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Copyright Board
Canada

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Commission du droit d’auteur
Canada

 

Date

2016-04-21

Référence

Dossier: Gestion collective du droit d’exécution et du droit de communication

Régime

Gestion collective relative aux droits visés aux articles 3, 15, 18 et 21

Loi sur le droit d’auteur, paragraphes 68(3) et 70.15(1)

Commissaires

L’honorable William J. Vancise

Me Claude Majeau

Me J. Nelson Landry

Projets de tarif examinés

SOCAN (2011-2013)

Ré:Sonne (2012-2014)

CSI (2012-2013)

Connect/SOPROQ (2012-2017)

Artisti (2012-2014)

Tarif des redevances à percevoir par la socan, Ré:Sonne, csi, connect/soproq et artisti à l’égard des stations de radio commerciale

Motifs de la décision

I. CONTEXTE - 1 -

II. POSITION DES PARTIES - 4 -

A. Sociétés de gestion - 4 -

B. Ré:Sonne - 6 -

C. Connect/SOPROQ - 6 -

D. Artisti - 8 -

E. ACR - 8 -

III. PREUVE - 10 -

A. Le modèle tarifaire axé sur le groupe - 10 -

B. Dispositions relatives à la présentation de rapports sur l’utilisation de la musique et autres dispositions administratives - 14 -

C. Réduction à l’égard des services de distribution de musique numérique - 15 -

D. Exception relative aux appareils radiophoniques récepteurs (paragraphe 69(2)) - 16 -

E. Exceptions au droit d’auteur - 17 -

i. Valeur relative de chaque type de copie - 17 -

ii. Licence générale modifiée - 20 -

iii. Contexte international des reproductions temporaires pour processus technologiques - 21 -

iv. Pratiques et admissibilité des stations - 22 -

IV. TYPES DE COPIES EFFECTUÉES - 23 -

V. QUELS ENREGISTREMENTS SONORES SONT VISÉS PAR UN DROIT À RÉMUNÉRATION? - 24 -

A. Loi sur la modernisation du droit d’auteur - 25 -

B. Incidence sur les redevances payables à Ré:Sonne - 26 -

VI. PARAGRAPHE 3(1) – « UNE PARTIE IMPORTANTE » - 28 -

VII. RÉDUCTION SDMN - 29 -

VIII. APPLICATION DES EXCEPTIONS AUX REPRODUCTIONS RÉALISÉES PAR LES STATIONS DE RADIO - 31 -

A. Éléments de preuve et fardeau de la preuve - 32 -

B. Article 29 – Utilisation équitable aux fins de recherche - 34 -

i. L’utilisation correspond-elle à une des fins prévues par la Loi? - 34 -

ii. Facteurs d’une utilisation équitable - 35 -

a. Le but de l’utilisation - 35 -

b. L’ampleur de l’utilisation - 36 -

c. La nature de l’utilisation - 36 -

d. Solutions de rechange à l’utilisation - 37 -

e. La nature de l’œuvre - 38 -

f. L’effet de l’utilisation sur l’œuvre - 38 -

iii. Conclusion - 39 -

C. Article 29.24 – Copies de sauvegarde - 40 -

D. Article 30.71 – Reproductions temporaires pour processus technologiques - 41 -

i. « la reproduction est un élément essentiel d’un processus technologique » - 42 -

ii. « elle n’existe que pour la durée du processus technologique » - 42 -

iii. « elle a pour seul but de faciliter une utilisation qui ne constitue pas une violation du droit d’auteur » - 44 -

iv. Application - 45 -

E. Article 30.9 – Copies éphémères des radiodiffuseurs - 45 -

i. Introduction - 45 -

ii. Respect des exigences - 47 -

F. Conviendrait-il d’opter pour une licence générale modifiée? - 47 -

G. Conclusion - 50 -

IX. REDEVANCES FONDÉES SUR LE PARAGRAPHE 69(2) – EXÉCUTIONS PUBLIQUES D’ENREGISTREMENTS SONORES AU MOYEN D’UN APPAREIL RADIOPHONIQUE RÉCEPTEUR - 51 -

A. Historique du paragraphe 69(2) - 52 -

B. Applicabilité du paragraphe 69(2) à la présente affaire - 53 -

C. Le paragraphe 69(2) est-il applicable à l’égard de l’exécution d’enregistrements sonores? - 53 -

D. Qu’est-ce qu’un « appareil radiophonique récepteur »? - 54 -

E. Les utilisations prévues au paragraphe 69(2) sont-elles déjà rémunérées? - 57 -

F. Comment un taux en vertu du paragraphe 69(2) pourrait être établi - 60 -

X. ANALYSE ÉCONOMIQUE - 64 -

A. Modèle tarifaire axé sur le groupe - 64 -

B. L’incidence des exceptions relatives à la reproduction - 67 -

i. Les taux de reproduction devraient-ils être répartis entre différents types de copies? - 67 -

ii. Les données - 70 -

iii. La proposition de M. Reitman - 71 -

iv. La proposition de MM. Boyer et Cremieux - 72 -

v. Raisons pour lesquelles nous rejetons la proposition de MM. Boyer et Cremieux - 74 -

vi. Comment nous modifions la proposition de M. Reitman - 75 -

C. Les taux de CSI - 76 -

D. L’entente tripartite - 78 -

E. Les taux de Connect/SOPROQ - 79 -

i. Du 1er janvier 2012 au 6 novembre 2012 - 79 -

ii. Du 7 novembre 2012 au 31 décembre 2017 - 80 -

F. Les taux d’Artisti - 81 -

G. Les taux de la SOCAN et de Ré:Sonne - 81 -

XI. TARIFS FINAUX HOMOLOGUÉS ET REDEVANCES GÉNÉRÉES - 82 -

XII. LIBELLÉ DU TARIF - 83 -

A. « Revenus bruts » - 83 -

B. « À des fins privées ou domestiques » - 84 -

C. Renseignements sur l’utilisation de la musique - 85 -

i. Renseignements devant être fournis - 86 -

ii. Nombre de jours couverts par les rapports - 87 -

iii. Pénalités pour rapports tardifs - 90 -

D. Communication de renseignements - 90 -

E. Dispositions transitoires - 90 -

F. Autre libellé provenant des consultations - 91 -

G. Intérêts - 91 -

XIII. ANNEXE A - 91 -

XIV. ANNEXE B - 94 -


I. CONTEXTE

[1] La radiodiffusion de musique exige la reproduction et la communication au public d’œuvres musicales, de prestations d’artistes-interprètes et d’enregistrements sonores. Au total, la radiodiffusion fait intervenir six droits ou ensembles de droits administrés par plusieurs sociétés de gestion, lesquelles sont identifiées ci-après. [1] Ils font tous l’objet de la présente décision.

[2] Le 31 mars 2010, le 31 mars 2011 et le 30 mars 2012, conformément au paragraphe 67.1(1) de la Loi sur le droit d’auteur [2] (la « Loi »), la Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SOCAN) a déposé des projets de tarifs pour la communication au public d’œuvres musicales et dramatico-musicales par télécommunication pour les années 2011 à 2013. Le 31 mars 2011 et le 30 mars 2012, conformément au même paragraphe de la Loi, Ré:Sonne Société de gestion de la musique (Ré:Sonne) a déposé des projets de tarifs pour la communication au public par télécommunication d’enregistrements sonores publiés constitués d’œuvres musicales et de la prestation de telles œuvres pour les années 2012 à 2014.

[3] Quatre autres sociétés de gestion ont déposé des projets de tarifs conformément au paragraphe 70.13(1) de la Loi. Le 31 mars 2011, Connect Music Licensing Service Inc. (Connect) [3] et la Société de gestion collective des droits des producteurs de phonogrammes et de vidéogrammes du Québec (SOPROQ) (conjointement Connect/SOPROQ) ont déposé un projet de tarif pour la reproduction d’enregistrements sonores pour les années 2012 à 2017. Le 31 mars 2011, Artisti a déposé un projet de tarif pour la reproduction des prestations d’artistes-interprètes faisant partie de son répertoire pour les années 2012 à 2014. Le 30 mars 2012, CMRRA/SODRAC Inc. (CSI) a déposé un projet de tarif pour la reproduction d’œuvres musicales pour l’année 2013. En mars 2009, 2010, 2011 et 2012, ACTRA Performers’ Rights Society et Musicians’ Rights Organization of Canada (conjointement ACTRA PRS/MROC) ont déposé des projets de tarifs pour la reproduction de prestations d’artistes-interprètes pour les années 2010 à 2013. Le 29 mars 2012, ACTRA PRS/MROC a déposé une demande en vue d’obtenir le statut d’intervenante à l’égard du projet de tarif de Connect/SOPROQ pour les années 2012 à 2017. Les tarifs de Connect/SOPROQ, de CSI, d’Artisti et d’ACTRA PRS/MROC sont désignés collectivement par « tarifs de reproduction ».

[4] Tous les projets de tarifs ont été publiés dans la Gazette du Canada; les utilisateurs éventuels et leurs représentants ont ainsi été informés de leur droit de s’opposer.

[5] Entre le 26 juin 2009 et le 1er août 2012, l’Association canadienne des radiodiffuseurs (ACR), qui représente la majorité des stations de radio privées canadiennes, s’est opposée en temps opportun à tous les projets de tarifs susmentionnés au nom de ses membres.

[6] Le 12 juillet 2012, la Cour suprême du Canada a rendu l’arrêt SOCAN c. Bell Canada, [4] dans lequel elle a clarifié la notion d’utilisation équitable, ce qui pourrait avoir des répercussions sur certaines des activités visées en l’espèce.

[7] Le 7 novembre 2012, certaines dispositions de la Loi sur la modernisation du droit d’auteur [5] sont entrées en vigueur. Ainsi, l’article 29.24, qui prévoit une exception pour les copies de sauvegarde, et l’article 30.71, qui prévoit une exception pour les reproductions qui sont un élément essentiel d’un processus technologique, ont été adoptés, et l’article 30.9, qui crée une exception limitée pour les reproductions éphémères faites par les radiodiffuseurs, a été modifié.

[8] Le 8 novembre 2012, l’ACR a réagi à l’arrêt Bell et à l’entrée en vigueur de certaines dispositions de la LMDA en déposant une demande [6] visant à obtenir : 1) une décision provisoire de la Commission réduisant de 90 pour cent les redevances versées par les stations de radio commerciale à CSI, à Connect/SOPROQ et à Artisti en vertu des derniers tarifs homologués pour la radio commerciale, à compter du 7 novembre 2012 jusqu’à ce que la Commission rende sa décision sur le fond; 2) une déclaration selon laquelle, à compter du 7 novembre 2012, les tarifs de reproduction pour la radio commerciale n’ont pas de fondement juridique; 3) l’annulation du tarif en ce qui a trait à CSI à compter du 7 novembre 2012.

