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Copyright Board
Canada

Canada Coat of Arms/Armoiries du Canada

Commission du droit d’auteur
Canada

 

Date

2008-10-24

Référence

Dossier : Exécution publique d’œuvres musicales

Régime

Gestion collective du droit d’exécution et de communication

Loi sur le droit d’auteur, paragraphe 68(3)

Commissaires

M. le juge William J. Vancise

M. Stephen J. Callary

Me Sylvie Charron

Projets de tarif examinés

22.B à 22.G (Internet – Autres utilisations de musique) 1996-2006

Tarif des redevances à percevoir par la SOCAN pour la communication au public par télécommunication, au Canada, d’œuvres musicales ou dramatico-musicales

Motifs de la décision

I. INTRODUCTION

[1] Les présents motifs traitent de la seconde partie du tarif 22 de la Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SOCAN). Les motifs à l’égard de la première partie, celle visant les services de musique en ligne, ont été publiés le 18 octobre 2007. [1] Nous avions alors reporté l’examen des autres utilisations de musique sur Internet, afin de pouvoir mener les consultations étendues que nous envisagions sur le libellé du tarif relatif à ces utilisations.

[2] Nous homologuons les taux applicables à ces autres utilisations par les présents motifs. Comme nous le disions dans SOCAN 22.A (2007), il convient de lire les présents motifs conjointement avec cette décision, ses parties descriptive et analytique valant aussi pour la présente, avec les adaptations nécessaires.

A. Un tarif visant les utilisateurs, pas les utilisations

[3] On peut établir un tarif en fonction d’utilisateurs ou de groupes d’utilisateurs déterminés, ou encore selon les utilisations, sans égard aux utilisateurs. Les tarifs visant une utilisation sont en général plus sensibles aux variations de types et de quantités de consommation. Ils favorisent normalement les utilisateurs, à qui ils permettent d’acheter seulement les droits dont ils ont besoin; par exemple, le restaurant qui n’utilise que de la musique de fond évitera ainsi d’avoir à payer une licence de karaoké dont il n’a pas besoin. C’est là l’approche que la SOCAN a proposée dans le cas présent. Nous avons cependant décidé d’homologuer un tarif fondé sur les utilisateurs, pour les motifs qui suivent.

[4] Premièrement, la nature des utilisations de musique sur Internet évolue sans cesse. La liste d’utilisations proposée par la SOCAN est incomplète; de nouvelles apparaîtront inévitablement. Un tarif fondé sur les utilisations risquerait de ne pouvoir s’adapter à l’évolution constante de l’environnement Internet, en tout cas pour le moment.

[5] Deuxièmement, il pourrait se révéler difficile de mettre en rapport les utilisations définies par la SOCAN avec ce qui se passe réellement sur Internet. Par exemple, la transmission d’un signal audio dont le contenu est surtout musical et accessoirement parlé serait-elle assimilable aux services sonores payants ou à la radio commerciale? Or, les tarifs proposés par la SOCAN pour ces catégories sont sensiblement différents.

[6] Troisièmement, les exploitants qui ont déjà besoin d’une licence de la SOCAN pour leur activité principale utilisent en général de la musique sur Internet essentiellement pour soutenir cette activité. L’objet principal du site Web d’une station de radio n’est pas de produire des revenus, mais de stimuler l’intérêt pour ses émissions.

[7] Il ne faut pas voir dans notre décision d’homologuer ici un tarif Internet fondé sur les utilisateurs une indication de la voie que nous suivrons à l’avenir pour tous les tarifs. Nous prévoyons qu’augmentera l’importance relative des sites Web dans la stratégie commerciale globale d’une partie des utilisateurs de musique; avec le temps, les sites Web deviendront pour certains d’entre eux une source de revenus indépendante et importante. Les instruments actuels de mesure, qui permettent déjà une observation précise de la consommation de musique, seront encore perfectionnés, et, ce qui est encore mieux, des instruments moins chers seront élaborés. Nous réexaminerons cette question ultérieurement. Les choses pourraient d’ici là évoluer de manière telle qu’une approche fondée sur les utilisations se révélerait plus adéquate.

[8] Par conséquent, l’analyse qui suit porte sur des catégories que nous avons définies en fonction des utilisateurs plutôt qu’en fonction des utilisations telles que proposées par la SOCAN. Nous examinerons cependant en détail les activités de chaque utilisateur.

II. Catégorie B – La radio commerciale

[9] Comme beaucoup d’autres utilisateurs, les radiodiffuseurs commerciaux utilisent la musique sur leurs sites Web de nombreuses façons. Premièrement, ils y diffusent en général leur signal de radio conventionnel plus ou moins en simultané (« diffusion simultanée »). Il arrive aussi qu’ils diffusent un signal audio indépendant du signal conventionnel, pouvant ou non contenir de la musique. Ils peuvent aussi offrir des webdiffusions audiovisuelles, des téléchargements audiovisuels, des balados et des jeux.

A. La diffusion simultanée audio

[10] M. Stanley J. Liebowitz, l’expert de la SOCAN, propose d’utiliser le taux fixé par la Commission pour la radio commerciale comme mesure de référence pour la diffusion simultanée des signaux de stations de radio. Il soutient qu’il faut corriger cette mesure en fonction de la différence de rentabilité des deux services. La correction qu’il propose est fondée sur la notion de coûts irrécupérables. Il fait valoir que la transmission sur Internet n’influe en rien sur le coût de création des programmes de radio ni sur les coûts d’administration, puisque le signal Internet est le même que le signal conventionnel. En soustrayant les coûts de programmation et d’administration des charges afférentes au service Internet, on obtient des économies égales à 177,5 pour cent des coûts restants. M. Liebowitz attribue ensuite la moitié de cette augmentation des économies aux titulaires de droits. Si l’on prend pour base le taux de 4,4 pour cent applicable à la radio conventionnelle, on obtient ainsi un taux de 8,3 pour cent pour la webdiffusion du signal de radio.

[11] La SOCAN propose un taux de 8 pour cent, à asseoir sur les seuls revenus produits par la vente de publicité sur les sites Web.

[12] M. Frank Mathewson, l’expert de l’Association canadienne des radiodiffuseurs (ACR), soutient que les nouvelles utilisations d’intrants qu’on utilise déjà par ailleurs (tels que la musique) devraient être soumises à redevances selon la même proportion que l’utilisation existante, de sorte que le taux applicable à la diffusion simultanée devrait être le même que pour le signal de radio conventionnel. La seule correction nécessaire concerne l’assiette tarifaire. Selon M. Mathewson, lorsque la diffusion simultanée engendre des recettes publicitaires attribuables au seul site Web, le taux existant de la SOCAN ne devrait être assis que sur la fraction de ces revenus liée à la musique. Le rapport du Solutions Research Group (SRG) [2] révèle qu’environ 30 pour cent du nombre total de visualisations de pages sur les sites Web des stations de radio consistent en séances de transmission mettant en jeu la webdiffusion ou la diffusion simultanée. Il s’ensuit, toujours selon M. Mathewson, qu’environ 70 pour cent des visualisations de pages ne sont pas liées à des séances de transmission (qu’il s’agisse de diffusion simultanée ou de webdiffusion) et que les revenus afférents aux seuls sites Web devraient en conséquence être réduits de quelque 70 pour cent avant qu’on leur applique le taux.

[13] Nous pensons aussi que le taux déjà appliqué à la radio conventionnelle est la mesure de référence qui convient pour la diffusion simultanée du signal conventionnel. Cependant, nous ne souscrivons pas à la correction que propose la SOCAN en se fondant sur l’hypothèse de M. Liebowitz selon laquelle tous les coûts de diffusion et d’administration sont des coûts irrécupérables, de sorte que la rentabilité de la diffusion simultanée des signaux des stations de radio serait presque le double de celle de la radio conventionnelle.

[14] Les coûts ne peuvent être considérés comme irrécupérables que pour une période limitée et déterminée; à plus long terme, les flux de revenus provenant des biens préexistants s’intègrent à l’analyse globale des coûts. Une augmentation à court terme des bénéfices, constatée suivant une approche fondée sur les coûts irrécupérables, ne justifie pas une augmentation du taux. Seule une augmentation des revenus qu’on pourrait considérer comme relativement permanente – attribuable par exemple à une nouvelle technologie plus efficiente – pourrait mener à une augmentation du prix payé pour tous les intrants, dont la musique.

[15] La correction que M. Mathewson suggère veut rendre compte du fait que les sites Web proposent en général moins de contenu audio que les émissions de radio, étant donné que ceux-là comportent plusieurs pages qui en sont dépourvues. Cependant, on constate des utilisations très différentes de contenu audio d’une section à l’autre des sites Web.

[16] Il y a trois sources possibles de recettes publicitaires attribuables aux différentes sections d’un site Web de station de radio : la publicité par bannière qu’on fait en général sur le site, la publicité par bannière directement liée à la diffusion simultanée et l’augmentation des tarifs de publicité conventionnelle à mettre au compte de l’accroissement de l’audience globale qu’entraîne la webdiffusion. Nous concluons qu’aucune correction ne s’impose dans le cas de ces deux dernières sources de revenus, au motif qu’elles se rapportent directement au signal conventionnel. En fait, la SOCAN reçoit déjà une rémunération au titre de la troisième source de revenus, dans la mesure où les audiences Internet influent sur les tarifs que les stations peuvent obtenir de leurs annonceurs.

[17] Il n’en va pas de même pour la publicité générale qu’on trouve sur le site Web. Selon la preuve, renforcée par les démonstrations faites à l’audience, il est possible de visiter le site Web d’une station de radio sans jamais écouter le signal de cette dernière ou, plus généralement, sans ne jamais rien écouter. Par conséquent, nous réduirons l’assiette tarifaire pour tenir compte de ces pages Web sur lesquelles aucun son ne peut être entendu.

[18] Nous concluons que le taux à payer devrait être le taux effectif applicable aux signaux conventionnels des stations de radio commerciales, soit 4,2 pour cent. Ce taux ne s’appliquera qu’à une fraction de l’assiette tarifaire, selon les conclusions formulées plus loin. [3]

[19] Les stations de radio commerciales ne paient que 3,2 pour cent de la première tranche de 1,25 million de dollars de leurs revenus. Dans la décision Radio commerciale, 2005, [4] la Commission a conclu que, « [a]fin d’alléger le fardeau que l’augmentation du tarif peut imposer aux stations plus petites et moins rentables, il est nécessaire, au moins temporairement, d’étager le tarif en plafonnant le taux auquel ces stations sont assujetties. » On trouve la même conclusion dans la décision Radio commerciale, 2008. [5] Il n’y a aucune raison, cependant, de faire bénéficier de la même concession les activités Internet des stations de radio. Les motifs qui ont amené la Commission à concéder cet avantage ne valent pas dans l’environnement Internet. Le fardeau réglementaire qui pèse sur la radio commerciale impose des coûts et des restrictions dont l’environnement Internet, non réglementé, est tout simplement exempt. Les coûts fixes sont d’une nature et d’un ordre de grandeur différents. Il n’y a pas de taux « existant » à « plafonner », de manière temporaire ou permanente. Enfin, le plafonnement du taux pourrait être temporaire. Dans la décision Radio commerciale, 2005, la Commission a noté explicitement qu’il incomberait à l’ACR de la convaincre que le tarif 1.A (Radio commerciale) de la SOCAN devrait rester étagé après 2007.

