part de la programmation appartenant à une société de perception au cours de l’année témoin. La Commission devrait tenir compte des différences entre l’année témoin et l’année d’application du tarif, s’il est raisonnable de croire à leur existence et s’il est possible de les quantifier.

III. LES DROITS À PAYER POUR LA RETRANSMISSION DE SIGNAUX DE TÉLÉVISION

Les quatre sections suivantes traitent de l’établissement des droits exigibles de chaque retransmetteur. Nous examinerons d’abord le tarif applicable aux petits systèmes de retransmission.

A. LES PETITS SYSTÈMES

Le tarif que la plupart des sociétés de perception proposent pour les petits systèmes de plus de 500 abonnés correspond à la moitié du tarif proposé pour les grands systèmes. Pour les petits systèmes qui ont au plus 500 abonnés, la plupart des sociétés sont disposées à accepter un tarif fixe de 100 $ par année. Les opposants prétendent que la Commission n’a pas compétence pour établir des distinctions entre les petits systèmes. Ils proposent des taux fixes qui vont de 66 $ à 100 $ par année.

La Commission fixe les droits à 100 $ par année pour chaque petit système de retransmission. Il est possible que la Loi permette plus d’un taux pour les petits systèmes, mais la Commission n’a pas à se prononcer sur cette question pour l’instant. La Commission est convaincue que l’établissement d’un seul taux de 100 $ pour cette classe est juste et équitable.

La Commission est d’avis que ce tarif est préférentiel à plusieurs égards. Premièrement, l’établissement d’un taux annuel pour les petits systèmes leur impose un fardeau administratif et des exigences de rapport moins lourds. Chaque système qui peut être qualifié de petit système en date du 1er janvier dans l’une ou l’autre des deux années d’application du tarif saura alors quels sont les droits qu’il doit verser et n’aura pas d’autres obligations pour cette année-là. De plus, pour tout système comptant plus de 41 abonnés, les droits à verser sont moindres, en termes absolus, qu’ils le seraient en vertu du tarif applicable aux grands systèmes. Enfin, bien que le montant des droits à verser ne dépende ni du nombre d’abonnés, ni de celui des signaux éloignés offerts, ce tarif reconnaît que chaque petit système a l’obligation de verser des droits pour l’utilisation qu’il fait de la programmation des signaux éloignés.

B. LES GRANDS SYSTÈMES : I – LA VALEUR DES SIGNAUX ÉLOIGNÉS

Les parties proposent quatre méthodes pour établir la valeur des œuvres protégées par le droit d’auteur. Trois méthodes sont fondées soit sur la valeur économique de services semblables offerts par les signaux éloignés, soit sur le manque à gagner imputable à l’utilisation des signaux éloignés; la dernière méthode établit une comparaison directe avec les conditions prévalant aux États-Unis. La présente section est consacrée à l’analyse de ces méthodes, à savoir :

  1. la valeur des services comparables

  2. la valeur de la programmation potentielle écartée

  3. la valeur des droits de licence perdus

  4. la comparaison avec le régime américain

i. La valeur des services comparables

Puisque la Commission doit établir la valeur des signaux éloignés, il peut être utile de connaître le prix d’un bien comparable dans un autre marché. Si ce marché analogue est un marché concurrentiel, on peut conclure que le prix représente bien la valeur des signaux éloignés.

La SPDAC a prétendu que les tarifs demandés par la CANCOM pour la revente de services de télécommunication aux systèmes de télédistribution affiliés permet d’évaluer l’avantage que les systèmes de télédistribution tirent de l’accès aux signaux éloignés. Dans certains marchés, la CANCOM demande jusqu’à 1,70 $ pour le premier signal. Cependant, dans le marché évoqué, les acheteurs et les vendeurs n’ont pas le même pouvoir. Les systèmes de télédistribution situés en milieu éloigné achètent d’un revendeur qui détient un monopole. Il est fort possible qu’ils payent un montant supérieur à celui qu’un système de télédistribution moyen serait disposé à payer au Canada. De plus, la CANCOM n’a pas un tarif unique, mais plusieurs tarifs qui varient selon le télédistributeur et le nombre de signaux achetés. Enfin, le coût de livraison représente une part importante du prix du service. La Commission considère qu’il ne s’agit pas d’un marché analogue au marché général pour les signaux éloignés.

Comme marché analogue pour la programmation sportive et, plus précisément, pour le baseball, la LBM a proposé un service américain axé sur les sports, soit ESPN.

Son témoin a donné son aval à l’ensemble du raisonnement s’appuyant sur les marchés analogues. Selon son témoignage bien étayé, le prix le plus représentatif est celui qui est payé dans un marché où tant les acheteurs que les vendeurs agissent en pleine liberté. Cependant, même dans ce cas, les prix devraient peut-être être redressés en fonction des différences relatives aux coûts, aux niveaux de risque ou à d’autres facteurs. Il a également souligné que si le prix établi pour les signaux éloignés n’est pas approprié, des réactions à cette situation pourraient causer des déséquilibres dans le marché des signaux éloignés. Certains signaux ou des abonnements pourraient être abandonnés sans pour autant que cela produise des économies de ressources ou permette à quiconque d’autre dans le marché d’en tirer un avantage d’égale valeur.

Le prix payé par ESPN pour les matchs des ligues majeures de baseball est d’environ 33 ¢ par mois pour chaque abonné pendant les six mois que dure la saison de baseball. En comparaison, les droits de 15 ¢ par mois qu’elle a proposés sont tout à fait raisonnables, selon la LBM. Dans son argumentation finale, l’ADRRC soutient que la LBM a peut- être choisi le mauvais niveau de comparaison pour établir la valeur du produit puisque le tarif mensuel moyen que versent les retransmetteurs américains pour tout le service de ESPN ne dépasse pas 35 ¢ par abonné.

Dans le même ordre d’idées, la FWS fait ressortir les prix payés par ESPN, le Turner Network, le Sports Channel America et d’autres services spécialisés américains pour des blocs de matchs de football, de hockey et de basketball. Pour la saison de chacun de ces sports, les prix varient de 19 ¢ à 83 ¢ par mois. Selon la FWS, un tarif fixe, sans égard au nombre de signaux éloignés, est juste et équitable. Puisque les exposés de ces deux sociétés de perception à l’égard des émissions sportives ne concernent qu’une petite partie de l’ensemble de la programmation, ils sont de peu d’utilité pour permettre à la Commission d’établir la valeur d’un signal éloigné en son entier.

La SCR a recueilli des données pour 1989 sur les tarifs mensuels de gros que doivent payer les systèmes canadiens de télédistribution pour les services spécialisés. Ces prix atteignent 1,05 $ et 88 ¢ pour Le Réseau des sports (RDS) et The Sports Network (TSN) alors qu’ils s’élèvent à peine à 8 ¢ pour MuchMusic; Vision TV est même offert gratuitement. La moyenne non pondérée de ces tarifs est de 34 ¢. Selon la SPDAC et la SCR, de tous les services de programmation offerts, YTV et Arts and Entertainment Network (A&E) sont ceux dont le contenu ressemble le plus à celui des signaux éloignés. On a prétendu que les prix de gros de 31 ¢ et 25 ¢ respectivement devraient être considérés comme représentatifs de la valeur minimale des signaux éloignés. Le tarif de A&E reflète le prix établi par le marché alors que celui de YTV est réglementé. Par conséquent, le tarif de A&E est peut-être plus représentatif de la valeur des signaux éloignés.

Le prix d’un service peut être représentatif de la valeur d’un service comparable s’il est effectivement offert dans un marché actif, mais cela ne suffit pas. Le prix de A&E est établi pour un marché actif; il présente cependant des faiblesses qui faussent la comparaison de ce service avec les signaux éloignés.

Premièrement, la Commission reconnaît que les signaux n’ont pas tous le même nombre d’heures de programmation. C’est précisément l’argument invoqué par la SCR pour établir des VSE qui reflètent le nombre d’heures de programmation distincte sur les signaux éloignés.

À partir des chiffres de la SPDAC pour les signaux éloignés et des VSE de la SCR, la Commission a calculé qu’une réduction d’au moins 20 pour cent au tarif d’A&E s’impose, pour établir la valeur des signaux éloignés, en raison de la diffusion simultanée des mêmes émissions. C’est ce qu’indique le tableau VII ci-après. Il se peut par ailleurs que ce chiffre constitue une sous-estimation, compte tenu du fait que le phénomène de la diffusion simultanée est plus prononcé durant les heures de grande écoute. La colonne de droite indique les niveaux de VSE pour l’ensemble des signaux éloignés retransmis au Canada. Ces chiffres impliquent qu’une réduction de 20 pour cent est appropriée eu égard à la diffusion simultanée et à la substitution de programmation identique.

TABLE VII: THE CALCULATION OF THE INCIDENCE OF SIMULCASTING
TABLEAU VII: CALCUL DE LA FRÉQUENCE DE LA DIFFUSION SIMULTANÉE

Station

Station

Number of Subscribers (Millions)

Nombre d’abonnés (millions)

DSV

VSE

Weighted DSV

VSE pondérée

CBC

1.328 [8]

.52 [9]

.0240 [10]

CTV

1.039

.73

.0263

Can.

1.251

.90

.0391

TVO

0.867

.89

.0268

SRC

0.429

.59

.0088

TVA

1.127

.59

.0231

QS

0.351

.71

.0087

RQ

0.179

.68

.0042

ABC

6.444

.74

.1656

CBS

4.535

.82

.1291

NBC

4.604

.83

.1326

U.S. Ind.

2.189

.97

.0737

PBS

4.305

.92

.1375

 

________

 

_____

TOTAL

28.798 [11]

 

.7997

De plus, il y a répétition d’autres émissions transmises par des signaux qui ont leur origine dans des fuseaux horaires différents. Par exemple, lorsqu’un signal éloigné diffuse une émission une ou deux heures avant que ne le fasse une station locale, la première diffusion a possiblement moins de valeur pour certains abonnés pour qui il est plus intéressant de regarder cette émission plus tard lorsqu’elle est diffusée par la station locale. Un signal éloigné peut également avoir moins de valeur lorsqu’une station locale a déjà diffusé la même émission dans la même semaine, que ce soit ou non le même jour. Dans l’un et l’autre cas, la répétition de la même émission réduit la valeur des deux signaux.

Par contre, il est plutôt rare qu’un service spécialisé et un autre service de programmation transmettent la même émission en même temps. La Commission a bien noté la prétention de la SCR que les signaux éloignés diffusent plus d’œuvres dramatiques en première que ne le fait A&E, mais cette différence est moins importante qu’on pourrait le croire puisque beaucoup de ces émissions sont diffusées simultanément sur des signaux locaux. La preuve n’indique pas si A&E diffuse les mêmes émissions plusieurs fois; si c’est le cas, cela pourrait réduire la valeur de ce service. Par contre, la répétition d’une émission peut augmenter la valeur du signal du fait que les abonnés ont plus d’occasions de la regarder. La preuve ne donne aucune indication de l’effet net de la répétition des émissions sur la valeur relative des services spécialisés et des signaux éloignés.

Deuxièmement, le prix le plus représentatif est celui d’un produit similaire établi dans un marché où tant les acheteurs que les vendeurs agissent en toute liberté. On a décrit A&E et les signaux éloignés comme des services similaires. De plus, tant en ce qui concerne les services spécialisés que les signaux éloignés déjà transmis, le vendeur n’encourt pas de coûts additionnels si une autre personne les utilise. Mis à part tous les arguments sur le comportement stratégique du vendeur et sur le recouvrement de l’ensemble des coûts, tout prix supérieur à zéro est plus que suffisant pour permettre au vendeur de recouvrer ses coûts marginaux et de toucher des revenus additionnels.

Le marché des services spécialisés se distingue en ce que le vendeur peut empêcher une personne d’avoir accès à un service à moins de payer le prix qu’il demande. Le marché donne ainsi un certain pouvoir au vendeur et c’est ce qui permet à A&E, par exemple, d’exiger un prix de 25 ¢ de tous ses abonnés. Le propriétaire d’un signal éloigné n’a pas autant de pouvoir puisqu’il n’a pas les moyens techniques d’empêcher une personne, qui n’accepterait pas de verser le prix demandé, d’utiliser son signal.

Sans se perdre dans une digression, il convient de souligner qu’il existe un autre marché dont les propriétaires des deux types de signaux tirent des revenus – celui de la publicité – mais le propriétaire d’un service spécialisé peut en outre compter sur les revenus d’abonnement afin de recouvrer l’ensemble de ses coûts.

La Commission en conclut donc que la volonté des acheteurs et des vendeurs n’est pas la même dans les deux marchés et qu’il faut en tenir compte en se servant du prix de A&E pour établir la valeur des signaux éloignés.

La Commission a pour rôle de décider quel devrait être le prix des signaux éloignés. Ce faisant, elle doit garder à l’esprit qu’un prix élevé pour les signaux éloignés pourrait réduire leur utilisation, empêcher plusieurs personnes d’en profiter et même réduire la somme totale des droits, sans pour autant réduire le coût de leur diffusion. En fait, on a avancé lors des audiences que c’est précisément la gratuité des signaux éloignés qui en a facilité la distribution à travers le Canada.

La quasi-totalité des 6,6 millions d’abonnés au service par câble au Canada reçoivent, comme signal éloigné, au moins un des trois réseaux commerciaux américains (ABC, CBS, NBC). Environ 25 pour cent des abonnés, soit 1,6 million, reçoivent A&E, bien que dans certains marchés ce service ne soit pas offert dans le service de base « élargi ». Pour que A&E rejoigne, comme ces signaux éloignés, la quasi-totalité de la population, il faudrait que son prix baisse. D’ailleurs, la Commission constate que le prix de MuchMusic, TSN, MusiquePlus et RDS a baissé et leur taux de pénétration a augmenté après leur intégration au service de base.

Troisièmement, aucune preuve n’a été présentée concernant les différences entre le regroupement de signaux éloignés et le regroupement des services spécialisés en vue de les offrir aux abonnés, ni concernant l’effet éventuel de ce regroupement sur la volonté d’un télédistributeur de payer pour les signaux éloignés. Ces services sont offerts aux abonnés sur un volet distinct et la structure des marchés n’est pas la même. A&E est un service bien défini offert à un prix bien défini. Tel n’est pas le cas des signaux éloignés.

La Commission n’est pas convaincue que le prix de A&E resterait le même si ce service était mis en marché de façon différente. Il est difficile de savoir quel serait le prix d’un signal ou d’un service individuel offert séparément. On ne peut considérer le prix du service de A&E comme représentatif à la fois de la valeur de l’unique signal éloigné reçu à Toronto et de celle de chacun des six signaux éloignés reçus à Vancouver. Même si le prix de A&E était comparable à la valeur d’un premier signal éloigné, il est fort possible qu’il dépasse la valeur des autres signaux faisant partie du même bloc. C’est d’ailleurs ce que reflètent les propositions de la CANCOM, de la SCR et de l’ADRRC qui prévoient une réduction du tarif par signal à mesure que le nombre de signaux augmente. Il en est de même des propositions de la SPDAC et l’ACTC de réduire les droits par signal à partir d’un certain nombre de signaux.

ii. La valeur de la programmation potentielle écartée

La SCR a proposé la valeur des services de programmation possiblement écartés, comme moyen d’évaluer le préjudice subi par les sociétés de perception. La SCR conclut que l’importation des signaux éloignés empêche la création d’au moins un autre service national de télédiffusion.

La SCR a évalué à environ 105,6 millions de dollars le budget cumulatif de six stations indépendantes canadiennes pour l’acquisition de programmation au cours de l’exercice financier terminé en 1990. Ce chiffre correspondrait au budget d’acquisition du nouveau service de télédiffusion. On a réduit ce montant de 20 pour cent, soit la fraction du budget consacrée aux nouvelles locales, car la retransmission de ces émissions ne causerait aucun préjudice aux titulaires du droit d’auteur. Ainsi, la SCR évalue le préjudice subi à environ 80 millions de dollars.

La Commission ne croit pas que le Canada se serait doté d’un autre service national de télédiffusion si les signaux éloignés n’existaient pas. Il semble improbable que plus de réseaux nationaux ou groupements de stations puissent être rentables au Canada anglais ou au Canada français qu’aux États-Unis, car ces marchés sont minuscules comparativement au marché américain. La quasi-totalité des centres urbains au Canada ayant une population de 200 000 ou plus sont desservis par au moins trois stations commerciales canadiennes distinctes diffusant dans la langue principale de la communauté. De plus, la prolifération de stations de télévision canadiennes dans la région de Toronto semble contredire la théorie voulant que la disponibilité de signaux américains empêche l’entrée en ondes de nouvelles stations canadiennes.

Si la Commission acceptait la prémisse qu’un service de programmation potentiel a été écarté, la valeur des émissions qui auraient été produites par ce service ou pour son compte permettrait d’évaluer dans une certaine mesure le préjudice causé. Toutefois, il est déraisonnable de croire que les prix courants de l’industrie demeureraient les mêmes suite à un tel bouleversement structurel. L’arrivée d’un nouveau réseau et une augmentation de plus de 100 millions de dollars des recettes de l’industrie entraîneraient d’autres changements dans les prix. Il serait injustifié d’avoir recours à une extrapolation d’une telle envergure pour évaluer le budget d’un tel service de télédiffusion ou le préjudice causé aux propriétaires d’émissions existantes.

iii. La valeur des droits de licence perdus

La SCR prétend également qu’une émission se déprécie chaque fois que le public a l’occasion de la regarder à nouveau. Comme déjà dit, la diffusion simultanée ne fait subir aucun préjudice aux titulaires du droit d’auteur. Toute autre répétition d’une émission réduit les droits de licence pour sa diffusion et peut même nuire aux ventes projetées. La SCR a évalué ce préjudice à 4 000 $ par heure de diffusion en soulignant que cette évaluation demeurait très raisonnable.

À l’aide de son concept de valeur de signal éloigné, la SCR a ensuite évalué les licences résultant de la retransmission d’une VSE. Chaque VSE comporte 6 570 heures de programmation par année. Si une VSE n’était composée que d’émissions de réseau ou d’émissions en souscription, la valeur totale du préjudice causé s’établirait à 26,3 millions de dollars. On a réduit ce montant de 10 pour cent pour tenir compte des émissions de nouvelles locales dont la retransmission ne causerait aucun préjudice aux titulaires du droit d’auteur. La valeur totale du préjudice, par VSE, s’établirait alors à 23,7 millions de dollars.

La SCR a aussi affirmé que les abonnés reçoivent, en moyenne, 2,8 VSE [12] et que, par conséquent, la valeur totale du préjudice se chiffre à 66,2 millions de dollars.

Ce raisonnement présente deux failles qui préoccupent tout particulièrement la Commission. L’évaluation de 4 000 $ l’heure est fondée sur le témoignage de producteurs indépendants d’émissions qui ne représentent qu’une infime partie de la programmation retransmise et qui figurent surtout à l’horaire des signaux éloignés canadiens. Le risque d’erreur est élevé lorsqu’on se sert d’échantillons aussi petits pour tirer des conclusions sur une grande échelle.

Deuxièmement, les dommages causés aux titulaires du droit d’auteur s’expliquent en partie par le fait que, dans plusieurs marchés canadiens importants, des stations américaines sont captées comme signaux locaux. Par exemple, le signal PBS de Buffalo est un signal local dans une partie de la région de Toronto. Le sud de l’Ontario est situé à proximité de la frontière et d’un grand nombre de stations américaines. Il s’agit d’un marché clé pour les ventes aux réseaux. Les ventes à travers le Canada peuvent très bien en souffrir. La Commission ne peut attribuer aux signaux éloignés un manque à gagner dont les signaux locaux américains sont en partie responsables. Or, la théorie de la SCR ne semble pas tenir compte de ce facteur.

Malgré les efforts déployés par plusieurs parties pour chiffrer la valeur du préjudice que l’importation des signaux éloignés au Canada cause aux titulaires du droit d’auteur, ces deux théories et la preuve à l’appui présentent trop de failles, selon la Commission, pour qu’elle leur accorde beaucoup d’importance.

iv. La comparaison avec le régime américain

Aux États-Unis, les droits d’auteur pour la retransmission projetés pour 1990 sont d’environ 200 millions de dollars américains. L’ACTC a proposé la règle de la « division par dix » : puisque la population des États-Unis est approximativement dix fois celle du Canada, les droits d’auteur au Canada devraient se chiffrer à 10 pour cent de ce qu’ils sont aux États-Unis, soit à environ 24 millions de dollars canadiens.

Les droits fixés par la Commission ne s’appliquent qu’aux retransmetteurs situés au Canada, bien qu’ils soient versés aux titulaires du droit d’auteur où qu’ils se trouvent. En essayant de faire des comparaisons entre différents pays, on se bute à d’innombrables obstacles. Il existe des différences sur le plan de la structure de l’industrie, des prix relatifs, des échelles de revenus et de la culture. Voici quatre différences entre les marchés des deux pays qu’il est possible de quantifier.

Premièrement, la pénétration de la télédistribution est plus grande sur le marché canadien. Bien que la population du Canada ne représente que 10 pour cent de la population des États-Unis, le nombre d’abonnés au service par câble au Canada atteint 12 pour cent du nombre d’abonnés aux États-Unis.

Deuxièmement, les systèmes de télédistribution au Canada retransmettent un plus grand nombre de signaux éloignés. En moyenne, le nombre de signaux éloignés que reçoit un abonné au service par câble au Canada est de 4,56, tandis qu’un système de télédistribution canadien retransmet 6,04 signaux éloignés en moyenne. Aux États-Unis, les grands systèmes retransmettent en moyenne 3,5 signaux éloignés. [13]

Troisièmement, le dédoublement des émissions sur les signaux éloignés retransmis au Canada est moins important qu’aux États-Unis. D’ailleurs, aux États- Unis, la valeur de signal éloigné attribuée, par la loi qui prescrit le tarif, aux stations affiliées aux réseaux ABC, CBS et NBC s’élève à 0,25 : on présume qu’il y a dédoublement d’une part importante de la programmation de deux stations affiliées au même réseau. Aucune partie n’a prétendu qu’il y a autant de dédoublement de la programmation des stations canadiennes par les trois réseaux américains qu’il y a de dédoublement de la programmation des stations américaines affiliées à un même réseau.

Quatrièmement, la programmation des signaux éloignés au Canada a une cote d’écoute plus élevée qu’aux États-Unis. Vingt-deux pour cent de la programmation que regardent les canadiens est transmise par des signaux éloignés alors qu’aux États-Unis, les signaux éloignés n’obtiennent que 15 pour cent de la cote d’écoute.

Bien que la Commission ne soit pas liée par les taux américains pour établir les droits à verser au Canada, les différences susmentionnées portent à croire que le taux canadien ne devrait pas être inférieur au taux américain. En 1988, le tarif mensuel moyen par abonné au service par câble aux États-Unis était de 43 ¢ américains.

L’argumentation de l’ACTC portant que le montant global des droits devrait refléter les taux américains est fondée en grande partie sur l’étude SECOR, commandée en 1985 par le Sous-comité sur le droit d’auteur du Comité permanent de la Chambre des communes sur les communications et la culture. Le but de cette étude était d’évaluer l’impact de l’application des taux américains sur l’industrie canadienne de la télédistribution, tel qu’elle existait alors, bien que certaines prémisses aient été inexactes. L’ACTC prétend que le législateur, en établissant le droit de retransmission, s’attendait à ce que le montant global des droits atteigne entre 9 millions de dollars et 11,2 millions de dollars par année, ainsi que le prévoit l’étude SECOR. Le montant auquel se chiffreraient les droits selon le contreprojet de tarif de l’ACTC, soit 18 millions de dollars, correspondrait aux prévisions de l’étude SECOR en les ajustant pour tenir compte de l’inflation.

La Loi ne fixe pas de limite au montant global et charge la Commission d’établir la formule tarifaire. La Commission a pour tâche de faire en sorte que les droits à verser au Canada soient justes et équitables tout en s’assurant que les obligations du Canada découlant de l’Accord de libre-échange soient respectées. Si la Commission a décidé de tenir des audiences, c’est justement pour prendre connaissance de l’ensemble des éléments qui seraient susceptibles d’avoir un impact sur sa décision.

v. Les conclusions de la Commission

La Commission conclut que l’utilisation des services comparables est une méthode fiable pour établir la valeur des signaux éloignés. De plus, la Commission considère que le prix de gros demandé par A&E est utile comme point de départ, à condition de tenir compte des différences qui existent entre ce service et les signaux éloignés.

Il y a substitution simultanée des émissions transmises par les signaux éloignés alors que ce n’est pas le cas de celles que diffuse A&E. Par conséquent, la Commission détermine qu’il y a lieu de réduire de 20 pour cent la valeur des signaux éloignés.

Vu sous l’angle du recouvrement des coûts, le marché des signaux éloignés fait appel à d’autres considérations que le marché des abonnements aux services spécialisés. Il s’ensuit que le vendeur d’un signal éloigné accepterait un prix moindre pour son produit dans ce marché.

Le niveau de pénétration du marché par les signaux éloignés est plus élevé que celui de A&E. Pour que ce service atteigne le même niveau, il faudrait en baisser le prix.

La variété de combinaisons des signaux éloignés en vue de leur mise en marché a peut-être un impact sur leur valeur. Même si on arrivait à la conclusion que le prix de A&E correspond à la valeur du premier signal éloigné, il est possible que ce prix excède la valeur des autres signaux qui font partie du même groupe de signaux fournis en bloc aux abonnés.

Compte tenu de toutes ces différences, la Commission conclut qu’il est raisonnable de fixer le prix moyen d’un signal éloigné à 15 ¢. Ce prix concorde avec plusieurs barèmes possibles qui tiendraient compte de la valeur décroissante des signaux dans un bloc de quatre signaux, par exemple : 25 ¢, 20 ¢, 10 ¢ et 5 ¢ ou 35 ¢, 15 ¢, 10 ¢ et 0 ¢. Il faut cependant noter que, compte tenu de la structure des tarifs, objet de la prochaine section, il n’est pas nécessaire que la Commission établisse précisément ces différents prix.