[9] La Commission a statué sur cette demande dans une décision provisoire rendue le 21 décembre 2012. [7] Elle a jugé la demande au fond « insoutenable ». Premièrement, la Commission a rejeté la thèse selon laquelle les tarifs visant la reproduction n’avaient aucun fondement juridique, estimant que les stations de radio ne pouvaient pas pour le moment prouver qu’elles pourront se prévaloir des exceptions applicables en ce qui concerne les utilisations futures des enregistrements sonores musicaux. La Commission a aussi statué qu’une preuve importante sur l’ampleur des activités de reproduction protégées des stations de radio serait nécessaire pour trancher les questions soulevées par l’ACR, y compris celle de l’utilisation équitable, et qu’il serait préférable d’examiner l’ensemble des projets de tarifs pour la radio commerciale dans le cadre d’un processus unique. Par ailleurs, la Commission a conclu que l’argumentation de l’ACR ne pouvait pas justifier une réduction des redevances pour l’ensemble d’une industrie, du fait que toutes les stations n’opèrent pas de la même façon. [8]

[10] La Commission a répondu à la demande de l’ACR visant à modifier le tarif pour la radio commerciale de CSI pour la période du 7 novembre 2012 au 31 décembre 2012 en rendant provisoire le tarif homologué en janvier 2011, pour autant qu’il vise CSI, à compter du 7 novembre 2012. [9]

[11] La Commission a rejeté tous les autres aspects de la demande de décision provisoire. Cette demande soulevait les mêmes problèmes en matière de preuve et les mêmes questions juridiques que la demande au fond. [10] La Commission a aussi mentionné qu’il serait plus facile pour les stations de radio de soustraire un trop-payé de versements futurs de redevances que pour les sociétés de percevoir un manque à gagner, et que la prépondérance des inconvénients favorisait les sociétés de gestion collective. [11]

[12] Le 21 janvier 2013, la Commission a invité les parties s’opposant au statu quo (soit à tout aspect des tarifs en vigueur) à présenter des observations exposant les raisons de leur opposition. Le 28 janvier 2013, les parties suivantes ont indiqué à la Commission qu’elles entendaient s’opposer au statu quo et fourni les raisons de leur opposition : l’ACR, la SOCAN, Ré:Sonne, Connect/SOPROQ, Artisti et ACTRA PRS/MROC. La Commission a statué, le 6 mars 2013, qu’aucune des parties ne s’opposait à l’utilisation des tarifs déjà homologués (y compris en ce qui concerne la valeur de l’utilisation de la musique et la valeur fondamentale de la musique) comme point de départ pour fixer les redevances, même si la plupart d’entre elles proposaient d’ajuster certains taux.

[13] Le 6 mars 2013, ACTRA PRS/MROC a retiré ses projets de tarifs et sa demande d’obtenir le statut d’intervenante.

[14] En août 2013, l’ACR, Artisti et Connect/ SOPROQ ont présenté à la Commission une entente sur l’ampleur du répertoire d’enregistrements sonores de Connect/ SOPROQ et la répartition des redevances entre Connect/SOPROQ et Artisti. Par suite de cette entente, Artisti a retiré l’opposition au statu quo formulée dans ses observations du 28 janvier 2013.

[15] L’audience de l’affaire a duré dix jours, du 8 octobre 2013 au 22 octobre 2013, et les parties ont présenté leurs plaidoiries finales les 3 et 4 mars 2014. Le dossier a été mis en état le 21 mars 2014, lorsque Connect/SOPROQ a présenté sa réplique à la réponse de l’ACR à une question de la Commission.

II. POSITION DES PARTIES

A. Sociétés de gestion

[16] Connect/SOPROQ, CSI, Ré:Sonne et la SOCAN, conjointement les « sociétés de gestion », ont collectivement proposé quatre types de modifications à apporter à leurs tarifs actuels. Premièrement, conformément au projet de tarif de Connect/SOPROQ pour les années 2012 à 2017, elles proposent que les redevances à verser par les stations de radio qui appartiennent à un même groupe soient établies en fonction des revenus bruts de l’ensemble du groupe plutôt que de ceux de chacune des stations. Elles justifient cette approche par le fait que la structure actuelle avait pour but d’alléger le fardeau financier des petites stations indépendantes, et non celui des petites stations appartenant à un groupe. Les sociétés de gestion soutiennent que, dans le système actuel, les titulaires de droits subventionnent les stations de petite taille et les stations de tailles moyenne et grande qui font partie d’un groupe de stations. Elles font aussi valoir qu’en raison de la structure étagée des tarifs actuels, où le taux augmente avec les revenus, l’approche actuelle donne un taux de redevances effectif moins élevé que celui que souhaitait la Commission à l’origine.

[17] Deuxièmement, la SOCAN, avec l’appui de Connect/SOPROQ, de CSI et de Ré:Sonne, plaide pour que le tarif soit formulé de telle sorte que les revenus bruts des stations de radio soient définis comme incluant la publicité réciproque de même que les recettes publicitaires d’agence.

[18] Les projets de tarifs de la SOCAN pour les années 2011, 2012 et 2013 ne comprennent cependant pas ces éclaircissements. Les sociétés de gestion proposaient, dans leur énoncé de cause du 9 août 2013, d’inclure la publicité réciproque et les produits de troc dans la définition des revenus bruts selon la formulation suivante : [TRADUCTION] « la valeur de tout bien ou service fourni aux stations par toute personne en échange de l’utilisation de ces services ou de ces installations de radiodiffusion ». [12] Selon les sociétés de gestion, bien que la majorité des stations de radio ont indiqué dans leurs réponses aux demandes de renseignements qu’elles incluaient la publicité réciproque et le troc dans le calcul de leurs revenus bruts, certaines stations de radio n’ont pas répondu à la question ou ont donné une réponse ambigüe.

[19] Par la suite, dans le cadre de ses remarques préliminaires au début l’audience, [13] la SOCAN s’est dite d’accord avec la proposition de l’ACR visant à utiliser les termes « troc » et « publicité réciproque » explicitement dans la définition des revenus bruts, comme suit :

[TRADUCTION] « revenus bruts » s’entend des sommes brutes payées par toute personne pour l’utilisation d’un ou de plusieurs services ou d’une ou de plusieurs installations de radiodiffusion offerts par l’exploitant d’une station, y compris la valeur de tout bien ou service fourni par toute personne en échange de l’utilisation de ces services ou de ces installations et la juste valeur marchande de toute contrepartie non monétaire (p. ex. troc ou publicité réciproque), mais à l’exclusion de ce qui suit […] [14]

[20] Le 28 janvier 2013, la SOCAN a informé la Commission, par écrit, d’un autre changement par rapport au statu quo : [TRADUCTION] « des éclaircissements sur la définition de revenus bruts figurant au tarif et sur les exclusions de l’assiette tarifaire, y compris le traitement des recettes publicitaires d’agence (vu la position de la SOCAN voulant que certaines stations excluent erronément les produits de cette nature de la somme servant au calcul des redevances) ».

[21] Troisièmement, les sociétés de gestion ont proposé des modifications aux dispositions administratives ainsi qu’aux dispositions relatives aux obligations de rapport figurant dans les tarifs de Connect/SOPROQ et de Ré:Sonne. Ces modifications imposeraient, entre autres choses, la présentation d’une liste séquentielle couvrant chaque jour de l’année, la présentation d’un rapport électronique dans les 14 jours suivants la fin de la période mensuelle pertinente, des pénalités financières pour la présentation tardive de rapports sur l’utilisation de la musique et de relevés financiers, la présentation de renseignements additionnels d’identification de la musique, comme le code-barres (UPC) ou le code international normalisé des enregistrements (CINE), les feuilles de minutage pour la programmation en souscription, la durée des enregistrements sonores (à la diffusion et sur l’album), le numéro de piste, le type d’utilisation, le numéro au catalogue et le fait que l’enregistrement est publié ou non. Les sociétés de gestion souhaitent aussi élargir les dispositions en matière de confidentialité et limiter à un an les demandes de remboursement de trop-payé. Elles estiment que ces modifications visent à faciliter le versement rapide et exact des redevances à leurs membres et à se conformer aux normes internationales.

[22] Dans ses prétentions écrites du 14 février 2014, Ré:Sonne a indiqué qu’elle renonçait à sa proposition de modification de l’article 13 de ses projets de tarifs relativement à la limite d’un an applicable aux demandes de remboursement de trop-payé par les radiodiffuseurs. Le 28 février 2014, en réponse à une question de la Commission, Connect/ SOPROQ a indiqué qu’elle renonçait également à ses propositions de modifications correspondantes.

[23] Quatrièmement, les sociétés de gestion ont aussi proposé des changements dans le libellé des tarifs de Connect/SOPROQ et de Ré:Sonne en vue d’en clarifier la portée et d’uniformiser les divers tarifs pour la radiodiffusion.

B. Ré:Sonne

[24] En plus d’appuyer les sociétés de gestion dans leur opposition au statu quo, Ré:Sonne propose que soient fixées des redevances pour l’exécution publique d’enregistrements sonores publiés au moyen d’un appareil radiophonique récepteur, en application du paragraphe 69(2) de la Loi. Cette disposition prévoit que les entreprises qui diffusent de la musique au moyen d’un appareil radiophonique récepteur n’ont pas à verser de redevances pour la musique utilisée. Il s’agit de ce qu’on appelle couramment [TRADUCTION] « l’exception relative aux appareils radiophoniques récepteurs ». Le paragraphe 69(2) prévoit que la Commission du droit d’auteur doit, autant que possible, pourvoir à la perception anticipée des redevances auprès des radiodiffuseurs pour l’exécution en public de musique dans une entreprise au moyen d’un appareil radiophonique récepteur, plutôt qu’auprès du propriétaire ou de l’utilisateur du poste récepteur.

[25] Dans son projet de tarif publié en juin 2011, Ré:Sonne avait initialement suggéré relativement à l’exception relative aux appareils radiophoniques récepteurs, de fixer les taux pour l’exécution publique d’enregistrements sonores à 0,26 pour cent des revenus bruts pour les stations de radio utilisant peu de musique et, pour les autres stations à 0,446 pour cent pour la première tranche de 1,25 million de dollars des revenus bruts et à 0,65 pour cent des revenus bruts au-delà de ce seuil. Cependant, dans son énoncé de cause du 9 août 2013, Ré:Sonne proposait un taux moindre, à 0,06 pour cent des revenus bruts pour tous les types de stations et toutes les tranches de revenus.

[26] En plus de proposer de fixer des redevances en application du paragraphe 69(2), Ré:Sonne propose de modifier le libellé de la disposition de ses projets de tarifs portant sur la confidentialité. Ce changement permettrait à Ré:Sonne d’échanger des renseignements confidentiels avec ses organisations membres et avec ses fournisseurs de service.

C. Connect/SOPROQ

[27] Connect/SOPROQ a initialement proposé de garder la même méthodologie et les mêmes taux de départ que ceux utilisés pour CSI dans le dernier tarif homologué pour la radio commerciale, mais a fait valoir que tous les ajustements appliqués dans le dernier tarif homologué ne sont plus nécessaires en raison de l’évolution du marché. [15] Le dernier tarif homologué comprenait trois tels ajustements, lesquels se sont traduits par des réductions. Des réductions avaient été appliquées aux taux de redevances pour tenir compte des éléments suivants : les services de distribution de musique numérique (SDMN), comme DMDS, autorisent leurs abonnés à effectuer la copie initiale des enregistrements sonores qu’ils téléchargent à partir de ces services (la « réduction SDMN »); le répertoire de Connect/SOPROQ représente 93,72 pour cent des enregistrements sonores diffusés par les stations de radio commerciale (la « réduction en fonction du répertoire »); certaines des prestations sur les enregistrements de Connect/ SOPROQ appartiennent à Artisti ou à d’autres artistes-interprètes (la « réduction pour la prestation »).

[28] Les taux de redevances initialement proposés par Connect/SOPROQ pour les stations de radio utilisant peu de musique, sans réductions appliquées, étaient de 0,15 pour cent pour la première tranche de 625 000 $ des revenus bruts, de 0,288 pour cent pour la deuxième tranche de 625 000 $ des revenus bruts, et de 0,482 pour cent au-delà. Les taux pour les autres types de stations étaient de 0,338 pour cent pour la première tranche de 625 000 $ des revenus bruts de la station, de 0,663 pour cent pour la deuxième tranche de 625 000 $ et de 1,375 pour cent au-delà.