B. La webdiffusion audio

[20] M. Liebowitz a analysé les webdiffusions audio fondées sur l’abonnement et sur la publicité afin d’en tirer une proposition de taux pour la webdiffusion audio assimilable à l’activité des stations de radio commerciales. Il a choisi comme mesure de référence une moyenne des taux du tarif 1.A de la SOCAN respectivement applicables à la forte et à la faible utilisation de musique. Il a ainsi obtenu un taux d’environ 3,8 pour cent, qu’il a corrigé pour arriver à un taux final.

[21] M. Liebowitz a apporté un certain nombre de corrections – pour tenir compte du fait que la musique ne remplace pas des personnalités d’antenne, du fait que le contenu parlé vaut deux fois plus que la musique, et de l’absence d’indicatifs de station et d’autopromotion – qui l’ont amené à proposer une fourchette de 6,4 à 8,9 pour cent.

[22] Cependant, dans sa réplique, M. Liebowitz a concédé que la mesure de référence qui convient est le taux élevé applicable à la radio, soit 4,4 pour cent, et que la même valeur devrait être attribuée à l’utilisation additionnelle de musique qu’à l’utilisation existante. Par suite, il a remplacé sa proposition concernant la webdiffusion audio par un taux unique de 5,95 pour cent.

[23] M. Mathewson ne souscrit pas à l’évaluation de la musique par rapport aux prestations des personnalités d’antenne que propose M. Liebowitz. Selon lui, la valeur de l’utilisation additionnelle de musique devrait être considérée comme égale à celle de l’utilisation existante. Le rapport des valeurs du contenu parlé et de la musique n’est pas nécessairement le même dans les webdiffusions audio que dans la radio conventionnelle parce que l’auditeur d’une webdiffusion audio contenant de la musique peut préférer une formule exclusivement musicale à un composé de musique et de parlé. Enfin, M. Mathewson fait valoir que M. Liebowitz ne tient pas compte de la différence des revenus produits par la webdiffusion exclusivement musicale et par la diffusion de contenus associant le parlé et la musique. Si le revenu produit par la webdiffusion à contenu exclusivement musical est moindre, il n’y a pas de raison économique d’attribuer une valeur plus élevée à la musique additionnelle dans la webdiffusion audio.

[24] M. Mathewson pense comme M. Liebowitz que la mesure de référence adéquate est le taux payé par les stations de radio commerciales conventionnelles. Cependant, selon lui, ce taux ne devrait être assis que sur les recettes publicitaires exclusivement attribuables aux sites Web – tirées par exemple de la publicité par bannière et par passerelle – qui sont associées à des contenus incluant de la musique, recettes dont il évalue la part dans l’ensemble à environ 30 pour cent.

[25] L’ACR soutient que, même si la Commission retenait les chiffres que la SOCAN a tirés du rapport Erin, [6] le contenu musical n’occupe que 34 pour cent de la durée totale des segments audio diffusés sur le Web. Ce chiffre représente 44,7 pour cent de la quantité de musique utilisée par la radio conventionnelle; [7] si on utilise le taux de 4,4 pour cent pour la radio conventionnelle, le taux applicable devrait donc être de 1,97 pour cent.

[26] Nous pensons comme les parties que la meilleure mesure de référence dont nous disposons pour les webdiffusions audio des stations de radio commerciales est le taux de la SOCAN applicable aux stations de radio commerciales conventionnelles. Il convient de corriger ce taux pour tenir compte des différences à l’égard de la disponibilité des contenus non audio.

[27] Une correction à la hausse pourrait se justifier dans le cas des transmissions audio qui contiennent plus de musique que le signal conventionnel d’une station de radio commerciale. Cependant, d’autres facteurs pourraient entraîner une correction à la baisse. Par exemple, nombre de sites de radio offrent des segments de durée fixe consistant en clips audio ou audiovisuels distincts. Le contenu musical de ces segments, selon la SOCAN, est de 34 pour cent, [8] ce qui devrait justifier une correction à la baisse de la mesure de référence.

[28] Pour bien calculer cette correction, nous aurions besoin d’en savoir plus sur la manière dont les stations de radio utilisent précisément la musique dans les webdiffusions audio, en particulier sur l’importance relative des transmissions audio et des segments de durée fixe. À défaut de tels renseignements, force nous est de conclure que ces deux corrections tendent à se neutraliser. Par conséquent, nous n’apporterons pas de correction à la mesure de référence, et nous appliquons pour cette catégorie le même taux que celui déjà établi pour les stations de radio conventionnelles.

C. La webdiffusion audiovisuelle, les jeux et les autres utilisations

[29] Les stations de radio commerciales utilisent la musique sur leurs sites Web selon bien d’autres modes que la webdiffusion et la diffusion simultanée audio. En fait, la SOCAN propose que, lorsqu’un site de radio commerciale (ou n’importe quel site) offre des types d’utilisation multiples, le droit de licence le plus élevé s’applique à l’utilisation pertinente, et que soient réduits de 10 pour cent les droits de licence découlant de l’application de tous autres éléments du tarif. L’ACR ne souscrit pas à cette façon de voir. Elle soutient qu’il s’agirait là de plus qu’un simple cumul : d’une « superrémunération ».

[30] Le rapport Erin fournit des éléments de preuve touchant l’importance quantitative de chacun des différents types d’utilisation de musique. [9] Cependant, il ne propose pas d’éléments tendant à établir l’importance relative de chacun de ces différents types d’utilisation sur un site donné et l’importance relative de la musique pour chacune de ces utilisations. Par conséquent, nous ne pouvons quantifier de manière fiable la contribution de chacune de ces utilisations aux revenus du site. La seule conclusion utile que nous puissions établir est que toutes ces activités devraient être considérées à la fois et que le taux de la radio conventionnelle devrait leur être appliqué.

D. Le taux et l’assiette tarifaire

i. Le taux

[31] Nous décidons d’appliquer le taux du tarif 1.A de la SOCAN, y compris ses dispositions relatives à la faible utilisation de musique, à tous les types d’utilisation de musique par un radiodiffuseur commercial sur son site Web. Les taux particuliers que nous homologuons sont précisés dans l’annexe.

ii. L’assiette tarifaire

[32] À l’égard de leur signal conventionnel, les stations de radio commerciales basent le calcul de leurs redevances sur leurs seules recettes publicitaires. La raison en est que ces recettes constituent une mesure de référence de l’audience qu’elles réussissent à attirer, ce qui n’est pas le cas des autres revenus, par exemple les revenus de production.

[33] Sur Internet, cependant, les recettes publicitaires ne sont pas la seule forme de revenus qui dépende de la popularité du site. Les revenus d’abonnement en sont une autre, ainsi que la rémunération que l’exploitant du site reçoit chaque fois qu’un visiteur clique pour passer à un autre site. À défaut d’éléments prouvant que les sites Web procurent une quelconque forme de revenus qui ne dépendrait pas du nombre de visites, nous estimons préférable d’inclure la totalité des revenus liés à Internet dans l’assiette tarifaire. Nous devons également tenir compte du fait que sur Internet, la musique n’est pas toujours programmée de la même façon et peut être utilisée, et payée, dans le cadre d’un très grand nombre de conditions et de modèles d’affaires. Le tarif applicable à toutes les catégories de sites Web producteurs de revenus sera fondé sur ce principe.

[34] Nous concluons également que seule une fraction du total des revenus d’un site de radio commerciale devrait être assujettie au tarif. La constatation du SRG selon laquelle environ 30 pour cent de l’ensemble des visualisations de pages consistent en séances de transmission comportant soit une webdiffusion soit une diffusion simultanée ne donne qu’une idée partielle de l’utilisation de musique, qui peut aussi être associée dans une certaine mesure à d’autres activités telles que la webdiffusion audiovisuelle et les jeux. Or, nous ne disposons pas de renseignements sur ces dernières utilisations.

[35] De prime abord, il semblerait que seules les recettes qui peuvent être liées à la musique devraient être incluses dans l’assiette tarifaire. Cette affirmation soulève au moins trois questions. Premièrement, il pourrait être difficile voire impossible de ventiler les revenus de cette façon. Ensuite, si l’utilisateur peut se limiter aux recettes liées à la musique, il y aura d’inévitables disputes sur ce qui est lié ou non à la musique. Il vaut mieux éviter un tel débat dans la mesure du possible, au moins jusqu’à ce qu’il soit possible de concevoir un système de suivi et d’affectation des recettes liées à la musique.

[36] Enfin, et chose encore plus importante, le fait de cibler exclusivement les recettes liées à la musique entraînera un double rabais si les stations de radio commerciales paient le même taux pour l’utilisation de la musique diffusée par Internet et par la voie des ondes. Les taux qui s’appliquent à la radiodiffusion hertzienne tiennent compte du fait que tout le contenu radiophonique (et télévisuel) comporte des sons, mais qu’il ne s’agit pas toujours de musique ni, à plus forte raison, de musique du répertoire de la SOCAN. C’est précisément la raison pour laquelle la Commission a fixé, il y a plusieurs années, un taux pour faible utilisation de musique. Autrement dit, une station de radio ou de télévision paie des redevances à la SOCAN sur les recettes générées par le contenu audio autre que la musique, comme les bulletins de nouvelles, les émissions d’actualités ou les discussions; les taux sont fixés en conséquence.

[37] Par ailleurs, il faut tenir compte du fait que le son est omniprésent dans le signal qu’une station de radio transmet par voie hertzienne, alors qu’il ne l’est pas nécessairement dans le site Web de la station : un nombre important de pages consultées n’ont aucun contenu audio. Par conséquent, si le taux du Tarif 1.A doit servir de point de départ pour l’établissement du tarif applicable aux activités Internet d’une station de radio commerciale, la portion des recettes liées à Internet qui sont visées par le tarif devrait être établie en fonction du contenu audio par rapport au reste du contenu, mesuré par le nombre de pages visualisées.