C. LES GRANDS SYSTÈMES : II – LES DROITS À PAYER

Il ne suffit pas que les retransmetteurs versent une juste rémunération aux titulaires du droit d’auteur pour l’utilisation de signaux éloignés. Encore faut-il que ce fardeau soit réparti équitablement entre les retransmetteurs. La présente section passe en revue la preuve des parties et énonce les conclusions de la Commission à cet égard.

i. Les propositions des parties

Le tarif peut être lié à l’un ou plusieurs des critères suivants : les recettes des systèmes de télédistribution, le nombre de signaux éloignés qu’ils retransmettent et le nombre d’abonnés d’un système donné.

a. Un tarif fondé sur les recettes

Seule l’ADRC a proposé un tarif fondé sur les recettes des retransmetteurs. De l’avis de la Commission, cette formule déroge à plusieurs des principes qu’elle a établis et ne saurait être aussi valable qu’une formule fondée sur le nombre d’abonnés ou sur le nombre de signaux retransmis. Il y a un écart considérable entre les tarifs mensuels d’abonnement au service par câble et cet écart est plus prononcé entre les petits systèmes qu’il l’est entre les grands systèmes. C’est ce qu’on peut constater en examinant le TABLEAU V : TARIFS D’ABONNEMENT MENSUEL AU SERVICE PAR CÂBLE AU CANADA. De plus, la preuve démontre que les tarifs d’abonnement des petits systèmes de télédistribution sont en général plus élevés que ceux des grands systèmes puisqu’il en coûte en moyenne davantage pour desservir les petites communautés.

Règle générale, un tarif fondé sur les recettes ne ferait qu’accentuer les écarts déjà considérables qui existent entre les tarifs d’abonnement au service par câble dans différentes régions du pays. De plus, toute fluctuation des recettes, qu’elle découle ou non d’un changement dans l’utilisation des œuvres protégées par le droit d’auteur, se répercuterait dans le montant des droits d’auteur exigibles. Par exemple, toute modification autorisée par le CRTC aux tarifs d’abonnement affecterait le montant des droits d’auteur à verser par les retransmetteurs. Bref, les retransmetteurs verraient le montant des droits qu’ils ont à verser fluctuer même lorsque le nombre de leurs abonnés ou de signaux éloignés qu’ils retransmettent demeurerait stable.

b. Un tarif fondé sur le nombre de signaux éloignés retransmis

Toutes les formules proposées, à l’exception de celle de la FWS, dépendent à la fois du nombre d’abonnés au système et du nombre ou du type de signaux éloignés ou de VSE retransmis.

La BBC, la CAPAC, la SDE et la LBM ont proposé un taux fixe par signal éloigné retransmis. Ainsi, les droits à verser par un système qui retransmet deux fois plus de signaux éloignés qu’un autre seraient deux fois plus élevés. Toutes les autres parties préconisent plutôt un tarif où le taux par signal décroît avec l’augmentation du nombre de signaux pour refléter la valeur que les retransmetteurs et les abonnés attribuent, selon elles, aux signaux éloignés.

Pour chaque signal éloigné, la SPDAC accorde une VSE de 1 sauf s’il s’agit d’un signal jumeau (local ou éloigné) émanant d’une station affiliée au même réseau. La VSE de chaque signal jumeau, à compter du deuxième, est de 0,5, ce qui tient compte du fait qu’un réseau fournit à ses stations affiliées environ la moitié de leur programmation et que l’ensemble des stations affiliées à ce réseau, retransmises par un système de télédistribution donné, diffusent cette programmation normalement en même temps. On prévoit également un tarif moins élevé pour chaque VSE au-delà de six.

Le projet de tarif initial de la SCR prévoyait aussi une réduction applicable aux signaux jumeaux affiliés au même réseau; cependant, tel que déjà mentionné, une des modifications apportées à son projet de tarif prévoit plutôt une réduction de la VSE liée à la diffusion simultanée d’émissions.

Le tableau VIII donne les positions des parties sur les réductions à prévoir lorsque plus d’un signal est retransmis. Il a été préparé à partir d’un tableau de la SCR, et on y a ajouté la réduction suggérée par la CANCOM dans le cas où plusieurs signaux sont offerts. Dans toutes les colonnes sauf celle qui concerne la SCR, la VSE d’un signal est de 1. Dans le cas de la SCR, la première VSE représente environ 1,2 signal.

TABLE VIII – MULTIPLE SIGNAL DISCOUNT APPROACHES
TABLEAU VIII – RÉDUCTIONS POUR LES SIGNAUX MULTIPLES

Royalty per Subscriber as per cent of Royalty for First DSV

Droits par abonné exprimés en pourcentage des droits pour la première VSE

VSV or Part Thereof

VSE même incomplète

CRC-CBRRA

SCR-ADRRC

CCC

SPDAC

CRRA

ADRC

CCTA

ACTC

CANCOM

First/Première

100.0

100.0

100.0

100.0

100.0

Second/Deuxième

91.4

100.0

75.0

100.0

80.0

Third/Troisième

68.6

100.0

50.0

100.0

60.0

Fourth/Quatrième

27.0

100.0

50.0

100.0

40.0

Fifth/Cinquième

13.5

100.0

25.0

50.0

0.0

Sixth/Sixième

13.5

100.0

5.0

50.0

0.0

Seventh/Septième

13.5

25.0

5.0

50.0

0.0

Eighth/Huitième

13.5

25.0

5.0

50.0

0.0

Évidemment, ce sont les systèmes qui retransmettent le plus grand nombre de signaux éloignés qui profitent de ces réductions. Dans son argumentation finale, la SCR explique un autre motif qui justifie ces réductions : les bénéfices que rapportent les signaux éloignés n’augmentent pas en proportion directe du nombre de signaux reçus par un abonné. La structure du tarif devrait donc peut-être refléter l’importance démesurée des quelques premiers signaux. La SCR souligne également l’observation de l’ACTC portant que plus le nombre des signaux éloignés est élevé, plus la valeur de chaque signal diminue.

La Commission a voulu faire en sorte que les droits à verser soient les mêmes partout au pays. Il est possible d’atteindre cet objectif en prévoyant un tarif fixe pour la retransmission de signaux éloignés, sans égard au nombre de signaux. À l’inverse, un tarif fondé sur le nombre de signaux éloignés retransmis créerait des écarts entre des systèmes qui comptent le même nombre d’abonnés. Par exemple, un retransmetteur situé à Thompson (Manitoba) qui offre 14 signaux éloignés verserait 1,89 $ par abonné en vertu du tarif de la SPDAC, et 1,39 $ en vertu du tarif de la SCR. Un retransmetteur situé à Cowansville (Québec), ayant autant d’abonnés, mais n’offrant qu’un signal éloigné, verserait 25 ¢ et 24 ¢ en application de ces tarifs. Une comparaison similaire entre Hamilton (Ontario) et London (Ontario) fait ressortir une différence d’environ 1 $ dans les droits exigibles, cet écart étant directement attribuable au nombre de signaux offerts, soit deux à Hamilton et neuf à London. La Commission préfère retenir une formule qui reflète la pratique bien établie de l’ancienne Commission d’appel du droit d’auteur de permettre aux sociétés de perception de délivrer des licences générales pour l’utilisation de musique sans égard à la quantité utilisée.

Le tarif ne dépend pas du nombre de signaux retransmis (au-delà du premier). Cependant, si le seul signal éloigné qu’offre un retransmetteur est celui d’une station affiliée au même réseau qu’un autre signal retransmis, le retransmetteur pourrait être porté à laisser tomber ce signal afin de ne pas avoir à verser de droits. La Commission a donc prévu une réduction du tarif pour les signaux jumeaux dans le but d’éviter que les retransmetteurs qui n’offrent qu’un signal éloigné cessent de l’offrir.

Les données recueillies pour l’année témoin démontrent qu’aucun système ne retransmettait un signal jumeau comme unique signal éloigné. Deux systèmes, à Hamilton (Ontario) et à Grimsby (Ontario), parmi ceux qui ne retransmettaient que deux signaux éloignés, ne retransmettaient que des signaux jumeaux. Il y a également trois systèmes dans le sud de l’Ontario qui retransmettaient uniquement trois signaux éloignés jumeaux.

La Commission rejette catégoriquement la proposition de l’ACTC selon laquelle la retransmission des signaux éloignés de CBC, de Radio-Canada, de Radio-Québec et de TVOntario ne devrait pas être assujettie au paiement de droits lorsque la retransmission a lieu dans les territoires que desservent ces réseaux. L’ACTC prétend que ces signaux n’ont aucune valeur, peu importe qu’une station locale appartienne au même réseau, car les retransmetteurs ne font qu’aider ces réseaux à atteindre leur auditoire cible. Cet argument confond l’avantage dont bénéficie le retransmetteur avec l’objectif du radiodiffuseur qui n’est pas, dans tous les cas, titulaire du droit d’auteur sur les émissions qu’il diffuse.

c. Un tarif fondé sur le nombre d’abonnés

Toutes les parties ont proposé que le tarif pour les grands systèmes soit fondé sur le nombre d’abonnés. La Commission est également d’avis qu’un tarif établi en fonction du nombre d’abonnés est juste et équitable.

Le législateur a expressément prévu que le régime doit accorder un traitement préférentiel aux petits systèmes de retransmission. La Commission le leur garantit, en partie, par un tarif particulier qui ne soit pas fonction du nombre d’abonnés. Les témoins cités par la CANCOM et par la C1 ont démontré que les problèmes particuliers aux petits systèmes ne se dissipent pas soudainement dès qu’un système rejoint plus de 1 000 abonnés.

ii. La répartition des droits entre les retransmetteurs

La Commission est d’avis que rien dans les dispositions de la Loi ne l’empêche d’établir plusieurs taux pour la classe des grands systèmes, à condition que ces taux soient justes et équitables. Par conséquent, elle a divisé en sous-classes les retransmetteurs ayant entre 1 001 et 6 000 abonnés. Le nombre de 6 000 abonnés correspond à la limite maximale pour les systèmes de classe 2. En 1989, 248 systèmes au Canada comptaient entre 1 001 et 6 000 abonnés. Les abonnés de ces systèmes recevaient 6,34 signaux éloignés en moyenne.

Le tarif homologué par la Commission prévoit que les droits à verser par un télédistributeur dépendent uniquement du nombre de ses abonnés. Le taux augmente en fonction du nombre d’abonnés. Les droits à verser ne dépassent en aucun cas 70 ¢ par abonné. Puisqu’un abonné reçoit en moyenne 4,56 signaux éloignés, cela correspond à un peu plus de 15 ¢ par signal.

Les taux progressifs pour les systèmes comptant entre 1 001 et 6 000 abonnés varient de 20 ¢ à 65 ¢ par abonné.

Ces taux et les droits à verser par les différents systèmes figurent au tableau IX. En 1989, voici quels auraient été les droits mensuels à verser par les grands systèmes :

TABLE IX: DISTRIBUTION OF MONTHLY ROYALTY PAYMENTS
TABLEAU IX: RÉPARTITION DES DROITS MENSUELS

System Size

(Number of Subscribers)

Taille du système (Nombre d’abonnés)

Monthly Royalty Rate in $

Taux mensuel en $

Number of Subscribers

Nombre d’abonnés

Percentage of all Subscribers

Pourcentage de tous les abonnés

Royalty Payment in $

Droits à verser en $

1,001 – 1,500

.20

79,291

1.20

15,858.20

1,501 – 2,000

.25

81,306

1.23

20,326.50

2,001 – 2,500

.30

61,273

0.93

18,381.00

2,501 – 3,000

.35

75,934

1.15

26,576.90

3,001 – 3,500

.40

54,830

0.83

21,932.00

3,501 – 4,000

.45

63,576

0.97

28,609.20

4,001 – 4,500

.50

50,768

0.77

25,384.00

4,501 – 5,000

.55

61,456

0.93

33,800.80

5,001 – 5,500

.60

57,726

0.88

34,635.60

5,501 – 6,000

.65

56,967

0.82

37,028.60

6,001 +

.70

5,675,496

86.17

3,972,847.20

 

 

_________

_____

___________

TOTAL

 

6,318,623

95.88

4,235,380.90

Ces taux mensuels auraient produit des droits de 50,82 millions de dollars en 1989, soit une moyenne de 67 ¢ par abonné. La réduction du taux pour les systèmes de 6 000 abonnés ou moins n’a qu’un effet minime sur le montant total des droits puisque 90 pour cent des abonnés appartiennent aux systèmes de plus de 6 000 abonnés. Si les retransmetteurs qui comptent au plus 6 000 abonnés avaient versé 70 ¢ par abonné, plutôt que 45 ¢ en moyenne, les droits auraient augmenté de 2,25 millions de dollars.

Si on ajoute les droits à verser par les petits systèmes, le montant total à payer en 1989 aurait été de 50,93 millions de dollars.

iii. La formule tarifaire

a. Taux basés sur la retransmission des œuvres plutôt que des signaux

Les sociétés de perception qui ne proposent pas de scénario global (la BBC, la FWS, la LBM, la SDE et la CAPAC) demandent que les télédistributeurs leur versent des droits uniquement pour les mois au cours desquels au moins une de leurs œuvres est retransmise sur un signal éloigné.

Le procureur représentant la BBC, la CAPAC et la SDE a expliqué le fondement juridique de cette formule « basée sur les œuvres ». Les droits d’auteur pour la retransmission sont revendiqués par les titulaires du droit d’auteur et fixés par la Commission. Le retransmetteur qui ne verse pas les droits d’auteur exigibles peut encourir les sanctions prévues par la Loi, et notamment être tenu de payer des dommages-intérêts et de respecter une injonction à la demande du titulaire du droit d’auteur sur l’œuvre retransmise. Il y aurait donc un lien direct entre les droits à verser et les œuvres dont la retransmission donne lieu à des sanctions.

En inversant ce syllogisme, le procureur a fait valoir que si aucune œuvre d’une société de perception n’est retransmise, celle-ci ne peut percevoir de droits. Ainsi, le fait que des poursuites judiciaires puissent être intentées contre un retransmetteur qui fait défaut de payer signifierait qu’il ne peut être tenu de verser des droits que pour les œuvres diffusées par les signaux qu’il retransmet. La Commission ne saisit pas la logique de cet argument.

En réponse, la SCR a souligné que seules les sociétés de perception ont le droit de déposer des projets de tarif et que la Commission doit établir la quote-part des droits de chaque société. Aucune disposition de la Loi n’établit un lien direct entre les droits à verser et une œuvre spécifique. Ainsi, la Loi impose le versement de droits non pas pour une œuvre en particulier, mais plutôt pour l’ensemble des œuvres retransmises.

La Commission souscrit à l’argumentation de la SCR. La Loi est silencieuse sur les conséquences de la non-retransmission des œuvres d’une société donnée, mais le versement des droits offre une protection pour la retransmission de toutes les œuvres de toutes les sociétés de perception. Le versement des droits met bel et bien les retransmetteurs à l’abri de poursuites pour violation du droit d’auteur. De plus, l’article 70.65 accorde aux sociétés de perception le droit de percevoir les droits fixés dans le tarif homologué « indépendamment de tout autre recours ».

Par exemple, aucune œuvre de la BBC n’est diffusée par une station canadienne. Par conséquent, la BBC ne pourrait pas intenter de poursuites pour violation du droit d’auteur contre un système de télédistribution qui distribue uniquement des signaux éloignés canadiens. La Loi lui permet toutefois de percevoir sa quote-part des droits conformément au tarif. C’est là son seul recours. En vertu du tarif adopté par la Commission, la part des droits à verser à la BBC est la même pour tous les retransmetteurs au Canada, bien qu’il y en ait qui n’offrent aucun signal éloigné américain et par conséquent, aucune œuvre de la BBC.

De plus, il serait fort difficile pour le gouverneur en conseil de modifier un tarif établi en fonction des œuvres retransmises puisqu’une modification à la formule entraînerait aussi une modification de la quote- part de chaque société. Pour que le gouverneur en conseil puisse pleinement exercer le pouvoir que la Loi lui confère, la Commission doit d’abord fixer la formule tarifaire, puis établir la quote-part de chaque société de perception.

b. Les écarts

Plusieurs parties ont souligné les disparités nécessairement engendrées par toute formule prévoyant un seul taux applicable à tous les abonnés d’un système dont la taille a franchi un certain seuil. Par exemple, en application du tarif homologué par la Commission, le montant total des droits à verser par un système ayant 1 000 abonnés est de 100 $ par année. Un système comptant un abonné de plus aurait à verser 2 402,40 $. Seul un tarif qui fixe le même taux pour les 1 000 premiers abonnés de chaque système, sans égard au nombre total d’abonnés, empêche que de telles disparités se produisent.

La preuve indique que ce n’est pas l’établissement de certains seuils qui soulève des oppositions, mais l’importance des disparités qu’ils créent. La Commission considère l’augmentation du tarif au-delà du seuil de 1 000 abonnés n’est pas suffisante pour remettre en question le caractère équitable de l’ensemble du tarif, car les systèmes qui franchissent ce seuil jouissent d’une période de grâce d’un an avant d’être assujettis au tarif applicable aux grands systèmes.

c. Les signaux partiellement éloignés

Un signal est éloigné seulement pour les abonnés au service par câble qui se trouvent à plus de 32 kilomètres du périmètre de rayonnement de classe B de la station. Certains systèmes offrent des signaux qui sont éloignés pour une fraction de leurs abonnés seulement. Il s’agit de « signaux partiellement éloignés ».

Toutes les parties conviennent qu’un retransmetteur ne devrait pas être tenu de verser des droits pour la partie de son territoire qu’il dessert par un signal local. Les parties conviennent aussi qu’il est possible d’évaluer de façon satisfaisante le nombre d’abonnés pour lesquels un signal est éloigné en comparant les cartes qui indiquent la zone desservie par ce signal et les aires couvertes par différents codes postaux. Un signal est réputé éloigné pour la moitié des abonnés d’un service de câble résidant dans une zone représentée par un code postal dans laquelle le signal est éloigné pour partie seulement.

La formule tarifaire adoptée par la Commission minimise le nombre de systèmes qui ont à faire ce calcul. Le nombre de signaux partiellement éloignés et leur degré d’éloignement n’a aucune importance pour un système qui offre au moins un signal éloigné pour tous ses abonnés. En 1989, trois systèmes n’offraient que des signaux partiellement éloignés.

d. Les abonnés indirects

À la fin des audiences, le traitement des « abonnés indirects » ne soulevait plus qu’une question : comment structurer les réductions applicables aux chambres d’hôtel et d’hôpital.

Toutes les parties ont reconnu que chaque unité d’un édifice à logements multiples devrait être considérée séparément. On s’est aussi entendu pour dire que chaque pièce d’un édifice institutionnel ou commercial devrait être considérée comme un abonné.

Les opposants ont proposé une solution qui obligerait chaque système de télédistribution à fournir à titre confidentiel, un rapport sur le taux moyen de la réduction offerte aux hôtels et hôpitaux desservis comme abonnés en bloc. La Commission considère qu’une solution plus objective réduirait la nécessité de faire des vérifications et protégerait le caractère confidentiel des contrats pour les abonnements en bloc.

Ainsi, la Commission a incorporé, dans le tarif, des réductions qui reflètent l’utilisation de la télévision par câble dans les hôpitaux et les hôtels.

Le taux moyen d’occupation des chambres d’hôtel et de motels s’élève approximativement à 65 pour cent. La Commission fixe la réduc- tion applicable à 35 pour cent. Les sociétés de perception ont indiqué qu’elles se contenteraient de recevoir 25 pour cent du plein tarif, pour chaque chambre desservie dans un hôpital, une maison de repos ou un autre établissement de soins de santé. Par conséquent, la Commission établit à 75 pour cent la réduction pour les chambres se trouvant dans ces établissements.

e. Les rajustements liés à l’inflation

Le tarif homologué ne tient pas compte de l’inflation. Il est d’usage de prévoir des clauses de rajustement pour parer à la chute de la valeur constante des contrats exprimés en numéraire. Plus l’économie est instable, et plus longue est la durée d’un contrat, plus il est important de prévoir ces clauses. Exception faite des contrats individuels, ces clauses peuvent présenter des dangers car elles risquent d’alimenter la flambée de l’inflation qu’elles visent justement à contrer. Une autre stratégie consiste à écourter la durée du contrat, comme l’a d’ailleurs proposé l’ACTC.

La Commission tient à établir un tarif qui soit simple, d’autant plus qu’il ne reste que 15 mois à courir avant son expiration. Elle préfère donc s’abstenir d’y intégrer, explicitement ou implicitement, ses propres prévisions.

D. L’IMPACT DES DROITS D’AUTEUR SUR L’INDUSTRIE

L’impact sur l’industrie de la télédistribution de son assujettissement à des droits d’auteur pour la retransmission dépend à la fois de sa rentabilité et de sa capacité d’en reporter le coût sur les consommateurs et les fournisseurs de signaux. Nous aborderons cette question en trois volets :

  1. la capacité de l’industrie dans son ensemble d’absorber le coût des droits;

  2. la réaction des retransmetteurs et des consommateurs qui pourraient, selon le cas, cesser de distribuer des signaux ou annuler leur abonnement pour se soustraire au paiement des droits;

  3. la capacité relative de certains sous- secteurs de l’industrie d’assumer le coût des droits.

i. La capacité de l’industrie d’absorber le coût des droits

C’est la structure des coûts et recettes de l’industrie qui détermine si elle peut assumer le paiement des nouveaux droits de retransmission. Selon la preuve présentée par la SPDAC, l’industrie de la retransmission peut s’appuyer sur une situation financière plus solide que celle de la plupart des autres industries réglementées. Cette preuve démontre que l’industrie devrait pouvoir assumer elle- même au moins une partie des droits puisque, même après les avoir versés, ses bénéfices continueront de dépasser ceux d’autres industries réglementées. La SPDAC a prétendu que l’industrie pourrait assumer la plus grande partie des 80 millions de dollars qui auraient été perçus en application de son projet.

Les recettes de l’industrie, provenant du service de base, sont passées de 273 millions de dollars en 1978 à 990 millions de dollars en 1988. Son revenu nominal a donc connu une augmentation annuelle moyenne de 5,4 pour cent. Le nombre total d’abonnements au service par câble a continué d’augmenter en dépit d’une augmentation des prix du service supérieure à l’augmentation de l’indice des prix à la consommation.

L’obligation de verser des droits pour la retransmission de signaux éloignés représente, pour l’industrie, un changement fondamental qui aura un impact sur ses coûts et ses recettes. PROJET 94, un document dans lequel l’industrie de la télédistribution émet des prédictions sur son évolution au cours des prochaines années, ne fait aucunement état de l’imposition des droits d’auteur pour la retransmission, ce qui porte à croire que les télédistributeurs s’attendaient à pouvoir reporter les droits sur leurs abonnés et à en minimiser l’impact sur leurs structures de coûts. Même si cela ne s’avérait pas possible, la Commission croit que les retransmetteurs, après une période d’adaptation, continueront à obtenir un rendement « juste », quoique possiblement moindre.

La deuxième partie de la preuve de la SPDAC concernait l’élasticité de la demande de services de télédistribution par rapport au prix. Il s’agit d’une preuve de nature très générale, fondée sur des études empiriques effectuées au cours des années soixante et soixante-dix. La Commission en vient néanmoins à la conclusion que la nature du service de télédistribution, en tant que bien de consommation, demeure la même qu’il y a dix ou vingt ans. Même le p.d.g. de l’ACTC, qui était d’avis que l’étude sur l’élasticité avait été mal faite, a reconnu qu’il n’y a aucune raison de croire à l’élasticité de la demande de services de télédistribution.

La Commission reconnaît que la demande de services de télédistribution n’est pas sensible à la fluctuation du prix. Cependant, elle refuse d’attribuer exclusivement à ce facteur l’augmentation du nombre d’abonnements au service par câble au cours des dernières années. Elle souligne notamment que le revenu personnel a aussi connu une hausse et que la qualité du service s’est améliorée avec l’augmentation du nombre de canaux, du nombre d’émissions et de la qualité des émissions. En outre, de plus en plus de foyers ont accès au service. Tous ces facteurs pourraient expliquer une augmentation du nombre d’abonnés en dépit de l’augmentation des prix.

ii. La réaction des retransmetteurs et des abonnés

Si les retransmetteurs cessent de distribuer certains signaux ou si les abonnés abandonnent le service, la communauté subira une perte puisque ses coûts réels d’utilisation des signaux (mesurés en termes d’autres ressources qui doivent être abandonnées) sont nuls. Puisque le tarif homologué n’est pas fonction du nombre de signaux, la réaction des retransmetteurs ne devrait pas être très prononcée.

Une récente décision du CRTC a pour effet de permettre aux télédistributeurs de moins de 2 000 abonnés d’augmenter automatiquement leurs tarifs d’abonnement d’un montant correspondant à celui des droits à verser. Or, ces derniers étant soumis aux taux les moins élevés, leurs tarifs d’abonnement ne devraient pas connaître d’augmentation importante. C’est ce sur quoi porte la prochaine section.

iii. La capacité relative de certains sous-secteurs de l’industrie d’assumer le coût des droits

L’argumentation de la SPDAC concernant la rentabilité de l’industrie et l’élasticité de la demande porte sur l’industrie dans son ensemble. Cependant, les plus petits télédistributeurs, et leurs abonnés peuvent être durement touchés par des augmentations de prix. C’est ce qui ressort de la preuve de la C1. De plus, la clientèle de la CANCOM se trouve dans une situation très différente de celle des autres télédistributeurs puisqu’elle paye déjà les signaux éloignés qu’elle reçoit. Ces télédistributeurs pourront peut-être récupérer de la CANCOM une partie des droits qu’ils ont à verser. La preuve de la CANCOM indique clairement qu’elle en est consciente.

Il est cependant peu probable que cela se produise car le tarif homologué prévoit des droits moins élevés pour les plus petits systèmes desservis par la CANCOM et qu’un système ne peut éviter le paiement des droits à moins d’abandonner tous les signaux éloignés. Il est encore plus important de constater que le tarif moins élevé pour les systèmes dont le nombre d’abonnés ne dépasse pas 6 000 a pour effet de minimiser l’impact des droits sur les abonnés dans l’éventualité où les télédistributeurs tenteraient de récupérer leurs coûts.

IV. LA RÉPARTITION DES DROITS ENTRE LES SOCIÉTÉS DE PERCEPTION

La deuxième tâche de la Commission consiste à répartir les droits entre les sociétés de perception. Le fondement des deux principaux modes de répartition repose sur la proportion des émissions diffusées et sur les cotes d’écoute des émissions. D’autres méthodes ont également été proposées. Avant de les examiner, la Commission doit traiter plusieurs questions de droit préliminaires.

A. LES QUESTIONS DE DROIT

La Commission a demandé aux parties d’exposer leur point de vue sur trois questions de droit qu’elle devait résoudre afin d’établir les quote-parts :

  • la compilation d’une journée de radiodiffusion est-elle protégée par le droit d’auteur ?

  • les radiodiffuseurs contrôlent-ils les droits de retransmission des émissions à l’égard desquelles ils détiennent une licence territoriale exclusive ?

  • les émissions sportives sont-elles protégées par le droit d’auteur et, le cas échéant, qui est titulaire du droit d’auteur sur ces émissions ?

La SPDAC et l’ADRRC ont soulevé une autre question de droit :

  • la retransmission d’œuvres musicales est-elle également protégée par le droit d’auteur ?

