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Copyright Board
Canada

Canada Coat of Arms/Armoiries du Canada

Commission du droit d’auteur
Canada

 

Date

2008-04-22

Référence

Dossier : Reproduction d’œuvres musicales

Régime

Gestion collective relative aux droits visés aux articles 3, 15, 18 et 21

Loi sur le droit d’auteur, article 66.51

Commissaires

M. le juge William J. Vancise

M. Stephen J. Callary

Me Sylvie Charron

Tarif des redevances à percevoir par CMRRA/SODRAC inc. pour la reproduction d’œuvres musicales, au Canada, par les services de musique en ligne en 2008

Motifs de la décision

[1] Le 30 mars 2007, CMRRA/SODRAC inc. (CSI) déposait un projet de tarif pour la reproduction d’œuvres musicales par les services de musique en ligne pour l’année 2008 (le « projet de tarif »). Le projet a été publié dans la Gazette du Canada. L’Association canadienne des radiodiffuseurs, l’Association de l’industrie canadienne de l’enregistrement, Apple Canada Inc. et Apple Inc., Puretracks, Bell, Rogers Communications et TELUS se sont opposées à ce projet.

[2] Le jour suivant (le 31 mars 2007), la Commission homologuait le Tarif CSI pour les services de musique en ligne, 2005-2007. En vertu de l’article 70.18 de la Loi sur le droit d’auteur (la « Loi »), le tarif de 2005-2007 continue de s’appliquer à titre provisoire jusqu’à l’homologation d’un nouveau tarif.

[3] Le tarif CSI de 2005-2007 cible les mêmes utilisateurs (pour des droits différents) que le tarif 22.A de la SOCAN (Internet – Services de musique en ligne) que la Commission a homologué pour les années 1996 à 2006, le 24 novembre 2007. Le tarif de la SOCAN fait l’objet de demandes de contrôle judiciaire; la SOCAN n’a pas demandé à la Commission d’entreprendre l’examen de ses projets de tarif pour l’année 2007 et les suivantes.

[4] Habituellement, la Commission examine ensemble les tarifs qui visent les mêmes utilisateurs. Or, le 10 janvier 2008, comme l’examen du tarif 22.A de la SOCAN n’aurait pas lieu avant au moins 2009, CSI a demandé que son projet de tarif fasse l’objet d’une instruction accélérée et distincte des futures versions du tarif de la SOCAN. Le 21 février 2008, la Commission a rejeté la demande.

[5] Le 6 mars 2008, CSI a demandé, conformément à l’article 66.51 de la Loi, l’homologation d’un tarif provisoire différant sur trois points de celui de 2005-2007. Premièrement, il supprimerait « l’escompte de base de 10 % ». Deuxièmement, il obligerait les services à transmettre à CSI des renseignements qu’ils ne doivent fournir actuellement que dans la mesure où ils sont disponibles. Troisièmement, il préciserait [TRADUCTION] « certains points mineurs concernant le libellé du tarif de 2005-2007 ». Les opposantes se sont opposées à la demande.

I. Suppression de l’escompte

[6] Dans le tarif de 2005-2007, la Commission a appliqué un escompte de 10 pour cent parce qu’il s’agissait d’un nouveau tarif. Le tarif ne prévoit aucun mécanisme permettant de supprimer l’escompte à la fin de sa durée prévue.

[7] Selon CSI, trois raisons justifient la suppression immédiate de l’escompte. D’abord, la décision de la Commission d’examiner le projet de tarif de CSI en même temps que le tarif 22.A de la SOCAN retarde inévitablement l’homologation du tarif de CSI pour l’année 2008; ce retard prive les auteurs et les éditeurs de musique de redevances auxquelles ils ont déjà droit, selon la Commission. Deuxièmement, l’élimination de l’escompte permettrait à CSI d’absorber les dépenses qu’elle a engagées durant le processus d’homologation du tarif de 2005-2007 et en créant son propre système de délivrance de licences pour la musique en ligne. Troisièmement, certains services de musique en ligne en sont à leurs débuts, ce qui peut rendre difficile la perception des paiements rétroactifs.

[8] Les opposantes ont invoqué plusieurs arguments à l’encontre de la modification du taux. Premièrement, CSI n’a pas démontré que le maintien du taux homologué aurait des effets néfastes. Plus particulièrement, la majeure partie des activités en ligne étant contrôlées par de grandes sociétés bien établies, les risques liés à une éventuelle imposition de paiements rétroactifs sont minimes. Deuxièmement, modifier le taux reviendrait à préjuger des résultats de l’examen conjoint ordonné par la Commission; par exemple, rien ne prouve que l’industrie de la musique en ligne n’est plus une industrie naissante ni qu’il convient d’augmenter le tarif homologué pour 2005-2007. Troisièmement, la Commission a comme pratique de simplement reconduire les tarifs existants sur une base provisoire. Quatrièmement, le recouvrement de coûts n’est pas un argument qui milite en faveur du tarif provisoire, du moins dans le cas d’une société de gestion disposant de revenus importants. [1] Cinquièmement, sur le plan administratif, il serait plus simple pour CSI de réclamer aux services d’éventuelles hausses rétroactives de taux que d’effectuer des remboursements rétroactifs.