[38] Nous poserons donc en principe que l’assiette tarifaire sera d’au plus 50 pour cent des revenus de la station liés à Internet. Les radiodiffuseurs pourront réduire encore cette assiette en mesurant et en rendant compte du ratio des visualisations de pages ayant du contenu audio aux pages totales visualisées. Nous ne voulons pas obliger toutes les stations à mesurer leurs activités sur Internet; c’est pourquoi nous avons décidé de ne pas inclure la totalité des revenus Internet dans l’assiette tarifaire. Mais nous ne voulions pas non plus accorder une réduction trop considérable et risquer ainsi qu’aucune station de radio ne soit incitée à réduire encore son assiette tarifaire. Le fait de retrancher la moitié des revenus de l’assiette tarifaire devrait soulager de nombreuses stations du fardeau d’avoir à mesurer leurs activités sur Internet, tout en permettant à la SOCAN et à la Commission d’en apprendre plus sur l’importance de ces différents types d’utilisation.

III. Catégorie C – La radio non commerciale

[39] Les radiodiffuseurs non commerciaux utilisent aussi la musique de diverses manières sur leurs sites Web.

A. La diffusion simultanée audio

[40] La SOCAN propose pour les stations de radio non commerciales un taux de 3,6 pour cent, à l’appui duquel elle n’a déposé ni éléments de preuve ni justification.

[41] L’Association nationale des radios étudiantes et communautaires (ANREC) soutient que la diffusion simultanée sur Internet n’est pas une nouvelle utilisation qui justifierait la fixation d’un taux différent du taux de 1,9 pour cent que les stations en question paient actuellement pour leurs activités conventionnelles. L’ANREC fait valoir que, en fait, comme le tarif 1.B (Radio non commerciale) actuel de la SOCAN est assis sur les dépenses brutes, les stations non commerciales paient déjà des redevances pour leurs activités de diffusion simultanée sur Internet dans le cadre de ce tarif, la SOCAN n’ayant pas donné pour instructions aux diffuseurs de retrancher du total de leurs dépenses brutes les coûts liés à la diffusion sur Internet.

[42] Étant donné que les stations paient déjà des redevances au titre de ces activités sur Internet, toujours selon l’ANREC, l’application rétroactive du présent tarif entraînerait une double rémunération pour la SOCAN. L’ANREC fait aussi observer que les stations qu’elle représente ne font pas de publicité sur leurs sites Web. Enfin, elle affirme qu’on ne devrait pas imposer de redevances minimales à ces stations.

[43] Comme dans le cas de la diffusion simultanée pratiquée par les stations de radio commerciales, nous concluons que le taux actuellement applicable aux activités conventionnelles des stations de radio non commerciales devrait aussi s’appliquer à leurs activités de diffusion simultanée sur Internet.

B. La webdiffusion audio

[44] La SOCAN propose l’application d’un taux de 3 pour cent à la webdiffusion audio assimilable à la radio non commerciale. Cette proposition semble fondée sur l’argument que tous les utilisateurs, même les plus modestes, ont besoin d’une licence pour utiliser la musique de la SOCAN et qu’on ne devrait pas attendre de cette dernière qu’elle subventionne l’utilisation de musique par les petits utilisateurs.

[45] L’ANREC soutient qu’à l’égard de la webdiffusion audio, les diffuseurs Internet devraient être traités de la même façon que les radiodiffuseurs non commerciaux conventionnels et que le taux actuel du tarif 1.B de la SOCAN (1,9 pour cent) devrait aussi s’appliquer à la diffusion sur Internet.

[46] Nous sommes d’accord avec la SOCAN pour dire qu’on ne devrait pas attendre d’elle qu’elle subventionne l’utilisation de musique. Nous sommes cependant d’accord avec la position de l’ANREC quant au taux à appliquer à la webdiffusion par les radios non commerciales. De plus, il conviendrait selon nous d’apporter une correction pour tenir compte de la différence entre les diffuseurs conventionnels et les diffuseurs Internet sous le rapport de cette utilisation. Nous sommes cependant dans l’impossibilité d’apporter cette correction, faute de données sur ladite utilisation.

[47] Par conséquent, comme dans le cas de la diffusion simultanée, nous concluons que le taux conventionnel des stations de radio non commerciales devrait aussi s’appliquer à leurs activités de webdiffusion.

C. La webdiffusion et la diffusion simultanée audiovisuelles, les jeux et les autres utilisations

[48] Nous ne disposons pas de beaucoup d’éléments de preuve touchant l’utilisation de musique dans le cadre des autres activités que les stations non commerciales peuvent pratiquer sur leurs sites Web. Les démonstrations faites à l’audience semblent indiquer que ces autres activités ne mettent en jeu qu’une faible utilisation de musique, voire parfois aucune. Nous ne pouvons donc que conclure qu’elles devraient être soumises au taux conventionnel, dans la mesure où il leur est applicable.

D. Le taux et l’assiette tarifaire

[49] Nous décidons donc, comme nous l’avons fait pour la radio commerciale, d’appliquer le taux du tarif 1.B de la SOCAN à tous les types d’utilisation de musique par les radiodiffuseurs non commerciaux sur leurs sites Web.

[50] Nous réduirons aussi l’assiette tarifaire de la proportion de 50 pour cent établie pour la radio commerciale. Ainsi, les radiodiffuseurs non commerciaux appliqueront le taux de redevance de 1,9 pour cent à seulement 50 pour cent des dépenses liées à leurs sites Web. Il sera permis aux stations non commerciales de réduire encore leur assiette tarifaire, de la même façon que les radiodiffuseurs commerciaux.

IV. Catégorie D – La télévision commerciale, les autres services de télévision, les services sonores payants, les services de radio par satellite

A. La diffusion simultanée audiovisuelle

[51] M. Liebowitz propose d’utiliser le taux de 1,9 pour cent fixé par la Commission pour les stations de télévision commerciales (tarif 2.A de la SOCAN) comme mesure de référence pour la diffusion simultanée de signaux de stations de télévision et de le corriger en fonction de la différence de rentabilité des deux activités, tout comme il l’a fait pour les stations de radio. Il pose en hypothèse que la télévision Internet ne représente pratiquement que des bénéfices, étant donné que le signal Internet est le même que le signal conventionnel et que la transmission Internet n’influe pas sur les coûts de création des programmes de télévision ni sur les frais d’administration.

[52] Selon l’estimation de M. Liebowitz, la proportion des économies par rapport aux coûts restants de la transmission Internet du signal est de l’ordre de 240 pour cent. Il soutient que la moitié de cet excédent de rentabilité devrait être attribuée aux titulaires de droits. On obtient ainsi, à partir du taux de 1,9 pour cent appliqué à la télévision conventionnelle, un taux de 4,19 pour cent pour la diffusion simultanée de signaux de télévision. La SOCAN propose en conséquence un taux de 4 pour cent, à asseoir sur les seuls revenus produits par la vente de publicité sur les sites Web.

[53] M. Mathewson pense lui aussi que le tarif 2.A est la mesure de référence qui convient, mais soutient que le taux ne devrait être assis que sur les revenus attribuables à la transmission du signal de télévision. Selon lui, la transmission de musique ne représente que 1,3 pour cent de l’activité sur les sites Web des stations de télévision.

[54] Nous avons déjà rejeté l’analyse de M. Liebowitz fondée sur les coûts irrécupérables et concluons que le taux appliqué à la télévision conventionnelle devrait servir de mesure de référence pour la diffusion simultanée de leurs signaux par les stations de télévision.

[55] La seule autre correction possible se rapporte à l’utilisation globale de musique sur le site. La preuve montre que très peu de télédiffuseurs diffusent leur signal en simultané. Selon le rapport du SRG, seulement 1,3 pour cent des visualisations de pages sur les sites Web de stations de télévision incluent du contenu audio. Nous croyons donc que le taux de 1,9 pour cent ne devrait pas être assis sur la totalité des revenus produits par le site Web.

B. La webdiffusion audiovisuelle

[56] Certaines stations de télévision diffusent sur leur site Web un signal audiovisuel différent de leur signal conventionnel. Ce signal peut comprendre de la musique aussi bien que d’autres éléments de programmation. La SOCAN propose un taux de 4 pour cent pour ce type d’utilisation. Elle n’a cependant pas produit d’éléments de preuve se rapportant spécialement à la webdiffusion audiovisuelle et se contente de proposer que le taux applicable à celle-ci soit le même que celui retenu pour la diffusion simultanée d’un signal de station de télévision.

[57] L’ACR soutient que le taux devrait être le même que celui des tarifs 2.A et 17 (Services de télévision payante et services spécialisés) de la SOCAN, soit 1,9 pour cent, à réduire de 19 à 24 pour cent pour tenir compte de la faible utilisation de musique. Elle ajoute que le taux ne devrait être assis que sur les revenus du site Web liés à la musique et non sur l’ensemble de ses revenus. Selon l’estimation de l’ACR, une proportion de 1,3 pour cent du total des revenus des sites Web est liée à la musique.

[58] Nous pensons comme l’ACR que le tarif actuellement appliqué à la télévision conventionnelle est la mesure de référence adéquate pour cette utilisation.

C. La webdiffusion audio, les jeux et les autres utilisations

[59] Le rapport Erin, s’il donne des exemples de divers types d’utilisation de musique par les stations de télévision, ne propose aucun élément de preuve touchant l’importance de l’utilisation de musique. Ici encore, nous ne pouvons que conclure que le taux fixé pour la télévision conventionnelle devrait s’appliquer à ces autres activités.

D. Le taux et l’assiette tarifaire

[60] Nous décidons d’appliquer le taux du tarif 2.A de la SOCAN à tous les types d’utilisation de musique par les télédiffuseurs commerciaux sur leurs sites Web.

[61] La preuve indique que 1,3 pour cent des visualisations de pages sur les sites Web de stations de télévision comportent une transmission de contenu audio. Nous ne disposons pas d’éléments de preuve touchant les autres types d’utilisation de musique sur ces sites. Comme nous le disions plus haut à propos de la radio commerciale, [10] il est important que le pourcentage des revenus formant l’assiette tarifaire soit tel qu’il incite les stations de radio à réduire encore leur assiette en fournissant à la SOCAN et à la Commission des renseignements utiles. Par conséquent, nous décidons que le taux sera assis sur 10 pour cent des revenus du site Web de télévision commerciale. Les stations pourront réduire encore leur assiette sous les conditions formulées plus haut.

[62] La SOCAN a proposé d’appliquer à la diffusion simultanée de signaux de télévision les dispositions relatives à la faible utilisation de musique de son tarif 17. Nous souscrivons à cette idée et fixons un taux de 0,8 pour cent des revenus du site Web de télévision commerciale dans le cas où la musique représente moins de 20 pour cent du temps de diffusion.