Tant l’ADRRC que la FWS ont mis en doute la compétence de la Commission de trancher toute question de droit de cet ordre. La question de compétence est celle de savoir si la Commission, en répartissant les droits parmi les sociétés de perception, doit se limiter à évaluer et quantifier les revendications concurrentes sans en examiner la justification en droit. Les parties se sont fondées sur l’affaire CTV Television Network Ltd c. Canada (Commission du droit d’auteur) (1990) 30 CPR (3d) 262 (CF pr. inst.) dans laquelle M. le juge Cullen s’est exprimé ainsi (à la page 267) : [TRADUCTION] « Il ressort clairement de la Loi que le législateur n’avait pas l’intention de permettre à la Commission de trancher des questions de droit, mais qu’il l’a plutôt établie comme organisme de réglementation pour fixer des taux ». Cette décision, a-t-on prétendu, réitère le principe énoncé dans l’arrêt Curly Posen c. Ministre de la Consommation et des Corporations, [1980] 2 CF 259 (CAF).

Ces arrêts portent sur la compétence de la Commission, et de la Commission qui l’a précédée, d’approuver des tarifs pour l’exécution publique d’œuvres musicales; ils ne concernent pas le régime des droits pour la retransmission. Pour répartir ceux-ci, la Commission doit évaluer des réclamations concurrentes. Comme les questions de droit énoncées soulèvent des problèmes quant aux droits des parties à la répartition, la Commission ne peut s’acquitter de son obligation de fixer les taux et d’établir la quote- part de chacun sans d’abord trancher ces questions de droit. La compétence de la Commission de trancher ces questions de droit découle nécessairement de sa compétence de répartir les droits de retransmission. Tout organisme administratif peut trancher de telles questions, sous réserve, bien sûr, du pouvoir de révision des tribunaux judiciaires.

i. La compilation de la journée de radiodiffusion

Tant l’ADRRC que la BBC ont présenté une preuve étoffée à l’appui des droits qu’ils revendiquent pour la compilation sur bande vidéo de la journée de radiodiffusion de leurs stations membres. Dans leur argumentation, l’ADRC et la SCR, qui représentent également des radiodiffuseurs, demandent une partie des droits pour la compilation de la journée de radiodiffusion si jamais la Commission décidait que des droits sont exigibles à ce titre.

La compilation d’émissions exige des aptitudes et des efforts. La sélection et l’arrangement d’émissions pour établir un horaire et l’intercalation d’annonces publicitaires, de communiqués d’intérêt public et de messages promotionnels requiert un certain jugement, de l’expertise, une connaissance du marché pertinent, de la créativité et de l’originalité.

Les trois arguments de droit suivants sont invoqués à l’appui de la reconnaissance de la journée de radiodiffusion comme étant une œuvre protégée par le droit d’auteur :

  1. la journée de radiodiffusion est une « œuvre littéraire » parce que cette expression s’entend en outre des compilations;

  2. c’est une « œuvre dramatique », car il s’agit d’une production cinématographique;

  3. c’est une « œuvre artistique », car il s’agit d’une photographie.

Avant d’analyser ces arguments de droit, la Commission a vérifié si la Loi, dans sa forme actuelle, cherche à protéger les radiodiffusions.

En vertu de l’article 63 de la Loi, seules les œuvres littéraires, dramatiques, musicales et artistiques sont protégées par le droit d’auteur. Au fur et à mesure que la technologie a évolué, la Loi a reconnu de nouvelles œuvres et de nouveaux droits mais sans jamais sortir du cadre des catégories déjà existantes. Les photographies ont été protégées comme œuvres artistiques; les productions cinématographiques, comme œuvres dramatiques; les enregistrements sonores sont traités comme œuvres littéraires, dramatiques ou musicales; les programmes d’ordinateur sont assimilés aux œuvres littéraires.

Par contre, la Loi ne protège la diffusion par télévision ou par radio ni à titre d’œuvre distincte, ni à titre d’œuvre appartenant à une catégorie d’œuvres. Dans d’autres ressorts de common law, tels la Grande Bretagne, l’Australie et la Nouvelle-Zélande, la Loi protège spécifiquement la radiodiffusion comme une œuvre distincte à laquelle elle rattache des droits spécifiques différents de ceux accordés aux œuvres traditionnelles. Si la journée de diffusion était reconnue au Canada comme une œuvre, l’ensemble des droits normalement rattachés à ce type d’œuvres traditionnelles lui seraient automatiquement rattachés.

La protection accordée aux enregistrements sonores s’avère une comparaison utile. L’enregistrement sonore de la journée de diffusion par télévision ou par radio est protégé uniquement contre la reproduction non- autorisée; c’est par une modification remontant à 1971 que le législateur n’en interdit plus l’exécution en public et la communication par radiocommunication. Il n’est donc pas étonnant que les modifications de 1989 à la Loi ne protègent pas le droit de retransmission des enregistrements sonores. Conclure que l’enregistrement sur bande magnétoscopique de la journée de radiodiffusion est mieux protégé que son enregistrement sonore irait tout à fait à l’encontre de l’intention du législateur. Si, par ailleurs, tant l’enregistrement sur bande magnétoscopique que l’enregistrement sonore étaient protégés à titre de compilations, l’enregistrement de la journée de radiodiffusion par radio serait mieux protégé que celui des nombreuses œuvres musicales qu’elle contient.

Ce n’est pas la première fois qu’on soulève, au Canada, la question de savoir s’il y a lieu de protéger de façon distincte le droit d’auteur des organismes de radiodiffusion sur ce qu’ils diffusent. La Commission Ilsley, en 1957, le Conseil économique du Canada, en 1971, le rapport Keyes-Brunet, en 1977, le Livre Blanc sur le droit d’auteur, en 1984, et le Sous-comité parlementaire sur la révision du droit d’auteur, en 1985, ont tous examiné cette question. Toutes ces études ont reconnu que la Loi ne protège pas les radiodiffusions. L’Association canadienne des radiodiffuseurs a elle-même reconnu dans sa présentation au Parlement en 1985 que la radiodiffusion n’est pas protégée par le droit d’auteur au Canada. Le Parlement n’a toujours pas donné suite aux recommandations prônant une protection distincte de la radiodiffusion.

Une analyse du contexte législatif suffit donc pour que la Commission rejette toute revendication de droits fondée sur la journée de radiodiffusion comme œuvre traditionnellement protégée par le droit d’auteur. La BBC et l’ADRRC ont cependant insisté pour que la Commission donne une interprétation large à la Loi et reconnaisse que la compilation d’une journée de radiodiffusion répond à la définition de ces œuvres traditionnelles. Voici les commentaires de la Commission quant aux justifications que les parties ont invoquées à l’appui de cette prétention.

a. La journée de radiodiffusion comme « œuvre littéraire »

La BBC et l’ADRRC prétendent que la compilation est, par définition, une œuvre littéraire, peu importe la nature des œuvres compilées. La Loi ne définit pas le mot « compilation » mais ne fait que le citer comme exemple d’une « œuvre littéraire ». Tous les jugements pertinents des tribunaux canadiens et britanniques concernent la compilation d’œuvres littéraires protégées ou de données écrites non protégées. La journée de radiodiffusion comporte une variété d’œuvres dramatiques et d’autres œuvres protégées par le droit d’auteur dont la compilation ne donne pas naissance à une œuvre littéraire au sens courant du terme.

L’ADRRC prétend que le Canada, pour s’acquitter de ses obligations en vertu de l’Accord de libre-échange, doit retenir la conclusion du Copyright Royalty Tribunal aux États-Unis que la journée de radiodiffusion constitue une compilation. Cependant, l’Accord de libre-échange exige seulement que le Canada protège toutes les formes de transmission et de retransmission des émissions de télévision et de radio, et non qu’il modifie sa loi pour la rendre conforme à celle des États- Unis. D’ailleurs, certaines différences entre les lois canadienne et américaine sur le droit d’auteur expliquent sans doute pourquoi le CRT a pu conclure que la journée de radiodiffusion est une compilation : la loi américaine protège les works of authorship alors que la loi canadienne ne protège que les œuvres littéraires, dramatiques, musicales et artistiques; de plus, la loi américaine définit la compilation, en lui attribuant d’ailleurs un sens assez large, alors que la loi canadienne ne le fait pas.

Tant la BBC que l’ADRRC prétend que l’horaire de radiodiffusion constitue lui-même une œuvre littéraire et que la retransmission des émissions qu’il énumère constitue la retransmission de cette œuvre littéraire. L’horaire des émissions d’un radiodiffuseur est une œuvre littéraire, mais on ne peut assimiler la retransmission des émissions qui y sont inscrites à la retransmission de l’horaire.

b. La journée de radiodiffusion comme « œuvre dramatique »

Si la journée de radiodiffusion n’est pas protégée comme œuvre littéraire, la BBC et l’ADRRC prétendent qu’elle l’est à titre de production cinématographique, incluse dans la définition d’une « œuvre dramatique ». Pour être qualifiée d’œuvre dramatique, une production cinématographique doit comporter des dispositifs de mise en scène, ou une combinaison d’incidents représentés. La compilation par un radiodiffuseur ne comporte manifestement aucun dispositif de mise en scène et on ne saurait considérer une combinaison d’œuvres ou d’émissions comme une combinaison d’incidents.

Par ailleurs, s’il y a lieu d’assimiler l’enregistrement sur bande magnétoscopique d’une journée de radiodiffusion à une œuvre protégée par le droit d’auteur, c’est à l’enregistrement sonore, et non à l’œuvre dramatique qu’il faudrait l’assimiler. La bande magnétoscopique produite par le radiodiffuseur est un enregistrement de toutes les émissions diffusées ce jour-là, y compris celles qu’il a réalisées.

Lorsqu’une émission est diffusée en direct, l’enregistrement magnétoscopique devient le moyen de fixation pour les fins du droit d’auteur. L’œuvre est ainsi protégée comme œuvre dramatique ou comme photographie. Déjà, l’ADRRC et la BBC revendiquent des droits sur les émissions réalisées par leurs membres.

Comme les émissions que ces derniers radiodiffusent ont pour la plupart été fixées d’avance, l’enregistrement sur bande magnétoscopique au moment de la diffusion constitue au plus une reproduction d’œuvres déjà existantes. L’alinéa 3 (1) (d) de la Loi décrit cette activité comme étant le droit « de confectionner toute empreinte, tout rouleau perforé, film cinématographique ou autres organes quelconques, à l’aide desquels l’œuvre pourra être exécutée ou représentée ou débitée mécaniquement ». Or, nous savons que le produit de cette activité n’est protégé que pour la reproduction. Aucun droit de retransmission ne s’y rattache.

c. La journée de radiodiffusion comme « œuvre artistique »

La Commission conclut que la journée de radiodiffusion ne constitue pas une production cinématographique distincte protégeable à titre d’œuvre dramatique. En conséquence, il ne peut s’agir d’une photographie ou d’un ensemble de photographies distinctes.

d. La journée de radiodiffusion comme recueil

La BBC prétend que la journée de radiodiffusion répond à la définition d’un recueil dans lequel sont incorporées des œuvres d’auteurs différents. Cependant, les recueils ne constituent pas une catégorie d’œuvres distinctes. Ce qui caractérise le recueil, c’est la façon dont il a été réalisé. Cela ne règle pas la question de savoir si ce qui est réuni constitue une œuvre traditionnellement protégée par le droit d’auteur.

ii. La revendication de l’ADRRC concernant l’exclusivité territoriale

L’ADRRC revendique une part des droits de retransmission afin d’indemniser ses stations membres pour les dommages que leur cause l’importation de signaux éloignés diffusant des émissions à l’égard desquelles ces stations détiennent une licence qui leur assure l’exclusivité territoriale. L’ADRRC prétend que ces licences accordent implicitement aux radiodiffuseurs le droit de retransmettre les émissions en exclusivité dans leur marché et que les retransmetteurs doivent, par conséquent, obtenir leur permission pour les diffuser.

Cependant, la Loi indique clairement que c’est le titulaire du droit d’auteur qui bénéficie du droit de retransmission, à moins de cession expresse en faveur d’une autre personne. La preuve démontre que les radiodiffuseurs n’acquièrent pas, en général, le droit d’auteur sur les émissions à l’égard desquelles ils ont une licence de radiodiffusion.

iii. Les émissions sportives

Avant le début des audiences, la Commission a demandé aux parties concernées de traiter, dans leurs présentations, la question de la nature des émissions sportives en regard du droit d’auteur. À moins que l’événement sportif lui-même ou la réalisation de sa télédiffusion ne soit une œuvre protégée par le droit d’auteur, sa retransmission ne permet pas à son propriétaire de revendiquer une part des droits.

La FWS a présenté une preuve détaillée à l’appui de sa prétention selon laquelle une manifestation sportive est une œuvre protégée par le droit d’auteur. Elle a choisi, à titre d’exemples, les matchs de football et de hockey. Elle a assimilé les livres de jeux, les plans de matchs et les listes de préparation à des œuvres littéraires; les séquences de jeu ont été comparées à une œuvre dramatique et, plus précisément, à une œuvre chorégraphique. On a prétendu que les insignes des équipes et le dessin des uniformes sont des œuvres artistiques. Aucune preuve n’a été présentée à la Commission sur la nature d’autres sports en regard du droit d’auteur.

La FWS et la LBM minimisent toutes deux la contribution du réalisateur de la télédiffusion des manifestations sportives et prétendent que ce que la réalisation ajoute à un match a peu d’importance comparativement à la contribution des équipes elles-mêmes.

Pour leur part, la BBC et l’ADRC prétendent que les manifestations sportives elles-mêmes ne sont pas protégées par le droit d’auteur. Bien qu’il existe un droit d’auteur sur les livres de jeux et les plans de matchs ainsi que sur les insignes des équipes et le dessin des uniformes, la BBC prétend soit qu’ils n’ont aucune valeur pour les systèmes de télédistribution, soit que ceux-ci ne s’en servent pas. Une séquence de jeu n’est pas une œuvre chorégraphique puisque, contrairement à la danse, un événement sportif est essentiellement une série d’événements fortuits. Le déroulement du match est imprévisible, ce qui est tout à fait contraire à la notion même de chorégraphie.

La Commission est d’accord avec les arguments de la BBC et conclut qu’un événement sportif n’est pas une œuvre protégée par le droit d’auteur.

Par ailleurs, la réalisation de la télédiffusion d’un match sportif constitue une production cinématographique et appartient, en vertu de la Loi, à la catégorie des œuvres dramatiques protégées par le droit d’auteur. Une preuve considérable a été présentée à la Commission sur la réalisation des émissions sportives. La description des rôles des réalisateurs, directeurs, aiguilleurs et cameramen démontre que l’œuvre présente un caractère original suffisant pour être protégée par le droit d’auteur. La série d’incidents que représentent les gestes des joueurs suffit à donner à l’œuvre le caractère original requis d’une production cinématographique. La Commission conclut également que l’enregistrement sur bande magnétoscopique constitue un mode de fixation par un procédé analogue à la cinématographie.

En l’absence d’une entente à l’effet contraire entre les équipes sportives et le réalisateur de la télédiffusion, la Commission conclut que c’est ce dernier qui est titulaire du droit d’auteur sur l’œuvre.

iv. Les œuvres musicales

Puisque c’est, disent-elles, leur mode de fixation qui permet de définir les œuvres musicales, la SPDAC et l’ADRRC contestent le droit de la SDE et de la CAPAC de revendiquer une partie des droits, alléguant que c’est l’exécution d’une œuvre musicale et non l’œuvre musicale comme telle qui est retransmise. Cet argument se fonde sur la décision de la Cour suprême du Canada dans l’affaire CAPAC c. CTV, [1968] RCS 676, sur laquelle s’est appuyé récemment M. le juge Cullen dans une autre affaire, CTV Television Network Ltd. c. Canada (Commission du droit d’auteur) (précitée).

Ces deux décisions ont été rendues dans des circonstances particulières au réseau de télévision CTV et ne sauraient s’appliquer aussi à l’égard des articles de la Loi qui portent sur la retransmission. Ces articles établissent un régime complet relatif à la retransmission de signaux que des stations de télévision et de radio transmettent d’abord par la voie des ondes. Or, les stations de télévision et de radio elles-mêmes ne communiquent pas les œuvres littéraires, dramatiques, musicales ou artistiques dans leur forme physique, mais en communiquent plutôt des représentations et des exécutions. Il s’agit du seul moyen par lequel les œuvres peuvent être communiquées au public. Rien dans la Loi ne permet de traiter les œuvres musicales différemment. Or, le paragraphe 28.01 (1) fait état d’un signal porteur d’une œuvre littéraire, dramatique, musicale ou artistique.

Par conséquent, la Commission conclut que la SDE et la CAPAC ont droit à une part des droits de retransmission.

B. LES MODES DE RÉPARTITION

Ces diverses méthodes sont examinées ci-après. Diverses méthodes d’évaluation de la programmation ont été proposées par les parties aux fins de la répartition des droits : le nombre d’abonnés qu’elle rejoint, le nombre d’abonnés qui la regardent, la satisfaction qu’elle procure et même ses coûts de production.

i. La répartition fondée sur le temps d’antenne

La SCR, l’ADRRC, l’ADRC et la BBC proposent divers modes de répartition fondé sur le temps d’antenne. Selon ce mode de répartition, la revendication d’une part des droits est fondée sur le fait de rendre une émission accessible à un téléspectateur potentiel. Le poids accordé à chaque émission est fonction du nombre d’abonnés rejoints, c’est-à-dire du nombre d’abonnés qui reçoivent le signal par câble et qui peuvent regarder l’émission s’ils le souhaitent. Théoriquement, le titulaire du droit d’auteur sur une émission que personne ne regarde peut revendiquer la même part des droits que le titulaire du droit d’auteur sur une émission très populaire.

La répartition que proposent la SCR et l’ADRRC est établie à partir d’un échantillon d’émissions diffusées par des stations situées dans 15 marchés de télédistribution représentatifs pendant 14 jours au cours de l’année se terminant le 31 mars 1989. Les stations de télévision qui composent l’échantillon représentent tous les genres de signaux éloignés disponibles au Canada.

Pour chaque émission, le nombre d’abonnés atteints par une station qui la diffusait a été pondéré en fonction du nombre d’abonnés rejoints par le genre de signal transmis par cette station et du nombre d’abonnés rejoints par ce signal dans l’échantillon. Ce calcul a établi la part de cette émission sur l’ensemble du temps d’antenne de toutes les émissions, soit la quote-part des droits de la société de perception titulaire du droit d’auteur sur cette émission.

Cette répartition n’est pas fondée strictement sur le temps d’antenne puisque deux ajustements y ont été apportés; les émissions présentées entre minuit et 6h ont été exclues de l’échantillon, et on a réduit de 50 pour cent la valeur d’une heure de programmation d’intérêt purement local, malgré l’opposition de l’ADRRC à cette réduction.

L’ADRC a également proposé un mode de répartition fondé sur le temps d’antenne, mais uniquement pour appuyer sa propre revendication. Pour l’année se terminant le 31 août 1989 (mars 1989 pour Radio-Québec), l’ADRC a pu identifier presque toutes les émissions qui ont été diffusées par les stations de ses membres et leurs stations affiliées à l’égard desquelles ses membres revendiquent la propriété du droit d’auteur. Outre des droits sur la programmation fournie par les réseaux, elle revendique aussi des droits pour les émissions en souscription. Cependant, cette revendication n’a pas été aussi bien étayée.

Contrairement à la SCR, l’ADRC accorde la même valeur à chaque signal. Ainsi, plus la journée de radiodiffusion est courte, plus la valeur d’une heure de programmation est élevée. L’ADRC a également tenu compte des émissions qui, en raison des règles sur la substitution de programmation identique, n’ont en fait pas été retransmises.

La BBC propose elle aussi un mode de répartition des droits en fonction du temps d’antenne mais, tout comme l’ADRC, elle s’en sert uniquement pour établir la quote-part des droits qui lui revient.

Les données de la SCR sont tirées de registres et fondées sur une période témoin et un échantillon de systèmes auxquels on a reproché de ne pas être représentatifs. Malgré cela, les données de la SPDAC et de la SCR sur le temps d’antenne concordent assez, compte tenu des limites des deux échantillons, pour permettre à la Commission de conclure que les données des deux sociétés offrent un bon aperçu du temps d’antenne des émissions et du nombre d’abonnés atteints au Canada.

ii. La répartition fondée sur les cotes d’écoute

Selon le mode de répartition proposé par la SPDAC, qui est fondé sur les cotes d’écoute, la quote-part des droits attribuée à une société de perception devrait correspondre à la part des cotes d’écoute recueillie par les émissions de ses membres sur l’ensemble des signaux éloignés.

L’évaluation mise de l’avant par la SPDAC se fonde sur une analyse des sondages sur les cotes d’écoute à travers le Canada effectués durant une période témoin de trois semaines en novembre 1988 « les semaines de sondage ». En se servant du système de classification des émissions mis au point par Statistique Canada, on a établi la cote d’écoute de divers types d’émission. Ces catégories ne correspondant pas aux demandes des parties, la Commission a ordonné à la SPDAC de réorganiser ses données sur les cotes d’écoute en fonction de la propriété des émissions. La Commission a aussi ordonné aux parties d’identifier, dans la période témoin, les émissions qu’elles prétendent appartenir à leurs membres.

La proposition de la SPDAC n’est pas fondée uniquement sur les cotes d’écoute. Avant d’appliquer ses données sur les cotes d’écoute, la SPDAC a pondéré trois types de signaux en fonction du nombre d’abonnés rejoints, ou du temps d’antenne. Ces trois types de signaux sont : les stations commerciales américaines (59,6 pour cent du temps d’antenne), les stations de PBS (16,6 pour cent du temps d’antenne) et les stations canadiennes (24,3 pour cent du temps d’antenne).

Les statistiques brutes sur les cotes d’écoute figurent sur la pièce CCC-72. On y constate que la SCR récolte 12,6 pour cent de l’ensemble de l’écoute. Après application du facteur de pondération, la part des droits qui revient à la SCR passe à plus de 20 pour cent. La méthode de pondération utilisée a un grand impact sur les statistiques.

Citons en exemple le cas de PBS. Sa part des cotes d’écoute, sur l’ensemble des émissions transmises par des signaux éloignés au Canada s’élève à 9,5 pour cent, alors que sa part du temps d’antenne sur l’ensemble des émissions transmises par des signaux éloignés est de 16,6 pour cent. En vertu de la proposition de la SPDAC, la PBS recevrait 16,6 pour cent des droits de retransmission, soit presque deux fois plus qu’en répartissant les droits selon les cotes d’écoute.

En dépit de l’entente entre la SPDAC et la SCR, la Commission a décidé que tous les signaux éloignés qui ont leur origine aux États-Unis devraient former une seule catégorie. Selon cet arrangement, les stations canadiennes qui transmettent des signaux éloignés ont plus de poids que si elles étaient mêlées aux signaux américains. La Commission expose les motifs qui justifient cette distinction dans la section 4C intitulée « Les ajustements aux données sur l’écoute ».

La répartition fondée sur les cotes d’écoute est la seule à reconnaître et à quantifier des valeurs différentes pour les émissions. Les retransmetteurs et les abonnés n’accordent pas la même valeur à toutes les émissions. Les sondages sur les cotes d’écoute servent avant tout à établir les prix pour la diffusion de messages publicitaires, et la valeur d’une émission, pour un annonceur, dépend de l’ampleur et de la composition de l’auditoire. La Commission reconnaît donc que les sondages BBM sur les cotes d’écoute indiquent assez fidèlement la popularité d’une émission auprès des abonnés au service par câble et qu’ils peuvent servir à établir la valeur de ces émissions.

La SCR appuie la répartition fondée sur le temps d’antenne en grande partie parce qu’elle rejette celle fondée sur les cotes d’écoute. La SCR prétend que la répartition fondée sur les cotes d’écoute ne tient pas du tout compte de la façon dont les services de télédistribution sont mis en marché. Le tarif d’abonnement mensuel d’un service de télédistribution donné est le même pour tous les abonnés, qu’ils regardent la télévision pendant une heure ou pendant cent heures. Il ne s’ensuit pas pour autant qu’on devrait attribuer la même valeur à toutes les émissions transmises par les signaux éloignés offerts par ce service de télédistribution. Il faut en effet tenir compte du fait que près de 50 pour cent de l’écoute des signaux éloignés a lieu pendant les trois heures de « grande écoute ». Ce facteur ne vaut peut-être pas pour tous les abonnés, mais les sondages sur les cotes d’écoute indiquent qu’il est significatif dans l’ensemble.

La SCR rejette ce mode de répartition parce qu’il n’établit pas la valeur des émissions pour le télédistributeur alors que l’industrie de la télédistribution elle- même admet qu’elle a le mandat d’offrir un choix d’émissions variées. Il n’existe, cependant, aucun moyen d’évaluer ce que vaut chaque émission pour un télédistributeur et il n’est pas possible d’établir combien un télédistributeur verserait pour une émission qui attire, par exemple, deux fois plus de téléspectateurs qu’une autre. Pourtant, s’il veut garder ses abonnés et en attirer de nouveaux, le télédistributeur fait des choix qui reflètent leurs préférences. Par conséquent, la Commission conclut que la meilleure méthode de remplacement pour établir combien vaut une émission pour un télédistributeur consiste à déterminer dans quelle mesure les abonnés regardent les émissions disponibles.

La SCR a invoqué plusieurs autres motifs pour contester la répartition fondée sur les cotes d’écoute. Certains téléspectateurs s’abonnent au service par câble pour capter des émissions qui n’ont pas une forte cote d’écoute. Le mode de répartition fondé sur le temps d’antenne proposé par la SCR tombe dans l’excès contraire en surestimant la capacité de certaines émissions d’attirer de nouveaux abonnements. La proposition de la SPDAC permet de déterminer avec plus de précision quelles sont les émissions qui ont une incidence réelle sur le nombre d’abonnés aux systèmes de télédistribution.

La SCR prétend aussi que les données sur les cotes d’écoute sont un bien faible indicateur du niveau de satisfaction des téléspectateurs. Les stations et les réseaux commerciaux, et même les autres radiodiffuseurs, décident régulièrement d’abandonner des émissions qui ont des faibles cotes d’écoute. Une émission peut prendre fin même si certains abonnés en sont particulièrement friands. Il est fort possible qu’on constate, à long terme, une corrélation entre les émissions les plus regardées et celles qui sont les plus aimées.

L’étude de sondages BBM sur laquelle s’appuie la SPDAC présente aussi des lacunes. La plus évidente tient au fait que pendant la période témoin, à savoir le mois de novembre, aucun match de baseball n’a été diffusé. La Commission se demande si ces données ne contiennent pas d’autres distorsions. Elles ne reflètent peut-être pas fidèlement le comportement du fait même qu’elles sont basées sur des entrées dans un journal d’écoute.