[29] L’entente d’août 2013 entre l’ACR, Connect/SOPROQ et Artisti tenait compte de deux des trois ajustements susmentionnés. Selon l’entente, du point de départ de 0,688 pour cent (1,375 ÷ 2), Artisti recevrait 0,028 point de pourcentage pour la prestation de ses artistes-interprètes faisant partie du répertoire de Connect/SOPROQ, et cette dernière recevrait le 0,66 restant. Par ailleurs, toutes les parties conviennent que les enregistrements sonores de Connect/SOPROQ représentent 93,72 pour cent des enregistrements sonores diffusés par les stations de radio commerciale. Artisti, Connect/SOPROQ et l’ACR conviennent également de renoncer à demander une hausse ou une baisse de l’importance estimée du répertoire en l’espèce. De plus, Connect/SOPROQ a accepté de ne pas chercher, pour le reste de la présente instance, à obtenir une baisse de la réduction pour les prestations dont le droit de reproduction appartient à l’artiste-interprète. Par conséquent, la réduction en fonction du répertoire et la réduction pour la prestation resteraient en vigueur, au même taux que dans le dernier tarif homologué.

[30] Dans son énoncé de cause du 9 août 2013, Connect/SOPROQ propose d’éliminer la réduction SDMN pour tenir compte du fait que les SDMN n’autorisent plus la première copie téléchargée à partir de leur serveur. L’élimination de la réduction SDMN se traduirait par un taux de 1,23 pour cent des revenus bruts pour les stations de radio commerciale dont les revenus dépassent 1,25 million de dollars; le taux était de 1,192 pour cent dans le dernier tarif homologué.

[31] Dans ses prétentions écrites du 14 février 2014, Connect/SOPROQ a aussi relevé une erreur de calcul dans Radio commerciale (2010) en ce qui a trait aux taux de redevances d’AVLA/SOPROQ. Dans une lettre datée du 13 mars 2014, l’ACR a indiqué que, si la Commission déterminait qu’il y avait bien eu une erreur de calcul dans la décision de 2010, l’ACR ne s’opposerait pas à sa correction en l’espèce.

[32] Outre l’élimination de la réduction SDMN, Connect/SOPROQ appuie toutes les propositions des sociétés de gestion.

D. Artisti

[33] Initialement, Artisti demandait une augmentation de ses taux de redevances au motif qu’elle a élargi son répertoire depuis l’homologation du dernier tarif et qu’elle continuera de le faire dans les prochaines années; elle faisait aussi valoir que les taux du dernier tarif reposaient sur une surestimation de la proportion des membres instrumentistes d’Artisti, assujettis à la convention collective entre la Guilde des musiciens du Québec et l’Association québécoise de l’industrie du disque, du spectacle et de la vidéo (ADISQ), qui ne bénéficient pas du droit prévu à l’alinéa 15(1)b)ii) sur toutes leurs prestations. [16]

[34] À la suite de l’entente intervenue en août 2013 entre Artisti, Connect/SOPROQ et l’ACR, Artisti a indiqué qu’elle ne s’opposait plus au statu quo. Artisti s’appuie sur les prétentions et la preuve de Connect/SOPROQ et de CSI en ce qui concerne les reproductions effectuées par les stations de radio commerciale, la portée des droits de reproduction à la suite des modifications de la Loi et les conséquences des exceptions prévues dans la Loi sur la portée et la valeur du droit de reproduction. Cependant, Artisti s’est réservé le droit de répondre à tout argument sur le taux de redevances applicable aux prestations d’artistes-interprètes qui sortirait du cadre de l’entente d’août 2013, ce qui n’a pas été le cas.

E. ACR

[35] L’ACR s’oppose au statu quo en ce qui concerne les projets de tarifs de CSI, d’Artisti et de Connect/SOPROQ pour la reproduction. Sa position est essentiellement la même que dans sa demande de tarif provisoire du 8 novembre 2012. Elle fait valoir qu’en raison des modifications apportées à la Loi en novembre 2012 et de l’arrêt Bell, les tarifs de reproduction pour la radio commerciale n’ont aucun fondement juridique.

[36] L’ACR a initialement soutenu qu’aucun type de copies effectuées dans le cadre du processus de radiodiffusion de la musique n’est protégé aux termes de la Loi, et que les taux pour la reproduction devraient donc être fixés à zéro. Dans sa demande de tarif provisoire, l’ACR proposait que le taux des tarifs pour la reproduction soit réduit de 90 pour cent. Subsidiairement, dans l’éventualité où la Commission conclurait que certaines catégories de reproduction ne sont pas visées par les exceptions, l’ACR proposait que seule la valeur de ces catégories soit prise en considération dans les taux de redevances.

[37] L’ACR cite à l’appui de sa thèse les cinq dispositions suivantes de la Loi. Premièrement, l’exception relative au processus technologique permet la reproduction d’une œuvre s’il s’agit d’un élément essentiel d’un processus technologique, qu’elle a pour seul but de faciliter une utilisation qui ne constitue pas une violation du droit d’auteur et qu’elle n’existe que pour la durée du processus technologique (article 30.71 de la Loi). Deuxièmement, comme son nom l’indique, l’exception relative aux copies de sauvegarde permet la reproduction d’une copie originale si cette copie est effectuée exclusivement à des fins de sauvegarde au cas où la copie originale non contrefaite serait perdue, endommagée ou autrement inutilisable (article 29.24 de la Loi). Troisièmement, l’exception relative aux enregistrements éphémères liés à la radiodiffusion permet la reproduction d’un enregistrement sonore, ou d’une prestation ou d’une œuvre fixée dans un enregistrement sonore, si l’entreprise de radiodiffusion en est le propriétaire et que les exemplaires sont autorisés par le titulaire du droit d’auteur ou que l’entreprise est titulaire d’une licence lui permettant de la communiquer au public (article 30.9 de la Loi). Quatrièmement, l’exception relative à l’utilisation équitable permet la reproduction d’une œuvre aux fins d’étude privée, de recherche, d’éducation, de parodie ou de satire (article 29 de la Loi). Cinquièmement, le paragraphe 3(1) de la Loi restreint l’application du droit de reproduction à la reproduction de la totalité ou d’une partie importante d’une œuvre.

[38] L’ACR soutient que différentes exceptions, ou droits des utilisateurs, s’appliquent à différents types de copies. Par exemple, elle fait valoir que les copies d’incorporation, les copies du système d’automatisation principal, les copies de préenregistrement vocal, les copies de prestation en direct et les copies pour diffusion en continu sur Internet et appareils mobiles pourraient bénéficier des exceptions relatives au processus technologique et à la diffusion d’enregistrements éphémères. Les copies de préenregistrement vocal et les copies pour diffusion sur Internet et appareils mobiles ne sont pas nécessairement des copies d’une partie importante de l’œuvre originale. Les copies d’évaluation ou de sélection de la musique pourraient être exemptées de droits suivant l’exception relative à l’utilisation équitable.

[39] Subsidiairement, l’ACR fait valoir que si un type de copie n’est visé que par une seule exception au droit d’auteur à laquelle les stations doivent se conformer de manière individuelle, comme les copies éphémères visées à l’article 30.9 de la Loi, le taux applicable aux stations conformes devrait être réduit proportionnellement à la valeur relative de la catégorie. Cette solution correspond à une forme de licence générale modifiée (LGM).

[40] Dans ses prétentions écrites du 14 février 2014, l’ACR a modifié sa proposition initiale pour suggérer que les taux pour la reproduction soient fixés, au lieu de zéro, à un pour cent des taux actuels, de manière à tenir compte du nombre marginal de copies qui pourraient ne pas être visées par des exceptions.

III. PREUVE

[41] Pendant l’instance, les parties ont soulevé cinq questions principales. Les sociétés de gestion mettent de l’avant un modèle tarifaire axé sur le groupe (MTAG) pour le calcul des redevances. Les sociétés de gestion proposent également de modifier les dispositions sur les obligations de rapports relatives à l’utilisation de la musique et d’autres dispositions administratives. Connect/SOPROQ propose d’éliminer la réduction SDMN. Ré:Sonne propose que des redevances soient fixées en application du paragraphe 69(2). L’ACR souhaite obtenir une réduction des taux dans les tarifs pour la reproduction de manière à ce qu’ils tiennent compte des exceptions au droit d’auteur. Les sections ci-dessous décrivent les éléments de preuve présentés à l’égard de chacune de ces questions.

A. Le modèle tarifaire axé sur le groupe

[42] Les sociétés de gestion s’appuient sur les rapports de trois experts pour étayer leur proposition de redevances axées sur le groupe : M. Marcel Boyer, professeur émérite à l’Université de Montréal, Mme Lisa Pinheiro, vice-présidente d’Analysis Group et M. Michael Murphy, professeur titulaire à Ryerson University. M. Boyer et Mme Pinheiro ont préparé conjointement un rapport [17] sur l’effet quantitatif qu’aurait sur les redevances payées par les stations le passage de l’approche actuelle à l’approche axée sur le groupe tandis que M. Murphy a préparé un rapport [18] sur la technologie utilisée par les stations appartenant à un même groupe.

[43] Le MTAG, dans l’analyse de M. Boyer et de Mme Pinheiro, repose sur le calcul des redevances à partir des revenus combinés de toutes les stations appartenant au même groupe plutôt que sur le calcul des redevances à payer pour chaque station de radio séparément. M. Boyer et Mme Pinheiro ont estimé l’effet qu’aurait le passage du modèle tarifaire axé sur la station (MTAS) au MTAG en fonction de deux ensembles de données : les données sur l’octroi de licences aux stations de radio par Connect/SOPROQ, exclusion faite des stations utilisant peu de musique, et les données de Statistique Canada sur les stations de radio commerciale au Canada. Selon les données de Connect/SOPROQ, ils ont estimé que le passage du MTAS au MTAG se traduirait par une hausse de 21,8 pour cent des redevances, qui passeraient ainsi de 13,9 à 17,8 millions de dollars. Selon les données de Statistique Canada, ils ont estimé que la hausse des redevances serait de 24 pour cent, passant de 11,3 à 15 millions de dollars.

[44] Connect/SOPROQ avait proposé le MTAG dans l’instance ayant mené à la décision Radio commerciale (2010). La Commission avait alors rejeté cette proposition aux motifs que davantage d’éléments de preuve étaient nécessaires pour justifier un tel changement, qu’il est difficile de définir avec exactitude les réseaux et les entreprises radiophoniques et qu’une proposition de ce type exige d’évaluer ses effets sur les redevances totales versées par les stations et la possibilité d’ajuster les taux tarifaires. [19]

[45] En réponse aux oppositions soulevées par la Commission dans la décision Radio commerciale (2010), M. Boyer et Mme Pinheiro ont présenté des arguments en faveur du MTAG. Selon eux, le MTAS permet aux petites stations de radio de profiter d’une double réduction en raison de la structure étagée des tarifs pour la radio commerciale et du fait que les taux représentent un pourcentage des revenus. La double réduction peut être considérée comme une subvention consentie par les titulaires de droits aux petites stations, et comme une forme de partage des risques. Cependant, contrairement à la théorie du partage des risques, le taux de rendement dont profitent les investisseurs (en l’occurrence, les titulaires de droits) n’augmente pas avec le niveau de risque de l’investissement.

[46] M. Boyer et Mme Pinheiro font aussi valoir que le MTAS ne tient pas compte de certaines réalités économiques de l’industrie de la radio commerciale. En particulier, il ne tient pas compte du fait que les groupes de stations cherchent à maximiser leurs profits et n’investissent dans les petites stations que si l’investissement leur est profitable, ni de l’interdépendance financière et de la mise en commun des ressources dans ces groupes. M. Boyer et Mme Pinheiro soutiennent que le MTAG ferait en sorte que les petites et moyennes stations au sein d’un groupe soient subventionnées par leur groupe plutôt que par les titulaires de droits. Ils font aussi valoir que l’industrie de la radio commerciale est actuellement caractérisée par un ratio de concentration élevé [20] et que la situation n’est plus la même que celle qui avait mené à l’adoption d’un tarif étagé.