E. Services sonores payants et radio par satellite

[63] La SOCAN a proposé un tarif fondé sur l’utilisation plutôt que sur l’utilisateur. Par conséquent, elle n’a proposé rien de particulier pour les services sonores payants ou les services de radio par satellite. Nous ne sommes pas pour autant privés d’un point de référence. Tout comme dans le cas de la radio commerciale, le taux applicable à ces services devrait être celui qui est prévu par le tarif principal de la SOCAN, et faire l’objet d’un éventuel rabais lorsque l’information sur l’utilisation aura été adéquatement suivie et communiquée. Même si le tarif applicable à la radio par satellite n’est pas encore établi, le tarif Internet applicable à ces services peut être homologué au moyen d’une formule que la Commission a appliquée à la télévision de la SRC en 1991.

V. Catégorie E – La Société Radio-Canada (SRC); l’Office de la télécommunication éducative de l’Ontario (TVO); la Société de télédiffusion du Québec (Télé-Québec)

A. La SRC

[64] Les sites Web de la SRC pratiquent la diffusion simultanée de signaux de radio, la webdiffusion audio et audiovisuelle, ainsi que d’autres types d’activités.

B. La diffusion simultanée audio

[65] La SOCAN propose d’appliquer à la diffusion simultanée du signal de radio de la SRC le même taux qu’elle propose pour la radio conventionnelle, soit 8 pour cent. M. Liebowitz n’a pas justifié par une analyse spécifique le taux proposé pour la SRC. La SOCAN semble fonder sa position sur le principe qu’il convient de traiter de la même façon les stations de radio publiques et privées dans l’environnement Internet.

[66] La SRC soutient que la diffusion simultanée de son signal sur Internet ne devrait entraîner pour elle aucune charge supplémentaire. Elle fait valoir que la diffusion simultanée ne fait que reproduire un signal conventionnel (hertzien). Il s’agirait là simplement d’une autre façon d’écouter la radio.

[67] L’audience Internet de la SRC est pour l’instant marginale. La SRC soutient que le droit à la transmission Internet devrait être inclus dans le tarif existant (Tarif 1.C de la SOCAN). Elle a produit à l’appui de cette position des éléments de preuve relatifs à des accords avec des associations d’artistes telles que l’American Federation of Musicians of the United States and Canada (AFM), l’Alliance of Canadian Cinema, Television and Radio Artists (ACTRA) et l’Union des artistes (UDA), qui montrent que les titulaires de droits ont consenti à inclure la transmission Internet dans l’ensemble de droits en vertu desquels la SRC les rémunère déjà.

[68] Nous rejetons la proposition de la SOCAN à cet égard. Elle est fondée sur le taux proposé pour la diffusion simultanée des signaux des stations de radio commerciales assimilables à celles du tarif 1.A, taux obtenu à partir de l’analyse basée sur les coûts irrécupérables que nous avons déjà rejetée.

[69] Nous concluons que la SRC devrait rémunérer dans une certaine mesure la SOCAN pour la diffusion simultanée de son signal sur Internet et que cette rémunération devrait autant que possible être assise sur les revenus de ces activités de diffusion simultanée. Cependant, la SRC paie actuellement un forfait annuel convenu avec la SOCAN au titre de ses activités radiophoniques conventionnelles. Ce montant n’est pas lié aux revenus ou aux dépenses de la SRC. Par conséquent, l’accroissement d’audience que pourraient valoir à la SRC ses activités de diffusion simultanée sur Internet n’entraînera pas automatiquement une augmentation des redevances versées à la SOCAN, comme ce serait le cas par exemple pour la radio commerciale. Nous ne disposons pas de données, touchant les revenus publicitaires ou autres ou l’accroissement de l’audience, sur lesquelles fonder une augmentation des redevances à verser à la SOCAN.

[70] Par conséquent, force nous est pour le moment de considérer que les redevances actuellement versées par la SRC à la SOCAN rémunèrent déjà le droit d’utiliser la musique de cette dernière dans le cadre de la diffusion simultanée sur Internet. Quand viendra le temps de réviser le tarif 1.C de la SOCAN, la Commission sera en mesure d’établir de nouveau un lien entre les redevances versées par la SRC et son audience, y compris celle attribuable à Internet, étant donné que la méthode employée dans le passé pour établir les redevances à payer par la SRC était liée aux recettes publicitaires de la radio commerciale.

C. La webdiffusion audio

[71] La SOCAN propose d’appliquer à cette catégorie le même taux que celui de la webdiffusion audio assimilable à la radio conventionnelle. Elle soutient ici encore que, dans l’environnement non réglementé d’Internet, la radio publique devrait être traitée de façon identique à la radio privée, et elle propose le même taux de 6 pour cent pour les activités de webdiffusion audio de la SRC.

[72] La SRC fait valoir que la SOCAN omet de prendre en considération son rôle spécial d’intérêt public. La SRC admet qu’elle devrait rémunérer la SOCAN dans une certaine mesure pour le droit de communiquer sur demande le contenu de programmes archivés, mais elle conteste la proposition de la SOCAN.

[73] La preuve montre que les programmes que la SRC diffuse sur le Web comportent environ 9 pour cent du contenu musical des programmes de radio conventionnelle. La SRC diffuse délibérément sur le Web des programmes à faible contenu musical et retranche le contenu musical de certaines de ses émissions parce qu’elle n’est pas en mesure de libérer les droits.

[74] La SRC affirme que la valeur de la réutilisation de contenus protégés sur Internet ne fait que 5 pour cent de la valeur de la transmission originale, de sorte qu’une correction de 95 pour cent devrait être appliquée aux redevances qu’elle paie au titre de ses activités conventionnelles. Cette correction est fondée sur l’examen des accords que la SRC a conclus avec des associations telles que l’AFM, l’ACTRA, l’UDA et la Société des auteurs de radio, télévision et cinéma (SARTEC). Ces accords prévoient le versement d’une redevance supplémentaire de 10 pour cent pour la réutilisation de contenus protégés sur Internet. Cependant, fait valoir la SRC, il s’agit là de programmes acquis en exclusivité. Or, comme elle réutilise sur Internet une part du contenu musical en non-exclusivité, la redevance supplémentaire de 10 pour cent devrait être réduite de moitié, donc portée à 5 pour cent.

[75] La SRC soutient que la rémunération additionnelle de la SOCAN au titre de ses activités de webdiffusion audio devrait être établie en fonction du montant qu’elle paie déjà pour ses activités conventionnelles, qu’il conviendrait de réduire de 91 pour cent pour tenir compte de l’utilisation moindre de musique et de 95 pour cent de plus en raison de la valeur moindre de la webdiffusion. Comme la radio de la SRC paie actuellement 1 486 836 $ en vertu de son dernier tarif homologué, l’application des deux réductions proposées se traduirait par le paiement d’une somme de 6 690 $.

[76] Nous souscrivons à la prémisse de la SOCAN selon laquelle les radios publique et privée devraient être traitées de la même façon, encore que nous en tirions une conclusion différente. Pour les raisons déjà indiquées au paragraphe 68, nous rejetons la proposition de taux de la SOCAN. La Commission a homologué antérieurement (en 1991) le tarif des activités conventionnelles de la SRC en se fondant sur le taux des activités conventionnelles de la radio commerciale. Nous concluons que la même méthode convient à l’environnement Internet. Nous adoptons donc l’approche de la SRC et retenons le montant qu’elle paie actuellement au titre de la radio comme mesure de référence pour l’établissement du taux applicable à ses activités de webdiffusion audio.

[77] Nous concluons qu’il convient d’apporter une correction à cette mesure de référence pour tenir compte de la différence, sous le rapport de l’utilisation de musique, entre les services de radio conventionnelle de la SRC et ses activités de webdiffusion audio. La SRC affirme qu’elle utilise pour la webdiffusion audio une proportion de 9 pour cent du contenu musical de ses services de radio conventionnelle. La SOCAN fait valoir que ces calculs n’excluent pas la musique appartenant au domaine public. Comme la SRC l’a fait remarquer, une telle exclusion aurait en fait pour effet de réduire le pourcentage à payer à la SOCAN. La SRC consent à l’application de ce chiffre de 9 pour cent, et comme c’est le seul dont nous disposons, c’est lui que nous retiendrons.

[78] Nous pensons comme la SRC qu’il convient d’apporter une deuxième correction à la mesure de référence pour tenir compte de la valeur de la réutilisation de contenus protégés sur Internet. Lorsque la rémunération des droits est exprimée en pourcentage des recettes publicitaires (ou autres revenus), comme c’est le cas pour la radio conventionnelle, les redevances s’alignent automatiquement sur le niveau d’activité Internet. Une correction s’impose ici parce que la rémunération est forfaitaire. Nous retiendrons le taux de redevance pour réutilisation de 10 pour cent proposé par la SRC. Cependant, nous n’adopterons pas le taux de 5 pour cent qui, selon cette dernière, rendrait mieux compte de la réutilisation en non-exclusivité du contenu musical sur le site Web. En effet, les éléments de preuve relatifs à la valeur de l’exclusivité dans ce contexte ne nous paraissent pas concluants.

D. La webdiffusion audiovisuelle

[79] Pour les activités de webdiffusion audiovisuelle de la SRC, la SOCAN propose 4 pour cent des dépenses brutes d’exploitation, soit le même taux que celui pour la télévision commerciale. La SOCAN n’a pas produit d’éléments de preuve à l’appui de cette proposition.

[80] La SRC voudrait quant à elle appliquer à ses activités audiovisuelles la méthode qu’elle a retenue pour ses activités de webdiffusion audio, c’est-à-dire apporter deux corrections – réductions de 91 pour cent pour l’utilisation de musique et de 95 pour cent pour la différence de valeur – à la rémunération qu’elle verse déjà à la SOCAN (établie par entente) au titre de ses activités de télévision. La SRC propose un montant annuel de 31 153,50 $. Ce montant résulte de l’application des deux corrections au montant de 6 923 000 $, équivalent au taux arrondi homologué dans le tarif 2.D visant la télévision de la SRC (6 922 586 $).

[81] Sous réserves des observations formulées plus loin, nous approuvons les deux corrections que la SRC propose d’apporter au tarif 2.D. [11]

E. Les jeux et autres utilisations

[82] Selon la description que la SRC a présentée de ses sites Web, d’autres utilisations de musique, par exemple dans le cadre de jeux, y sont possibles. Nous ne disposons cependant pas d’éléments de preuve précis touchant le contenu musical de ces utilisations ou leur popularité. Nous appliquerons donc à ces utilisations la même méthode que nous avons employée jusqu’à maintenant.