Malgré ses imperfections, cette méthode constitue, de l’avis de la Commission, le meilleur moyen disponible pour établir les différentes valeurs d’émissions différentes. La seule méthode dont la Commission dispose pour calculer les cotes d’écoute, dans l’accomplissement de sa tâche, est la méthode des sondages BBM.

Par conséquent, la Commission s’est servie des résultats des sondages sur les cotes d’écoute, répartis entre les titulaires du droit d’auteur sur les émissions, comme point de départ pour répartir les droits parmi les sociétés de perception.

BBM réalise chaque année deux sondages nationaux, en plus de sondages plus fréquents portant sur les grandes agglomérations. Les données des deux sondages nationaux auraient pu donner à la Commission une meilleure vue d’ensemble des émissions qui sont disponibles tout au long de l’année et des tendances de l’écoute; les sondages restreints aux grandes agglomérations, bien qu’ils ne soient pas aussi détaillés, auraient pu corroborer les données des sondages nationaux.

iii. Le coût des émissions et les recettes qu’elles rapportent

La FWS et la LBM préfèrent la répartition fondée sur les cotes d’écoute à celle fondée sur le temps d’antenne. Ces deux sociétés de perception invoquent les coûts importants associés à la production de leurs émissions et les recettes importantes que ces émissions rapportent aux radiodiffuseurs à l’appui de leur prétention que leur part de l’écoute entraîne une sous-estimation de leurs émissions sportives. Elles ont proposé des méthodes pour établir la valeur de leur propre programmation mais ne donnent aucun renseignement qui permettrait à la Commission d’établir une méthode universelle de répartition des droits.

La Commission a ordonné à certaines sociétés de perception d’obtenir des radiodiffuseurs des renseignements sur le coût d’acquisition des émissions. Ces renseignements n’ont pas été recueillis de façon uniforme. À tout événement, ces renseignements n’auraient pas pu servir à répartir les droits en fonction de la propriété du droit d’auteur puisqu’ils sont regroupés par genre d’émissions.

Il y a généralement corrélation entre les recettes des radiodiffuseurs pour une émission et le nombre de téléspectateurs qui la regardent. La Commission ne voit pas l’utilité d’établir la répartition à partir des recettes, puisqu’il est plus facile d’avoir accès aux données sur l’écoute et que les valeurs relatives des émissions découlant de ces données sont probablement les mêmes que celles qui résulteraient de l’examen des recettes. Pour chaque émission de chaque station reçue comme signal éloigné, les cotes d’écoute sont disponibles. Il en est autrement des statistiques sur les recettes puisque, dans bien des cas, il faut compiler les recettes au niveau du réseau et au niveau local. Or, à l’un ou l’autre de ces niveaux, il se peut que les renseignements soient incomplets.

iv. L’opinion des télédistributeurs et des abonnés

Afin d’établir que les émissions sportives ont beaucoup plus de valeur pour les télédistributeurs que ne l’indiquent les cotes d’écoute, la FWS a commandé deux sondages. Le premier a été mené auprès des télédistributeurs; le deuxième, mené auprès des abonnés, a été présenté pour valider le sondage mené auprès des télédistributeurs.

Mis à part plusieurs carences méthodologiques, ces sondages comportent plusieurs faiblesses qui empêchent la Commission de s’en servir pour faire la répartition. Les questionnaires étaient conçus en fonction du genre d’émissions plutôt que du répertoire d’émissions de chaque société de perception. De plus, le sondage des abonnés ne semble pas avoir été limité aux émissions transmises par des signaux éloignés.

C. LES AJUSTEMENTS AUX DONNÉES SUR L’ÉCOUTE

Pour établir la quote-part des droits de chaque société de perception, la Commission a reçu les données d’un sondage sur les cotes d’écoute effectué en 1988. Aucune preuve n’a été présentée pour démontrer en quoi l’écoute au cours des deux années d’application du tarif pourrait se distinguer. Il est possible que les superstations fassent leur entrée au Canada une fois que le tarif pour la retransmission sera en vigueur, mais il n’est pas possible à la Commission de prédire l’impact qu’elles auront.

La Commission reconnaît cependant que les données dont elle dispose présentent certaines faiblesses et y apporte donc les ajustements suivants.

i. La distinction entre les signaux canadiens et américains

La SPDAC a divisé les signaux en trois catégories : les signaux canadiens, les signaux commerciaux américains et les signaux de PBS. La Commission ne juge pas à propos de distinguer les différents signaux américains, mais elle est disposée à établir une distinction entre les signaux canadiens et américains. Les cotes d’écoute ne reflètent pas fidèlement la valeur qu’attribuent les Canadiens aux émissions transmises par les signaux canadiens. A tort ou à raison, la société canadienne exige un minimum d’émissions canadiennes. Inscrire les signaux canadiens dans une catégorie à part a pour effet d’attribuer à toute émission transmise par ces signaux une valeur supérieure à celle que sa part de l’écoute lui permettrait d’obtenir.

ii. Les quote-parts de la SDE et de la CAPAC

La musique fait partie intégrante de toutes les émissions. La SDE et la CAPAC prétendent que le taux actuellement payé par l’industrie de la télévision commerciale au Canada, soit 2,1 pour cent des recettes brutes, devrait s’appliquer à l’industrie de la télédistribution. Elles estiment qu’environ 53 pour cent des recettes que touche l’industrie de la télédistribution grâce au service de base est imputable aux signaux éloignés et qu’il est donc raisonnable qu’elles demandent 2,1 pour cent de ce montant, c’est-à-dire, 10 millions de dollars. En réalité, ces sociétés revendiquent 6,6 millions de dollars.

Par ailleurs, la SCR prétend que le rapport entre les droits pour la musique et les droits pour la retransmission devrait être identique au rapport entre le coût de la musique pour l’industrie de la télévision et le coût des émissions. Ce rapport était de 3,3 pour cent en 1988. Ce chiffre correspond aux rapports établis pour les stations commerciales et non- commerciales canadiennes, pondérés en fonction du nombre d’abonnés aux signaux éloignés. Selon cette approche, la SDE et la CAPAC auraient perçu 1,66 million de dollars en 1989.

Selon la Commission, ce rapport convient mieux puisque le montant total des droits que les retransmetteurs auront à payer représente pour eux le coût de l’ensemble des émissions des signaux éloignés. Par conséquent, la Commission fixe la quote- part des sociétés musicales à 3,3 pour cent. Le tarif déposé initialement divisait les droits entre les deux sociétés dans une proportion de 60 et 40 pour cent. La preuve ne suggère aucune autre répartition entre les deux.

iii. La quote-part de la LBM

Les données de l’échantillon ne comprennent aucun match de baseball; même l’échantillon de quatorze jours de la SCR ne compte que deux jours qui coïncident avec la saison de baseball. Par conséquent, les échantillons fondés sur les cotes d’écoute comme ceux fondés sur le temps d’antenne sous-estiment la fréquence de la présentation des matchs de baseball à la télévision durant l’année. La Commission considère que les cotes d’écoute des émissions sportives, dans le sondage de novembre, sous-estime l’écoute des sports tout au long de l’année; elle a cherché une autre façon d’établir la quote-part de la LBM. La Commission ne croit pas que la quote-part de la FWS puisse servir à elle seule à établir la quote-part de l’ensemble des émissions sportives. Elle accorde donc à la LBM une quote-part distincte des droits; cette quote-part est égale à celle établie pour la programmation de toutes les autres ligues majeures de sport.

D. LES LITIGES CONCERNANT LA PROPRIÉTÉ DU DROIT D’AUTEUR

Les litiges qui subsistent portent sur la propriété du droit d’auteur ou sur l’interprétation de contrats, résultent d’un manque de temps pour régler un différend, ou encore, visent des émissions dont le droit d’auteur est partagé, mais à l’égard desquelles une entente n’a pas pu être conclue sur la division des droits. La Commission a suivi le principe voulant que l’auteur ou le premier propriétaire d’une émission soit le titulaire du droit d’auteur sur cette émission à moins que les droits de retransmission aient été cédés à une tierce partie. La Commission ne s’attendait pas à pouvoir ainsi régler l’ensemble des différends et a donc divisé en parts égales entre les sociétés concernées les droits restants qui représentent 2 pour cent du total. La Commission a pu néanmoins régler deux genres de litiges.

i. Les litiges sur le droit d’auteur pour les émissions sportives

La Commission est d’avis que la LBM est titulaire du droit de retransmission pour tous les matchs de baseball diffusés par les stations de la Société Radio-Canada. À la lumière des dispositions pertinentes des contrats intervenus entre la NFL et NBC, CBS et ABC, la Commission conclut que la FWS est titulaire du droit d’auteur pour les matchs de la NFL diffusés par les réseaux NBC et CBS alors que le droit d’auteur appartient à l’ADRC pour les matchs diffusés par le réseau ABC. L’ADRC a également revendiqué le droit d’auteur pour les matchs de la LCF et de la LNH diffusés par les stations de la CBC et de la SRC. La preuve n’établissant aucunement que l’une ou l’autre de ces ligues est titulaire du droit d’auteur, la Commission attribue cette part des droits à l’ADRC.

ii. Le litige sur les comédies et les émissions dramatiques en souscription

Le plus important litige porte sur la propriété du droit d’auteur des émissions qui ont été réalisées à l’origine par les trois réseaux commerciaux américains représentés par l’ADRC, mais qui sont maintenant des émissions en souscription dont les distributeurs sont représentés par la SPDAC. Les parties n’ont pas déposé devant la Commission les contrats par lesquels les réseaux auraient cédé leur droit d’auteur aux distributeurs. La Commission conclut que le droit de retransmission continue d’appartenir aux titulaires initiaux du droit d’auteur et elle alloue leur part à l’ADRC.

E. LA RÉPARTITION FINALE

Afin d’établir les nouvelles parts de l’écoute, la Commission a réparti les quote-parts contestées. On a accordé à la LBM une part égale à celle de toutes les autres ligues majeures de sport. La part non revendiquée a été exclue du calcul, ce qui fait que cette part est répartie de même façon que celle de l’ensemble, déduction faite de la part de la SDE et de la CAPAC. [14]

On a ensuite rajusté ces parts de l’écoute en fonction du temps d’antenne, en appliquant un facteur de 1,637 aux émissions de chaque société de perception diffusées par des signaux canadiens, ainsi qu’un facteur de 0,889 aux émissions diffusées par des signaux américains. Cela donne :

SPDAC

60,971 (pour cent)

SCR

13,677

ADRC

12,552

ADRRC

6,210

BBC

3,138

FWS

2,895

LBM

3,832

TOTAL :

103,275

La SDE et la CAPAC se voient attribuer 3,3 pour cent de l’ensemble des droits, laissant 96,7 pour cent à répartir entre les autres sociétés de perception. Ainsi, chaque part du tableau précédent doit être recalculée selon un rapport de 96,7/103,275 ou en la multipliant par 0,936. La CAPAC et la SDE se partagent leur part dans une proportion de 60 et de 40 pour cent; pour ramener le total à 100 pour cent, ces parts ont été incluses. Les chiffres sont arrondis au centième de point pour établir les parts suivantes, ainsi qu’elles figureront dans la Gazette du Canada :

SPDAC

57,160* (pour cent)

SCR

12,822*

ADRC

11,668*

ADRRC

5,821*

BBC

2,942*

FWS

2,814*

LBM

3,479*

CAPAC

1,980

SDE

1,320

TOTAL :

100,006*

* Chiffres corrigés, avis de correction de la Commission, le 2 janvier 1991

V. LES DROITS À PAYER POUR LA RETRANSMISSION DE SIGNAUX DE RADIO

Seules la SDE, la CAPAC et l’ADRRC ont déposé des projets de tarif pour la retransmission de signaux de radio. Au début de la procédure, la Commission a accepté de reporter cette question à la fin de l’audience mais, le 30 mars 1990, la Commission a été avisée d’une entente intervenue entre les trois sociétés de perception et l’ACTC, entente que la CANCOM et la C1 ont par la suite endossée.

La Commission homologue un tarif consolidé pour la retransmission de signaux de radio, qui reflète pour l’essentiel les dispositions de cette entente. Ainsi que l’ont demandé les parties, les dispositions administratives du tarif applicable à la radio reflètent celles du tarif applicable à la télévision.

Les grands retransmetteurs versent annuellement 4 ¢ par abonné, sans égard au nombre de signaux éloignés offerts. Les petits systèmes de retransmission verseront un montant fixe de 10 $ par année. La SDE et la CAPAC recevront chacune 25 pour cent de l’ensemble des droits, tandis que l’ADRRC recevra une quote-part de 50 pour cent.

Aucune preuve n’a été présentée concernant le nombre d’abonnés qui reçoivent effectivement des signaux éloignés de radio, bien que les parties estiment qu’environ 5 pour cent des abonnés branchent un récepteur radio à leurs sorties pour le câble. En l’absence de renseignements sur le nombre de signaux éloignés de radio retransmis par chaque système de retransmission au Canada, les parties ont choisi une formule qui ne dépend pas du nombre de signaux éloignés retransmis.

Toutes les parties se sont entendues sur un tarif annuel fixe et minime pour les petits systèmes et sur un taux fixe par abonné pour les grands systèmes, ce qui est conforme à la structure du tarif que la Commission établit pour la télévision. La Commission est convaincue que la structure du tarif pour la radio est juste tant pour les retransmetteurs que pour les titulaires du droit d’auteur. Devant l’accord des parties, la Commission conclut de plus que le montant des droits est également juste pour la durée du premier tarif.

Si, en 1989, tous les retransmetteurs avaient offert au moins un signal éloigné de radio, les droits à verser, selon cette formule, se seraient établis à 252 000 $ pour les grands systèmes et à 10 800 $ pour les petits systèmes.

VI. LES TARIFS

L’adoption des tarifs pour la retransmission représente un point tournant pour la Commission. Pour la première fois, la nouvelle Commission rend une décision après des audiences prolongées. Par ailleurs, sa décision porte sur un nouveau domaine de compétence. Pour ces raisons, la Commission a décidé de porter une attention particulière à la rédaction des tarifs, et d’énoncer les motifs qui l’ont poussée à faire certains choix à cet égard.

Le présent chapitre comporte quatre sections. La section A examine les motifs et les conséquences de la consolidation des tarifs. La section B énonce les principes dont la Commission s’est inspirée dans la rédaction des tarifs. La section C offre des commentaires sur divers aspects d’une nature plus technique. Enfin, la section D souligne certaines différences qui existent entre les tarifs applicables à la télévision et à la radio.

A. LA CONSOLIDATION DES TARIFS

La Commission adopte un tarif unique pour la retransmission des signaux de télévision, et un autre pour la retransmission des signaux de radio. La part de chacune des sociétés de perception est exprimée en pourcentage des droits exigibles d’un retransmetteur. Par ailleurs, les tarifs sont structurés de façon à permettre leur mise en œuvre par n’importe quelle société de perception.

La Commission est d’avis que cette façon de procéder présente plusieurs avantages. Elle permet plus de transparence et de simplicité dans l’administration des tarifs. Le montant qu’un retransmetteur est appelé à verser est assujetti à un ensemble unique de règles, et à une seule méthode de calcul; le seul chiffre dont auront besoin la plupart des retransmetteurs qui entendent établir le montant de leur obligation est le nombre de locaux qu’ils desservent le dernier jour d’un mois donné.

Puisque chacune des sociétés de perception reçoit un pourcentage fixe des droits payés par un retransmetteur, il n’est pas nécessaire de décrire, dans les tarifs, les sociétés elles-mêmes ou la nature de leur répertoire. La société qui désire intenter une action en justice contre un retransmetteur pour violation de son droit d’auteur peut certainement le faire sans que les tarifs établissent les œuvres qu’elle contrôle. Ceci dit, on retrouve à la section 1.D de la présente décision une description des sociétés et de leur répertoire respectif.

B. LES PRINCIPES DE RÉDACTION

Les tarifs que la Commission homologue sont fort différents de ceux qu’on lui avait proposés et ce, pour deux motifs.

Premièrement, la façon dont la Commission a choisi d’aborder plusieurs des questions de fond a permis d’éliminer une large partie du texte proposé par les parties. C’est le cas de ses décisions de consolider les tarifs et d’établir un taux fixe.

Ceci dit, on ne saurait expliquer toutes ces différences uniquement à partir de la formule que la Commission a retenue ou de sa décision de consolider les tarifs. La Commission avait l’intention ferme de respecter certains principes dans la rédaction des tarifs; les plus importants sont énoncés dans les paragraphes qui suivent.

  1. Les tarifs sont des textes réglementaires. Un tarif n’est pas un contrat. D’ailleurs, le tarif que la Commission homologue est un « règlement » au sens de l’article 2 de la Loi d’interprétation. Cette constatation a permis à la Commission de ne pas reproduire un certain nombre de disposi- tions telles celles portant sur la cessibilité des droits, celles portant que les délais sont de rigueur et celles traitant de l’omission d’exercer un droit. Ces dispositions n’ont pas leur place dans un texte réglementaire.

  2. Les tarifs devraient se suffire à eux- mêmes. La Commission a tenté de faire en sorte qu’il ne soit pas nécessaire d’avoir recours à d’autres lois ou règlements pour comprendre une disposition des tarifs. C’est la raison pour laquelle l’article 2 de chacun des tarifs reprend les définitions de signal éloigné, local, signal et petit système de retransmission. Pour le même motif, la Commission a décidé de reproduire au paragraphe 19(4) du tarif applicable à la télévision les taux d’escompte établis pour la portion de l’année 1990 écoulée avant la publication du tarif. C’est aussi ce qui explique la formulation des dispositions prévoyant que le petit système à antenne collective doit produire une déclaration à cet effet. [Tarif pour la télévision, alinéa 13(2)b); tarif pour la radio, paragraphe 8(3)]

  3. Les tarifs devraient être aussi faciles à lire et à comprendre que possible. Ce principe est d’autant plus important compte tenu de ceux à qui ils s’adressent, y compris ceux qui exploitent des systèmes de retransmission relativement petits. C’est pour cette raison, par exemple, que la définition de signal local paraphrase, pour l’essentiel, le Règlement sur la définition de signal local et signal éloigné, plutôt que d’en reproduire simplement le langage hautement technique. Pour le même motif, la Commission a tenté de jeter un peu de lumière sur le sens pratique de la définition de retransmetteur prévue à la Loi, sans prétendre en changer le contenu de quelque façon que ce soit. (La Commission n’a de toute façon pas ce pouvoir).

  4. Les tarifs devraient être concis.

  5. Les tarifs devraient équilibrer les droits et les devoirs de ceux qu’ils lient. Plusieurs dispositions des tarifs reflètent cette recherche d’équilibre : le fait que les paiements excédentaires de droits portent intérêt au même titre que les paiements déficitaires, illustre bien ce principe. [Tarif pour la télévision, paragraphe 16(2); tarif pour la radio, paragraphe 11(2)]

La Commission souhaite avoir atteint, si peu soit-il, ces objectifs; elle espère que les sociétés de perception appelées à rédiger d’autres tarifs que la Commission aurait à homologuer prendront bonne note des principes énoncés.

C. NOTES EXPLICATIVES

Dans la présente section, la Commission donne les explications qui s’imposent à l’égard de divers aspects des tarifs.

i. Les définitions

Les propositions des parties comportaient plusieurs définitions qui ne sont pas reprises dans les tarifs. Certaines sont incorporées à la disposition dans laquelle la notion pertinente se retrouve : c’est le cas de la définition de taux d’escompte. D’autres mots, tels « mois » ou « personne », sont déjà définis dans la Loi d’interprétation et n’ont par conséquent pas besoin d’être définis.

ii. Le concept d’abonné

Tout au long des audiences, les parties ont utilisé l’abonné comme unité servant à déterminer tant le taux des droits à payer que le total des droits qu’un retransmetteur aurait à verser. La Commission retient plutôt le concept de local et ce, pour deux raisons.

Premièrement, le Règlement sur la définition de petit système de retransmission contient déjà une définition du mot « local » qui correspond à peu de choses près au concept d’abonné utilisé par les parties. En se servant de cette définition sans la modifier, on évite que des distinctions soient établies entre ces deux concepts. L’utilisation du terme «local» évite aussi à un retransmetteur d’avoir à compter les locaux qu’il dessert de deux façons différentes, pour déterminer s’il est un petit système de retransmission et pour établir le montant des droits qu’il doit verser.

Deuxièmement, cette façon de procéder évite d’avoir recours à l’artifice plutôt gauche de définir l’« abonné » (un mot qui, pour la plupart des gens, s’entend intuitivement de personnes physiques) en termes de « pièces », d’« habitations » ou de « TVRO ».

iii. L’inclusion par renvoi d’autres dispositions législatives

Certaines propositions des parties prévoient que le renvoi à un texte de loi est réputé être un renvoi à cette disposition modifiée. La Commission ne croit pas qu’il soit nécessaire de recourir à cette technique de rédaction. Bien qu’assez répandue en matière de contrats, elle n’a pas sa place en rédaction législative. Qui plus est, c’est une mesure qui a pour but de régler une difficulté qui ne se pose pas en droit fédéral. L’alinéa 44(h) de la Loi d’interprétation précise clairement que le renvoi dans les tarifs à un texte abrogé « équivaut à un renvoi aux dispositions correspondantes du nouveau texte ». Par ailleurs, puisque la Commission n’a pas le pouvoir de modifier ces textes, il serait déplacé d’inclure dans les tarifs des mots qui semblent sous-entendre que leur omission permettrait à la Commission de « geler » ces dispositions et d’en empêcher la modification.

Il coule de source que la modification à des dispositions définissant un concept auquel les tarifs renvoient pourrait entraîner une « évolution importante ... des circonstances visées par ces décisions ». Les parties pourraient alors demander à la Commission qu’elle modifie la décision, conformément aux dispositions de l’article 66.52 de la Loi.

iv. Les petits systèmes [Tarif pour la télévision, article 4; tarif pour la radio, article 4]

a. Le moment de l’établissement de la qualité de petit système de retransmission

Le Règlement sur la définition de petit système de retransmission ne fixe pas quand, durant la période d’application des tarifs, il faut déterminer si un retransmetteur constitue un petit système de retransmission, ni la façon dont il faut comptabiliser les locaux (en arrêtant leur nombre à une date donnée ou en établissant une moyenne des locaux desservis pendant une période donnée). Il s’agit là pourtant d’un élément essentiel de tout régime en vertu duquel les dates de paiement des droits pour les petits systèmes ne correspondent pas à celles imposées aux autres.

L’alinéa 70.63(1)(a)(ii) de la Loi confère à la Commission le pouvoir de fixer « les modalités afférentes aux droits »; la Commission considère que cette disposition lui permet de trancher la question. Puisque les droits payables par un petit système sont déterminés sur une base annuelle, il est logique de permettre que la qualité de petit système soit établie pour la même période. Par ailleurs, la Commission est consciente des avantages que retire un retransmetteur de sa qualité de petit système. La souplesse que permet le tarif dans la façon d’établir cette qualité n’a pour ainsi dire pas d’effet sur le montant total des droits à être versés aux sociétés de perception.

Pour ces motifs, la Commission permet à un retransmetteur d’établir sa qualité de petit système pour une année donnée soit à la date du début de ses activités dans l’année, soit en établissant une moyenne pour toute l’année qui précède.

b. Le paiement proportionnel des droits pour les petits systèmes

Les droits annuels que verse le petit système qui commence à retransmettre un signal éloigné après le mois de janvier ne sont pas réduits proportionnellement. La Commission considère qu’une telle mesure aurait indûment compliqué l’administration des tarifs. Qui plus est, le tarif applicable à un petit système pour la retransmission de signaux de télévision représente un rabais pour tout système qui dessert plus de 500 locaux, même s’il ne dessert ces locaux qu’un mois durant l’année.

c. Les « grands » systèmes qui desservent au plus 1 000 locaux

Certains systèmes desservant au plus 1 000 locaux sont néanmoins des grands systèmes et versent donc les droits prévus par le tarif pour la télévision. Le système à antenne collective situé dans la zone de desserte d’un grand système de retransmission par câble en est un exemple; le service de radiodiffusion directe du satellite au foyer et le grand système dont le nombre d’abonnées fléchit sous le seuil de 1 000 abonnés durant l’année en sont deux autres.

v. Les services de radiodiffusion directe du satellite au foyer

Les dispositions du tarif pour la télévision traitant des retransmetteurs qui offrent un service de radiodiffusion directe du satellite au foyer (plus particulièrement, l’article 6) sont fort différentes de celles qui traitent des autres grands retransmetteurs. Ceci est dû au fait que ces retransmetteurs ne sont ni des systèmes de retransmission par câble, ni des systèmes terrestres de retransmission par ondes hertziennes. Au moins deux conséquences découlent de ce qui précède.

Premièrement, le libellé de l’article 3 du Règlement sur la définition de signal local et signal éloigné établit clairement que tous les signaux que ces services retransmettent sont éloignés pour tous les TVRO qu’ils desservent. Par conséquent, il devient inutile d’établir pour ceux-ci la distinction que fait l’article 7 du tarif pour la télévision entre le nombre de locaux servant à déterminer le taux des droits applicable (le nombre total de locaux desservis par le système, qu’ils reçoivent ou non un signal éloigné) et le nombre de locaux à l’égard desquels des droits sont versés (uniquement les locaux qui reçoivent au moins un signal éloigné).

Deuxièmement, le libellé du paragraphe 3(1) du Règlement sur la définition de petit système de retransmission fait en sorte qu’un service de radiodiffusion directe du satellite au foyer ne peut être un petit système. Il est donc inutile d’inclure une disposition précisant qu’un tel retransmetteur verse toujours des droits à titre de grand système.

La façon dont la Commission a choisi de procéder en ce qui concerne le tarif pour la radio rend inutile cette distinction. Les services de radiodiffusion directe du satellite au foyer font partie des « autres » systèmes dont traite l’article 6 de ce tarif.

vi. La façon de déterminer le montant des droits

L’article 7 du tarif pour la télévision établit deux principes importants :

  1. les droits pour la retransmission de signaux éloignés de télévision ne sont versés qu’à l’égard des locaux qui reçoivent au moins un signal éloigné; ces locaux sont situés à l’extérieur de l’aire de transmission d’au moins une des stations qu’ils reçoivent;
  2. le taux applicable à ces locaux est fonction de la taille du système, soit du nombre total de locaux desservis par le système, qu’ils reçoivent ou non un signal éloigné.