[47] En ce qui concerne l’affirmation de la Commission voulant qu’il soit difficile de définir les réseaux et les entreprises radiophoniques, M. Boyer et Mme Pinheiro proposent qu’un groupe de stations soit défini comme l’ensemble des stations détenues ou contrôlées par un même groupe.

[48] Pour estimer l’effet du passage au MTAG en supposant le maintien de la structure tarifaire actuelle, M. Boyer et Mme Pinheiro ont calculé les revenus bruts combinés des groupes de stations en additionnant les revenus bruts de chacune des stations appartenant à un groupe donné; ils ont ensuite appliqué les taux étagés du Tarif pour la radio commerciale (2010) [21] d’AVLA/SOPROQ aux revenus bruts combinés des groupes de stations et aux revenus bruts des stations indépendantes. En fonction du MTAG, le taux de redevances moyen pour l’ensemble des stations aurait été de 1,138 pour cent, et le total des redevances payées aurait augmenté de 21,8 pour cent par rapport aux redevances payées par l’ensemble des stations dans le cadre du MTAS. M. Boyer et Mme Pinheiro considèrent cette situation comme une réduction offerte par le MTAS. En vertu du MTAG, les petites stations indépendantes et les petits groupes de stations auraient toujours à payer un taux bien en deçà de 1,138 pour cent, mais les grands groupes payeraient un taux se rapprochant de 1,192 pour cent, le taux de la tranche la plus élevée. Selon les auteurs, il s’agirait d’une forme de subvention des petites stations par les grandes.

[49] M. Boyer et Mme Pinheiro ont aussi estimé l’effet du passage à un MTAG dans lequel les petites stations indépendantes ne seraient pas subventionnées par les groupes de stations. Ils expliquent que cela reviendrait à faire passer le taux de la tranche la plus élevée de 1,192 pour cent à 1,170 pour cent de façon à ce que les groupes de stations paient, en moyenne, un taux de redevances de 1,138 pour cent. Dans ce scénario, toutes les stations payeraient un taux moyen de 1,117 pour cent, ce qui constituerait une réduction de 1,8 pour cent par rapport au MTAG avec subvention.

[50] Selon les sociétés de gestion, le fait que la structure technologique des stations de radio leur permette de mettre leurs ressources en commun appelle une approche tarifaire axée sur le groupe pour le calcul des redevances. Dans son rapport en réplique, [22] M. Murphy décrit les particularités de la technologie mise en commun dans les groupes et les réseaux de stations de radio commerciale au Canada. Le rapport se fonde sur des données obtenues dans le cadre de demandes de renseignements présentées par Connect/SOPROQ et CSI et sur des renseignements de nature publique. Selon le rapport, les groupes de stations utilisent de plus en plus d’infrastructures technologiques partagées. Par exemple, les technologies de réseautage informatique et les technologies satellitaires permettent de mettre en commun la programmation, de réaliser des gains d’efficacité et de centraliser des ressources. Les activités d’incorporation, les serveurs de préenregistrement vocal à distance, les systèmes de stockage réseau et les produits d’enregistrement audio automatique peuvent être mis en commun pour toutes les stations d’un même groupe.

[51] Dans son rapport, [23] l’expert de l’ACR, M. David Reitman, vice-président de Charles River Associates, formule deux critiques à l’égard de la proposition d’un MTAG de M. Boyer et de Mme Pinheiro. Premièrement, M. Boyer et Mme Pinheiro surestiment les taux de redevances qui seraient applicables aux stations de radio dans un MTAG. Selon M. Reitman, cette surestimation résulte de l’application erronée de la structure tarifaire de la SOCAN à Connect/SOPROQ et à CSI, et de l’hypothèse voulant que le taux réel global de la SOCAN représente le taux moyen que devront payer toutes les stations.

[52] Deuxièmement, M. Reitman soutient que le MTAG proposé aurait des répercussions sur les groupes de stations principalement composés d’un grand nombre de petites stations, qui verraient bondir leurs paiements de redevances.

[53] M. Reitman souligne aussi que la structure étagée du tarif explique la différence entre le MTAS et le MTAG. Les redevances à verser seraient les mêmes dans les deux modèles si les taux n’étaient pas étagés.

[54] M. Reitman soutient qu’il n’y a pas de raison de passer du MTAS actuel au MTAG, mais met tout de même de l’avant deux solutions de rechange qu’il estime plus équitables que la proposition du MTAG de M. Boyer et de Mme Pinheiro. La première solution consisterait à fixer le taux de la tranche la plus élevée de manière à ce que les paiements de redevances selon le modèle axé sur le groupe soient équivalents aux paiements de redevances actuels. Avec un taux de redevances de 0,926 pour cent pour la tranche la plus élevée, la somme des redevances serait la même dans les deux modèles. Comme deuxième solution, M. Reitman propose de faire payer aux groupes de stations les mêmes taux qu’ils auraient dû payer si les taux de la tranche la plus basse avaient été augmentés de 31,25 pour cent dans la décision de 2005 pour tenir compte de la valeur accrue de la musique. Dans ce cas, les stations payeraient un peu plus que dans le modèle en vigueur, mais moins qu’elles ne le feraient dans le MTAG proposé par M. Boyer et Mme Pinheiro.

[55] M. Boyer et Mme Pinheiro n’ont pas souscrit à l’analyse de leur rapport effectuée par M. Reitman, particulièrement en ce qui concerne les taux effectifs que la Commission avait l’intention de fixer dans la décision Radio commerciale (2010). M. Boyer et Mme Pinheiro font valoir que le taux pour AVLA/SOPROQ est d’environ 1,138 pour cent alors que M. Reitman soutient qu’il devrait être de 0,97 pour cent.

[56] Dans leur réplique à la réponse de M. Reitman, M. Boyer et Mme Pinheiro ont de nouveau abordé la question des taux et donné quelques exemples tendant à démontrer qu’il y aurait moins de variations entre les paiements de redevances des groupes de stations aux revenus semblables dans leur version du MTAG. Ils proposent aussi que la Commission limite la hausse des redevances à un maximum de 20 pour cent si elle souhaite limiter l’effet du passage à un modèle axé sur le groupe.

[57] Deux témoins de l’ACR, M. Kirk Nesbitt, vice-président des services intégrés et du radiogénie de Rogers Broadcasting Limited, et M. Rod Schween, président-directeur du Jim Pattison Broadcast Group et directeur général de CFJC-TV, de CIFM-FM et de CKBZ-FM, s’opposent à l’affirmation de M. Murphy selon laquelle les stations ayant un même propriétaire mettent de plus en plus leur infrastructure technologique en commun depuis 2008. Selon eux, la preuve montre que certains groupes de radios mettent en commun leur technologie depuis le début des années 2000, tandis que d’autres s’abstiennent de partager les ressources de leurs différents marchés et se limitent à mettre en commun les nouvelles et leur fournisseur de diffusion en continu.

[58] Selon M. Nesbitt, le rapport de M. Murphy dresse un portrait trompeur des activités mises en commun par les stations de Rogers; les stations de Rogers se partagent les coûts des services en fonction de leur part des revenus. [24]

[59] M. Schween explique par ailleurs que, dans son groupe de stations, la répartition des revenus entre les stations se limite aux recettes des achats de publicité groupés. [25]

B. Dispositions relatives à la présentation de rapports sur l’utilisation de la musique et autres dispositions administratives

[60] Mme Doris Tay, directrice de la distribution de Ré:Sonne, Mme Victoria Shepherd, directrice générale de Connect et M. Sébastien Sangollo, directeur général adjoint de SOPROQ, ont expliqué la manière dont les redevances sont réparties par leurs sociétés de gestion respectives et comment les dispositions administratives proposées, de même que celles relatives à la présentation de rapports, amélioreraient et faciliteraient la gestion du tarif et la distribution des redevances aux titulaires de droits.

[61] Dans sa réponse du 17 septembre 2013, l’ACR fait valoir que toutes les stations qui possèdent la technologie nécessaire pour se conformer aux exigences de présentation de rapports sur l’utilisation de la musique proposées par les sociétés de gestion devraient le faire, mais que les stations ne devraient pas se voir forcées d’acquérir de nouvelles technologies. Elle soutient par ailleurs qu’il est inexact d’affirmer que toutes les versions de tous les logiciels de programmation permettent de produire les listes séquentielles demandées par les sociétés de gestion.

[62] En réponse aux observations de l’ACR quant à la capacité des logiciels à produire des listes séquentielles, Mme Tay fait valoir qu’à sa connaissance toutes les versions de MusicMaster, de Selector et de GSelector peuvent produire des listes séquentielles couvrant chaque jour de l’année. Elle soutient en outre que les stations reçoivent les mêmes flux des SDMN qu’elle, et que ces flux comprennent généralement le code-barres et le code international uniformisé des enregistrements, le numéro de la piste et le numéro au catalogue.

[63] Mme Tay explique aussi pourquoi certaines modifications aux dispositions actuelles du tarif en matière de confidentialité, lesquelles permettraient à Ré:Sonne d’échanger des renseignements confidentiels de stations de radio avec ses membres, ses fournisseurs de service [26] et les personnes qui demandent le versement de redevances (alinéas 12(2)a) et d)) et d’échanger des données globales (paragraphe 12(3)), sont nécessaires.

[64] Pour pouvoir statuer sur ces questions, la Commission a ordonné aux parties de lui fournir des renseignements sur la présentation de rapport sur l’utilisation de la musique. [27] Elle a demandé à Ré:Sonne de fournir des renseignements sur les stations qui présentent des listes séquentielles couvrant chaque jour de l’année ou utilisent des logiciels de programmation comme Selector ou MusicMaster, en vue de déterminer si les stations à faibles revenus présentent moins souvent des listes séquentielles ou ont des systèmes moins avancés technologiquement que les grandes stations.

[65] Selon la réponse de Ré:Sonne aux questions de la Commission, les stations dont les revenus sont inférieurs à 1,25 million de dollars présentent des listes séquentielles couvrant chaque jour de l’année dans la même proportion que les stations dont les revenus sont plus élevés. Au total, 51,5 pour cent des stations produisant des listes couvrant chaque jour de l’année ont des revenus de moins de 1,25 million de dollars. Cependant, comparativement aux autres, les stations à faibles revenus présentent plus souvent leurs rapports dans un format autre que ceux des logiciels comme Selector ou MusicMaster. Au total, 82,5 pour cent des 663 stations de radio commerciale présentant des rapports à Ré:Sonne utilisent un logiciel comme Selector ou MusicMaster. Les stations à faibles revenus représentent 54,3 pour cent des 116 stations qui n’utilisent pas ces logiciels.

[66] Il n’a pas été nécessaire de faire appel à un expert pour régler la question de la définition de revenus bruts.

C. Réduction à l’égard des services de distribution de musique numérique

[67] Connect/SOPROQ n’a pas fait comparaître d’experts pour appuyer sa proposition d’éliminer la réduction SDMN qui avait été appliquée au tarif de AVLA/SOPROQ dans la décision Radio commerciale (2010). Cependant, elle a présenté une copie du contrat de licence d’utilisateur final actuellement en vigueur entre l’entreprise de distribution de médias numériques Yangaroo Inc., les stations de radio et les producteurs d’enregistrements sonores; elle souligne les récentes modifications du contrat de licence d’utilisateur final, lesquelles confirment que les stations de radio ne sont pas autorisées à reproduire des enregistrements sonores, y compris la copie initiale à laquelle s’appliquait la réduction SDMN.