F. Le taux et l’assiette tarifaire

[83] Le montant des redevances à payer s’établirait donc à 1,5 pour cent [0,1 × 0,15 = 0,015] de la somme que la SRC paie à la SOCAN au titre de la radiodiffusion et de la télédiffusion conventionnelles. Le premier chiffre correspond à la redevance de réutilisation établie plus haut. Le deuxième rend compte de l’utilisation de musique. Selon la preuve, les webdiffusions audio et audiovisuelle ont un contenu musical équivalent à 9 pour cent du contenu musical des signaux conventionnels. Pour faire entrer en compte un certain degré d’utilisation de musique dans les jeux et autres activités, nous fixons le facteur de correction à 15 pour cent. La SRC pourra réduire encore ce facteur de correction quand elle mesurera ses activités sur Internet et en rendra compte.

[84] La SRC a versé au total 8 409 422 $ à la SOCAN en 2006. L’application à cette somme de la formule que nous homologuons établirait à 126 141,33 $ le montant de redevances.

G. TVO et Télé-Québec

[85] Puisque la SOCAN a proposé un tarif fondé sur les utilisations, elle n’a pas proposé de taux spéciaux pour TVO ou Télé-Québec. Nous n’en sommes pas pour autant privés de point de repère. Dans le passé, la Commission a fixé les taux applicables à ces télédiffuseurs publics d’une manière semblable, si ce n’est identique, à la méthode employée pour la SRC. [12] Par conséquent, nous suivrons la même méthode qu’avec la SRC pour établir le taux à payer par TVO et Télé-Québec. Les montants qu’ils ont payés à la SOCAN en 2006 sont respectivement de 300 080 $ et de 180 000 $. Les montants qu’ils paieraient en vertu de ce tarif seraient de 4 500 $ (300 080 $ × 0,015) et de 2 700 $ (180 000 $ × 0,015), respectivement. Les deux télédiffuseurs pourront eux aussi réduire encore ces montants en mesurant leur utilisation de musique et en en rendant compte de manière satisfaisante.

VI. Catégorie F – Les sites Web audio

[86] Cette catégorie du tarif s’appliquera aux exploitants des autres sites conçus principalement pour l’écoute de fichiers audio. Cette catégorie comprend notamment les sites Web qui, comme Iceberg, se rapprochent des services sonores payants. La principale activité pratiquée sur ces sites est par définition la webdiffusion audio, mais on y trouve aussi d’autres activités.

A. La webdiffusion audio

[87] La SOCAN fait valoir que ces sites Web offrent des chaînes à contenu exclusivement musical selon des formules fondées sur la publicité ou l’abonnement. La SOCAN propose un taux de 9 pour cent pour cette catégorie. Cette proposition est basée sur la moyenne du taux actuel homologué par la Commission pour les services sonores payants (12,35 pour cent), qui sont offerts sur abonnement, et du taux de 6 pour cent proposé par M. Liebowitz pour les services à revenus publicitaires assimilables à la radio commerciale.

[88] Les telcos/câblos contestent cette proposition. Elles soutiennent que la mesure de référence devrait être le tarif appliqué à la radio commerciale conventionnelle, sous réserve d’une correction en fonction de la différence à l’égard de l’utilisation de musique. Ainsi, on devrait fixer pour les webdiffusions audio à contenu exclusivement musical un taux d’environ 25 pour cent plus élevé que pour la radio commerciale.

[89] Iceberg pense comme les telcos/câblos qu’on devrait apporter une correction pour tenir compte du degré plus élévé d’utilisation de musique. Selon sa propre estimation, cette entreprise utilise le répertoire de la SOCAN sur environ 95 pour cent de son temps de programmation. Elle fonde ce chiffre sur une estimation selon laquelle une proportion de 5 pour cent de la musique qu’elle utilise appartient au domaine public. Si l’on compare ces estimations à la proportion que représente la musique dans le contenu de la radio conventionnelle, soit 76 pour cent, on obtient une correction à la hausse de 23 pour cent.

[90] Iceberg soutient que les taux devraient être de 4 pour cent pour les faibles revenus et de 5,5 pour cent pour les revenus plus élevés. Elle fait valoir que ces taux ne devraient être assis que sur les revenus liés à la musique provenant de la vente de publicité dans le lecteur de musique, dont elle estime à environ 32,3 pour cent la part dans l’ensemble de ses revenus.

[91] Nous pensons comme les opposantes que le tarif appliqué aux services sonores payants numériques n’est pas la mesure de référence qui convient. La quantité de musique utilisée peut bien être semblable dans les deux cas, mais la différence des modèles opérationnels – notamment le fait que les signaux des services se vendent en bloc avec les signaux audiovisuels – rend ce tarif inapte à servir de mesure de référence.

[92] La Commission a déjà refusé dans le passé d’utiliser le taux de la radio commerciale comme mesure de référence pour l’établissement du tarif pour les services sonores payants. [13] Cette décision était fondée sur le fait que ces services ne sont pas un proche substitut de la radio commerciale et qu’ils ont des modèles opérationnels et des structures de coûts différents. Nous sommes d’avis que, si la webdiffusion audio assimilable aux services sonores payants et la radio conventionnelle n’ont pas la même structure de coûts, elles forment des substituts plus proches puisqu’elles se disputent les clics des utilisateurs sur leurs sites Web respectifs. En outre, les modèles opérationnels des sites de webdiffusion audio se sont écartés du modèle des services sonores payants pour se rapprocher de celui des recettes publicitaires. À notre avis, la mesure de référence à retenir pour ces sites de webdiffusion audio est le taux applicable à la radio commerciale conventionnelle, sous réserve de certaines corrections.

[93] Il nous faut apporter une correction pour tenir compte des différences dans la quantité d’utilisation de musique. La musique représente environ 76 pour cent du temps de programmation total des stations de radio conventionnelles, et près de 100 pour cent de celui des services de webdiffusion audio. Nous souscrivons à la thèse des opposantes selon laquelle il convient d’apporter une correction pour tenir compte du fait qu’une partie de la musique diffusée sur le Web pourrait appartenir au domaine public; à cette fin, nous acceptons la preuve des opposantes et établissons à 5 pour cent le facteur de correction. Il faut donc augmenter le taux de référence correspondant à la radio commerciale de 25 pour cent (95 pour cent / 76 pour cent) pour tenir compte du pourcentage plus élevé d’utilisation de musique qui caractérise les webdiffusions audio. Le taux effectif de la radio commerciale étant de 4,2 pour cent, nous fixons donc à 5,3 pour cent des revenus le taux applicable aux services de webdiffusion audio à forte utilisation de musique.

B. La webdiffusion audiovisuelle, les téléchargements audiovisuels, les jeux et les autres utilisations

[94] Nous ne disposons pas de renseignements concernant spécialement ces activités que les autres sites audio peuvent pratiquer sur Internet. Nous leur appliquerons donc la même approche fondamentale que nous avons retenue plus haut et compterons sur la mesure de l’utilisation de musique pour nous fournir ultérieurement ces renseignements.

C. Le taux et l’assiette tarifaire

[95] Cette catégorie comprend de gros utilisateurs de musique tels que les sites de webdiffusion audio, mais aussi d’autres utilisateurs qui, même si leur activité principale consiste à permettre l’écoute de fichiers audio, n’emploient pas la musique au même degré. Il paraît donc équitable de distinguer trois groupes d’utilisateurs : a) les gros utilisateurs, dont la musique occupe au moins 80 pour cent du « temps d’antenne », paieront un taux de 5,3 pour cent; b) les utilisateurs moyens, dont la musique représente de 20 à 80 pour cent du « temps d’antenne », paieront le même taux que les stations de radio conventionnelles au titre de leurs activités liées à Internet, soit 4,2 pour cent; c) les petits utilisateurs, dont la musique représente moins de 20 pour cent du « temps d’antenne », paieront 1,5 pour cent de leurs revenus.

[96] Les raisons (exposées au paragraphe 19) pour lesquelles nous n’avons pas fixé un taux plus bas pour les revenus liés à Internet des stations de radio à faibles revenus s’appliquent aussi à tous les autres utilisateurs de musique opérant sur Internet. Les facteurs qui ont conduit la Commission à plafonner en 2005 et en 2008 le taux de la radio commerciale pour les petites stations n’existent pas pour les utilisateurs de musique exploitant des sites Web.

[97] Comme nous l’avons fait pour les sites Web des radiodiffuseurs commerciaux, nous concluons que le tarif ne devrait être assis que sur une fraction du total des revenus. Compte tenu de tous les facteurs pertinents, notamment des types d’utilisation de musique distingués plus haut, nous fixons l’assiette tarifaire à 50 pour cent des revenus du site Web. Il sera permis aux utilisateurs de réduire encore cette assiette en mesurant leurs activités sur Internet et en en rendant compte.

[98] Un autre facteur de réduction doit être appliqué. L’approche qu’ont suivie les parties et que nous avons retenue tient pour acquis que la presque totalité du trafic du site d’une station canadienne de radio ou de télévision met en jeu une communication au Canada. Nous n’avons donc pas permis aux utilisateurs en question de retrancher de leur assiette tarifaire les visites de clients de l’étranger. Il ne serait pas légitime de faire de même à l’égard de tous les autres sites, qui peuvent être axés dans une large mesure ou même exclusivement sur les utilisateurs étrangers. Les sites canadiens seront donc autorisés à retrancher de leur assiette tarifaire 95 pour cent des visites provenant de l’extérieur du Canada, suivant l’hypothèse selon laquelle toutes les communications aboutissant au Canada sont des communications au Canada, tandis que seulement une faible proportion des communications aboutissant à l’étranger sont néanmoins des communications au Canada. Les sites non canadiens pourront retrancher toutes les visites provenant d’ailleurs que du Canada, suivant l’hypothèse selon laquelle ces visites ne comportent jamais un lien suffisamment réel et important avec le Canada pour constituer une communication au Canada.

VII. Catégorie G – Les sites de jeux

[99] La SOCAN propose un taux de 4 pour cent des dépenses ou des revenus bruts pour les communications d’œuvres musicales de son répertoire à partir d’un site ou d’un service de jeux. M. Liebowitz n’a pas proposé d’analyse des sites de jeux. M. Hoffert a fait une démonstration de divers sites de jeux utilisant une musique de fond, soit sur la page principale, soit pendant les jeux mêmes. Le chiffre de 4 pour cent est fondé sur la similarité des sites de jeux et des films et émissions de télévision sous le rapport de l’utilisation de la musique.