[9] Nous sommes d’accord avec les premier, troisième et quatrième arguments des opposantes. La question de savoir si l’ensemble de l’industrie devrait bénéficier de l’escompte devrait être étudiée dans le cadre de l’examen des autres questions avec l’aide de toutes les intéressées. Enfin, nous aimerions ajouter les commentaires suivants. Les taux pour 2005-2007 sont le tarif. La Commission a certes déclaré que ces taux sont inférieurs à ceux qu’elle considérait alors comme des taux justes à long terme. Cette opinion ne lie personne. Les opposantes demanderont des taux moins élevés pour l’année 2008 et les suivantes. Par conséquent, ces taux pourraient être moins élevés, plus élevés ou les mêmes qu’en 2005-2007. En revanche, lorsque la Commission a homologué un tarif provisoire pour la radio commerciale après que la Cour d’appel fédérale lui ait ordonné de revoir sa décision antérieure, [2] il ne faisait aucun doute que le taux augmenterait par rapport au taux antérieurement homologué. Compte tenu de ce qui précède, il n’est pas nécessaire que nous commentions le cinquième argument.

II. Obligations additionnelles de rapport

[10] Actuellement, les services de musique en ligne doivent fournir à CSI le nom de l’auteur de l’œuvre musicale, le code international normalisé des enregistrements attribué à l’enregistrement sonore, et les nom, identificateur, numéro du catalogue des produits et code universel des produits attribués à tout enregistrement sonore publié sur support matériel, uniquement dans la mesure où ces renseignements sont disponibles. Ces renseignements « appartiennent » aux maisons de disques; les services ne les ont pas toujours. CSI prétend qu’ils sont essentiels à l’application efficace du tarif et que permettre aux services de ne les fournir que s’ils sont disponibles jusqu’à ce que le tarif 2008 soit homologué retardera la perception et la distribution des redevances et augmentera les frais administratifs. Les opposantes s’opposent à la demande pour deux motifs. D’abord, le respect des obligations additionnelles de rapport exigerait énormément de temps et de ressources. Ensuite, CSI n’a produit aucune preuve démontrant qu’elle a besoin de ces renseignements additionnels pour gérer les droits de ses membres.

[11] Nous ne sommes pas convaincus que le système de rapport actuel, fondé sur la disponibilité des renseignements, empêche CSI d’appliquer efficacement le tarif. Nous croyons également qu’il est trop tôt pour modifier le système actuel, vu l’absence de preuve concrète quant à son efficacité. Avant de procéder à ce changement, il nous faudrait mieux comprendre pourquoi les renseignements demandés sont nécessaires, et savoir dans quelle mesure les services de musique en ligne fournissent déjà ces renseignements. Nous convenons également que ce serait imposer des coûts inutiles aux services que d’imposer ces changements à ce moment-ci.

[12] Cela étant dit, les services de musique en ligne devraient se préparer à une telle éventualité et insister pour que les maisons de disques leur transmettent les renseignements. Pour les motifs donnés en 2007, la difficulté à obtenir les renseignements nécessaires pour rendre adéquates l’application du tarif et la distribution des redevances ne pèsera pas lourd lorsque le tarif final sera homologué.

III. Précisions sur le libellé

[13] CSI demande que certaines modifications soient apportées au libellé du tarif provisoire afin d’éviter toute confusion inutile. Ces modifications permettraient de préciser que le tarif n’est offert qu’aux services qui se conforment au tarif et que les montants à déclarer et à payer sont en dollars canadiens. Nous croyons que la législation actuelle (qu’il s’agisse de la Loi ou de la législation canadienne régissant l’utilisation de monnaie étrangère pour le paiement de produits et de services canadiens) est suffisamment claire pour qu’il soit inutile de donner suite à cette demande.

IV. Ordonnance

[14] La demande de tarif provisoire de CSI est rejetée.

Le secrétaire général,

Signature

Claude Majeau



[1] Décision de la Commission du 29 février 2008 portant sur le Tarif des redevances à percevoir par AVLA/SOPROQ pour la reproduction d’enregistrements sonores, au Canada, par les stations de radio commerciales pour les années 2008 à 2011.

[2] Décision de la Commission du 24 novembre 2006 homologuant le Tarif provisoire SOCAN-SCGDV pour la radio commerciale, 2003-2007.

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