D. Exception relative aux appareils radiophoniques récepteurs (paragraphe 69(2))

[68] M. Martin Gangnier, directeur des licences de Ré:Sonne, a donné des renseignements sur l’exception relative aux appareils radiophoniques récepteurs prévue au paragraphe 69(2) de la Loi. Il a décrit la manière dont le service des licences a déterminé le taux de redevances proposé de 0,06 pour cent. Ce taux a été calculé à partir d’une estimation de la somme des redevances qu’auraient dû payer les entreprises si elles n’avaient pas bénéficié de l’exception relative aux appareils radiophoniques récepteurs. Trois principaux facteurs ont été pris en considération. Le premier est la somme des redevances qu’aurait dû recevoir Ré:Sonne n’eût été l’exception relative aux appareils radiophoniques récepteurs. Ré:Sonne a calculé cette somme en multipliant le nombre estimé d’entreprises canadiennes bénéficiant de l’exception relative aux appareils radiophoniques récepteurs par la moyenne pondérée des redevances payées par les entreprises semblables conformément au Tarif 3 de Ré:Sonne (utilisation et distribution de musique de fond). Le deuxième facteur, l’économie potentielle de frais de perception réalisée par Ré:Sonne grâce à l’exception relative aux appareils radiophoniques récepteurs, correspond au produit de la somme estimative des économies en coûts administratifs par entreprise (timbres, impression, papeterie, perception) et du nombre d’entreprises visées par l’exception relative aux appareils radiophoniques récepteurs. Le troisième facteur est le total des revenus bruts de l’ensemble de l’industrie de la radio commerciale en 2012, tels que rapportés à Ré:Sonne. [28]

[69] De l’avis de l’ACR, le nombre d’auditeurs sur lequel se fondent les annonceurs pour leurs achats de temps d’antenne auprès des stations de radio comprend le nombre d’employés et de clients des entreprises qui font jouer la radio dans leurs locaux. Ainsi, selon l’ACR, la structure de l’actuel tarif pour la radio commerciale [29] tient déjà compte de l’exécution en public dans les entreprises d’une manière qui aurait été impossible en 1938, lorsque le tarif pour la radio fondé sur le paragraphe 69(2) de la Loi a été fixé pour la première fois. À l’époque, insiste l’ACR, le tarif pour la radio était calculé sous la forme d’une somme fixe par appareil radiophonique récepteur au Canada et ne dépendait pas des revenus des stations.

[70] Par conséquent, l’ACR fait valoir que l’exécution en public est déjà prise en considération dans les redevances prévues au Tarif pour la radio commerciale (2010), étant donné que les revenus des stations de radio viennent principalement des annonceurs et qu’ils dépendent du nombre d’auditeurs. À l’appui de sa prétention, l’ACR s’appuie sur le témoignage de M. Rod Schween, qui a expliqué la manière dont les publicités sont généralement vendues au sein du Jim Patterson Broadcast Group. Les publicités nationales et régionales sont vendues en fonction du nombre d’auditeurs. Le Bureau of Broadcast Measurement (BBM) mesure le nombre d’auditeurs dans tous les environnements (à la maison, dans la voiture, au travail, etc.).

[71] L’ACR fait aussi valoir qu’il n’existe aucun élément de preuve fiable quant à l’utilisation de la radio commerciale comme musique de fond par les entreprises et que l’utilisation du Tarif 3 de Ré:Sonne comme point de référence n’est pas pertinente. Contrairement aux fournisseurs de musique de fond, la radio commerciale ne diffuse pas exclusivement de la musique, n’est pas conçue pour un environnement précis et n’offre pas un type de musique précis. Selon l’ACR, si la radio commerciale pouvait remplacer parfaitement la musique de fond, il n’existerait pas de marché pour les fournisseurs de musique de fond.

[72] L’ACR soutient qu’aucun tarif ne devrait être homologué en application du paragraphe 69(2) de la Loi. Subsidiairement, l’ACR fait valoir que, si la Commission décide qu’un tarif doit être homologué, il devrait s’agir d’un tarif nominal comme ceux qui ont été homologués dans le passé, de 1939 à 1952.

[73] Selon Ré:Sonne, le tarif à l’égard de la radio commerciale en ce qui a trait à la SOCAN et à Ré:Sonne (Tarif 1.A) s’applique à la communication d’enregistrements sonores, mais non à l’exécution publique d’enregistrements sonores; les redevances à payer en application du paragraphe 69(2) de la Loi ne sont donc pas visées par ce tarif. Ré:Sonne fait aussi valoir qu’un tarif nominal ne conviendrait pas. La preuve montre qu’un nombre non négligeable d’entreprises fait jouer la radio, ce qui signifie que l’exécution publique de musique au moyen de la radio a une valeur substantielle pour elles.

[74] M. Gangnier s’oppose à l’affirmation de l’ACR selon laquelle il n’existerait pas de marché pour les fournisseurs de musique de fond si la radio commerciale pouvait s’y substituer. Les dossiers de Ré:Sonne indiquent que les entreprises ont recours tant aux services de musique de fond qu’à la radio comme sources de musique de fond. M. Gangnier a connaissance de certaines chaînes qui ont même des politiques imposant à leurs magasins de faire jouer la radio AM/FM comme musique de fond. M. Gangier soutient aussi que Ré:Sonne possède un portrait clair des entreprises qui font jouer la radio commerciale comme musique de fond. Ré:Sonne indique aussi que la radio est une source de musique de fond bien établie et que les redevances prévues par le Tarif 3 représentent la meilleure mesure de référence pour les redevances à payer en application du paragraphe 69(2) de la Loi.

E. Exceptions au droit d’auteur

i. Valeur relative de chaque type de copie

[75] Dans son rapport, [30] M. Reitman a présenté les éléments qui lui ont servi à calculer la valeur relative des différents types de copies effectuées par les stations de radio. M. Reitman s’est fondé sur deux ensembles de données pour estimer les valeurs relatives : a) les réponses de 99 stations de radio aux demandes de renseignements de Connect/SOPROQ et de CSI; b) les données fournies par 212 stations de radio dans une enquête auprès des stations de radio commerciale menée par les sociétés de gestion au printemps 2013.

[76] À partir de ces données, M. Reitman a calculé six mesures, chacune correspondant à une combinaison des scores attribués aux résultats de l’enquête et des demandes de renseignements sur les plans de l’utilisation et de l’utilité, ensuite convertis en valeurs relatives. L’« utilisation » correspond à la fréquence d’utilisation d’un type de copie par les stations de radio, tandis que l’« utilité » correspond à l’importance de ce type de copie pour la station de radio. [31] Les résultats des six mesures obtenues sont semblables. Dans chaque cas, les copies d’incorporation, lescopies du système d’automatisation principal et les copies de sauvegarde se voient attribuer ensemble une valeur relative plus élevée, soit entre 70 pour cent et 83 pour cent de la valeur totale. Ce sont les copies du système d’automatisation principal qui ont la plus grande valeur.

[77] La mesure privilégiée par M. Reitman combine les données de l’enquête sur l’utilité et les données sur l’utilisation tirées des demandes de renseignements. Selon M. Reitman, une mesure hybride de ce genre est susceptible de produire une meilleure estimation de la valeur moyenne de chaque type de copie pour l’ensemble des stations de radio commerciale. La prise en considération de l’utilisation et de l’utilité permet une meilleure estimation de la réalité de l’industrie dans son ensemble, et l’addition des données provenant des demandes de renseignements et de l’enquête donne accès à un maximum de renseignements sur le nombre et le type de copies réalisées.

[78] Selon les calculs de M. Reitman, 35,2 pour cent de la valeur des reproductions liées à la radiodiffusion de la musique serait attribuable aux copies du système d’automatisation principal, 25,2 pour cent, aux copies d’incorporation, 22,3 pour cent, aux copies de sauvegarde, 7 pour cent, aux copies de préenregistrement vocal, 6,5 pour cent, aux copies de prestation en direct, 2,8 pour cent, aux copies d’évaluation ou de sélection de la musique, 0,6 pour cent, aux copies pour diffusion en continu sur Internet et appareils mobiles et 0,4 pour cent, aux copies additionnelles.

[79] M. Marcel Boyer et M. Pierre Cremieux, directeur général d’Analysis Group et professeur auxiliaire au département des sciences économiques de l’Université du Québec à Montréal et à la Yale School of Management, ont examiné l’analyse de la valeur relative des différents types de copies faite par M. Reitman. Selon eux, l’approche de M. Reitman consistant à additionner la valeur des différents types de copies ne reflète pas le modèle actuel de licence générale, dans lequel les stations paient un pourcentage de leurs revenus pour avoir le droit d’effectuer autant de copies qu’elles le souhaitent, sans égard à leur type. De plus, ils estiment que l’approche de M. Reitman présente les problèmes suivants : elle ne possède pas de véritable fondement économique; elle ne tient pas compte des interdépendances entre les copies ou de la possibilité d’effectuer des copies; elle ne tient pas compte de la proportion des stations qui sont admissibles à une exception; elle ne justifie pas son utilisation des réponses aux demandes de renseignements de préférence aux réponses à l’enquête.

[80] MM. Boyer et Cremieux proposent une autre approche, inspirée de la théorie des jeux coopératifs, pour calculer les redevances dans les cas où des exceptions s’appliquent à certaines des reproductions faites par les stations de radio. La théorie des jeux coopératifs s’intéresse à la juste répartition de la valeur ou des coûts communs entre plusieurs biens ou services, qui représentent les joueurs. Selon MM. Boyer et Cremieux, la valeur de Shapley représente la meilleure solution dans le contexte des exceptions au droit d’auteur. La valeur de Shapley correspond à la valeur que chaque joueur peut espérer obtenir en coopérant avec les autres joueurs. Dans ce jeu, les joueurs sont les types de copies effectuées par les stations de radio. En raison de l’interdépendance entre les types de copies, le fait d’effectuer des copies de plusieurs types a une plus grande valeur que la valeur additionnée des copies de types distincts effectuées de manière non coopérative.

[81] Pour calculer la valeur relative des différents types de reproductions, MM. Boyer et Cremieux ont utilisé les valeurs relatives déterminées par M. Reitman en fonction de leur utilité, ajustées selon le nombre de copies nécessaires, et ont posé l’hypothèse, sur la foi des réponses aux demandes de renseignements que les copies de sauvegarde, les copies de préenregistrement vocal et les copies d’incorporation dépendent toutes des copies du système d’automatisation principal et n’ont aucune valeur lorsqu’elles ne sont pas combinées à une reproduction du système d’automatisation et à la possibilité d’effectuer des copies. La valeur de Shapley correspond à la moyenne des valeurs ajoutées attribuées à chaque séquence de participants, et les valeurs relatives calculées par MM. Boyer et Cremieux représentent simplement la valeur de Shapley relative de chaque type de copie.

[82] Au moyen de cette méthode, MM. Boyer et Cremieux concluent que la valeur totale des reproductions se répartit comme suit : 39 pour cent pour les copies du système d’automatisation principal; 7,1 pour cent pour les copies de sauvegarde, 6,9 pour cent pour les copies d’incorporation, 3 pour cent pour les copies de préenregistrement vocal; 2,3 pour cent pour les copies de prestation en direct; 2,2 pour cent pour les copies d’évaluation ou de sélection de la musique; 0,3 pour cent pour les copies additionnelles; 0,2 pour cent pour les copies pour diffusion en continu sur Internet et appareils mobiles. De plus, MM. Boyer et Cremieux insistent sur le fait que leur approche, comme celle de M. Reitman, devrait être ajustée pour tenir compte du nombre de stations qui peuvent réellement se prévaloir d’une exception.