[100] L’Entertainment Software Association et l’Entertainment Software Association of Canada (ESA) soutient que, si la Loi sur le droit d’auteur oblige bien la Commission à homologuer un taux dans ce cas, elle devrait adopter comme mesure de référence pour la transmission de jeux le taux de 0,8 pour cent, correspondant au taux de faible utilisation de musique du tarif 17 de la SOCAN. Elle propose ensuite de corriger ce taux en fonction de la différence entre les taux proposés par la SOCAN pour les téléchargements et les transmissions de musique, obtenant ainsi un taux de 0,3 pour cent pour les téléchargements de jeux.

[101] L’ESA fait valoir que la musique n’est pas la principale caractéristique des jeux, et que les coûts liés à la musique ne représentent que de 0 à 5 pour cent de l’ensemble des coûts de leur production. Elle applique donc un facteur de réduction de 90 pour cent, pour arriver à des taux de 0,08 et de 0,03 pour cent respectivement pour les transmissions et les téléchargements.

[102] L’ESA affirme ensuite la nécessité d’une dernière correction, fondée sur la part de la clientèle canadienne dans l’ensemble du trafic des sites de jeux. Selon le panel de l’ESA, le marché canadien représente environ 5 pour cent de ce trafic. Posant qu’une proportion de 5 pour cent du trafic équivaut à une proportion de 5 pour cent des revenus, l’ESA propose des taux respectifs de 0,004 et 0,0015 pour cent des revenus ou des dépenses pour les transmissions et les téléchargements de jeux.

[103] Nous acceptons le taux de 0,8 pour cent correspondant à une faible utilisation de musique comme mesure de référence pour les exploitants de sites de jeux. Cependant, nous ne souscrivons pas à la correction proposée par l’ESA pour tenir compte de la différence entre les transmissions et les téléchargements de jeux. Il appert que l’ESA a choisi arbitrairement le taux de 0,8 pour cent comme mesure de référence à retenir pour les transmissions de jeux. Si elle avait choisi ce taux comme mesure de référence pour les téléchargements, le taux applicable aux transmissions de jeux aurait été de 1,9 pour cent. En fin de compte, nous ne disposons pas de suffisamment d’éléments de preuve, en particulier à l’égard des différences dans l’utilisation de musique, pour établir des taux différents relativement aux transmissions et aux téléchargements de jeux.

[104] L’ESA demande une correction du tarif à la baisse pour tenir compte du fait que la musique n’est jamais la principale caractéristique d’un logiciel ou d’un site de jeux, où elle n’est utilisée qu’en fond sonore. Nous rejetons cette proposition de correction. L’utilisation du tarif 17 de la SOCAN comme mesure de référence repose déjà en grande partie sur l’hypothèse que la musique n’est pas la caractéristique principale. La correction proposée pourrait donc donner lieu à une double réduction.

A. Le taux et l’assiette tarifaire

[105] Nous homologuons pour les sites de jeux un taux de 0,8 pour cent des revenus.

[106] Nous permettrons aux sites de jeux, comme aux autres usagers, de réduire l’assiette tarifaire en fonction de l’importance relative du contenu audio. Les présentations faites durant l’audience ont montré que certaines pages des sites de jeux, notamment celles contenant l’information sur la société ou d’appui technique, ne contiennent pas de contenu audio. L’ESA n’a cependant présenté aucune preuve additionnelle traitant de l’importance des contenus non audio. De plus, la preuve que l’ESA a déposée démontre que les sites de jeux sont un monde à part, ce qui rend les comparaisons avec d’autres types de sites très difficiles. Pour ces raisons, nous permettons aux sites de jeux de réduire leur assiette tarifaire, mais uniquement s’ils mesurent et rendent compte de l’information à la SOCAN.

[107] L’ESA a proposé d’asseoir le taux sur seulement 5 pour cent des revenus, pour tenir compte du fait que les communications canadiennes ne représentent que cette proportion de l’ensemble du trafic du site de jeux moyen. Nous souscrivons à cette façon de voir, mais rejetons le pourcentage proposé. Ici comme ailleurs, nous souhaitons éviter d’opérer une réduction assez importante pour enlever à tous les sites Web toute incitation à rendre compte de leur activité. Par conséquent, nous fixons l’assiette tarifaire à 10 pour cent des revenus produits par le site Web. Il sera permis aux utilisateurs de réduire encore cette assiette en enregistrant les visites provenant du Canada et en communiquant ces statistiques.

VIII. Tous les autres sites

[108] Il y a aussi toutes sortes de sites qui utilisent de la musique de diverses façons mais dont l’activité principale n’est pas liée à l’utilisation de musique. Cela comprend par exemple les sites Web de restaurants, d’hôtels et de bars, ainsi que tous les autres sites commerciaux qui utilisent de la musique. Cela comprend également les balados d’amateur, les sites de réseautage social tels que Facebook et MySpace et les sites de partage de vidéo tel que YouTube, de même que les sites maintenus par des individus qui utilisent de la musique. L’utilisation de musique par ces sites peut prendre diverses formes, notamment la webdiffusion audio, ainsi que la webdiffusion et le téléchargement audiovisuels.

[109] M. Liebowitz n’a pas proposé d’analyse aux fins de l’établissement du taux qui conviendrait à ces utilisateurs. En réponse à une question de la Commission, la SOCAN lui a communiqué une liste de sites qui entreraient selon elle dans la catégorie des « autres sites », liste qui comprenait les sites de restaurants, d’hôtels et de fabricants d’automobiles. À en juger d’après la quantité limitée d’éléments de preuve produits, il semble que ces sites ont pour objet principal d’annoncer une marque ou un magasin et ne produisent pas directement de revenus.

[110] La SOCAN soutient que la Commission devrait fixer un taux pour l’utilisation de musique par ces sites, même si l’on dispose de peu de renseignements sur l’importance quantitative de cette utilisation. Les exemples fournis par la SOCAN comportaient des utilisations de communications de musique par Internet qui n’entraient dans aucune des catégories déjà examinées du tarif 22. La SOCAN propose un taux de 7 pour cent des dépenses ou des revenus bruts, soit la moyenne des taux proposés par elle pour l’ensemble des autres catégories d’utilisations.

[111] Nous ne souscrivons pas à la méthode employée par la SOCAN pour calculer ce taux. Les gros utilisateurs de musique tels que les sites de musique et de radio sont par définition exclus. On constate même, à l’examen des exemples donnés par la SOCAN, que la plupart des « autres » sites utilisent très probablement une infime quantité de musique. Par conséquent, le taux applicable à ces utilisateurs ne peut être le taux moyen de tous les autres, y compris les sites de musique et de radio. Qui plus est, mis à part les quelques exemples de sites Web présentés par M. Hoffert, la SOCAN n’a pas produit d’éléments de preuve touchant le rôle de la musique sur les sites qui nous occupent.

[112] Même si nous pensons que la fixation d’un taux de redevance se justifie pour cette catégorie d’utilisateurs, nous n’en fixerons pas, pour quatre raisons.

[113] Premièrement, nous croyons qu’il serait d’effet hautement perturbateur et par le fait même inéquitable, a) de fixer à l’aveuglette un taux; b) qui ne serait pas symbolique; c) pour une période (1996 à 2006) écoulée depuis longtemps; d) à payer par des centaines de milliers d’utilisateurs qui font un usage de musique soit extrêmement modeste, soit ne générant pas ou guère d’attention; e) en l’absence de tout point de repère sûr.

[114] Deuxièmement, étant donné l’absence de toute preuve sérieuse sur laquelle fonder notre décision, le tarif que nous aurions fixé aurait de toute façon été de minimis, afin d’éviter autant que possible les effets nuisibles des efforts de recouvrement d’une multitude de paiements minimes au titre d’une myriade d’utilisations très modestes. Les effets pourraient être d’autant plus importants qu’en vertu de la responsabilité conjointe et solidaire à l’égard de la communication de musique, les milliers d’individus actifs sur les sites de réseautage social ou de partage de vidéo pourraient être tenus individuellement responsables de paiements minimes. Nous refusons d’homologuer un tarif qui pourrait avoir une telle portée sans preuve suffisante.

[115] Troisièmement, les sites de réseautage social ou de partage de vidéo sont un phénomène plutôt récent. La plupart ne sont devenus populaires qu’à la toute fin de la période visée par le présent tarif (1996-2006). Les montants en jeu pour la période risquent donc d’être relativement peu importants.

[116] Quatrièmement, la Commission ne peut, en l’absence de preuve, remplir adéquatement ses obligations telles que prescrites par la Cour d’appel fédérale dans l’affaire ACR c. SOCAN et SCGDV, [14] de justifier adéquatement dans ses motifs la façon dont elle s’y est prise pour arriver au taux du tarif.

[117] La Commission a déclaré à plusieurs reprises que la SOCAN a le droit d’être rémunérée pour toute utilisation de son répertoire et que les utilisateurs ne peuvent être dispensés de lui payer des redevances. Ces déclarations restent vraies en principe. Cependant, dans le cas qui nous occupe, il n’a été produit absolument aucun élément de preuve tendant à établir la valeur du répertoire ou même le degré ou la nature de ses utilisations. En outre, nous ne disposons pas de points de repère fiables sur lesquels fonder la fixation d’un taux. En fait, même l’intention de la SOCAN concernant l’application de cet élément du tarif n’est pas claire. Internet est un phénomène à la fois si fluide et si omniprésent qu’il serait imprudent de fixer un taux dont nous pensons que les conséquences risqueraient de se révéler excessives et, comme nous le disions, socialement inéquitables. En tout état de cause, la SOCAN a déposé pour 2007 et au-delà, des projets de tarifs toujours applicables à « tous les autres sites ». Lorsque la Commission examinera de nouveau ces tarifs, elle attendra des parties qu’elles produisent les éléments de preuve nécessaires à une évaluation adéquate de la situation.

IX. Les redevances minimales

[118] La SOCAN propose une redevance minimale de 200 $ par mois pour les sites de webdiffusion audio et de radio commerciale. Elle a réduit sa proposition de redevance mensuelle minimale à 90 $ pour les sites de radio non commerciale. Ici non plus, la SOCAN n’a pas présenté d’analyse économique à l’appui de ses propositions.

[119] L’ACR ne s’oppose pas en principe à la fixation de redevances minimales, mais elle fait remarquer que d’autres tarifs de la SOCAN non fondés sur des événements prévoient des redevances minimales inférieures ou légèrement supérieures à 100 $ par an. L’ACR propose une redevance minimale de 60 $ par année. L’ANREC s’oppose aux redevances minimales proposées par la SOCAN.