Par ailleurs, l’article 9 prévoit que les locaux sont comptabilisés dès qu’ils reçoivent un signal éloigné. Il se peut que le signal qui crée l’obligation pour le retransmetteur de verser des droits ne soit pas le même pour tous les locaux qu’il dessert. [voir aussi l’alinéa 13(1)(g)]

L’article 7 établit aussi que l’obligation de verser les droits dans un mois quelconque est déterminée par la situation qui prévaut à la fin de ce mois.

vii. Les abonnés indirects

L’article 11 du tarif pour la télévision prévoit un rabais pour les chambres situées dans un hôtel et dans certains autres types d’établissements. Il ne faut cependant pas oublier que chacun des locaux est considéré comme une unité complète aux fins d’établir le taux des droits applicables à chaque local du système qui reçoit un signal éloigné.

viii. Le droit des sociétés de perception de recevoir leur quote- part [Tarif pour la télévision, article 12; tarif pour la radio, article 7]

Ces dispositions, de même que l’article 3 de chacun des tarifs, établissent le principe, énoncé auparavant dans la décision, qu’une société de perception reçoit sa quote-part des droits, même si aucune œuvre qu’elle contrôle n’a été retransmise par un signal éloigné durant le mois concerné.

ix. Les exigences de rapport [Tarif pour la télévision, article 13; tarif pour la radio, article 8]

Ces dispositions n’imposent que les exigences de rapport nécessaires à la mise en œuvre des tarifs, tout en assurant que les sociétés de perception obtiennent toute l’information dont elles ont besoin, comme en font foi les dispositions qui suivent :

  • un rapport doit être soumis au moment où des droits doivent être versés. Un petit système fait rapport une fois l’an.

  • l’obligation de rapport ne porte par la suite que sur les changements aux renseignements. Un retransmetteur n’a pas à présenter à nouveau l’information qu’il a déjà fournie.

  • un retransmetteur fournit uniquement l’information nécessaire au calcul des droits qu’il verse. Les exigences de rapport sont donc moins lourdes pour les petits systèmes.

Les paragraphes qui suivent énoncent les motifs pour lesquels la Commission a choisi d’établir certaines exigences de rapport dans la forme prescrite par les tarifs.

En vertu de l’alinéa 13(1)a) du tarif pour la télévision, un retransmetteur n’est tenu de produire une carte délimitant sa zone de desserte autorisée que si une telle carte a été déposée auprès du CRTC. La Commission croit inutile d’imposer la confection d’une telle carte pour la seule application de ce tarif.

L’alinéa 13(1)b) du tarif pour la télévision et l’alinéa 8(1)a) du tarif pour la radio prévoient l’obligation pour un retransmetteur de préciser le nombre de locaux ou de TVROs qu’il dessert, peu importe s’ils reçoivent ou non un signal éloigné. Cette information est requise afin d’établir le taux applicable au retransmetteur.

Les alinéas 13(1)d) et f) du tarif pour la télévision prévoient l’obligation de fournir certains renseignements nécessaires, de l’avis de la Commission, aux sociétés de perception qui entendent fonder la distribution des droits qu’elles perçoivent sur la cote d’écoute de certaines émissions. On pourra noter qu’il n’est pas fait mention de TVRO à l’alinéa d); comme nous l’avons souligné plus tôt dans la présente section, les nombres prévus par les alinéas 13(1)b) et 13(1)d) du tarif pour la télévision sont identiques pour le retransmetteur qui offre un service de radiodiffusion directe du satellite au foyer.

On remarquera que les exigences de rapport contenues au tarif pour la radio ne sont pas les mêmes que celles imposées par le tarif pour la télévision. Certains des renseignements exigés pour l’application du premier ne sont tout simplement pas nécessaires pour l’application du second.

Les propositions des parties comportaient deux exigences de rapport que la Commission a choisi de ne pas imposer et qui méritent de plus amples explications.

La plupart des sociétés de perception auraient voulu qu’un retransmetteur fournisse copie de toute décision du CRTC qui emporterait un changement pertinent aux conditions de la licence du retransmetteur. La Commission n’impose pas cette obligation, pour deux raisons. La Commission croit suffisant d’exiger que le retransmetteur fournisse l’essentiel de toute information requise; de prime abord, on devrait pouvoir se fier à la parole du retransmetteur. Par ailleurs, en toute logique, il est plus facile pour les sociétés de perception de s’abonner aux décisions du CRTC, si elles tiennent à les examiner, que d’exiger des retransmetteurs qu’ils fassent parvenir toutes les décisions qui les touchent à chacune des sociétés de perception.

Les sociétés de perception auraient aussi voulu imposer aux retransmetteurs un formulaire conçu par elles aux fins des présents tarifs. La Commission ne retient pas cette exigence, pour trois raisons. Premièrement, un formulaire établi autrement que dans les présents tarifs ne pourrait imposer au retransmetteur une obligation de rapport plus lourde que celle prévue aux tarifs. Deuxièmement, la Commission croit que les retransmetteurs se feront un plaisir d’utiliser un formulaire bien fait; par contre, elle ne veut pas les forcer à remplir un formulaire qui n’a pas reçu son aval, d’autant plus que les tarifs ne les obligent pas à présenter à nouveau l’information qui est demeurée identique depuis la date du précédent rapport. Enfin, les retransmetteurs ne devraient pas avoir à faire rapport de plus d’une manière.

Par conséquent, et à moins d’arguments contraires, la Commission entend suivre comme politique de ne considérer la possibilité d’imposer l’utilisation d’un formulaire que si celui-ci est inclus dans le tarif pertinent.

x. Les erreurs [Tarif pour la télévision, article 14; tarif pour la radio, article 9]

Ces dispositions régissent la correction des erreurs de toute sorte, y compris celles qui seraient découvertes à l’occasion d’une vérification.

xi. Le remboursement de paiements excédentaires [Tarif pour la télévision, paragraphe 14(2); tarif pour la radio, paragraphe 9(2)]

Les propositions de certaines parties prévoyaient que les paiements excédentaires d’un retransmetteur seraient portés à leur crédit et imputés aux droits futurs. Cette mesure n’aurait pas offert une solution satisfaisante aux parties dans le cas où le paiement excédentaire est disproportionné par rapport aux droits que le retransmetteur aura à payer dans l’avenir. Qui plus est, cette mesure aurait eu pour résultat de traiter différemment les sociétés de perception et les retransmetteurs, puisque les premières peuvent exiger le paiement des montants qui leur sont dus par suite d’une sous- estimation des droits. Pour ces motifs, les tarifs prévoient l’obligation de rembourser au retransmetteur ses paiements excédentaires.

xii. Les vérifications [Tarif pour la télévision, article 15; tarif pour la radio, article 10]

La Commission a cherché à simplifier le processus et à minimiser les inconvénients pour les retransmetteurs, tout en fournissant aux sociétés de perception les outils qui leur permettent de s’assurer qu’elles reçoivent ce qui leur est dû et de faire face aux défauts. Plusieurs des mesures reflètent cette préoccupation. Ainsi, la période durant laquelle un retransmetteur doit conserver les registres pertinents a été ajustée pour correspondre à celle durant laquelle les sociétés sont autorisées à effectuer une vérification. [voir les paragraphes (1) et (2) des articles pertinents]

La Commission est consciente des inconvénients que peut entraîner l’obligation de se soumettre à plusieurs vérifications. C’est pour cette raison que le paragraphe 3 des articles pertinents prévoit que les rapports de vérification sont transmis à toutes les sociétés de perception. Une société de perception n’engagera vraisemblablement pas les coûts d’une vérification si celle effectuée par une autre société lui fournit toute l’information dont elle a besoin. La Commission a décidé de ne pas limiter le nombre de vérifications à une vérification par retransmetteur par année. La Commission s’attend à ce que les sociétés de perception fassent preuve de modération dans l’utilisation de ces dispositions, et n’aient recours à des vérifications multiples que dans le cas des retransmetteurs les plus récalcitrants. À l’occasion des prochaines audiences sur la retransmission, les sociétés de perception devront fournir de l’information quant à l’usage qu’elles auront fait des dispositions portant sur la vérification.

La plupart des sociétés de perception avaient demandé qu’un retransmetteur ayant sous-estimé de plus de 10 pour cent les droits qu’il devait verser à l’égard d’un mois quelconque soit tenu d’assumer les coûts de la vérification. La Commission croit que ce serait là une mesure onéreuse : après tout, une sous- estimation de 10 pour cent pour un mois quelconque peut représenter une sous- estimation de moins de un pour cent pour l’année entière. Par conséquent, le paragraphe 4 des dispositions pertinentes prévoit qu’il faut que le retransmetteur ait sous-estimé les droits pour un mois donné de plus de 20 pour cent pour être tenu de payer la vérification.

xiii. L’intérêt sur les sommes dues [Tarif pour la télévision, article 16; tarif pour la radio, article 11]

Pour plusieurs motifs, la Commission a choisi le taux d’escompte de la Banque du Canada. Il s’agit d’un taux facile à déterminer, proposé par les parties, établi par un tiers désintéressé, qui reflète les fluctuations générales du marché de l’argent et qu’on considère généralement comme un reflet fidèle de l’intérêt que peut recevoir une personne.

Quelques aspects techniques méritent notre attention.

Premièrement, le taux est fixé à un pour cent au-dessus du taux d’escompte, de façon à encourager les parties à régler promptement leurs dettes.

Deuxièmement, le taux utilisé pour un mois donné est celui auquel le taux d’escompte est établi pour la dernière fois dans le mois qui précède. Ceci permet d’établir, dès qu’un montant est dû, les intérêts qui devront être versés si l’échéance n’est pas respectée.

Troisièmement, les tarifs ne font pas mention du fait que les paiements d’intérêt, ou tout autre montant additionnel qui pourrait être dû selon les termes des tarifs, sont réputés être des droits additionnels. Le paragraphe 28.01(2)(d) de la Loi établit clairement l’obligation du retransmetteur de respecter les modalités des tarifs. Selon la Commission, le versement d’intérêts sur des droits en souffrance constitue une « modalité d’un tarif ».

Finalement, les tarifs prévoient le paiement d’intérêts à chaque fois qu’une personne doit de l’argent à une autre en vertu des dispositions des tarifs, à une exception près. Le paiement qui est retourné par suite d’un changement d’adresse ne porte pas intérêt jusqu’à ce que ce changement ait été communiqué. La Commission espère qu’en pratique, le fait de ne pas recevoir un paiement suffira pour que les intéressés s’informent des motifs du retard.

xiv. L’expédition des avis [Tarif pour la télévision, article 18; tarif pour la radio, article 13]

Toutes les propositions des parties prévoyaient qu’un avis serait « réputé » reçu après une certaine période. La Commission considère trop radical le recours à une présomption irréfragable, et choisit plutôt d’utiliser le mot « présumé ». Ceci permettra aux parties de tenir pour acquis qu’une communication a bien été reçue à un certain moment, à moins que le destinataire établisse que tel n’est pas le cas.

xv. Les dispositions transitoires [Tarif pour la télévision, article 19; tarif pour la radio, article 14]

Les dispositions transitoires sont nécessaires du fait que la Loi prévoit qu’ils prennent effet le premier janvier 1990 alors que, dans les faits, ils ne sont homologués que beaucoup plus tard. Ces dispositions reflètent essentiellement deux principes.

Premièrement, l’objet des dispositions est de tenir compte du coût d’opportunité qui résulte du versement tardif de droits. Un montant, représentant de l’intérêt, a été ajouté aux droits; ce montant est établi à partir de la date à laquelle un montant donné aurait été échu si le retransmetteur avait connu les dispositions des tarifs. Cet intérêt est égal au taux d’escompte de la Banque du Canada : les retransmetteurs ne sont pas responsables de l’homologation tardive des tarifs. La Commission croit que cette mesure indemnise les sociétés de perception de façon équitable, sans pénaliser les retransmetteurs.

Deuxièmement, la Commission entendait éviter que chaque retransmetteur ait à établir le montant de l’intérêt qu’il aurait à payer pour la période d’application rétroactive du tarif. Cette exigence aurait imposé un fardeau inutile et aurait nécessairement entraîné des erreurs de calcul. Pour ces motifs, la Commission a établi à l’avance un pourcentage de majoration du montant total dû pour la période d’effet rétroactif. Ce facteur convient à la majorité des retransmetteurs; seuls ceux qui ne sont pas des petits systèmes et qui n’ont pas retransmis un signal éloigné de télévision durant toute cette période auront à calculer le montant de l’intérêt qu’ils doivent. Même ces derniers trouveront reproduits dans le tarif pour la télévision les taux d’intérêt applicables aux mois concernés.

Les pourcentages indiqués ne tiennent pas compte des fluctuations du nombre de locaux desservis par un retransmetteur durant cette période. La Commission croit que les imprécisions qui pourraient en découler sont, dans l’ensemble, de peu d’importance.

Les pourcentages ont été établis comme suit.

Dans tous les cas, les taux utilisés sont ceux énoncés au paragraphe 19(4) du tarif pour la télévision. Le dernier taux d’escompte établi en janvier était de 12,29 pour cent.

CALCUL AUX FINS DU TARIF POUR LA TÉLÉVISION

  1. pour les petits systèmes, on a additionné les taux d’intérêt pertinents pour les mois de janvier à septembre, puis on a divisé cette somme par 12. Le résultat est le suivant :

119,48 ÷ 12 = 9,97

Ce chiffre a été arrondi à dix pour cent.

  1. pour les autres systèmes, il s’agissait d’additionner des pourcentages représentant l’intérêt sur la portion des droits qui aurait été échue avant une date donnée (soit de mars à octobre), puis de diviser cette somme par 12. Le résultat est le suivant :

1/8 du taux d’intérêt de février = 13,25 × 0,125 = 1,656

2/8 du taux d’intérêt de mars = 13,51 × 0,25 = 3,378

3/8 du taux d’intérêt d’avril = 13,80 × 0,375 = 5,175

4/8 du taux d’intérêt de mai = 13,92 × 0,5 = 6,960

5/8 du taux d’intérêt de juin = 13,83 × 0,625 = 8,644

6/8 du taux d’intérêt de juillet = 13,46 × 0,75 = 10,095

7/8 du taux d’intérêt d’août = 12,92 × 0,875 = 11,305

8/8 du taux d’intérêtde septembre = 12,65 × 1,00 = 12,650

59,863 ÷ 12 = 4,99

Ce chiffre a été arrondi à cinq pour cent.

CALCUL AUX FINS DU TARIF POUR LA RADIO

  1. pour les petits systèmes, le calcul est le même qu’aux fins du tarif pour la télévision.
  2. pour les autres systèmes, le taux applicable est de 4 cents par local et ce, peu importe la date à laquelle le retransmetteur retransmet un signal éloigné pour la première fois. Par contre, la date à laquelle le paiement doit être effectué varie en fonction de la date de la première retransmission; les facteurs d’intérêts prévus par l’article 14 du tarif pour la radio varient en conséquence. Ces facteurs ont été établis en additionnant les taux d’intérêts applicables aux mois concernés et en divisant cette somme par 12. Les taux ont été arrondis à la première décimale.

D. LES ASPECTS PARTICULIERS DU TARIF POUR LA RADIO

Seules quelques remarques sont nécessaires en ce qui concerne le tarif pour la radio.

La Commission a envisagé la possibilité de combiner le tarif pour la radio et celui pour la télévision. Elle n’a pas retenu cette façon de procéder, pour deux raisons. Premièrement, il aurait été difficile de consolider toutes les dispositions pertinentes, à cause des différences qui marquent la structure interne des deux tarifs. Deuxièmement, il se peut que le tarif pour la radio se développe de façon fort différente du tarif pour la télévision. Des tarifs distincts n’entraîneront pas cette évolution. Ceci dit, la Commission a tenté de faire en sorte que leurs dispositions se ressemblent le plus possible.

Dans l’entente qu’elles ont déposée auprès de la Commission, les parties proposent que le tarif soit établi à 4 cents par année, et que la responsabilité soit établie en fonction de la qualité du système le premier janvier d’une année donnée. Ceci aurait pu résulter en certaines situations plutôt curieuses. N’étant pas tenu de verser les droits s’il ne retransmet aucun signal éloigné de radio, un retransmetteur aurait pu les éviter en interrompant simplement la retransmission de tout signal éloigné le premier jour d’une année donnée. Le tarif homologué par la Commission évite que ce genre d’incident se produise.

Le secrétaire général,

Signature

Philippe Rabot

VII. ANNEXE – CALCUL DÉTAILLÉ DE LA RÉPARTITION FINALE

A. Cotes d’écoute des émissions pour lesquelles le droit d’auteur n’est pas contesté, tout genre d’émission (tirées de CCC-72).

Viewing Shares / Cotes d’écoute

Collective

Société de perception

Canadian

Signals Signaux canadiens

U.S. Signals

Signaux américains

Total

CCC/SPDAC

6.500

55.475

61.975

CRC/SCR

2.254

10.344

12.582

CRRA/ADRC

0.775

8.935

9.709

CBRRA/ADRRC

3.758

0.040

3.798

BBC

 

3.391

3.391

FWS

0.604

0.003

0.607

Unclaimed/

Non revendiquées

0.018

0.566

0.585

TOTAL

13.909

78.754

92.647

B. Cotes d’écoute des émissions pour lesquelles le droit d’auteur est contesté (dans le même ordre que celui qui paraît dans CCC-72).

Viewing Shares / Cotes d’écoute

Collective Allocation

Société de perception

Program Type

Genre d’émission

Canadian Signals

Signaux canadiens

U.S. Signals

Signaux américains

Total

Final

Répartition finale

CCC-CRC/ SPDAC-SCR

Misc/

Divers

0.537

0.634

1.172

Divided equally

En parts égales

CCC-CRRA/

SPDAC-ADRC

Comedy & drama/

Comédies et dramatiques Others/

Autres

0.094

 

 

 

0.032

2.052

 

 

 

0.516

2.146

 

 

 

0.548

CRRA/ADRC

 

 

 

Divided equally En parts égales

CRC-CRRA/

SCR-ADRC

Misc/

Divers

0.049

0.017

0.066

Divided equally

En parts égales

CCC-BBC/

SPDAC-BBC

Misc/

Divers

 

0.083

0.083

Divided equally

En parts égales

CRC-CBRRA/

SCR-ADRRC

Misc/

Divers

0.028

0.002

0.030

Divided equally

En parts égales

CRRA-FWS/ ADRC-FWS

NFL games on ABC /

Matchs de la NFL sur ABC

 

 

1.027

1.027

CRRA/ADRC

 

CFL & NHL on CBC, SRC/

Matchs de la LCF et de la LNH sur CBC, SRC

0.028*

 

0.028*

CRRA/ADRC

 

All others/

Tous les autres

0.163*

1.960*

2.123*

FWS

CRRA-CBRRA/

ADRC-ADRCC

Sports

 

0.001

0.001

Divided equally

En parts égales

CCC-CRC-CRRA/

SPDAC-SCR- ADRC

Comedy & Drama/

Comédies et dramatiques

0.047

 

0.047

Divided equally

En parts égales

BBC-CRRA/

BBC-ADRC

Misc/

Divers

0.007

0.179

0.186

Divided equally

En parts égales

BBC-CRRA-FWS/

BBC-ADRC-FWS

Other sports/

Autres sports

 

0.010

0.010

Divided equally

En parts égales

TOTAL

 

0.985

6.351

7.337

 

* Revised figures, Board’s notice of correction, January 2, 1991

* Chiffres corrigés, avis de correction de la Commission, le 2 janvier 1991

C. Cotes d’écoute de toutes les émissions (cumul des tableaux A et B).

Viewing Shares / Cotes d’écoute

Collective

Société de perception

Canadian Signals

Signaux canadiens

U.S. Signals

Signaux américains

Total

CCC/SPDAC

6.800

56.091

62.892

CRC/SCR

2.564

10.670

13.234

CRRA/ADRC

0.957*

12.244*

13.201*

CBRRA/ADRRC

3.772

0.041

3.813

BBC

0.003

3.525

3.528

FWS

0.767*

1.966*

2.733*

Unclaimed/

Non revendiquées

0.018

0.566

0.585

MLB

0.608*

3.057*

3.665

TOTAL

15.489*

88.160*

103.651

La part totale de la LBM correspond à la part d’écoute de tous les autres sports des ligues majeures (3,665 = 0,607 + 3,048 + 0,010). Le rapport établi pour les signaux canadiens et américains (c’est-à-dire, 16,6* pour cent et 83,3* pour cent respectivement) est tiré du tableau 4-2, de CRC-45 qui indique le temps d’antenne des matchs de la LBM sur ces signaux.

Le total du tableau C excède 100 pour cent par suite de l’attribution d’une part à la LBM, en plus de celle attribuable aux autres sports. L’ensemble des parts est ramené à 100 pour cent ultérieurement.

* Chiffres corrigés, avis de correction de la Commission, le 2 janvier 1991

D. Cotes d’écoute rajustées en fonction du temps d’antenne des signaux canadiens et américains (tirées de CCC-73).

Viewing Shares / Cotes d’écoute

Collective

Société de perception

Canadian Signals

Signaux canadiens

U.S. Signals

Signaux américains

Total

CCC/SPDAC

11.129

49.842

60.971

CRC/SCR

4.196

9.481

13.677

CRRA/ADRC

1.566*

10.880*

12.446*

CBRRA/ADRRC

6.174

0.036

6.210

BBC

0.006

3.132

3.138

FWS

1.255*

1.747*

3.002*

MLB

0.995*

2.716*

3.711*

TOTAL

25.321*

77.834*

103.155*

La part des cotes d’écoute de chaque société de perception attribuable aux signaux canadiens, selon le tableau C, est pondérée par la part du temps d’antenne que représente l’ensemble des signaux canadiens. Cela donne un multiplicateur de 1,6366 ou 24,377/14,894. Le multiplicateur pour les signaux américains s’obtient de la même façon. Il est de 0,8886, ou 75,623/85,106.

Le total diffère de celui du tableau C par suite de l’élimination de la part attribuable aux émissions non revendiquées, et à cause des facteurs de pondération utilisés.

* Chiffres corrigés, avis de correction de la Commission, le 2 janvier 1991

E. La répartition finale

SPDAC

57,160* (per cent)

SCR

12,822*

ADRC

11,668*

ADRRC

5,821*

BBC

2,942*

FWS

2,814*

LBM

3,479*

CAPAC

1,980

SDE

1,320

Total

100,006*

La SDE et la CAPAC se voient attribuer 3,3 pour cent de l’ensemble des droits, laissant 96,7 pour cent à répartir entre les autres sociétés de perception. Chaque quote-part indiquée au tableau D est recalculée en la multipliant par 96,7/103,155* ou 0,9375*.

Les chiffres indiqués par le tableau E sont reproduits à la page 72 de la décision. (page 63 dans ce recueil)

* Chiffres corrigés, avis de correction de la Commission, le 2 janvier 1991

VIII. DISSIDENCE DU COMMISSAIRE LATRAVERSE

Préambule

Je ne partage pas l’avis de mes collègues à propos des principes directeurs choisis pour établir le montant global des royautés, ni sur leur analyse et leurs conclusions sur la preuve, telles qu’exprimées dans la partie 3B de la décision majoritaire, « Les droits à payer pour la retransmission des signaux de télévision; les grands systèmes : I – La valeur des signaux éloignés ». Également, je suis d’opinion que la réclamation pour la compilation devrait être agréée, en principe, pour une allocation nominale.

La formulation du tarif et des autres parties de la décision fut préparée conjointement par tous les membres de la Commission et j’en suis parfaitement satisfait, à l’exception des montants eux-mêmes, et des remarques que je fais sous le titre de la compilation.

J’ai divisé ma dissidence en cinq parties :

  1. Analyse des principes directeurs de la décision majoritaire

  2. Une analyse différente

  1. Le bénéfice retiré par les retransmetteurs

  1. Analyse du coût moyen de la programmation au Canada et coût hypothétique équivalent pour l’industrie de la télévision par câble.

  2. La théorie du paiement pour des services comparables.

  3. La valeur du marché – Les réclamations de la LBM et de la FWS – Analyse des coûts de programmation des diffuseurs.

  4. Les taux américains.

  1. Le dommage subi par les détenteurs de droits

  1. La théorie dite de « valeur de la programmation potentielle écartée ».

  2. La théorie dite « théorie de l’érosion de la valeur des droits de licence perdus ».

  1. Commentaires sur la partie 3B de la décision majoritaire : « Les droits à payer pour la retransmission des signaux de télévision; les grands systèmes : I – La valeur des signaux éloignés »

  1. Au sujet de l’analyse de la valeur des services comparables.

  2. Au sujet des théories « la valeur de la programmation potentielle écartée » et « la valeur des droits de licence perdus ».

  3. Au sujet de la comparaison avec le régime américain.

  4. Au sujet des conclusions de la Commission.

  1. La réclamation pour compilation du «jour de diffusion»

  2. Des conclusions différentes

A. ANALYSE DES PRINCIPES DIRECTEURS ÉNONCÉS DANS LA DÉCISION MAJORITAIRE

Je suis d’accord avec mes collègues sur trois des principes directeurs retenus pour déterminer le montant global des royautés et leur allocation.

2. le tarif devrait refléter la situation canadienne;

5. le tarif devrait refléter la retransmission des émissions et reconnaître que certaines émissions ont plus de valeur que d’autres; et

6. le tarif devrait être facile à administrer, à appliquer et à comprendre.

J’exprime des réserves sur la formulation des premier et quatrième principes, soit que le tarif doit :

1. être juste et équitable; et

4. être fondé sur une série de statistiques pour une année témoin donnée.

La formulation du premier principe n’est qu’une répétition de la norme légale et n’indique rien de l’interprétation que la Commission en fait.

Ma réserve sur le quatrième principe est fondée sur le fait que je le considère comme trop limitatif et contraignant. D’autre part, je partage leur avis quant à l’utilité d’un tel instrument pour ce premier tarif, particulièrement parce que telle est essentiellement la preuve qui nous fut soumise pour effectuer l’allocation. Je souhaiterais que ce principe soit énoncé d’une façon plus souple pour qu’en préparant les audiences futures, les parties sachent que la Commission demeure ouverte à d’autres suggestions et que ce principe devrait être modulé.

Je ne partage pas du tout leur avis sur le troisième principe énoncé, à l’effet que le tarif devrait « être, de tous les tarifs qui assureraient aux titulaires du droit d’auteur une même rémunération, celui qui perturbe le moins les services offerts aux abonnés du service par câble ». Puisque les retransmetteurs seront les seuls à décider de ce niveau d’équilibre souhaité par mes collègues, le principe tel qu’énoncé m’apparaît établir un préjugé en faveur de « celle qui perturbe le moins les services offerts aux abonnés du service par câble », ce qui m’apparaît contraire à notre démarche. Il est certain que le fait de devoir payer pour ce qui était auparavant gratuit risque de causer une certaine perturbation dans les services de télédistribution offerts aux abonnés parce que les retransmetteurs sont nombreux, divers et différents et opèrent dans des contextes économiques et financiers également divers et différents.