[83] M. Reitman ne partage pas le point de vue de MM. Boyer et Cremieux selon lequel son modèle ne tient pas compte des interdépendances. À son avis, le caractère « indispensable » attribué à certains types de copies dans l’enquête auprès des stations de radio tient compte des interdépendances. Ainsi, le modèle de Shapley auquel ont recours MM. Boyer et Cremieux compte deux fois la valeur ajoutée des copies du système d’automatisation principal. M. Reitman souligne aussi que ce ne sont pas toutes les stations qui ont déclaré que la copie du système d’automatisation principal était indispensable.

[84] Par ailleurs, selon M. Reitman, MM. Boyer et Cremieux n’ont aucune information sur les valeurs générées par la combinaison de différents types de copies, et les valeurs relatives qu’il a calculées ne conviennent pas nécessairement pour calculer la valeur de Shapley. En outre, M. Reitman est d’avis qu’en tenant compte de la possibilité d’effectuer des copies, la valeur de Shapley établie par MM. Boyer et Cremieux fait fi des joueurs additionnels qui devraient être pris en considération dans l’analyse.

ii. Licence générale modifiée

[85] Selon Connect/SOPROQ et CSI, la proposition de licence générale modifiée de l’ACR présente au moins trois écueils. Premièrement, elle ne serait pas conforme aux pratiques en vigueur dans l’industrie, car la preuve a établi que les stations de radio ne sont actuellement pas admissibles aux exceptions au droit d’auteur prévues par la Loi. Deuxièmement, rien n’indique que les stations apporteront à l’avenir les changements nécessaires pour se conformer aux exigences liées à ces exceptions. Troisièmement, le passage à une licence générale modifiée représenterait un fardeau administratif pour les sociétés de gestion.

[86] Mme Caroline Rioux, vice-présidente de l’Agence canadienne des droits de reproduction musicaux (CMRRA), a examiné la troisième solution proposée par l’ACR, soit la licence générale modifiée. Elle a expliqué en quoi consiste la gestion d’une licence générale modifiée et les raisons pour lesquelles CMRRA, SODRAC et CSI ne sont pas outillées pour s’acquitter de cette tâche. Pour que la licence générale modifiée fonctionne, les stations de radio souhaitant se prévaloir d’une exception au droit d’auteur auraient à faire la preuve à CSI de leur conformité aux exigences liées à ces exceptions, ce qui imposerait aux stations d’autres obligations en matière de présentation de rapports et à CSI d’autres activités administratives. Mme Rioux a estimé que l’application d’une nouvelle structure tarifaire conforme à une licence générale modifiée représenterait des coûts de 115 000 $ à 1,25 million de dollars par année pour les deux premières années, et de 45 000 $ à 900 000 $ par année par la suite. [32]

[87] MM. Boyer et Cremieux ont aussi examiné la solution de la licence générale modifiée proposée par l’ACR. Selon eux, une telle licence produirait des incitatifs contreproductifs et des lourdeurs administratives. Ils ajoutent qu’il ne serait pas juste d’appliquer de manière individuelle les valeurs relatives moyennes calculées pour l’ensemble des stations. Selon eux, il faudrait effectuer un calcul pour chacune des stations, ce qui pourrait avoir comme effet négatif d’encourager les stations à favoriser certains types de copies pour réduire leurs paiements de redevances. MM. Boyer et Cremieux proposent aussi la mise en place d’un système de frais d’administration ou de surcharges comme dans le Tarif 2.A de la SOCAN (Stations de télévision commerciales) dans l’éventualité où une licence générale modifiée serait adoptée, de manière à partager le fardeau des coûts administratifs entre les sociétés de gestion et les détenteurs de licence.

[88] Selon l’ACR, la complexité administrative ne devrait pas être une excuse pour homologuer un tarif simpliste et non modulable. En ce qui concerne la question de savoir si les stations se conforment aux exigences liées à certaines exceptions, l’ACR fait valoir que les radiodiffuseurs attendent la décision de la Commission pour voir quels correctifs ils devront apporter pour avoir droit aux exceptions et quelle sera l’ampleur de ces correctifs. [33] M. Schween corrobore l’explication de l’ACR.

iii. Contexte international des reproductions temporaires pour processus technologiques

[89] Connect/SOPROQ et CSI s’appuient aussi sur un rapport [34] rédigé par Mme Silke von Lewinski portant sur les différentes exceptions au droit d’auteur visant les reproductions temporaires pour processus technologiques dans divers pays. Mme von Lewinski a activement participé à de nombreuses réunions de comités de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) sur le droit d’auteur et les droits connexes. Selon elle, il est clairement ressorti de ces réunions que seules les copies temporaires se produisant automatiquement dans le cadre d’un processus technologique numérique devraient faire l’objet d’une exception relative aux processus technologiques, sous réserve de certaines conditions. Elle insiste sur le fait qu’il n’a jamais été envisagé dans les réunions de négociation informelles que les copies effectuées par les stations de radio à des fins de diffusion de la musique puissent être visées par cette exception et que c’est en fait ce que confirment les lois sur le droit d’auteur de la France, de l’Espagne, du Royaume-Uni, de l’Australie, de la Nouvelle-Zélande et du Japon. De plus, Mme von Lewinski souligne que l’exception relative aux enregistrements éphémères serait plus pertinente dans le contexte des copies effectuées par les stations de radio à des fins de diffusion de la musique. [35] Mme von Lewinski n’a pas comparu à l’audience, mais son rapport a été déposé en preuve.

iv. Pratiques et admissibilité des stations

[90] MM. Nesbitt et Youngs ont décrit le processus de radiodiffusion de la musique et les types de copies effectuées dans les stations de radio de Rogers et de LiVE 88.5, respectivement. M. Nesbitt a aussi expliqué que les processus technologiques et le processus de traitement de la musique n’avaient pas sensiblement changé depuis que Rogers avait commencé à utiliser des systèmes d’automatisation numériques de la musique au début des années 1990.

[91] M. Nesbitt a aussi expliqué que le processus suivi dans les stations d’information et les stations à prépondérance verbale différait sensiblement de celui suivi dans les stations musicales. Les types de copies effectuées ne sont pas les mêmes dans ces deux types de stations. Par exemple, les stations d’information et les stations à prépondérance verbale ne font pratiquement jamais de copies d’évaluation ou de sélection de la musique, de copies de préenregistrement vocal ni de copies de prestation en direct. Les processus d’incorporation sont aussi différents selon le type de station. Les stations d’information et les stations à prépondérance verbale n’utilisent qu’une partie des pistes sonores, [CONFIDENTIEL]. [36]

[92] Connect/SOPROQ et CSI soutiennent que la proposition de l’ACR se rapportant aux catégories de reproduction qui se qualifient au titre des exceptions au droit d’auteur n’est pas étayée par la preuve et ne tient pas compte de la variation dans les pratiques des différentes stations de radio.

[93] Dans son rapport Radio Technology and Workflow, [37] M. Murphy décrit le processus d’élaboration de la programmation dans les stations de radio commerciale, traite des reproductions faites par ces stations et explique en quoi le processus a changé depuis 2008. Selon lui, il n’existe pas un processus technologique unique pour toutes les stations de radio, mais plutôt un certain nombre de combinaisons de processus distincts. Dans un autre rapport, [38] M. Murphy indique qu’il est de plus en plus fréquent que les stations utilisent des serveurs additionnels (« serveurs redondants ») qui peuvent être mis en service dans l’éventualité où les serveurs du système d’automatisation principal ou les postes de travail tombent en panne. À son avis, ces serveurs redondants brouillent la notion de ce qui est généralement reconnu comme une copie de sauvegarde, car ils peuvent avoir d’autres utilités que la simple sauvegarde.

[94] En ce qui concerne la suppression des copies par les stations de radio, M. Murphy souligne que les stations n’utilisent pas actuellement de système automatisé pour supprimer les copies ou faire le suivi de leur suppression. La suppression est donc faite manuellement pas les stations et n’est pas liée à la date de création de la copie.

IV. TYPES DE COPIES EFFECTUÉES

[95] Comme les différents types de reproduction peuvent avoir des valeurs différentes et peuvent être admissibles aux exceptions dans différentes proportions (voire jamais), il convient d’examiner la terminologie utilisée en l’espèce.

[96] En général, l’ACR utilise les catégories de reproduction de musique établies et définies par les sociétés de gestion des droits de reproduction dans l’enquête qu’elles ont menée auprès de 212 stations de radio dans le cadre de la présente instance (l’« enquête »). Comme il a été mentionné à l’audience, nul ne conteste ces catégories ou leur définition. [39] Les catégories de l’enquête sont les suivantes (tirées du questionnaire de l’enquête) :

  1. Copie d’incorporation : copie effectuée à partir du serveur du SDMN ou d’une autre source;

  2. Copie d’évaluation ou de sélection de la musique : copie effectuée en vue d’évaluer la piste et de prendre la décision de l’ajouter ou non à la programmation de la station; [« copie d’évaluation de la musique »]

  3. Copie du système d’automatisation principal : copie effectuée à des fins de radiodiffusion directe;

  4. Copie de préenregistrement vocal : copie effectuée en vue de faciliter la création d’enregistrements vocaux;

  5. Copie de prestation en direct : copie de prestation en direct d’œuvres musicales données dans la station ou ailleurs;

  6. Copie pour la diffusion sur Internet et appareils mobiles : copie effectuée aux fins de faciliter la diffusion sur Internet ou appareils mobiles; [« copie pour diffusion en continu »]

  7. Copie de sauvegarde : copie destinée à remplacer une copie originale dans l’éventualité où elle serait perdue, endommagée ou autrement inutilisable;

  8. Autre copie : tout autre type de copie, y compris, mais non exclusivement les copies de pistes enregistrées sur les postes de travail du système, les copies redondantes de pistes enregistrées sur les serveurs et les disques durs, les copies de pistes enregistrées dans la bibliothèque musicale des stations de radio, les copies d’archivage des pistes, les copies de référence et toutes autres copies créées dans le cadre des activités de la station. [40]

[97] Mentionnons cependant que, même s’il n’y a pas de mésentente véritable quant aux définitions, la preuve indique que certaines copies peuvent être destinées à plus d’une fin, [41] ce qui peut influencer le taux de redevances applicable.

V. QUELS ENREGISTREMENTS SONORES SONT VISÉS PAR UN DROIT À RÉMUNÉRATION?

[98] Le droit pour lequel Ré:Sonne cherche à obtenir un tarif est énoncé à l’article 19 de la Loi, qui dispose que l’artiste-interprète et le producteur ont chacun droit à une rémunération équitable pour l’exécution en public ou la communication au public par télécommunication d’enregistrements sonores – à l’exclusion de la communication découlant de la « mise à disposition » et de toute retransmission. [42]

[99] Avant l’entrée en vigueur de la LMDA, la Loi prévoyait un droit à rémunération pour les enregistrements sonores qui avaient un point de rattachement au Canada ou à un pays partie à la Convention de Rome :

  1. le producteur, à la date de la première fixation, soit est un citoyen canadien ou un résident permanent au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés ou un citoyen ou un résident permanent d’un pays partie à la Convention de Rome, soit, s’il s’agit d’une personne morale, a son siège social au Canada ou dans un tel pays;
  2. toutes les fixations réalisées en vue de la confection de l’enregistrement sonore ont eu lieu au Canada ou dans un pays partie à la Convention de Rome. [43] [non souligné dans l’original]

[100] Les enregistrements sonores originaires de pays non-signataires de la Convention de Rome, comme les États-Unis, n’étaient pas visés par le droit à rémunération.