[120] Nous pensons comme l’ACR que, en général, les redevances minimales devraient concorder avec les autres tarifs de la SOCAN. Or, les redevances que propose la SOCAN ne correspondent à aucun de ses autres tarifs existants. L’ACR a déposé un tableau représentant les minima des autres tarifs de la SOCAN. Nous avons l’intention d’utiliser ce tableau comme cadre pour établir les redevances minimales, sous les réserves suivantes. Premièrement, comme de nombreux minima sont exprimés en dollars par an et d’autres en dollars par événement ou par lieu et que nous ne disposons pas des renseignements nécessaires pour traduire ces dernières quantités en dollars par an, nous ne tiendrons compte que des redevances exprimées en dollars par an. Deuxièmement, le tarif 21 de la SOCAN (applicable aux installations récréatives) sera exclu de notre analyse parce qu’il ne prévoit pas de redevance minimale, mais plutôt une redevance forfaitaire.

[121] Le tableau de l’ACR montre que les redevances annuelles minimales de la SOCAN s’inscrivent en gros entre 60 $ et 110 $. [15] S’il est vrai que les tarifs de la SOCAN ne concordent pas nécessairement tous les uns avec les autres, il y aurait lieu de s’attendre à ce que, toutes choses égales par ailleurs, le niveau des redevances minimales augmente avec la valeur (ou l’importance) de la musique. C’est là la règle que nous entendons appliquer ici, à une exception près. Nous ne voyons pas la nécessité de fixer une redevance minimale pour les utilisateurs qui paient déjà des redevances en vertu de l’un ou l’autre des tarifs 1 et 2 de la SOCAN. Les activités Internet de ces titulaires de licence sont nettement accessoires. En outre, comme le montre le présent exposé des motifs, notre intention est pour l’instant de raccorder autant que possible aux tarifs principaux les redevances Internet de ces utilisateurs. Comme ni l’un ni l’autre des tarifs en question ne prévoit de minimum, nous n’en fixerons pas ici.

[122] Parmi toutes les catégories examinées dans la présente décision, c’est pour celle des sites de webdiffusion audio que la musique revêt le plus d’importance et de valeur. Les taux que nous avons fixés pour ces sites sont en fait les plus élevés. Il nous paraît donc que la redevance minimale pour ces sites devrait se rapprocher plutôt du haut que du bas de l’échelle de 60 $ à 110 $. En conséquence, nous fixons à 100 $ par an la redevance minimale à verser au titre des sites de webdiffusion audio.

[123] Nous fixons les redevances minimales des autres catégories selon le ratio de leurs taux respectifs au taux établi pour les sites de webdiffusion audio à forte utilisation de musique. Ainsi, la redevance minimale annuelle sera de 79 $ pour les autres sites audio dont la musique occupe de 20 à 80 pour cent du temps de diffusion, de 28 $ pour les sites à faible utilisation de musique, et de 15 $ pour les sites de jeux. [16]

[124] Pour tous les autres sites, la SOCAN propose la même redevance minimale de 200 $ par mois. En ce qui concerne les baladodiffuseurs amateurs, la SOCAN a proposé la fixation d’un droit de licence annuel de 60 $ dans le cas où le contenu musical utilisé représente moins de 20 pour cent du temps de programmation, à condition que les balados ne produisent pas de revenus. Or, nous avons déjà décidé de ne pas établir de tarif pour cette catégorie de sites. Pour les mêmes motifs, nous ne fixerons pas pour elle de redevance minimale.

X. Autres questions

A. La capacité de payer

[125] En ce qui concerne les catégories B à G du tarif, nous ne pensons pas qu’une réduction analogue à celle consentie pour les services de musique en ligne (Tarif 22.A de la SOCAN) soit justifiée ou nécessaire, pour plusieurs raisons. Premièrement, pour la plupart des utilisateurs, le présent tarif n’introduit pas un nouveau tarif; il en est seulement l’extension à l’environnement Internet d’un tarif existant appliqué aux activités conventionnelles. Deuxièmement, l’assiette des taux fixés est considérablement réduite, ce qui limite le risque que le tarif ait sur les revenus un effet excessif ou nuisible. Troisièmement, les utilisateurs paient déjà implicitement ou explicitement les taux homologués pour certaines catégories; l’homologation ne fait alors que confirmer la quantité des redevances à payer par ces utilisateurs.

B. L’assiette tarifaire : les revenus ou les dépenses?

[126] La SOCAN a demandé que le tarif soit assis sur le montant le plus élevé des revenus bruts ou des dépenses brutes d’exploitation du site ou du service. L’ACR, entre autres, s’est élevée contre ce changement d’assiette tarifaire, faisant valoir que la SOCAN ne devrait pas être assurée d’un montant déterminé de redevances indépendamment du montant des revenus que le site peut produire. M. Liebowitz n’a pas non plus souscrit à cette approche, faisant toutefois observer qu’un changement unique d’assiette, des dépenses aux revenus, pourrait se justifier dans le cas d’une entreprise en démarrage.

[127] Nous ne pensons pas qu’une telle assiette variable, même si l’on ne permettait qu’un seul changement, se justifierait pour le présent tarif. Selon tous les autres tarifs homologués par la Commission, l’utilisateur incapable de produire suffisamment de revenus paie la redevance minimale, si une telle redevance est homologuée. Il en ira de même ici. Tous les taux sont assis sur les revenus (ou les coûts dans le cas des radios non commerciales), et si ceux-ci n’atteignent pas un seuil déterminé, l’utilisateur paiera la redevance minimale, quand elle est présente. Il est tout à fait justifié qu’une entreprise en démarrage incapable de produire suffisamment de revenus ne paie que la redevance minimale jusqu’à ce qu’elle devienne assez rentable pour commencer à payer le plein taux.

XI. Libellé du tarif

[128] Les commentaires suivants devraient aider le lecteur à comprendre le libellé du tarif. Comme c’est désormais la règle avec tout premier tarif, nous avons consulté les parties à ce sujet avant de prendre une décision finale.

[129] Dans la mesure du possible, le tarif vise l’utilisateur. Faire la jonction entre un tarif de ce genre et celui visant l’utilisation pose parfois problème. Ainsi, le paragraphe 1(2) prévoit que le tarif 22 ne vise pas les utilisations assujetties à un autre tarif, dont le tarif 24 (Sonneries). Cela dit, un fournisseur de sonneries utilisant de la musique sur Internet d’une façon qui n’est pas visée au tarif 24 pourrait en bout de piste payer des redevances en vertu du tarif 22. Il sera parfois difficile, voire impossible, de ventiler les revenus entre ces usages. Le cas échéant, nous sommes d’avis qu’il faudrait affecter les revenus en fonction de l’importance économique relative de chaque activité. Il ne nous semble pas opportun, du moins pour l’instant, d’établir précisément comment procéder dans chaque cas individuel. Nous sommes convaincus que la SOCAN et les utilisateurs feront preuve de bon sens pour résoudre ces questions.

[130] Pour les motifs exposés aux paragraphes 32 à 38 de cette décision, nous optons pour une assiette tarifaire large. La définition de « recettes d’Internet » exclut certains revenus et dépenses, dont la juste valeur marchande des services de production publicitaire. Cette valeur fait toujours l’objet d’un litige entre la SOCAN et certaines stations de radio commerciales. La SOCAN craint que certains utilisateurs cherchent à surévaluer les services de production. Elle suggère plutôt d’exclure uniquement la différence entre le montant total reçu pour la création et le placement d’une publicité et la juste valeur marchande de ce placement. Tout comme les opposantes, nous croyons que le libellé retenu est suffisamment clair et ce, même si l’établissement de n’importe quelle juste valeur marchande soulève toujours des difficultés.

[131] À l’article 7 tout comme ailleurs, la référence au contenu audio est voulue. Le tarif ne vise pas uniquement les sites où la musique prédomine; si tel était le cas, il ne servirait à rien d’établir un taux pour les sites utilisant de la musique moins de 20 pour cent du temps. Qui plus est, sera assujetti à l’article 7 tout site « habituellement » visité pour écouter un contenu exclusivement audio. Nous nous attendons à ce que la SOCAN et les utilisateurs interprètent cette expression en fonction des principes établis dans la première décision de la Commission en matière de copie privée. Un site qui livre un contenu audio habituellement mais pas la plupart du temps pourra réduire ses redevances comme la plupart des autres sites, en fonction du pourcentage de pages audio consultées. Enfin, dans la mesure du possible, les sites audio offrant plus d’un canal devront établir les recettes de chaque canal et payer leurs redevances en fonction de l’utilisation de musique de chaque canal. Les recettes qui ne peuvent être ainsi affectées généreront des redevances en fonction de l’utilisation de musique pour l’ensemble du site.

[132] Comme nous l’avons déjà mentionné, la plupart des utilisateurs pourront réduire leurs redevances en documentant le rapport entre les consultations de pages audio et toutes les consultations de pages. Pour les motifs exposés au paragraphe 98 de cette décision, les services canadiens de radio ou de télévision, les services sonores payants et la radio par satellite ne pourront retrancher les visites provenant de l’extérieur du Canada. Les sites Web audio pourront retrancher les consultations de pages audiovisuelles du calcul des redevances puisque ce que nous voulons viser à l’égard de ces utilisateurs est uniquement la livraison de contenu exclusivement audio; les utilisateurs assujettis aux articles 3 à 6 et 8 du tarif devront par contre inclure les consultations de pages audiovisuelles dans le calcul des redevances.

[133] L’article 12 permet à la SOCAN de demander des renseignements sur l’utilisation de musique à l’égard d’au plus 14 jours par année. Les opposantes soulignent que le paragraphe (2) semble permettre à la société de demander ces renseignements si tard qu’il serait impossible de les fournir dans les délais prescrits. Cela dit, la disposition reprend celle du tarif SOCAN-SCGDV 1.A, qui n’a pas créé de difficultés. Tout comme la SOCAN, nous ne croyons pas devoir exiger qu’elle avise les utilisateurs à l’avance et nous sommes confiants que la société ne cherchera pas à faire en sorte qu’il soit difficile ou impossible pour l’utilisateur de se conformer au tarif.

[134] L’article 13 décrit la façon dont un site Web audio devra documenter son utilisation de musique afin de bénéficier d’un taux plus bas. Les exigences documentaires que nous imposons ne sont pas les mêmes que celles qui incombent aux stations de radio utilisant peu de musique, pour trois motifs. Premièrement, les sites Web audio ne sont toujours pas réglementés par le CRTC; nous ne pouvons donc nous en remettre aux exigences qu’impose le CRTC pour obtenir la documentation nécessaire. Deuxièmement, nous ne voulons pas imposer la même exigence parce que nous ne savons pas ce qu’en serait l’impact pratique. Nous demandons plutôt aux utilisateurs de conserver des renseignements permettant à la SOCAN de vérifier l’utilisation de son répertoire, nous en remettant aux parties pour déterminer ce qui est à la fois pratique et utile. Troisièmement, notre intention est uniquement de faire en sorte que l’utilisateur qui ne conserve pas ces renseignements soit présumé être un canal de musique continue. Il lui sera toujours possible de convaincre la SOCAN (ou un tribunal judiciaire) par d’autres moyens que tel n’est pas le cas.