En énonçant ce principe, mes collègues semblent établir qu’une rémunération « juste et équitable » des détenteurs de droit, ne saurait être objective et n’est reliée à la valeur intrinsèque des œuvres retransmises que dans la mesure où le paiement de cette valeur « perturbe le moins » les retransmetteurs.

Je vois mal comment ce qui doit être la conclusion de notre travail, la fixation d’une formule de compensation adéquate des détenteurs de droits par les retransmetteurs, devrait être qualifiée par les bouleversements prévus et prévisibles que subiront les mêmes retransmetteurs. En effet, toute réduction de service sera nécessairement le fait des retransmetteurs, puisqu’ils vendent un service dans un marché dont on nous a démontré qu’il est inélastique.

De même, on pourrait croire qu’en adoptant un tel principe, mes collègues se réservent le droit d’ajuster arbitrairement le montant des royautés pour rencontrer ce niveau même où ils jugent que ce montant serait celui « qui perturbe le moins l’industrie de la télédistribution ».

J’en conclus que mes collègues décident que les paiements aux détenteurs de droits sont des paiements compensatoires pour le dommage subi mais que ces paiements peuvent être moindres que l’avantage retiré, à cause du critère retenu qui devient l’établissement d’une somme qui « perturbe le moins » les retransmetteurs. Utiliser ce principe, c’est s’en remettre à l’une des parties pour exercer un contrôle sur le montant du tarif : ce faisant, on risque d’abandonner trop facilement la recherche d’une mesure objective pour déterminer la formule tarifaire.

Personnellement, je suggérerais, en plus des trois principes retenus, les principes suivants qui ne semblent pas avoir été retenus par mes collègues :

  1. Les détenteurs de droits doivent être rémunérés d’une façon objectivement juste.
  2. Les retransmetteurs doivent payer une compensation qui correspond au bénéfice objectif qu’ils retirent de l’usage des œuvres protégées.
  3. Corollairement, le concept de « juste et équitable » doit s’interpréter comme signifiant « raisonnable », i.e. que les détenteurs de droits dans leur ensemble doivent recevoir la rémunération raisonnable que les retransmetteurs devraient leur payer pour acquitter le coût raisonnable du bénéfice qu’ils en retireront.
  4. Une formule tarifaire juste et équitable doit tenter de refléter la compensation qui serait obtenue par les détenteurs de droits d’auteurs si le tarif était établi au moyen d’une transaction librement négociée (je réfère ici au concept de « juste valeur marchande » suggéré par les sociétés de perceptions).

J’analyse ci-après les propositions des parties pour déterminer dans quelle mesure elles peuvent nous aider à déterminer cette rémunération « juste et équitable ».

B. UNE ANALYSE DIFFÉRENTE

La première tâche que je me suis fixée fut d’examiner si des paramètres de mesure du bénéfice des retransmetteurs et du dommage causé aux détenteurs de droits étaient à notre disposition pour nous aider à circonscrire ce que doit être une rémunération globale qui soit « juste et équitable ».

(i) Le bénéfice retiré par les retransmetteurs

1. Analyse du coût moyen de la programmation au Canada et coût hypothétique équivalent pour l’industrie de la télévision par câble

Il m’importait de tenter de trouver l’ordre de grandeur des coûts moyens de programmation dans l’industrie de la télévision au Canada, pour mesurer le bénéfice retiré par les retransmetteurs.

En effet, je considère que cette démarche est essentielle pour déterminer le bénéfice retiré par les retransmetteurs : que devraient-ils payer, en l’absence d’un régime de licence obligatoire, pour générer la programmation qu’ils retransmettent ? Les coûts moyens engagés par les producteurs d’émissions, donc celles-là même qu’ils retransmettent, me paraissent un excellent étalon de cette valeur, qui est équivalente au bénéfice retiré par les retransmetteurs. Cette mesure est la plus proche qu’il me paraît possible d’obtenir de la « juste valeur marchande » de cette programmation.

L’une des sociétés, SDE-CAPAC, nous a fourni au cours de l’audience la documentation du CRTC sur les coûts de programmation de la télévision privée, de la télévision payante et de l’industrie de la câblodistribution [SDE-CAPAC-TV-8]. Pour compléter les statistiques sur l’industrie du câble, j’ai obtenu de Statistique Canada les informations requises pour les quelques années manquantes dans la documentation fournie. Il est à noter que je n’ai pas tenu compte des données concernant la CRC/SRC : l’eussent-ils été que le pourcentage de coût serait considérablement plus élevé mais aurait biaisé les statistiques.

Ces statistiques portent sur dix ans pour les industries de la télévision privée et du câble et cinq ans pour l’industrie de la télévision payante, qui est beaucoup plus nouvelle. Je reproduis dans le tableau ci-après, ces statistiques.

TABLE A1: PROGRAMMING EXPENSES OF THE PRIVATE TELEVISION INDUSTRY FOR THE YEARS 1979-1988
TABLEAU A1: DÉPENSES DE PROGRAMMATION DE L’INDUSTRIE DE LA TÉLÉVISION PRIVÉE POUR LES ANNÉES 1979-1988

Year

Année

Operating Revenues

$ (millions)

Revenus d’opérations

Program Expenses

$ (millions)

Dépenses de programmation

% of Program Expenses vs Revenues

$ (millions)

Dépenses de programmation/ Revenus en %

1988

1,188.1

612.5

51.5

1987

1,065.9

544.7

51.1

1986

1,008.3

488.5

48.4

1985

960.9

438.3

45.6

1984

899.6

411.1

45.6

1983

833.2

396.4

47.5

1982

745.9

320.1

42.9

1981

652.4

283.2

43.4

1980

562.0

255.2

45.4

1979

472.5

209.1

44.2

1989

*

 

 

Average/Moyenne:

46.6 % – 10 years/ans

48.4 % – 5 years/ans

* Non available/Non disponible

TABLE A2: PROGRAMMING EXPENSES OF THE PAY TELEVISION INDUSTRY FOR THE YEARS 1979-1988
TABLEAU A2: DÉPENSES DE PROGRAMMATION DE L’INDUSTRIE DE LA TÉLÉVISION PAYANTE POUR LES ANNÉES 1979-1988

Year

Année

Operating Revenues

$ (millions)

Revenus d’opérations

Program Expenses

$ (millions)

Dépenses de programmation

% of Program Expenses vs Revenues

$ (millions)

Dépenses de programmation/ Revenus en %

1988

270.0

128.7

47.6

1987

229.7

107.4

46.7

1986

201.8

93.1

46.2

1985

159.5

67.6

42.4

1984

123.8

54.4

43.9

1983

*

 

 

1982

*

 

 

1981

*

 

 

1980

*

 

 

1979

*

 

 

1989

*

 

 

Average/Moyenne:

45.4 % – 5 years/ans

* Non available/Non disponible

TABLE A3: PROGRAMMING EXPENSES OF THE CABLE TELEVISION INDUSTRY FOR THE YEARS 1979-1988
TABLEAU A3: DÉPENSES DE PROGRAMMATION DE L’INDUSTRIE DE LA CÂBLODISTRIBUTION POUR LES ANNÉES 1979-1988

Year

Année

Operating Revenues

$ (millions)

Revenus d’opérations

Program Expenses

$ (millions)

Dépenses de programmation

% of Program Expenses vs Revenues

$ (millions)

Dépenses de programmation/ Revenus en %

1988

989.5

55.9

5.6

1987

870.2

51.6

5.9

1986

767.0

44.3

5.7

1985

672.1

41.6

6.1

1984

595.1

38.2

6.4

1983

529.0

36.3

6.8

1982

472.3

37.7

7.9

1981

405.0

30.5

7.5

1980

352.1

22.1

6.2

1979

313.7

20.4

6.5

1989

1,153.6

54.4

4.7

Average/Moyenne:

6.5 % – 10 years/ans

5.9 % – 5 years/ans

Les seules dépenses de programmation de l’industrie du câble au cours des dix dernières années sont reliées à la production d’émissions de télévision communautaire. Elles représentent en moyenne 6,46 pour cent de leurs revenus d’opérations au cours des dix dernières années, et 5,94 pour cent au cours des cinq dernières années. Elles sont de 4,7 pour cent pour l’année 1989.

Ceci dit, même à partir de ces seules statistiques, on peut déjà apprécier l’importance des coûts de programmation pour les retransmetteurs et les diffuseurs : il en coûte 56 millions de dollars par an aux retransmetteurs pour produire une cédule incomplète, d’intérêt local, et qui ne rencontre pas les critères propres à la programmation des deux autres industries.

Les dépenses de programmation pour l’industrie de la télévision privée sont d’en moyenne 46,56 pour cent de ses revenus pour les dix dernières années et de 48,44 pour cent de ses revenus pour les cinq dernières années. On constate aussi que ces coûts sont à la hausse au cours des cinq dernières années.

Les dépenses de programmation (paiements d’affiliation) représentent 45,36 pour cent des revenus pour l’industrie de la télévision payante, au cours des cinq dernières années et sont également à la hausse.

L’écart entre les statistiques quinquennales de l’industrie de la télévision privée et celles de la télévision payante, 48,44 pour cent et 45,36 pour cent respectivement, est minimum; la moyenne combinée s’établira à 46,9 pour cent.

Si l’on extrapole à partir de ces données quel pourrait être le coût équivalent de programmation pour l’industrie de la télédistribution, i.e. si l’industrie avait dû payer pour la retransmission de programmes, que jusqu’à 1990 ils retransmettaient sans coût, le chiffre aurait été pour 1989 de 541 032 035,60 $, soit 46,9 pour cent des revenus.

Comme 22 pour cent seulement des services et signaux offerts par l’industrie sont des signaux éloignés, l’on en arrive à un coût pour ceux-ci de 119 027 047 $.

Comme 20 pour cent de ces signaux font l’objet de substitution simultanée et de dédoublement, le chiffre net serait donc de 95 221 637 $.

Les dépenses de production déjà encourues par l’industrie du câble pour la production de la programmation communautaire ne sont pas reliées à des signaux éloignés; elles ne réduisent donc en rien le niveau hypothétique que, raisonnablement, l’industrie du câble devrait payer pour rémunérer équitablement les détenteurs de droits pour les signaux éloignés retransmis, sans retirer de bénéfice indus, c’est- à-dire sans payer moins que le bénéfice qu’ils en retirent. Le bénéfice qu’ils ont retiré en 1989 de la retransmission des signaux éloignés semble donc être bel et bien aux environs de 95 221 637 $.

2. La théorie du paiement pour des services comparables

Cette théorie fut proposée par la SCR/ADRRC et la SPDAC et la BBC l’ont commentée. J’explique ci-après la thèse de la SCR/ADRRC puis soumet les commentaires de la BBC et de la SPDAC.

La proposition de la SCR/ADRRC

M. Peter S. Grant explique fort clairement cette théorie :

[TRADUCTION]

« Une façon d’évaluer la valeur des signaux éloignés est de déterminer ce que rapportent aux systèmes de télédistribution les signaux éloignés qu’ils reçoivent présentement à titre gratuit. Inversement, on peut déterminer combien les retransmetteurs auraient à verser pour des services équivalents s’il leur fallait remplacer les signaux éloignés parce qu’on ne leur aurait jamais accordé la permission de les retransmettre.

Si les systèmes de télévision par câble n’avaient pas le droit d’offrir des signaux éloignés de radiodiffusion, la seule façon pour eux d’offrir des services de programmation équivalents à leurs abonnés qui leur permettraient de mainte- nir un haut niveau de pénétration, serait de négocier des contrats avec plusieurs réseaux de programmation par câble afin d’offrir de la programmation de valeur équivalente. Ces réseaux offrent un service uniquement aux abonnés du service de base du câble, et non à l’ensemble de la population.

Les recettes de ces services proviendraient non pas seulement du câble mais également, en partie, de la publicité. C’est le nombre d’abonnés au câble qui déterminerait à quel prix le temps d’antenne pour la publicité serait offert par ce service de programmation.

... il est tout à fait possible de faire une comparaison avec plusieurs services spécialisés canadiens et américains qui tirent des recettes publicitaires.

... les genres particuliers de programmation qui figurent sur ces services coûtent moins cher à produire que la programmation de réseau ou les émissions en souscription transmises par les signaux éloignés de radiodiffusion.

... ces chiffres sont tout de même pertinents pour évaluer la valeur qu’ont les signaux éloignés de radiodiffusion pour les systèmes canadiens de télévision par câble ». [SCR-1 p. 16-17].

Le tableau 1 du rapport de M. Grant est reproduit ci-après : il s’agit de la version complétée telle qu’elle apparaît dans l’argument écrit de SCR : [SCR, argument écrit, p. 7-8].

TABLE 1: WHOLESALE RATES CHARGED TO CANADIAN CABLE SYSTEMS FOR SELECTED CABLE PROGRAM SERVICES
TABLEAU 1: PRIX DE GROS PAYÉS PAR LES SYSTÈMES CANADIENS DE TÉLÉDISTRIBUTION POUR CERTAINS SERVICES DE PROGRAMMATION PAR CÂBLE

 

Programming Genre

Genre de programmation

Monthly Rate per Subscriber on Basic or “Enhanced Basic” Service

Tarif mensuel par abonné – Service de base ou service de base élargi

Canadian Services/Services canadiens

 

($ Can.)

CBC Newsworld

News/ Actualités

0.275 à 0.425

YTV Canada

Youth/Jeunes

0.31

The Sports Network (TSN)

Sports

0.88

MuchMusic

Music Video/

Vidéos musicaux

0.08

Weather Now

Weather/Météo

0.22

Canal Famille

Youth/General

Jeunes/Général

0.55

Réseau des Sports

Sports

1.05

MusiquePlus

Music Video/

Vidéos musicaux

0.10

Vision TV

Devotional/Religieux

0.00

TV-5*

European/French Européen/Français

0.28

U.S. Services/Services américains

 

 

Arts & Entertainment (A&E)

Arts/General Arts/Général

0.25

Nashville Network

Country Music/

Musique country

0.19

Cable News Network (CNN)

News/Actualités

0.16

À NOTER :

Les tarifs pour les services canadiens sont ceux établis par les décisions du CRTC 87-895 à 87-906, 30 novembre 1987, en vigueur pour la période du 1er septembre 1989 au 31 août 1990, et révisés par les décisions du CRTC 88-776 (TSN) et 88-777 (MuchMusic). Les tarifs des services américains reflètent ce que payent les systèmes canadiens de télévision par câble au 1er octobre 1989, pour la distribution de ces services au service de base ou au service de base « élargi », à l’option négative. Les tarifs sont généralement plus élevés lorsque ces services sont offerts en bloc avec des services de télé payante.

* Le tableau ci-haut comprend le tarif pour TV- 5 à la liste suite à une question du vice- président pendant le témoignage de M. Grant.

Et il conclut :

[TRADUCTION]

« Tenant compte de l’ensemble de ces circonstances, je considère que le tarif approprié qui représenterait ‘l’enrichissement sans cause’ des systèmes de télédistribution au Canada en raison de la retransmission des signaux éloignés de radiodiffusion est d’au moins 30 ¢ par mois par abonné pour chaque VSE. » [SCR-1, p. 19].

Dans son argument écrit, le procureur de SCR souligne que :

« ... [TRADUCTION] les services qui ressemblent le plus aux signaux éloignés sont YTV et A&E. Cependant, la SCR soumet aussi que la preuve démontre clairement que, pour les télédistributeurs, YTV et A&E ont beaucoup moins de valeur que les signaux éloignés. YTV, A&E et même les services ayant des tarifs de gros plus élevés, tel que Canal Famille, n’ont pas l’habitude de présenter des premières diffusions d’émissions dramatiques, mais ont tendance à présenter plutôt d’anciennes émissions en souscription... Mme Whittaker, le témoin de la CANCOM, a confirmé qu’il en est ainsi.

Par conséquent, la SCR soumet qu’on devrait considérer comme un minimum les tarifs de gros pour des services tels que A&E et YTV. Si les droits pour les signaux éloignés étaient établis en deçà de ce minimum (en moyenne, par signal), il y aurait clairement enrichissement sans cause des retransmetteurs aux dépens des titulaires de droits d’auteur. Il est clair que les retransmetteurs obtiendraient des services plus valables à un taux moindre que celui qu’ils paient volontiers pour des services de moindre valeur.

À cet égard, un élément pertinent à noter est le fait que les télédistributeurs ne sont tenus d’offrir aucun des services de programmation décrits au tableau 1. De plus, alors que les taux pour les services spécialisés canadiens indiqués au tableau 1 sont réglementés par le CRTC, ceux des services américains ne le sont pas. Comme l’a reconnu M. Michael Hind- Smith, de l’ACTC, les taux des services spécialisés américains, tel que A&E, font l’objet d’une libre négociation entre télédistributeurs canadiens et fournisseurs de services, sans que le CRTC n’intervienne ... Évidemment, les niveaux auxquels sont établis les tarifs de gros pour les services n’ont pas empêché les télédistributeurs d’offrir ces services et de les revendre à profit. » [SCR, argument écrit, p. 6 (L’italique est de moi)].

M. Grant assimile les « services de base élargis » et les services facultatifs offerts par les retransmetteurs sur le service de base par l’intermédiaire de « l’option négative ». Il retient A&E comme service étalon pour plusieurs raisons : il s’agit de l’un des services facultatifs américains jouissant d’une pénétration plus élevée, 1.5 millions d’abonnés; sa programmation n’est pas essentiellement spécialisée, comme Cable News Network et The Nashville Network, mais plus diversifiée; enfin, A&E est partiellement financé par des revenus de publicité.

Par ailleurs, la preuve révèle ce qui suit :

1. Que A&E est vendu à 65 ¢, selon son témoignage, comme service purement facultatif, et à 25 ¢ lorsqu’offert sur la base de l’option négative. [Transcription, vol. 14, p. 2643].

[TRADUCTION] « Ce taux de 25 ¢ a été négocié spécifiquement justement pour la raison que vous avez indiquée, c’est-à- dire, que les systèmes de câble qui l’offrent comme partie du service de base élargi ont accès à presque tous les foyers branchés au câble, soit plus de 80 pour cent des foyers branchés au câble. C’est pour cela que le taux a été rajusté à la baisse ». [Transcription, p. 2643].

«Il est fondé sur une négociation pour l’ensemble de l’industrie du câble, spécialement pour la distribution de ces services comme faisant partie du service de base élargi.» [Transcription, p. 2639].

« Il est maintenant reçu par 27 pour cent des 6,8 millions d’abonnés au câble au Canada. Quatre-vingt pour cent des abonnés choisissent de payer pour les services en clair ». [Transcription, p. 2645].

Il explique qu’ainsi, une pénétration de 80 pour cent est obtenue dans les marchés où A&E est ainsi offert, tout comme les autres services mentionnés au tableau 1. [Transcription, p. 1867].

Il qualifie d’ailleurs le marché de A&E de [TRADUCTION] « créneau particulier » qui [TRADUCTION] « a sa propre valeur ». [Transcription, p. 2642].

Donc A&E est un service qui reste spécialisé sans être toutefois limité à un seul centre d’intérêt, offrant un type de programmation générale particulier (« un créneau particulier ») distribué volontairement par les câblodistributeurs à un prix de 25 ¢ par mois par abonné lorsque distribué en vertu de «l’option négative du service de base», mais qui est retransmis sur une base facultative au taux de 65 ¢ par mois. Les taux furent négociés nationalement par l’industrie du câble.

J’ai pu constater qu’un pourcentage très substantiel, mais non établi par la preuve, de la programmation de A&E fait l’objet de plusieurs passages à l’intérieur d’un même mois et qu’un autre pourcentage de sa programmation, également non établi par la preuve, ne passe pas au Canada parce que les droits canadiens de diffusion n’auraient pu être obtenus par A&E. En outre, A&E offre une programmation en souscription, sans service de nouvelles ni de sports.

Ce service n’intéressait, à la date des audiences, que 111 des 1 469 câblodistributeurs au Canada. [Transcription, p. 2644].

2. Que les taux des services spécialisés canadiens sont fixés par le CRTC; certains d’entre eux sont distribués sur le service de base, dont tous ceux présentés au tableau 1, et les autres demeurent purement facultatifs. Les services spécialisés faisant partie du service de base demeurent facultatifs pour le retransmetteur, qui a le choix de les retransmettre, mais une fois que celui-ci a décidé de les retransmettre, ce service devient partie du service de base pour l’abonné.

Une étude de la politique du CRTC à ce sujet, et du compte-rendu des décisions du CRTC sur ces services [Un plus grand choix d’émissions canadiennes, CRTC, novembre 1987 (ci-après « choix »)] permettent d’établir que ces tarifs furent plus approuvés qu’imposés. En effet, il s’agit pour la plupart des tarifs proposés par les requérants, qui voulaient être incorporés au service de base pour être assurés d’un meilleur accès aux câblodistributeurs et aux recettes d’abonnement beaucoup plus grandes en découlant, auxquelles recettes s’ajoutent, pour certains autres services, une plus grande assiette de revenus publicitaires.

A&E est l’un des vingt-quatre services spécialisés non-canadiens « dont la distribution par un retransmetteur est autorisée comme services facultatifs conformément au Règlement de 1986 sur la télédistribution ou à une condition de sa licence ». [Choix, p. 83-84, et la liste de ces services, Annexe 2]. Le CRTC, dans son exposé de politique, affirme également : « Le CRTC maintient la position qu’il a exposée... qu’il ne serait pas dans l’intérêt du système de la radiodiffusion canadienne d’autoriser, à l’heure actuelle, la distribution de services de programmation non canadiens de télévision payante ou d’émissions spécialisées qui, de l’avis du Conseil, peuvent être considérés comme livrant en totalité ou en partie concurrence à des services canadiens de télévision payante ou d’émissions spécialisées... De plus, si le Conseil devait, dans l’avenir, autoriser un service canadien ayant une formule susceptible de concurrencer un service non canadien autorisé d’émissions spécialisées, l’autorisation de télédistribuer le service non canadien pourrait être retirée ». [Choix, p. 85]. Se référant à la liste des services non canadiens par satellite admissibles en vertu de la partie III, le CRTC spécifia que cette liste «fera l’objet d’un examen périodique en fonction des critères établis ci-dessus». [Choix, p. 86].

Ces commentaires du CRTC, permettent de mieux comprendre la valeur comme signal de A&E aux yeux du CRTC. Il s’agit d’un service marginal dont le droit de distribution pourrait fort bien être révoqué, le cas échéant, et qui ne saurait être comparé du point de vue de la politique de la télécommunication canadienne aux services faisant partie du service de base.

Mes collègues qualifient les taux des services spécialisés canadiens de réglementés : dans le cadre décrit, je crois qu’il serait plus juste de les qualifier de contrôlés car ils reflètent en fait l’expression du jugement des opérateurs de ces services sur le prix qu’ils croient pouvoir obtenir sur le marché canadien tout en rencontrant leurs objectifs de distribution et d’assiette publicitaire.

La différence, sous cette perspective, entre ces taux contrôlés et le taux de A&E négocié sur une base nationale avec les câblodistributeurs, réside dans le fait qu’ils doivent être, par ailleurs, approuvés par le CRTC.

On peut comprendre dès lors que, dans son analyse, M. Grant assimile parfois les uns aux autres.

3. Qu’un service spécialisé n’est pas un « service » au sens du contenu d’un signal éloigné typique.

La politique du CRTC sur les services spécialisés à laquelle je me référais précédemment permet de conclure que les signaux auxquels les parties se réfèrent sont fort différents des signaux éloignés usuels; par leur caractère même de services spécialisés, « destinés à des auditoires spécialisés ». Par ailleurs, je cite :

« (Le Conseil) a donc élaboré un cadre de réglementation conçu dans le but d’assurer que les majorations tarifaires éventuelles relevant de l’implantation de nouveaux services au service de base soient inférieures à ce que les abonnés sont disposés à payer pour de nouveaux choix d’émissions attrayantes, d’après ce qu’ont révélé les études ». [Choix, p. 48 (L’italique est de moi)].

« En fait, de l’avis du Conseil, les répercussions qu’auront les services spécialisés autorisés aujourd’hui en termes de fragmentation de l’auditoire et des recettes publicitaires équivaudront à l’ajout d’un nouveau service dans le marché anglophone et d’un nouveau service dans le marché francophone ». [Choix, p. 63].

4. Que l’audience rejointe par le service A&E, dans les endroits mêmes où il est distribué sur le service de base élargi ne peut se comparer d’aucune manière avec l’audience atteinte par la grande majorité des signaux éloignés. J’ai préparé ce tableau qui compare les cotes d’écoute pertinentes, à partir de statistiques BBM pour l’automne 1988 : [SPDAC-12]

TABLE B: BBM RATINGS FOR SELECTED SIGNALS IN SELECTED CITIES
TABLEAU B: COTES D’ÉCOUTE BBM DE CERTAINS SIGNAUX POUR DES VILLES CHOISIES

City / Ville

%

A&E

%

ABC

%

NBC

%

CBS

%

PBS

Vancouver

0.1

4.6

4.7

3.6

3.9

Edmonton

0.3

7.6

8.3

6.9

3.0

Ottawa

0.3

5.3

7.5

4.9

3.4

Toronto

0.3

3.7

N/A

N/A

N/A

Halifax

0.2

5.7

14.0

2.8

2.8

À NOTER :

Aucune statistique n’apparaît pour Montréal et Québec, parce qu’A&E n’y est pas distribué.

À Toronto, seul le signal ABC est éloigné pour tous les systèmes. C’est donc la seule statistique que j’ai cru utile pour fins de comparaison.

Je crois que ces statistiques démontrent le bien- fondé des commentaires du CRTC sur le rôle des services complémentaires spécialisés et leur importance relative vis-à-vis les services de grande écoute.

Les commentaires de la BBC

Commentant la présentation de M. Grant à ce sujet, dans son argument, Me Hynna, le procureur de la BBC, écrit : [BBC, argument écrit, p. 4 à 10 (L’italique est de moi)].

[TRADUCTION] « La seule preuve détaillée pour permettre d’établir la valeur de l’assiette des droits est celle présentée par la SCR, par le biais de son témoin, M. Grant...

En se servant des prix de gros payés par les systèmes de câble pour quatre services hors-radiodiffusion, M. Grant a conclu que la plupart de ces services sont comparables, mais inférieurs aux signaux retransmis (YTV, TSN, Canal Famille et A&E) et M. Grant a établi une valeur minimale de 30 ¢ par mois par abonné au câble pour chaque valeur de signal éloigné (VSE)...

Le chiffre de 30 ¢ par mois par abonné au câble fut établi en suivant une approche conservatrice et représente un montant minimum de droits. Lors du contre- interrogatoire, il a reconnu que le chiffre de 30 ¢ représente un minimum, les services comparables dont il s’est servi établissant que le taux se situerait entre 30 ¢ et 37 ¢ par abonné au câble. En se servant du plus élevé de ces chiffres, et tenant compte de la moyenne révisée de 2,8 VSE, le montant total des droits se chiffrerait à 82 millions de dollars.