[101] De plus, même si l’enregistrement sonore remplissait la condition du point d’attache nécessaire au droit à rémunération, la portée de ce droit, ou sa durée, pouvait être limitée. Le paragraphe 20(2) de la Loi prévoit que le ministre de l’Industrie peut restreindre la portée et la durée du droit à rémunération des enregistrements sonores provenant d’un pays qui n’accorde pas aux enregistrements sonores provenant du Canada un droit à rémunération semblable, de par sa portée et sa durée, à celui accordé par le Canada.

[102] Ces limites étaient imposées par la Déclaration limitant le droit à rémunération équitable pour certains pays parties à la Convention de Rome, [44] qui restreint la portée du droit à rémunération visant les enregistrements sonores provenant des 20 pays qui y sont précisés. À titre d’exemple, le droit à rémunération visant les enregistrements sonores provenant de la Bolivie s’appliquait seulement pendant 20 ans et celui visant les enregistrements sonores provenant de la Norvège s’appliquait uniquement à la communication au public par télécommunication (l’exécution en public étant exclue), alors que le droit à rémunération ne s’appliquait pas du tout aux enregistrements sonores provenant de Monaco.

[103] Parce que le droit à rémunération n’était pas du tout accordé aux pays non-signataires de la Convention de Rome, ces pays ne sont pas précisés dans la Déclaration de 1999, et ce même s’ils n’appliquaient pas aux enregistrements sonores provenant du Canada un droit à rémunération semblable à celui accordé par le Canada.

A. Loi sur la modernisation du droit d’auteur

[104] La LMDA a eu pour effet important d’étendre le droit de rémunération aux enregistrements sonores qui avaient un point d’attache à un pays partie au traité de l’OIEP. Le paragraphe 15(2) de la LMDA dispose comme suit :

(1.2) Le droit à rémunération conféré par le paragraphe 19(1.2) ne peut être exercé que si, selon le cas :

a) le producteur, à la date de la première fixation, soit est un citoyen ou un résident permanent d’un pays partie au traité de l’OIEP, soit, s’il s’agit d’une personne morale, a son siège social dans un tel pays :

b) toutes les fixations réalisées en vue de la confection de l’enregistrement sonore ont eu lieu dans un pays partie au traité de l’OIEP. [45] [non souligné dans l’original]

[105] Le Décret fixant plusieurs dates d’entrée en vigueur de diverses dispositions de la loi [46] prévoyait que le paragraphe 15(2) de la LMDA entrerait en vigueur le jour de l’entrée en vigueur du traité de l’OIEP pour le Canada.

[106] Le gouvernement du Canada a déposé ses instruments de ratification du traité de l’OIEP le 13 mai 2014, et le traité est entré en vigueur au Canada le 13 août 2014. Ainsi, le droit à rémunération a été étendu aux enregistrements sonores provenant de pays non-signataires de la Convention de Rome mais parties au traité de l’OIEP.

[107] La Déclaration de 1999 ne précisait rien quant à ces pays, dont certains n’appliquaient pas aux enregistrements sonores provenant du Canada un droit à rémunération semblable à celui accordé par le Canada. Ainsi, le jour de l’entrée en vigueur du traité de l’OIEP au Canada, le ministre de l’Industrie a pris, conformément au nouveau paragraphe 20(2.1) de la Loi, la Déclaration limitant le droit à rémunération équitable pour certains pays partie à la Convention de Rome ou au Traité de l’OIEP. [47] Comme la Déclaration de 2014 avait entre autres pour effet d’abroger la Déclaration de 1999, elle a entièrement remplacé cette dernière.

[108] La Déclaration de 2014 ajoute à la liste certains pays qui n’étaient pas énumérés dans la Déclaration de 1999 (p. ex. les États-Unis), modifie les limites visant certains pays qui y figuraient (p. ex. le Japon), élimine dans leur entièreté les limites visant certains pays (p. ex. l’Irlande) et maintient telles quelles les limites visant certains pays (p. ex. le Lesotho).

B. Incidence sur les redevances payables à Ré:Sonne

[109] Ré:Sonne gère le droit à rémunération des artistes-interprètes et des producteurs d’enregistrements sonores. Cependant, pour que Ré:Sonne puisse percevoir les redevances pour l’usage d’un enregistrement sonore, celui-ci doit être admissible au droit à rémunération dans le contexte dans lequel il est utilisé, et Ré:Sonne doit être autorisée à percevoir les redevances à l’égard de ce droit à rémunération. [48]

[110] Fait à noter, avant l’entrée en vigueur du traité de l’OIEP au Canada, les enregistrements provenant des États-Unis ne donnaient pas droit à une rémunération et Ré:Sonne ne pouvait donc pas percevoir de redevances à l’égard de leur communication au public par télécommunication. Comme les enregistrements sonores provenant des États-Unis représentaient une proportion importante des enregistrements sonores exécutés ou communiqués au public par télécommunication au Canada, les tarifs précédents ont été modifiés pour tenir compte de cette situation.

[111] À titre d’exemple, dans la décision SCGDV – Tarif 1.A (1998-2002), [49] la Commission a accepté que le répertoire admissible au droit à rémunération représentait 49,3 pour cent de l’usage d’enregistrements sonores par les stations de radio commerciale. Elle a ensuite conclu que la SCGDV, le prédécesseur de Ré:Sonne, représentait les producteurs d’au moins 95 pour cent de ces enregistrements. Elle a par conséquent conclu que le répertoire admissible représentait 45 pour cent de l’utilisation d’enregistrements sonores par les stations de radio commerciale. [50] Ainsi, la Commission s’est demandé si les enregistrements sonores communiqués au public par télécommunication étaient admissibles, ou non, au droit à rémunération, compte tenu de leur utilisation, et si Ré:Sonne était autorisée, ou non, à percevoir des redevances à l’égard de ces enregistrements sonores.

[112] Dans la présente affaire, Ré:Sonne soutient que d’étendre le droit à rémunération aux enregistrements sonores provenant de pays parties au traité de l’OIEP a pour effet d’accroître la proportion d’enregistrements sonores à l’égard desquels elle est autorisée à percevoir des redevances pour leur communication au public par télécommunication.

[113] Toute augmentation potentielle du répertoire qui découle de l’entrée en vigueur du traité de l’OIEP est subordonnée à l’usage dont font les stations de radio de ces enregistrements sonores, au fait que ces usages ne sont pas exclus aux termes de la Déclaration de 2014 et que Ré:Sonne est autorisée à percevoir une rémunération équitable à l’égard de ces enregistrements sonores. Notamment, les enregistrements sonores provenant des États-Unis, constituant la plus importante source d’augmentation potentielle, sont exclus du droit rémunération aux termes du paragraphe 2(2) de la Déclaration de 2014, qui prévoit ce qui suit :

(2) Dans le cas d’un enregistrement sonore dont le producteur, à la date de la première fixation, est citoyen ou résident permanent des États-Unis ou de Singapour ou une personne morale ayant son siège social dans l’un de ces pays, le droit à rémunération équitable n’est pas accordé pour :

a) la radiodiffusion — légale selon les dispositions de la Loi sur la radiodiffusion — par une station terrestre de radio d’un signal porteur de l’enregistrement sonore pour réception gratuite et sans abonnement;

b) la communication au public par télécommunication de l’enregistrement sonore à une entreprise pour exécution à titre de musique de fond sur les lieux de celle-ci dans le cours normal des affaires. [51]

[114] Ainsi, l’ajustement des taux de redevances serait potentiellement fondé sur l’usage que font les stations de radio commerciale des enregistrements sonores provenant d’un pays autre que les États-Unis partie au traité de l’OIEP, mais non-signataire de la Convention de Rome. Ces enregistrements sonores devraient tout de même faire l’objet d’une vérification visant à déterminer s’ils ne sont pas exclus aux termes de la Déclaration de 2014. À titre d’exemple, si les enregistrements sonores provenant de la Bolivie donnent généralement droit à une rémunération pour la communication au public par télécommunication, cela n’est vrai que pour les 20 années suivant leur fixation, ce qui signifie que les enregistrements sonores de plus de 20 ans provenant de la Bolivie sont exclus.

[115] À part les estimations utilisées par la Commission à l’égard des enregistrements provenant des États-Unis dans le cadre des tarifs précédents, nous ne disposons pas d’éléments de preuve portant sur la fréquence de diffusion des enregistrements sonores provenant des pays parties au traité de l’OIEP (mais non-signataires de la Convention de Rome) par les stations de radio canadiennes, ni sur la proportion que représentent ces enregistrements par rapport à l’ensemble des enregistrements sonores qu’elles diffusent. Nous n’avons pas davantage d’éléments de preuve concernant les enregistrements sonores provenant des pays parties au traité de l’OIEP (mais non-signataires de la Convention de Rome) à l’égard desquels Ré:Sonne est autorisée à percevoir des redevances.

[116] En l’absence de ces éléments de preuve, la Commission n’est pas en mesure de faire des ajustements de façon éclairée. Ainsi, l’ajustement de répertoire pour la période visée demeurera le même que dans le tarif pour la radio commerciale précédent.

VI. PARAGRAPHE 3(1) – « UNE PARTIE IMPORTANTE »

[117] Selon la Loi, le « droit d’auteur » sur une œuvre s’entend du « droit exclusif de produire ou reproduire la totalité ou une partie importante de l’œuvre ». [52] Ainsi, la reproduction d’une partie d’une œuvre qui ne constitue pas une partie importante de l’œuvre n’est pas visée par le « droit exclusif ». Par conséquent, la reproduction d’une partie non importante d’une œuvre protégée ou d’un autre objet de droit d’auteur ne donne pas droit à des redevances en vertu d’un tarif.

[118] L’ACR soutient que certaines reproductions effectuées par les stations de radio, plus particulièrement les « copies pour diffusion en continu sur Internet et appareils mobiles » et certaines « copies de préenregistrement vocal », ne constituent pas des reproductions d’une partie importante d’œuvres musicales ou d’enregistrements sonores. [53]

[119] Dans son énoncé de cause, l’ACR fait valoir que les « copies pour diffusion en continu sur Internet et appareils mobiles » relèvent de la mise en mémoire tampon de copies destinées à la diffusion en continu de contenu des stations de radio à des ordinateurs, appareils mobiles et autres terminaux numériques. L’ACR soutient que ces « copies pour diffusion en continu sur Internet et appareils mobiles » ne violent pas le droit d’auteur, car elles ne constituent pas une partie importante des œuvres. L’ACR ajoute que, selon les récentes modifications, ce type de copies peut tomber également sous le coup de l’article 30.71 de la Loi, défini ci-dessus.

[120] Dans le cas des copies de préenregistrement vocal, l’ACR soutient que certaines de ces copies ne satisfont pas l’exigence relative à la partie importante d’une œuvre et doivent à ce titre être exclues du tarif. Il s’agit ici principalement d’une question d’éléments de preuve, puisque que ceux présentés par l’ACR montrent des incohérences dans la façon dont les stations de radio utilisent les copies de préenregistrement vocal. Indépendamment des éléments de preuve relatifs aux diverses pratiques en vigueur dans les stations de radio à l’égard de ce type de copies, une question plus fondamentale encore se pose. Le critère de la « partie importante » énoncé au paragraphe 3(1) de la Loi n’est pas nouveau et, en théorie, les copies qui ne constituent pas une partie importante de l’œuvre [54] n’ont jamais été visées par un tarif, de sorte qu’elles n’ont jamais été comprises dans les redevances versées en vertu des tarifs pour la radio commerciale précédents. Par conséquent, nous ne voyons aucune raison d’ajuster les taux de redevances pour les copies de préenregistrement vocal. Notre analyse aurait pu différer si on nous avait présenté des éléments de preuve fiables établissant que les pratiques des stations de radio avaient substantiellement changé, de sorte qu’une quantité beaucoup plus importante de copies de préenregistrement vocal ne constituent pas des reproductions d’une « partie importante » d’œuvres par rapport à la situation qui prévalait en 2010, lorsque les taux visant la reproduction ont été fixés pour la dernière fois. Aucun élément de preuve de la sorte n’a été versé au dossier dans la présente affaire.