[135] Le tarif contient certaines dispositions transitoires qui sont nécessaires parce que le tarif prend effet le 1er janvier 1996 bien qu’il soit homologué beaucoup plus tard. Leur rédaction a soulevé des défis de taille.

[136] Le tarif repose sur certaines hypothèses, y compris sur les modes d’utilisation de musique sur Internet, qui pourraient ou non être valides aussi loin qu’en 1996. Certaines opposantes ont soutenu que l’utilisation de musique a beaucoup augmenté depuis. Cela est possible, mais non certain. Qui plus est, ce qui importe n’est pas tant la quantité de musique que la place qu’elle occupe par rapport à l’ensemble du contenu. Cela dit, nous avons cherché à répondre à certaines des craintes des opposantes à cet égard.

[137] Il était aussi important de ne pas structurer le tarif de façon à en rendre la perception illusoire. Ce n’est la faute ni de la SOCAN, ni des utilisateurs, que l’affaire a mis tant de temps à se conclure. Pour ces motifs, les dispositions transitoires prévoient ce qui suit.

[138] Premièrement, il n’y aura qu’un rapport par année pour chacun des facteurs pouvant servir à réduire le montant redevances. Cela évitera des calculs mensuels ou trimestriels.

[139] Deuxièmement, ces rapports seront calculés en utilisant ce qui nous semblent être les meilleurs renseignements disponibles, en fonction d’une formule préétablie qui impose qu’on utilise l’information pertinente qui se rapproche le plus dans le temps de la période pour laquelle le calcul est effectué.

[140] Troisièmement, et comme c’est devenu notre pratique courante dans des situations semblables, un tableau fournit les facteurs de multiplication qui seront appliqués aux sommes dues, établis en utilisant le taux officiel d’escompte de la Banque du Canada en vigueur le dernier jour du mois précédent. L’intérêt n’est pas composé. Le montant dû pour une période donnée est le montant des redevances établi conformément au tarif, multiplié par le facteur fourni pour cette période. Cette fois-ci, afin de simplifier encore plus les calculs, nous avons établi un seul facteur d’intérêts par année; le facteur s’appliquera à tous les usagers, peu importe s’ils verseraient autrement leurs redevances chaque mois, chaque trimestre ou chaque année. Le facteur est calculé en tenant pour acquis que les paiements auraient été faits 30 jours après la fin de chaque trimestre, comme le prévoient les articles 10 et 11 du tarif.

Le secrétaire général,

Signature

Claude Majeau

XII. ANNEXE – TAUX HOMOLOGUÉS

 

TAUX ET ASSIETTE TARIFAIRE

(Sauf pour C, l’assiette tarifaire correspond toujours aux Recettes d’Internet)

RÉDUCTION DE L’ASSIETTE TARIFAIRE

(« Au moins » signifie que la réduction peut être accrue en faisant rapport à la SOCAN)

Réduction pour les pages sans contenu audio

Réduction pour les visites non canadiennes

B. Radio commerciale

1,5 % pour faibles utilisateurs de musique

4,2 % pour les autres

Au moins 50 %

0

C. Radio non commerciale

1,9 % des coûts bruts d’exploitation Internet

Au moins 50 %

0

D. Télévision commerciale, autres services de télévision, services sonores payants, services de radio par satellite

Taux applicable en vertu des tarifs principaux (2.A, 17, Services sonores payants, Services de radio par satellite)

Au moins 50 % pour un service de musique vidéo, sonore payant ou de radio par satellite

Au moins 90 % pour tout autre service

0 pour un service canadien

Au moins 90 % pour tout autre service

E. SRC, TVO, Télé-Québec

10 % du montant total payable en vertu des tarifs 1.C, 2.B, 2.C ou 2.D

Au moins 85 %

0

F. Sites Web audio

1,5 % si l’utilisation de musique est de 20 % ou moins, assujetti à une redevance minimale de 28 $

4,2 % si l’utilisation de musique est de plus de 20 % et de moins de 80 %, assujetti à une redevance minimale de 79 $

5,3 % si l’utilisation de musique est de 80 % ou plus, assujetti à une redevance minimale de 100 $

Au moins 50 %

Site canadien

95 % des visites non canadiennes, si rapport est fait à la SOCAN

0 autrement

Site non canadien

Au moins 90 % (toutes les visites non canadiennes comptent)

G. Sites de jeux

0,8 %, assujetti à une redevance minimale de 15 $

0, sauf si rapport est fait à la SOCAN

Site canadien

95 % des visites non canadiennes, si rapport est fait à la SOCAN

0 autrement

Site non canadien

Au moins 90 % (toutes les visites non canadiennes comptent)

XIII. DISSIDENCE DE LA COMMISSAIRE CHARRON

[1] Je partage l’opinion de mes collègues à tous égards, sauf un. J’autoriserais l’accès gratuit au répertoire de la SOCAN uniquement aux utilisateurs les plus modestes.

[2] Je ne sais si j’établirais un taux nul ou si je refuserais tout simplement d’homologuer un tarif pour « tous les autres sites ». Chacune de ces façons de faire pose problème. La question de savoir si un prix égal à zéro constitue un « prix » reste sans réponse. Il est possible qu’un tel prix empêche en pratique la SOCAN d’exercer toute forme de contrôle sur son répertoire. En revanche, ne pas homologuer un tarif alors que la Loi semble nous obliger à le faire peut constituer un refus illégal d’exercer notre pouvoir discrétionnaire. Toutefois, au bout du compte, la Loi nous oblige toujours, formellement ou implicitement, à établir des tarifs équitables. Il me faudrait donc recourir à l’un de ces moyens pour arriver à un résultat qui, dans les circonstances très précises qui sont décrites au paragraphe 113 des motifs de mes collègues et à certaines conditions, m’apparaît foncièrement injuste.

[3] Premièrement, je tenterais de relever la plupart des utilisations susceptibles de générer des redevances importantes pour ensuite établir le tarif qui s’impose. Une fois les « autres » utilisations les plus importantes (MySpace, Facebook, Google, Yahoo) ajoutées au tarif, le reste des utilisations ne généreraient probablement que des montants symboliques. C’est ce que mes collègues ne font pas, et c’est sur ce point que j’inscris ma dissidence. Leur décision permet à des sites Web qui utilisent la musique de manière non négligeable et ont des revenus impressionnants d’avoir gratuitement accès au répertoire de la SOCAN, alors que la SOCAN cherchait justement à les cibler.

[4] Deuxièmement, je ne voudrais pas que cette situation délicate perdure. Je m’attendrais à ce que les utilisateurs ou leurs représentants prennent part aux prochaines instances pour fournir à la Commission les renseignements dont elle a besoin pour bien évaluer la situation.

[5] Le fait pour la SOCAN de n’avoir présenté aucune preuve nous permettant d’établir un tarif applicable à MySpace, par exemple, ne justifie pas en soi que l’on refuse d’établir un tarif. Aucune preuve ne nous a été présentée concernant TVO ou Télé-Québec; pourtant, mes collègues et moi-même n’avons pas hésité à établir un tarif en nous fondant sur la formule que nous appliquons à la SRC. J’aurais fait de même pour les autres sites Web. Par exemple, j’aurais appliqué le tarif visant les jeux en ligne aux sites de réseautage social, en tenant pour acquis que leurs habitudes en matière d’utilisation de musique se rapprochent de celles des sites de jeux.

[6] Surtout, la SOCAN a proposé de cibler l’utilisation et non l’utilisateur. Dans cette perspective, un grand nombre d’« autres » utilisateurs auraient été visés par les utilisations proposées par la SOCAN, définies en établissant une analogie avec les principales utilisations que font les utilisateurs déjà assujettis à un tarif de la SOCAN. Il m’apparaît difficile, et foncièrement inéquitable, de reprocher à la SOCAN de ne pas avoir présenté une preuve suffisante, alors qu’elle n’a commis d’autre faute que celle de ne pas avoir lu notre pensée.



[1] Cette décision est désignée ci-après SOCAN 22.A (2007).

[2] Solutions Research Group, « Use and Content of Canadian Broadcaster Websites », pièce CAB-4, page 22.

[3] Voir le paragraphe 38.

[4] Décision de la Commission du 14 octobre 2005 homologuant le tarif 1.A (Radio commerciale) de la SOCAN-SCGDV pour les années 2003-2007, à la page 32.

[5] Décision de la Commission du 22 février 2008 sur le réexamen du tarif 1.A (Radio commerciale) de la SOCAN-SCGDV pour les années 2003-2007, au paragraphe 91.

[6] Pièce SOCAN-5, rapport d’Erin Research Inc.

[7] La proportion de 34 pour cent équivaut à 44,7 pour cent de la part de la musique dans le temps total de programmation des stations de radio, soit 76 pour cent. Ce chiffre, utilisé par l’ACR, concorde avec les conclusions formulées par la Commission dans des décisions antérieures touchant le tarif 1.A de la SOCAN pour les stations de radio commerciales.

[8] Pièce SOCAN-5, page 52.

[9] Pièce SOCAN-5, tableau 28.

[10] Voir le paragraphe 38.

[11] Voir le paragraphe 83.

[12] Décisions de la Commission du 7 décembre 1990 et du 18 février 1993 homologuant divers tarifs de la SOCAN.

[13] Décision de la Commission du 15 mars 2002 homologuant les tarifs de la SOCAN et de la SCGDV pour les services sonores payants.

[14] Association canadienne des radiodiffuseurs c. Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique du Canada et la Neighbouring Rights Collective of Canada, 2006 CAF 337.

[15] Les tarifs suivants de la SOCAN prévoient tous une redevance minimale d’environ 62 $ : 3.B (Musique enregistrée accompagnant un spectacle), 11.A (Cirques, spectacles sur glace, feux d’artifice, etc.), 13.B (Navires à passagers), 13.C (Trains, autobus, etc.) et 19 (Exercices physiques et cours de danse). La redevance minimale la plus élevée est celle du tarif 6 (Cinémas) et s’élève à 111 $.

[16] (4,2 / 5,3) × 100 $ = 79 $; (1,5 / 5,3) × 100 $ = 28 $; (0,8 / 5,3) × 100 $ = 15 $.

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