Nous soumettons que l’analyse des services comparables dont s’est servi M. Grant fait ressortir que les droits devraient être beaucoup plus élevés que 30 ¢ par abonné, résultant ainsi en un montant total beaucoup plus élevé, et ce pour les raisons suivantes :

  1. pour le télédistributeur, la considération principale est d’offrir un grand choix et une programmation variée (Panel de l’industrie du câble, Tr., p. 7697 à 7699). Aucun des services hors- programmation qu’a examinés M. Grant n’offre une programmation équivalente à celle des signaux retransmis (Grant, Tr., pp. 1862- 1864). M. Grant considère A&E et YTV comme étant les services une offrant programmation variée qui se compare le plus à celle des signaux retransmis. Ces services manquent tous deux de diversité et passent habituellement des émissions qui ne sont pas en première diffusion. Ayant reconnu que ni l’un ni l’autre n’offre un service équivalent, il a néanmoins décidé d’un taux de 30 ¢ par abonné pour les signaux retransmis, bien que ce chiffre soit moindre que le taux de 31 ¢ pour YTV, qui fut l’un des services examinés. Le taux moyen pour les quatre services dont l’ensemble de la programmation, selon M. Grant, est le plus comparable, est de 50 ¢ (Tr., p. 2404). Nous soumettons que les considérations de M. Grant exigent logiquement un taux pour les signaux éloignés qui soit plus élevé que 31 ¢ et qui se rapproche davantage de la moyenne de 50 ¢. A&E a beaucoup moins de valeur que les signaux de télévision commerciale qui sont retransmis et les gens seraient disposés à payer un prix beaucoup plus élevé pour les signaux de CBS ou de CTV que pour A&E (Liebowitz, Tr., pp. 6717-8). Il faudrait qu’un abonné reçoive, et paye pour plus d’un service hors- radiodiffusion pour avoir le même choix et la même variété de programmation que ce qui est disponible sur un signal retransmis.

  2. Si on examine les tarifs de gros pour les divers services hors- programmation, les chiffres utilisés sont des tarifs de 1988 et 1989, ce qui ne reflète pas les augmentations de taux de gros pendant 1990 et 1991, soit les années pour lesquelles on cherche à établir la valeur des droits de retransmission (Grant, Tr., p. 2686-7).

  3. Dans la mesure où on reconnaît que la programmation sportive sur les signaux éloignés a une valeur importante, il y aurait augmentation concomitante du taux par abonné puisque TSN a le plus haut taux, soit 88 ¢ par abonné. Puisque le minimum de 30 ¢ par abonné qu’a choisi M. Grant se rapproche davantage de ceux des services hors- sports que sont A&E et YTV, le taux de 30 ¢ tend à ignorer tout élément de sports dans l’évaluation d’un signal éloigné.

Nous soumettons que le taux de 30 ¢ par abonné par VSE adopté par M. Grant sous- estime la valeur des signaux éloignés comparés aux services semblables qu’il a examinés. L’approche des services comparables suivie par M. Grant démontre que le taux devrait être établi à au moins 40 ¢ par abonné au câble et ainsi, le montant total des droits (si on exclut la musique) devrait être d’environ 80 millions de dollars (40 ¢ × 2.8 VSE × 12 millions × 6,6 millions d’abonnés au câble).

Ainsi, nous proposons que le montant total des droits que les grands systèmes auraient à verser à l’ensemble des sociétés de perception, sauf celles pour la musique, soit de 89 millions de dollars.

Les droits ainsi établis représenteraient moins de 10 pour cent de l’ensemble des recettes tirées des abonnements au service de base. Puisque les droits représentent le seul coût de programmation imputé aux télédistributeurs pour les signaux retransmis, ce coût est peu élevé quand on considère que les coûts des services hors-programmation représentent pour l’industrie dans son ensemble, 60 pour cent des recettes générées par ces services. (Voir BBC- 11, tableaux 2 à 6 de Statistique Canada, années 1984 à 1988). Ce coût est également peu élevé, comparé aux coûts du canal communautaire des systèmes de télédistribution, qui correspondent à environ 5 pour cent des recettes de l’industrie ».

Les commentaires de la SPDAC

Tout comme M. Grant, les procureurs de la SPDAC font les commentaires suivants dans leur exposé écrit : [SPDAC, argument écrit, p. 30-31 (L’italique est de moi)]

[TRADUCTION] « Nous prétendons qu’il est utile d’examiner ce que les télédistributeurs ont à payer pour les services spécialisés, et notamment pour les services américains qui ne sont pas réglementés par le CRTC, afin d’établir la juste valeur marchande des signaux éloignés pour les télédistributeurs. Nous prétendons que le service spécialisé américain qui ressemble le plus aux signaux éloignés est le Arts and Entertainment Network (A&E), pour lequel les télédistributeurs doivent verser mensuellement 25 ¢ par abonné s’ils l’offrent sur le service de base élargi, et ayant une vaste programmation d’intérêt général... Cependant ... il est clair que les cotes d’écoute de A&E au Canada ne sont pas aussi élevées que celles des signaux commerciaux américains. Nous prétendons que cela indique que A&E a moins de valeur pour les télédistributeurs que n’importe lequel des signaux commerciaux américains malgré le fait que les télédistributeurs versent mensuellement 25 ¢ par abonné afin de pouvoir offrir ce signal ... cela tend à indiquer qu’il serait justifié d’établir les droits pour les signaux commerciaux américains à un taux beaucoup plus élevé que 25 ¢ par abonné ».

J’ai beaucoup de difficulté à saisir la comparabilité du service offert par A&E avec la programmation diffusée par les grands réseaux canadiens et américains, qui offrent, à coûts énormes, une programmation sans cesse renouvelée, des services de nouvelles permanents, et des diffusions sportives qu’ils achètent à prix d’or.

Je préfère, mais à peine, comme étalon le taux de YTV, de 31 ¢. En effet, il s’agit d’un service également spécialisé, pour les jeunes. Il est offert sur le service de base et jouirait pour cette raison d’une pénétration de marché équivalente, les mêmes données s’appliquant d’ailleurs aux autres services spécialisés canadiens mentionnés au tableau de M. Grant.

De plus, je dois souligner que je suis d’accord avec l’analyse de Me Hynna, à l’effet que les services spécialisés, selon la description même du CRTC, « destinés à des auditoires spécialisés » n’offrent ni le choix, ni la variété de programmation qu’offrent les signaux éloignés du service de base. Son observation à l’effet que [TRADUCTION] « pour avoir droit au même choix et à la même qualité de programmation que ce qu’offrent les signaux retransmis, un abonné serait obligé de s’abonner à plusieurs services hors-programmation » rejoint celle du CRTC, vu d’un autre angle, à l’effet que « de l’avis du Conseil, les répercussions qu’auront les services spécialisés autorisés aujourd’hui en termes de fragmentation de l’auditoire et de recettes publicitaires équivaudront à l’ajout d’un nouveau service dans le marché anglophone et d’un nouveau service dans le marché francophone ». [Choix, p. 63]

Je considère donc que le choix à titre d’équivalent de l’un ou l’autre des prix de gros aux câblodistributeurs pour la diffusion des services spécialisés autorisés par le CRTC n’offre pas une comparaison valable, ni même représentative. Elle établit au mieux un taux minimum.

Malgré mes réticences, je note que l’utilisation des taux ainsi proposés, compte tenu d’une déduction de 20 pour cent pour substitution simultanée et dédoublement, donnerait les résultats suivants, sans tenir compte des escomptes prévus pour les systèmes de 0 à 6 000 abonnés :

28 798 431 × 12 × 0,25 (A&E)

= 86 395 293 $ × 0,80

= 69 116 234 $

28 798 431 × 12 × 0,31 (YTV)

= 138 232 468 $ × 0,80

= 85 704 130 $

28 798 431 × 12 × 0,40 (BBC)

= 138 232 468 $ × 0,80

= 110 585 975 $

3. La valeur au marché – Les réclamations de la LBM et de la FWS et une analyse de certains coûts de programmation des diffuseurs

a) La position de la LBM

La preuve de la LBM peut se résumer ainsi :

  1. Se fondant sur le contrat qui la lie au service américain ESPN, comme marché analogue, la LBM en vient à une valeur au marché de 33 ¢ par mois par abonné, pour les six mois de l’année pendant lesquels des parties de baseball sont retransmises. Cette somme ne correspond en rien au coût de l’ensemble du service ESPN mais aux seules retransmissions de parties de baseball.
  2. La LBM réduit ensuite ce montant à 15 ¢, sans doute pour tenir compte du nombre moindre de parties retransmises.
  3. Son principal témoin, M. Bryan Burns, a clairement expliqué à quel point les contraintes d’une licence obligatoire l’empêchent de retirer du marché canadien tout le bénéfice qu’il pourrait en retirer en l’absence d’un tel régime. Il ressort de son témoignage que la demande et les prix payés augmentent avec la liberté de négocier avec le plus offrant.
  4. Ce tarif générerait 7,3 millions de dollars pour cette seule société; pourtant, le temps de programmation des retransmissions de ses parties ne représente que 0,77 pour cent du temps de programmation de l’univers canadien, net de substitution simultanée et de dédoublement. [SCR-45, tableau 4-2, p. 54; Transcription, p. 5961].

b) La position de la FWS

De même, on peut résumer ainsi la preuve de la FWS :

  1. La FWS soumet que certains types de programmation sont plus valorisés que d’autres, indépendamment du temps de diffusion qu’ils occupent.

La preuve a établi les sommes annuelles inouïes payées par les divers médias, pour obtenir le droit de diffusion et de retransmission d’émissions sportives :

  • Pour la NFL, 925 millions de dollars pour 1990, une augmentation de 425 millions de dollars par rapport à l’année 1989. [FWS-48].
  • Pour la NBA, 150 millions de dollars de NBC et 68 millions de dollars de Turner Network Television pour 1990, soit 19 ¢ par mois par abonné pour les sept mois de la saison de basketball. [FWS-46].
  • Pour la LNH, son contrat avec Sports Channel America représente 22 ¢ par mois par abonné; par ailleurs, la diffusion hors réseaux génère 83 ¢ par mois par abonné à New York et 42 ¢ par mois par abonné à Buffalo, les deux marchés types retenus. [FWS-45].
  1. À cette preuve directe, s’ajoutent deux enquêtes préparées par le professeur Roger M. Heeler, qui tendent à établir la valeur relative de la programmation sportive par rapport aux autres types de programmation.

L’enquête auprès des retransmetteurs alloue 20,3 pour cent de la valeur de l’ensemble de la programmation à la catégorie « Sport professionnel et amateur en direct », et l’enquête auprès des abonnés, 17,3 pour cent à cette programmation.

Ces enquêtes furent fort contestées durant les audiences par les procureurs des autres parties. Nonobstant ces contestations, les résultats m’apparaissent éclairants pour démontrer la thèse de la FWS, l’importance du sport dans l’industrie de la télédiffusion et la cause fondamentale de la valeur objective très élevée de certains types de programmation, le goût du public.

La FWS réclame 26,4 pour cent du montant global des droits établis par la Commission comme compensation pour la retransmission des événements sportifs qu’elle chapeaute, ou 30.5 ¢ par mois par abonné.

c) Analyse de certains coûts de programmation des diffuseurs

Au cours des audiences, une preuve sommaire fut présentée par les diffuseurs, à la demande de la Commission, pour tenter d’établir la valeur relative des divers types de programmation, en prenant comme base leurs coûts.1

À partir de ces données, j’ai préparé le tableau suivant pour refléter les coûts considérables engagés par les diffuseurs dans la programmation en direct :

TABLE C: RATIOS OF NEWS AND SPORTS PROGRAMMING COSTS VERSUS TOTAL PROGRAMMING COSTS
TABLEAU C: DÉPENSES DE PROGRAMMATION DES NOUVELLES ET DES SPORTS, EN RAPPORT AVEC L’ENSEMBLE DES COÛTS DE PROGRAMMATION

 

CBRRA

ADRRC

BBC

BBC

CBC

SRC

American Commercial Networks

Réseaux commerciaux américains

PBS

PBS

News/Nouvelles

29.8%

38.3%

24.3%

14.9%

37.7%

Sports

13.8%

7.4%

20.1%

32.9%

0.7%

 

_____

_____

_____

_____

_____

*

43.6%

45.7%

44.4%

47.8%

38.4%

* Percentage of total programming costs. Pourcentage des coûts totaux de programmation.

De ces courtes analyses, on peut déduire que :

  • La valeur au marché libre de certains types de programmation, indépendamment de la quantité, peut atteindre un niveau très élevé, que l’on ne saurait ignorer lorsqu’il s’agit d’établir un barème de l’indemnisation des détenteurs de droits par les retransmetteurs.
  • Le concept de « juste valeur marchande » suggéré par tous les requérants comme base même d’une indemnisation juste et équitable trouve dans les preuves soumises par la LBM et la FWS son expression la plus directe : les indemnisations aux détenteurs de droits sont très élevées pour ces catégories de programmation les plus en demande, et ne cessent d’augmenter d’année en année.
  • Les coûts de la diffusion en direct sont considérables et ne sauraient être ignorés.

4. Les taux américains

L’analyse du contexte américain peut nous éclairer sur l’estimation des paramètres qui pourraient s’appliquer au Canada.

a) Les taux américains furent déterminés en grande partie par le Congrès américain en 1976

Des témoignages de Me Arthur Scheiner pour SPDAC et de M. W.R. Heppler pour CCTA, il ressort que :

[TRADUCTION] « Sous le régime de licence obligatoire établi par le Copyright Act, les droits d’auteur étaient très peu élevés. On s’est fondé, en grande partie, sur ce que l’industrie prétendait être disposée à, et en mesure de payer; on s’est ainsi trouvé à réduire considérablement le montant des droits que prévoyaient des projets de loi antérieurs. ... Le Congrès a reconnu qu’il s’agissait de droits assez modestes.

On constate à quel point les droits à verser sont ‘modestes’ – représentant environ un pour cent de l’ensemble des recettes brutes de l’industrie du câble – quand on les compare à ce que les radiodiffuseurs américains payent annuellement pour la programmation, qu’on évalue à 30 pour cent des recettes brutes ». [SPDAC-19, p. 9 et 10].

Comme l’indiquent d’ailleurs les procureurs de la SPDAC dans leur mémoire :

[TRADUCTION] « Le taux des droits à verser aux États-Unis en 1976 ... avait pour objet de subventionner l’industrie du câble de ce pays qui en était alors à ses débuts, ... Par conséquent, les droits exigés sous le régime américain sont de beaucoup inférieurs à la juste valeur marchande. Nous prétendons qu’une telle subvention n’est ni justifiée, ni appropriée, pour le Canada, puisque l’industrie du câble ici a atteint un stade de développement assez avancé, qu’il s’agit d’une industrie mûre et rentable et que, jusqu’au 1er janvier 1990, les titulaires de droits d’auteur subventionnaient le développement de l’industrie du câble au Canada, cette dernière n’ayant pas à verser de droits pour la retransmission ». [SPDAC, argument écrit, p. 36].

Une adoption stricte du taux américain au contexte canadien donnerait le résultat suivant :

U.S. 43 ¢ (U.S. 1 $ = Can. 87 ¢) = Can. 49,45 ¢ pour 3,5 signaux aux É.U.

Soit, pour la moyenne de 6,04 signaux retransmis par les câblodistributeurs au Canada, 85,33 ¢.

En complémentant ce chiffre pour tenir compte de l’escompte statutaire de 75 pour cent s’appliquant aux États-Unis aux signaux des réseaux ABC, CBS, NBC et PBS, escompte non prévu par la loi canadienne, et prenant en compte que les signaux de ces quatre réseaux représentent 69 pour cent des abonnés aux signaux éloignés au Canada, on en arrive à un coût équivalent ajusté par mois par abonné de 2,60 $ Can.

b) Le taux fixé par le Copyright Royalty Tribunal américain (CRT)

Le taux américain subséquent déterminé par le CRT en 1980 pour s’appliquer aux signaux éloignés rendus disponibles aux retransmetteurs après 1976 fut établi à 3,75 pour cent des revenus d’opérations d’un retransmetteur, par signal éloigné ainsi retransmis.

Il m’apparaît utile de souligner les commentaires suivants, extraits de la décision du CRT :

[TRADUCTION] « Le tribunal a conclu qu’on ne peut considérer que les taux que la loi établit actuellement reflètent ce qui pourrait être négocié sur le marché libre si la licence obligatoire n’existait pas. Les taux qui ont été établis sont le fruit d’un compromis législatif. Ils sont arbitraires et leur but était d’obliger les télédistributeurs à ne verser qu’un montant minimum ». [Cité par Me A. Scheiner, Transcription, p. 916 (L’italique est de moi)].

« De l’avis du tribunal, si les télédistributeurs ont tant insisté pour conserver la licence obligatoire, c’est sans doute parce que cela leur coûte moins cher que s’ils avaient à négocier l’achat des droits sur le marché libre. Le tribunal est également d’avis que le fait de ne pas avoir à négocier séparément pour chaque émission qu’ils passent représente un avantage considérable ». [Cité par Me A. Scheiner, Transcription, p. 918].

Il n’y a « aucune considération d’ordre public qui justifie qu’on établisse les droits à un niveau moindre de ce qu’il est raisonnable de croire être le prix que les titulaires des droits d’auteur pourraient négocier sur le marché ». [SPDAC-19, p. 18 (L’italique est de moi)].

En utilisant ce taux au Canada, où la moyenne de signaux éloignés reçus est de 4,54, on en arriverait au montant suivant :

  • basé sur les revenus de 1988 : 989 508 932 $ × 3,75 × 4,54

= 168 463 895 $

  • basé sur les revenus de 1989 : 1 092 515 991 $ × 3,75 × 4,54

= 186 000 847 $.

On peut conclure à ce sujet :

  • Que l’application, sur une base équivalente, des taux actuels américains, corrigés pour éliminer l’escompte statutaire prévu par le Congrès américain et inexistant dans la loi canadienne, donnerait un montant global de royautés beaucoup plus élevé que celui que réclament les sociétés de gestion.
  • Que le taux non statutaire, décidé par le Tribunal américain équivalent à notre Commission, tenant compte de la juste valeur marchande pour évaluer le bénéfice qu’en retire les retransmetteurs, est de 3,75 pour cent des revenus d’opérations des câblodistributeurs, par signal. Encore une fois, cet étalon de mesure générerait un montant global de royautés beaucoup plus élevé que celui réclamé par les sociétés.
  • Que la Commission doit tenir compte du contexte national et culturel différent du Canada, mais elle ne saurait ignorer que 76 pour cent des signaux éloignés retransmis au Canada proviennent des États-Unis, où cette valeur marchande a déjà été estimée à 3,75 pour cent des revenus des câblodistributeurs, par signal, dans un contexte d’application du concept de juste valeur marchande.

(ii) Le dommage subi par les détenteurs de droits

Deux scénarios, proposés par la SCR, tentent d’estimer le dommage subi par les détenteurs de droits, suite à la retransmission de signaux éloignés au Canada.

1. La théorie de la valeur de la programmation potentielle écartée

Je suis convaincu qu’en présentant la théorie dite de la valeur de la programmation potentielle écartée, [SCR-1, p. 19 à 22] M. Peter S. Grant, témoin-expert de la SCR, faisait un exercice hypothétique; la thèse est cependant illustrative du dommage causé aux créateurs, et son mérite réside dans le fait qu’elle propose des chiffres courants, ayant leur source au Canada.

Il ne saurait être mis en doute que l’importation de signaux augmente considérablement, pour l’abonné, le nombre de programmes qui lui sont offerts.

À moins que le gouvernement canadien ne change sa politique de télécommunication, en l’absence de ces signaux, la demande pour des émissions augmenterait considérablement, et l’offre devrait aussi augmenter très substantiellement pour être en mesure de permettre un menu aussi complet.

Donc, suite à l’importation de ces signaux, les créateurs d’émissions, à cause d’une demande diminuée des diffuseurs canadiens, voient leur opportunité de créer plus d’émissions diminuée.

Je considère que 22 pour cent de la programmation complète de ABC, NBC, CBS et PBS représente certainement, hypothétiquement, au moins la programmation d’une chaîne nationale de télévision canadienne.

Particulièrement, le chiffre de 100 millions de dollars suggéré par M. Grant dans l’évaluation de la valeur de la programmation écartée me paraît très raisonnable et tangible, reposant sur des coûts de production canadiens réels; je le qualifierais même de sous-évalué, puisqu’il ignore les coûts de programmation de stations au Québec et dans les Maritimes et ne tient pas compte du caractère biculturel du Canada. Je ne partage pas l’opinion de M. Grant sur la valeur moindre des nouvelles locales, particulièrement dans le contexte du présent exercice, où il ne s’agit que d’estimer un coût de remplacement.

Je considère donc cette estimation comme une mesure raisonnable du dommage subi par les détenteurs de droits en conséquence de la retransmission de signaux éloignés.

2. La théorie dite théorie de l’érosion de la valeur de la licence

La preuve soumise par le panel de producteurs indépendants membres de la SCR appuie entièrement l’argumentation fort documentée de M. Grant sur le sujet « Érosion, pour les producteurs, de la valeur de licence pour la radiodiffusion ». [SCR-1, p. 22 à 30].

Particulièrement, je retiens la différence marquée des prix de licences initiales comme proportion du coût de production versée par les diffuseurs américains et canadiens; la petitesse du marché canadien, qui rend absolument nécessaire, pour tenter d’assurer un rendement sur les sommes investies, que tous les revenus possibles soient perçus; et surtout l’importance primordiale de chaque diffusion et particulièrement la première, dans l’établissement de la valeur marchande d’une émission; l’omniprésence du marché américain au Canada qui réduit très substantiellement pour les distributeurs canadiens la revente des produits autres que nord-américains, et enfin cette omniprésence qui limite grandement les possibilités d’exploitation aux États-Unis des productions canadiennes.

L’estimé de 70,9 millions de dollars proposé par M. Grant m’apparaît conservateur, reposant sur un taux de 4 000 $ par heure, la preuve proposant plutôt un taux de 5 000 $ par heure, ce qui aurait représenté 88,2 millions de dollars.

C. COMMENTAIRES SUR LA PARTIE 3B DE LA DÉCISION MAJORITAIRE : LES DROITS À VERSER POUR LA RETRANSMISSION DE LA TÉLÉVISION; LES GRANDS SYSTÈMES : I – LA VALEUR DES SIGNAUX ÉLOIGNÉS

1. Au sujet de l’analyse de la valeur des services comparables

Je suis d’accord avec mes collègues à l’effet qu’il y a lieu de tenir compte dans l’établissement de la valeur d’un signal éloigné de l’incidence de la substitution simultanée et du dédoublement de diffusion de programmes.

J’accepte également le pourcentage de 20 pour cent proposé; cependant, dans la décision majoritaire, l’on qualifie ce chiffre de sous- évalué. Je ne partage pas cette opinion. En effet, il importe de souligner que nous n’avons pour supporter ce commentaire que les remarques non documentées de quelques témoins. L’on doit tenir compte du fait que le tableau VII repose sur une journée de diffusion de 18 heures et ce calcul ignore la programmation de minuit à 6:00 a.m., pendant laquelle, selon d’autres remarques de témoins, il n’y a que peu ou pas de substitution simultanée; de plus, je comprends de l’analyse de M. Paul Audley que les chiffres soumis tiennent compte également du dédoublement des signaux originant de réseaux selon différents fuseaux horaires. Le seul dédoublement de programmation dont, théoriquement, il ne serait pas tenu compte, est celle, minime mais possible, provenant de stations indépendantes.

Je comprends que mes collègues jugent utile d’imputer un deuxième escompte de 20 pour cent à la valeur de A&E pour les motifs suivants :

1. Que A&E, par nature, serait moins disposé à escompter le prix de son service pour atteindre une audience plus élevée. C’est la conclusion logique que l’on doit tirer de leur énoncé à l’effet que :

« Le marché des services spécialisés se distingue en ce qu’il permet au vendeur d’empêcher les individus d’avoir accès à un service, à moins de verser le prix qu’il demande. Le marché donne ainsi un certain pouvoir au vendeur et c’est ce qui permet à A&E, par exemple, d’exiger un prix de 25 ¢ de tous ses abonnés. Le propriétaire d’un signal éloigné n’a pas autant de pouvoir puisqu’il n’a pas les moyens techniques d’empêcher une personne, qui n’accepterait pas de verser le prix demandé, d’utiliser son signal.

Le marché des signaux éloignés fait appel à d’autres considérations que le marché des abonnements aux services spécialisés. Il s’ensuit que le vendeur d’un signal éloigné accepterait un moindre prix pour son produit dans ce marché ».

Mes collègues se réfèrent au procédé de brouillage des signaux des services spécialisés comme un motif de valorisation de la programmation de ces services. Cette technologie n’est pas utilisable par les signaux éloignés à cause de l’existence de la licence obligatoire dans notre loi, et non pour des raisons techniques. Je ne crois pas que l’on puisse pénaliser les signaux éloignés du seul fait qu’ils sont sujet à cette licence obligatoire.

Ces affirmations de mes collègues m’apparaissent également contredites par la preuve qui démontre que A&E, service facultatif au taux de 65 ¢ par mois par abonné, a cru bon de s’associer au service de base élargi au taux de 25 ¢.

Enfin, je ne crois pas que la preuve permette de soutenir la conclusion à l’effet que les diffuseurs du service de base auraient une plus grande propension naturelle à escompter leurs signaux. La preuve directe de la valeur au marché de la programmation suggérerait plutôt le contraire.

Cette analyse économique de la décision paraît également suggérer que plus un signal est reçu et apprécié, moindre est sa valeur et, par voie de conséquence, et je fais référence ici à ma révision des politiques du CRTC à ce sujet, on pourrait conclure que mes collègues estiment que moins est estimée sa valeur par le CRTC, plus grande devient sa valeur au marché.

2. Que le prix de A&E pourrait très bien être une bonne norme pour un premier signal mais il pourrait être trop élevé pour les autres signaux d’un même bloc auquel pourraient être reliés les signaux éloignés usuels. Encore une fois, cette analyse m’apparaît spéculative et non étayée par la preuve.

3. C’est ici que mes collègues semblent faire usage de la « marge de manœuvre » qu’ils s’étaient réservée par leur troisième principe directeur pour ramener la valeur du signal au niveau qui leur paraît convenable. Je ne peux que répéter que je ne suis pas d’accord avec ce principe.

2. Au sujet des théories de la valeur de la programmation potentielle écartée et de la valeur des droits de licence perdus

J’ai déjà émis mes commentaires à ce sujet. Je voudrais rajouter ces quelques remarques. Mes collègues rejettent la théorie de la valeur de la programmation écartée sur la base de l’improbabilité de la création d’un nouveau réseau de télévision national au Canada. Je ne crois pas que M. Peter Grant voulait les convaincre du bien-fondé d’une telle proposition, mais soulevait une hypothèse théorique pour aider à mesurer l’effet des signaux éloignés.

De même, je ne partage pas l’opinion de mes collègues quant au mérite de la théorie de l’érosion des droits de licence. Le panel des producteurs indépendants m’apparaissait très représentatif de toutes les émissions produites ou distribuées au Canada. Quant au deuxième motif soulevé à l’effet qu’une partie du dommage souffert provenait de la diffusion d’émissions américaines transmises via des signaux locaux, la difficulté avait été soulevée à l’audience. En contre-interrogatoire, à une question du procureur de la SCR, M. Ralph Ellis répondait :

[TRADUCTION] « Les signaux disponibles par voie des airs existaient avant même la télévision au Canada. Cela n’a jamais été perçu comme étant un vrai problème. À l’époque où j’œuvrais dans ce milieu, nous vendions des émissions après qu’elles soient passées sur une station de Buffalo, par exemple.

Cela n’est devenu problématique que suite à la prolifération des signaux et à l’arrivée des signaux éloignés et du câble ». [Transcription, p. 2185].

Ce témoignage ne fut ni contredit ni mis en doute.

Ces deux théories de M. Grant m’apparaissent comme des tentatives d’estimer l’effet que la retransmission sans coût et sans contrôle par les retransmetteurs du travail d’autrui produit pour les créateurs : d’abord elle limite leurs opportunités de production et ensuite elle diminue la valeur qu’ils peuvent obtenir pour leurs œuvres.

3. Au sujet de la comparaison avec le régime américain

Les données établies pour les États-Unis ne sont pas utilisées par mes collègues malgré leur commentaire à l’effet que :

« Bien que la Commission ne soit pas liée par les taux américains pour établir les droits à verser au Canada, les différences susmentionnées portent à croire que le taux canadien ne devrait pas être inférieur au taux américain. En 1988, le tarif mensuel moyen par abonné au service par câble aux États-Unis était de 43 ¢ américains. (L’italique est de moi)

La Commission a pour tâche de faire en sorte que les droits à verser, pour le Canada, soient justes et équitables et en même temps s’assurer que les obligations découlant de l’Accord de libre-échange soient respectées ».

En effet, compte tenu des différences de régime et du nombre de signaux éloignés, le niveau établi par la présente décision est substantiellement inférieur au niveau américain, considérant particulièrement la rémunération qui sera effectivement reçue par les détenteurs de droits.

L’on ne saurait comparer le 43 ¢ U.S. (@ 87 ¢ soit 49,42 ¢ Can.) au 70 ¢ Can. Car pour 70 ¢ Can. les retransmetteurs diffusent 6,04 signaux (3,50 aux États-Unis); et de plus, le régime canadien ne comporte pas les escomptes statutaires du régime américain. Une fois le montant global distribué, le détenteur de droits recevra moins sous le tarif approuvé par cette décision que sous le tarif existant aux États- Unis.

4. Au sujet des conclusions de la Commission

Mes collègues ne retiennent comme unité de mesure que le taux du service facultatif A&E, un service marginal, non représentatif par son contenu, et donc de la valeur des signaux éloignés généralement retransmis au Canada.

Je suis d’accord qu’il y a lieu d’escompter l’unité de mesure choisie, quelle qu’elle soit, pour tenir compte de la substitution simultanée et du dédoublement de programme.

Les autres motifs d’escompte me paraissent spéculatifs.

En acceptant A&E comme marché analogue, mes collègues paraissent ignorer la valeur même de la programmation, si déterminante dans l’obtention des pourcentages d’audience plus élevés; paradoxalement, ce sera selon ce barème même que l’allocation sera effectuée.

Pour conclure ces quelques remarques sur la décision majoritaire, j’aimerais souligner ce qui suit :

  1. Que je ne peux percevoir, dans la décision majoritaire, de quelle manière mes collègues font l’application de leurs deuxième et cinquième principes, dans l’établissement du montant global des royautés, prenant comme unique étalon de mesure un service discrétionnaire américain et ignorant complètement la différenciation et la valeur de la programmation originale ou en direct qui caractérise la grande majorité des signaux éloignés retransmis au Canada, et qui en représente une grande partie de leur valeur, au coût.

  2. Que je constate que le souci de la majorité d’assurer « le moins de perturbation possible des services offerts aux abonnés du service par câble », leur troisième principe, a servi de toile de fond à l’appréciation de la preuve soumise par les parties.

D. LA RÉCLAMATION POUR LA COMPILATION DU JOUR DE DIFFUSION

Deux sociétés, l’ADRRC et la BBC, sous le titre « compilation » ou « compilation du jour de diffusion », réclament une portion des royautés de retransmission pour rémunérer l’effort, l’habileté, la créativité et l’originalité nécessaires à l’organisation du contenu d’un signal.

Mes collègues reconnaissent la réalité de ces caractéristiques que la preuve a clairement établies au cours des audiences.

L’apparente difficulté est de décider si le résultat de ces efforts représente une œuvre protégée par la Loi sur le droit d’auteur.

Dans les faits, il m’apparaît évident qu’une transmission pure et simple, à la suite, des émissions diffusées par un signal risquerait fort d’être sans intérêt. C’est l’organisation de cette diffusion en fonction des exigences de l’auditoire, de la demande, qui donne à chaque signal son profil, son identité : ce travail, onéreux pour les diffuseurs, ajoute à la valeur des émissions retransmises, en leur assurant la meilleure réception; ce travail d’organisation, créateur d’une valeur ajoutée aux émissions elles-mêmes, prises isolément, profite évidemment aux retransmetteurs, pour lesquels le contenu du signal arrive « tout cuit », prêt à servir, sans investissement d’argent ou de temps.

Le but de la Loi est de rémunérer les détenteurs de droits pour les œuvres retransmises sur les signaux éloignés par les câblodistributeurs.

Est-ce que le travail de conception et d’organisation intellectuelles et techniques effectué par les créateurs des signaux éloignés est lui-même l’objet d’un droit d’auteur et devrait être indemnisé comme tel ?

1. La compilation du jour de diffusion

La preuve démontre que les résultantes concrètes de la compilation effectuée par un diffuseur sont les suivantes :

  • un horaire écrit détaillé de la programmation de chaque journée;
  • la diffusion organisée concordante de la programmation de cette journée;
  • un enregistrement-vidéo produit simultanément à sa diffusion de la totalité de la programmation de cette journée. Cet enregistrement-vidéo quotidien remplit l’exigence de fixation de toute œuvre protégée.

2. Bénéfice retiré indûment par les retransmetteurs ?

C’est par le Projet de loi C-2, 1988, Chap. 65 que le Parlement a amendé la Loi sur le droit d’auteur pour formellement obliger les retransmetteurs à indemniser les créateurs des œuvres retransmises sur signaux éloignés pour ce travail de création, qu’ils retransmettaient sans coût avant la loi.

Il ne fait aucun doute que le travail d’organisation de la diffusion des œuvres produites contribue à la valeur de cette programmation pour les retransmetteurs. Ce bénéfice net retiré par eux serait indu si ce travail est protégé par la loi.

3. Est-ce que la compilation que représente le « jour de diffusion » est une œuvre originale ?

La jurisprudence citée par les procureurs de l’ADRRC et la BBC établit le test d’originalité comme composé de deux éléments : d’abord l’œuvre ne doit pas être copiée et doit être le produit du travail, l’habileté, le jugement ou l’ingéniosité de son auteur. [Argument écrit de l’ADRRC, p. 55 à 57; argument écrit de la BBC, p. 21 à 24].

Les preuves présentées par les deux sociétés réclamantes ont très clairement établis ces caractéristiques dans l’organisation du jour de diffusion et m’ont convaincu que la compilation que représente le « jour de diffusion » rencontre ce test d’originalité prévu par la loi et explicité par la jurisprudence.

4. Le jour de diffusion serait-il une œuvre littéraire et/ou dramatique ?

Cette œuvre originale doit être littéraire, dramatique, musicale, ou artistique pour que le droit de la communiquer au public par télécommunication soit protégé par la loi, aux termes de l’alinéa 3(1)(f) de la Loi sur le droit d’auteur.

a) Le jour de diffusion constitue-t-il une œuvre littéraire ?

Tel qu’expliqué ci-devant, l’une des résultantes de l’effort de compilation est un horaire écrit détaillé. La nouvelle version de la définition française d’œuvre littéraire, contenue à l’article 2 de la loi, se lit comme suit :

« Sont assimilés à une œuvre littéraire les tableaux, les compilations, les traductions et les programmes d’ordinateur ».

et la définition anglaise :

« literary work includes tables, compilations, translations and computer programs ».

Il importe de souligner que la nouvelle définition française me paraît expliciter l’intention du législateur en traduisant « includes » par « sont assimilés à ».

Il s’ensuit que toutes compilations, et non seulement d’œuvres littéraires, vu l’utilisation générique du mot compilation, sont assimilées à des œuvres littéraires pour fins d’interprétation de la loi.

Sans aucun doute peut-on en conclure que la compilation que représente le « jour de diffusion » est protégée comme œuvre littéraire, indépendamment du fait que ce qui est transmis au public n’est pas cet horaire écrit détaillé. Comme l’indique le procureur de BBC dans son mémoire, [TRADUCTION] « il s’agit de l’expression littéraire de l’arrangement de la programmation ». [BBC, argument écrit, p. 24]. Il ajoute le commentaire suivant :

[TRADUCTION] « L’arrangement, les séquences, les sons et les images de la journée de diffusion sont le résultat de l’horaire écrit qui constitue une œuvre littéraire et ainsi reçoit la même protection que les sons et images des jeux vidéos, c’est-à-dire en raison du programme informatique sur lequel ils sont fondés, et qui est une œuvre littéraire ». [BBC, argument écrit, p. 21].

En effet, il m’apparaît évident que l’essence de la compilation c’est la présentation dans un certain ordre d’un regroupement d’œuvres ou éléments divers. L’expression simplifiée en serait toujours une liste ou une énumération qui, en elle-même sans intérêt, ne représenterait que la table des matières d’une anthologie littéraire, par exemple.

En voulant protéger cette œuvre, assimilée à une œuvre littéraire, la Loi fait nécessairement référence au contenu organisé auquel réfère cette énumération, dans la mesure où cette énumération est pré-établie, dans le cas qui nous occupe, par écrit. Il en serait de même si cette énumération était pré-établie dans un autre langage, informatique par exemple.

En conséquence, j’en conclus que le « jour de diffusion » représente une compilation au sens de la Loi, donc qu’elle est protégée comme œuvre littéraire.

b) Le « jour de diffusion » constitue-t-il une œuvre dramatique ?

Le jour de diffusion est la production télévisée de la compilation d’œuvres diverses qui toutes jouissent de la protection de la Loi sur le droit d’auteur.

Comme cette production est elle-même une œuvre originale, il me semble logique d’en conclure qu’elle jouit elle aussi de la protection de la Loi, du fait qu’elle est une production fixée simultanément sur bande magnétoscopique qui est un procédé analogue à la cinématographie, à notre époque. Madame Beverly Nix, vice-président de Warner Bros. explicitera dans son témoignage l’usage extensif et les caractéristiques de ce médium dans la production « cinématographique » actuelle. [Transcription, pp. 1196 à 1198]

Une production cinématographique, étant une œuvre dramatique dans laquelle les dispositifs de la mise en scène ou les combinaisons des incidents donnent à l’œuvre un caractère original, constitue une œuvre dramatique au sens de l’article 2 de la loi.

Laddie et al., dans The Modern Law of Copyright, [Butterworth 1980, p. 273-274] commentent la définition d’œuvre dramatique dans la loi anglaise de 1911, définition identique à la nôtre.

[TRADUCTION] « Un film ayant une identité et un style qui lui sont propres, et n’étant pas tout simplement le résultat automatique du tournage d’un sujet quelconque, devrait normalement faire partie de cette définition ...

Les combinaisons des incidents sont ce qui donnent à une œuvre son originalité... »

Ce qui importe, c’est que le producteur ait ajouté suffisamment d’originalité à la production télévisée dans son ensemble pour qu’on puisse conclure que les dispositifs de la mise en scène ou les combinaisons des incidents donnent de l’originalité à la production télévisée.

Est-ce que les divers programmes peuvent représenter ces incidents auxquels réfère l’auteur ?

Le dictionnaire juridique Black définit un incident comme suit :

[TRADUCTION] « Incident : nom ou adjectif, se disant d’une chose qui, soit de façon habituelle, soit naturellement et inséparablement, dépend d’une autre chose plus importante, s’y rattache ou la suit. Utilisé comme nom, le terme fait référence à toute chose qui, de façon inséparable, fait partie d’une autre chose (le principal), y est rattachée ou inhérente. De façon moins stricte, le terme fait aussi référence à toute chose qui est rattachée à une autre, soit habituellement, soit à certaines fins ». [H.C. Black, Black’s Law Dictionary, cinquième édition, West Publishing Co., 1979, p. 686].

Le dictionnaire Oxford confirme cette définition d’ailleurs. [Compact Edition, Oxford University Press, 1971].

Il ne fait aucun doute que le but des efforts, de l’habileté et de l’ingéniosité des télédiffuseurs, c’est précisément d’effectuer cette combinaison d’incidents, la combinaison en étant la production du jour de diffusion et les incidents les divers programmes.

Il m’apparaît donc que la production du jour de diffusion est par elle-même une production cinématographique autonome, et qu’indépendamment du fait que ce type de compilation est protégé ou non par la Loi, cette production est protégée par la Loi comme œuvre dramatique.

J’en conclus donc que le jour de diffusion est une production qui jouit de la protection de la loi tant comme œuvre littéraire que comme œuvre dramatique, et que, vu le régime de licence obligatoire existant sous notre Loi pour la retransmission, les sociétés sont justifiées de réclamer devant notre Commission une portion de la somme globale établie pour compenser les détenteurs de droits.

5. Interprétation par les tribunaux de la Loi sur le droit d’auteur

Il ressort de la nombreuse jurisprudence citée par les sociétés ADRCC et BBC que les tribunaux judiciaires ont, au cours des années, interprété le texte de la loi pour faire place à des technologies, des idées ou des droits nouveaux.

Est-ce que le fait que la Loi sur le droit d’auteur ne reconnaît pas tel quel le « jour de diffusion » comme l’objet explicite d’un droit d’auteur exclut toute reconnaissance de ce droit ?

Ce n’est que par la loi L.C., 1988, Chap. 15 que le Parlement a modifié la Loi sur le droit d’auteur pour législativement reconnaître les droits inhérents à la propriété intellectuelle des programmes informatiques. Pourtant, plusieurs jugements des cours de justice canadiennes avaient déjà reconnu l’existence de ces droits et interprété la loi pour l’ajuster aux circonstances de langage et de médium utilisés par cette innovation technologique.

De même, si les tribunaux s’en étaient tenus à une interprétation traditionnelle et restrictive de la loi, plusieurs œuvres qui n’ont rien de littéraire au sens académique du terme n’auraient pu obtenir des tribunaux la protection qu’elles en ont obtenue.

Dans le cas qui nous intéresse, le concept de « jour de diffusion » comme objet d’un droit d’auteur fut le sujet de nombreuses discussions académiques. Mais en fait, ce n’est que par l’adoption de la L.C., 1988, Chap. 66, qu’un droit de retransmission fut créé donnant ainsi ouverture à la justification d’une réclamation par les diffuseurs pour l’usage de leur œuvre.

En effet l’on pourrait se poser la question au sujet de nombreux types de compilations, à savoir s’ils devraient ou pourraient ou non faire l’objet d’un droit d’auteur, selon le même ordre de pensée : le choix par un musicien d’œuvres musicales pour un concert, la sélection de peintures par un conservateur de musée pour une exposition thématique ... etc. Mais, de facto, ce n’est que lorsqu’il y a usage de l’œuvre d’autrui de façon profitable, tangiblement, qu’il est opportun ou utile d’analyser si oui ou non cette œuvre est protégée, et si son auteur, dans un cas de licence obligatoire, comme c’est le cas ici, devrait recevoir juste compensation pour son usage.

Le droit en général et le droit du droit d’auteur en particulier se devant d’être évolutif, je crois qu’il faut en conséquence regarder les éléments de cette réclamation pour décider si oui ou non cette œuvre intellectuelle et technique qu’est le jour de diffusion est protégée par la Loi, telle qu’interprétée par les tribunaux, plutôt que de la rejeter, a priori, sous le prétexte que le concept n’est pas spécifiquement reconnu par le texte de la Loi.

6. Allocation aux diffuseurs pour la compilation du jour de diffusion

Quatre diffuseurs réclament une quote-part de toute allocation effectuée du fait de la compilation du « jour de diffusion » : ADRRC, BBC, ADRC et SCR.

D’après l’ADRRC et la BBC, la grande portion des coûts de l’entreprise, à l’exception des coûts de financement et des coûts d’acquisition de programmation, seraient imputables au coût d’organisation de cette compilation. Ceci dit, la preuve qui fut présentée pêche par une méthodologie douteuse, non convaincante. Ainsi, il ressort clairement de la preuve qu’aucun contrôle d’uniformité des méthodes comptables employées n’a été exercé; de même, les motifs permettant d’inclure dans ce calcul certains coûts et d’en exclure certains autres, m’ont paru plutôt aléatoires.

Pour ces motifs, je limiterais cette allocation à un montant symbolique, soit 2 pour cent du montant global des royautés, à être déduit en premier lieu du montant global, tout comme la royauté de 3,3 pour cent dévolue à la société SDE-CAPAC, le solde de 94,7 pour cent devant être distribué selon les pourcentages prescrits dans la décision basée sur la propriété des programmes entre les autres sociétés.

Aucune preuve ne nous permet de départager l’intérêt réel de chacune des quatre sociétés dans cette allocation : en conséquence, je la diviserais en quatre parts égales de 0,5 pour cent.

E. DES CONCLUSIONS DIFFÉRENTES

Il m’apparaît nécessaire, en prenant cette décision, de prendre d’abord en considération les principes directeurs et ensuite les propositions des parties.

Le tarif doit donc :

  • Refléter la situation canadienne;
  • Être facile à administrer, à appliquer et à comprendre;
  • Refléter fidèlement la retransmission des émissions et reconnaître que certaines émissions ont plus de valeur que d’autres;
  • Rémunérer les détenteurs de droits d’une façon objectivement juste;
  • Assurer que cette rémunération juste est, dans la mesure du possible, correspondante au bénéfice retiré par les retransmetteurs.

La formule tarifaire approuvée par la Commission remplit selon mon jugement les critères de transparence et d’aisance à être comprise et administrée.

La révision de mes commentaires permet de dégager les paramètres suivants, pour la détermination du montant global des royautés, avant les escomptes prévus au tarif pour les systèmes de 0 à 6 000 abonnés.

  1. La mesure des coûts canadiens équivalents de programmation permettrait de dégager des royautés estimatives de 95 221 637 $.
  2. Selon les propositions des parties pour les services comparables,

69 116 234 $ en utilisant A&E à titre comparatif;

85 704 130 $ en utilisant YTV à titre comparatif;

110 585 975 $ selon l’analyse de la société BBC;

après avoir pris en considération un ajustement de 20 pour cent pour déduire la substitution simultanée et le dédoublement.

  1. Selon les estimations de M. Grant, des sommes approximatives de 100 millions de dollars pour la valeur de la programmation écartée et de 70,9 millions de dollars pour la théorie de l’érosion des droits de licence seraient réalistes.

Des principes directeurs retenus se dégagent la principale difficulté de ce tarif : maintenir un équilibre entre la compensation juste des détenteurs de droits et le bénéfice retiré par les retransmetteurs d’œuvres protégées.

Les propositions des réclamants à l’effet d’utiliser les taux des services comparables comme étalons de mesure peuvent permettre de reconnaître la différentiation des types de programmation tout en faisant état du contexte canadien de ce tarif et incorporant des taux de services étrangers, si l’on dégage un taux moyen pour les services mentionnés au tableau 1 proposé par la SCR; en effet, les taux de CBC Newsworld, TSN et RDS reflètent cette différentiation. D’agir ainsi correspond, me semble-t-il, à l’esprit des remarques du CRTC sur les services spécialisés, à l’effet que ces services, dans leur ensemble, représenteraient l’équivalent d’un service.

Le taux moyen serait ainsi de 33,4¢ par signal par abonné, moins 20 pour cent pour substitution simultanée et duplication, soit un taux de 26,7 ¢ par mois, par signal, par abonné, soit arrondi, pour 4,56 signaux, 1,20 $ par mois, par abonné.

Dans ce contexte, le tarif serait le suivant :

TABLE D: DISTRIBUTION OF MONTHLY ROYALTY PAYMENTS AND ESTIMATE OF THE GLOBAL AMOUNT GENERATED
TABLEAU D: DISTRIBUTION DES PAIEMENTS MENSUELS DE DROITS ET ESTIMÉ DU MONTANT GLOBAL AINSI GÉNÉRÉ

System Size (Number of Subscribers)

Taille du système (Nombre d’abonnés)

Monthly Royalty Rate ($)

Droits par mois ($)

Number of Subscribers

Nombre d’abonnés

Percentage of all Subscribers

in Large Systems

Pourcentage de tous les abonnés

aux grands systèmes

Royalty Payment ($)

Droits ($)

1,001 - 1,500

0.34

79,291

1.20

26,958.94

1,501 - 2,000

0.43

81,306

1.23

34,961.58

2,001 - 2,500

0.51

61,273

0.93

31,249.23

2,501 - 3,000

0.60

75,934

1.15

45,560.40

3,001 - 3,500

0.69

54,830

0.83

37,832.70

3,501 - 4,000

0.77

63,576

0.97

48,953.52

4,001 - 4,500

0.86

50,768

0.77

43,660.48

4,501 - 5,000

0.94

61,456

0.93

57,768.64

5,001 - 5,500

1.03

57,726

0.88

59,457.78

5,501 - 6,000

1.11

56,967

0.82

63,233.37

6,001 +

1.20

5,675,496

86.17

6,810,595.20

 

 

6,318,623

95.88

7,260,237.78

x 12 =

 

 

 

87,122,853.36

1,082/$100 =

 

267,738

 

108,200.00

 

 

6,586,631

 

87,231,053.36

En bref, j’en viens à la conclusion que ces taux seraient justes et équitables, raisonnables, pour les raisons suivantes :

  1. Les marchés analogues sont ceux-là mêmes proposés par les réclamants et ils reflètent des taux canadiens.
  2. La somme globale générée représente environ 7,5 pour cent des revenus des retransmetteurs, un niveau qui causera certainement un certain changement pour l’industrie de la câblodistribution, mais qui est bien en-deçà des pourcentages d’industries semblables, compte tenu du fait que les retransmetteurs n’ont aucun investissement en capital à effectuer pour jouir du bénéfice de cette programmation. Je crois que l’analyse de Mme Maureen Farrow sur la capacité des retransmetteurs d’assumer en tout ou en partie ces coûts conserve toute sa véracité, considérant particulièrement le niveau de revenus atteint en 1989.
  3. La somme globale tient équitablement compte des coûts importants encourus par les diffuseurs pour la transmission de la programmation en directe, particulièrement les nouvelles et les sports.
  4. Cette somme reflète le concept de la juste valeur marchande recherché par tous les réclamants.

IX. NOTE – DISSIDENCE

Les informations furent établies des documents suivants :

ADRC-35: CBC Programming Expenses, Year Ending March 31, 1989.

ADRC-37: Three Network Data for the Copyright Board, for 1988.

BBC-24: BBC Members Programming Expenses for 1989.

ADRRC-25: Analysis of Costs of Programs Telecast of the Privately Owned Television Industry, Canada, 1988. 1988.

SCR-54: Rough Estimates of the Share of PBS Programming Expenses.



[1] Les données informatisées de la SPDAC indiquent que 4 066 « signaux spéciaux » sont transmis, mais on ne précise pas davantage de quoi il s’agit. Cela fait, au total, 8 629 services différents (sans faire de pondération en fonction du nombre d’abonnés atteints) dont 27 pour cent sont des signaux éloignés.

[2] Ce total représente uniquement les signaux éloignés de base, en conformité avec la pièce CCC-47, onglet 2.

[3] Mediastats recueille et publie des données sur les industries de la radiodiffusion et de la télédistribution. Ses banques de données informatisées sont utilisées par le CRTC, les ministères des Communications du Canada, du Québec et de l’Ontario, et par la Société Radio- Canada.

[4] Ces chiffres sont tirés des tableaux sommaires dans CCC-55 et CCC-56.

[5] Ce total représente les signaux éloignés de base seulement, en conformité avec les pièces CCC-46 et 47.

[6] Ce maximum s’applique uniquement aux systèmes appartenant à la classe 2 établie par le CRTC. Il s’agit des systèmes comptant moins de 6 000 abonnés, à l’exception des « titulaires assujettis à la partie III » qui offrent au plus deux stations locales de télévision. Les systèmes de classe 1 sont ceux qui comptent plus de 6 000 abonnés.

[7] Le système de classification du CRTC est décrit à la note 6.

[8] Ces chiffres sont tirés de la pièce CCC- 46, onglet 5.

[9] Tiré de la pièce CRC-1, p. 36, Tableau de la valeur des signaux éloignés.

[10] Il s’agit de la VSE multipliée par la proportion du nombre total d’abonnés atteints. Ainsi, à la première ligne, 0,0240 = 0,52 × 1,328/28,798.

[11] Il semble qu’il y ait une erreur quelque part dans la pièce CCC-46, onglet 5. La somme de cette colonne est de 28,648. Le chiffre de 28,798 est conforme à ce qu’indique le tableau IV, et la différence est à ce point minime que cela n’affecte aucunement les chiffres de la dernière colonne. Voilà pourquoi la Commission n’en a pas tenu compte.

[12] Il semble que le chiffre de 2,8 soit inexact. Puisque le tarif de la SCR prévoit des réductions, le nombre moyen de signaux reçus est supérieur à celui que les dépenses moyennes permettent d’acquérir. Nous savons que 6,3 millions d’abonnés reçoivent 28,8 millions de signaux éloignés. Ils reçoivent donc 4,56 signaux éloignés en moyenne ou, en se servant de la formule de la SCR, environ 3,64 VSE.

[13] La preuve de la SPDAC compare les chiffres de 4,56 et 3,5. Il semble plutôt que la comparaison doive se faire entre 6,04 et 3,5. Cependant, cela ne fait que démontrer encore plus clairement que les systèmes de télédistribution canadiens retransmettent un plus grand nombre de signaux éloignés.

[14] Le calcul détaillé se trouve dans l’annexe.

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