VII. RÉDUCTION SDMN

[121] Le 28 janvier 2013, Connect/SOPROQ a informé la Commission de son intention de proposer l’élimination de trois réductions appliquées par la Commission aux taux de départ de 0,688 pour cent fixés en 2010 pour la reproduction d’enregistrements sonores et de prestations d’artistes-interprètes.

[122] Plus précisément, Connect/SOPROQ a indiqué qu’elle demanderait à la Commission de réexaminer les réductions appliquées de façon à tenir compte de l’étendue de son répertoire (la réduction en fonction du répertoire), de la valeur présumée des prestations dont le droit de reproduction appartient toujours à l’artiste-interprète (la réduction pour la prestation) et de la valeur présumée des copies autorisées par les fournisseurs de services de distribution de musique numérique pour le compte des producteurs d’enregistrements sonores (la réduction SDMN).

[123] Dans une lettre datée du 6 août 2013, Connect/SOPROQ a informé la Commission que, à la suite d’une entente intervenue avec l’ACR et Artisti, elle ne chercherait plus à faire éliminer la réduction en fonction du répertoire et la réduction pour la prestation. La Commission a confirmé, dans un avis du 7 août 2013, que ces questions ne seraient pas examinées dans le cadre de la présente instance.

[124] Ainsi, la seule question à examiner est celle de la réduction SDMN. Cette réduction a été adoptée par la Commission pour la première fois dans le cadre de sa décision Radio commerciale (2010). La Commission s’est largement appuyée sur le libellé du contrat de licence d’utilisateur final en vigueur entre Yangaroo Inc. (Yangaroo), les stations de radio commerciale et les producteurs d’enregistrements sonores, à l’égard de l’utilisation du système de distribution de média numérique Digital Media Distribution System (DMDS) de Yangaroo. [55] La Commission a conclu que :

le texte des ententes entre les maisons de disques, DMDS et les radiodiffuseurs indique clairement que DMDS est un mandataire des maisons de disques. Ces dernières octroient à DMDS une licence gratuite, non exclusive et pancanadienne lui permettant d’autoriser des tiers à télécharger de la musique ou à la faire jouer en continu uniquement dans le but de fournir le « service », défini comme la [TRADUCTION] « livraison de musique […] aux utilisateurs autorisés par téléversement et téléchargement ». DMDS autorise les radiodiffuseurs à écouter de la musique et à télécharger des pistes afin de les ajouter à leur liste de diffusion. [56]

[125] Cependant, DMDS a modifié son contrat de licence d’utilisateur final afin d’établir clairement qu’elle interdit toute reproduction.

[126] Le contrat actuel est libellé comme suit :

[TRADUCTION]
AUCUN DROIT ACCORDÉ

[…] Les Œuvres contenues sur le site Web de DMDS sont protégées par les lois sur le droit d’auteur et les marques de commerce. DMDS n’est pas autorisée à vous transférer les droits ou la propriété des Œuvres ou des copies des Œuvres, des marques de commerce ou des droits d’auteur, ou à vous consentir une licence à cet égard. Il vous est interdit de modifier, de reproduire, de republier, de publier, de diffuser ou de distribuer les Œuvres sans le consentement des titulaires des droits d’auteur. Il vous est permis d’imprimer le matériel publicitaire à des fins promotionnelles uniquement, pourvu que toute mention de droits d’auteur accompagnant à l’origine ce matériel accompagne chaque copie. Malgré toute disposition contraire du présent Accord, la seule licence ou permission accordée à toute station de radio commerciale ou à toute autre entreprise de radiodiffusion (« entreprise de radiodiffusion ») en ce qui concerne le Média (défini ci-dessous), en vertu du présent Accord, porte sur l’accès au site Web DMDS pour télécharger le Média, conformément à une licence écrite distincte accordée par le titulaire du droit d’auteur ou conformément aux conditions d’un tarif en vigueur valide et homologué par la Commission du droit d’auteur du Canada. Aucun droit de propriété ou licence à l’égard du Média ou de copies du Média n’est accordé auxdites entités, y compris à l’égard du téléchargement, de la diffusion en continu, de la production ou de l’utilisation de toute copie, de l’ajout de copie à une liste de lecture, de la communication au public par télécommunication ou de toute autre fin de radiodiffusion. [57] [non souligné dans l’original]

[127] Compte tenu des modifications apportées au contrat de licence d’utilisateur final en vigueur, nous ne pouvons conclure qu’une licence implicite est accordée pour le compte des producteurs d’enregistrements sonores; par conséquent, les copies réalisées au moyen du système de DMDS ne peuvent être considérées comme étant autorisées par la licence, comme la Commission avait conclu en 2010. [58] Ainsi, nous concluons que l’ajustement que la Commission a précédemment appliqué aux reproductions afin de tenir compte de la réduction DMDS n’est plus justifié.

VIII. APPLICATION DES EXCEPTIONS AUX REPRODUCTIONS RÉALISÉES PAR LES STATIONS DE RADIO

[128] L’application des exceptions aux reproductions effectuées par les stations de radio exige que nous nous prononcions sur ce qui suit. Nous devons d’abord déterminer quels types de reproductions, s’il en est, peuvent bénéficier d’une exception prévue par la Loi. Si nous concluons qu’au moins un type de reproduction peut bénéficier d’une exception, nous devrons ensuite : a) déterminer la fréquence de ces types de reproductions au sein de l’industrie de la radiodiffusion; b) déterminer le pourcentage de ces reproductions qui peuvent faire l’objet d’une exception; c) appliquer la réduction au taux de redevances qui serait autrement payable.

[129] Dans l’analyse qui suit, nous déterminerons quels sont les types de reproductions admissibles à une exception. La valeur relative de chaque type de reproduction et la réduction relative correspondante seront déterminées plus loin dans la décision, dans la section d’analyse économique.

A. Éléments de preuve et fardeau de la preuve

[130] CSI soutient que les suppositions sur la conformité future relèvent de la conjecture, et que, à ce titre, aucune réduction générale ne devrait être appliquée puisqu’afin de [TRADUCTION] « réduire les taux de la valeur relative d’une catégorie précise de copie, comme l’ACR le demande actuellement, elle doit démontrer que toutes les stations de radio au Canada sont, et demeureront, admissibles à l’exception pour ce qui est de chaque copie de cette catégorie ». [59]

[131] L’ACR ne souscrit pas à ce point de vue et fait plutôt valoir ce qui suit :

[TRADUCTION] On ne peut pas raisonnablement s’attendre des entités commerciales qu’elles procèdent à des changements opérationnels en prévision de résultats inconnus qui pourraient ou non se produire. De fait, CSI fonctionne de la même manière. La présidente de CSI, Caroline Rioux, a expliqué en détail les changements qui devraient être apportés au système de rapport et de distribution de CSI si la Commission devait homologuer un tarif de reproduction prévoyant une licence générale modifiée, mais elle a clairement indiqué que CSI n’avait pas commencé, et n’avait pas davantage l’intention de commencer, à adopter de tels changements, avant que la Commission ne modifie le tarif.

La pratique antérieure ne permet raisonnablement de prévoir les comportements futurs que dans la mesure où l’on ne s’attend à aucun changement structurel sensible. Dans le cas présent, ce changement a eu lieu à la suite des modifications apportées à la Loi il y a plus d’un an. Il est technologiquement possible, voire prévisible, que les diffuseurs changent leurs façons de faire. [60]

[132] Dans son argument, l’ACR ne fait pas de distinction entre la source des obligations qui incombent à chaque partie. Les obligations administratives de CSI imposées par un tarif ne prennent naissance que si la Commission homologue ce tarif. En revanche, les obligations des diffuseurs en matière de copie découlent de la Loi, et sont donc déjà applicables au moment de la reproduction d’une œuvre protégée. La Commission ne crée pas ces dernières obligations, car elles existent déjà; la Commission applique simplement le droit qui les établit. Dans la mesure où les diffuseurs veulent se prévaloir d’une exception, exceptions. c’est à eux qu’incombe le fardeau de prouver qu’ils répondent aux exigences applicables à cette exception.

[133] Cela dit, nous reconnaissons que nous ne pouvons pas imposer aux diffuseurs un fardeau de preuve si exigeant qu’il leur serait impossible à l’avenir de démontrer qu’ils satisfont aux exigences d’une exception. Dans les instances en matière de tarif, le nombre d’œuvres ou d’autres objets de droit d’auteur à considérer est colossal, et la qualité et le détail des éléments de preuve relatifs à une copie précise ne sont vraisemblablement pas les mêmes que ceux présentés dans le cadre d’une action en contrefaçon. Le fait d’établir un seuil trop exigeant pour démontrer la conformité des utilisations futures aux exigences d’une exception aurait pour effet, à toutes fins utiles, de rendre théoriques les exceptions créées par le législateur, ce qui serait inéquitable et contraire à l’objet de la Loi.

[134] Parce que les projets de tarifs sont de nature prospective, il n’est jamais possible d’établir la conformité de certaines actions futures aux exigences d’une exception. Cependant, dans le cas d’une licence générale, il est raisonnable pour la Commission d’examiner les éléments de preuve qui lui sont présentés en vue de déterminer s’il est probable que les exigences applicables à une exception seront respectées, et dans quelle mesure. Les pratiques du passé sont généralement un bon indicateur de la conformité future.

[135] Comme nous l’expliquons ci-dessous, les éléments de preuve présentés dans la présente instance sont, selon nous, suffisants pour que nous concluions que certaines reproductions réalisées par les stations de radio sont admissibles à une ou plusieurs des exceptions suivantes :

  • Utilisation équitable aux fins de recherche (article 29);
  • Copies de sauvegarde (article 29.24);
  • Reproductions temporaires pour processus technologiques (article 30.71).

[136] Cependant, les éléments de preuve ne nous permettent pas de conclure qu’une partie ou la totalité des types de reproductions remplissent les exigences de l’exception relative aux copies éphémères (article 30.9). En effet, l’ACR admet que, au moment de l’audience, les télédiffuseurs [TRADUCTION] « n’avaient pas entrepris les démarches nécessaires pour satisfaire aux diverses exigences des exceptions, ou prouver qu’ils les respectaient ». [61]

[137] L’ACR soutient par contre que [TRADUCTION] « les diffuseurs attendent simplement d’être informés des changements qui seront requis de leur part, ainsi que des effets de ceux-ci ». [62] Elle fait observer que le fait que les radiodiffuseurs ne se soient pas encore conformés à certaines exigences n’est pas un motif raisonnable pour conclure qu’ils ne le feront pas. L’ACR explique qu’une fois que la Commission aura présenté son interprétation des démarches requises pour bénéficier de ces exceptions, les stations de radio se plieront aux exigences – pourvu que la réduction des taux découlant de la conformité aux exigences l’emporte sur le coût pour s’y conformer. [63] Plus loin dans la décision, nous aborderons la question de l’éventuelle conformité des stations de radio aux exigences de l’exception fondée sur le caractère éphémère.

B. Article 29 – Utilisation équitable aux fins de recherche

[138] L’ACR invoque le raisonnement exposé dans l’arrêt Bell et soutient que les copies réalisées à des fins d’évaluation de la musique par les stations de radio tombent sous le coup de l’utilisation équitable aux fins de recherche conformément à l’article 29 de la Loi. [64]

[139] En revanche, CSI fait valoir que l’ACR n’a produit aucun élément de preuve établissant que les copies en cause sont réalisées à des fins de recherche. Elle soutient également que l’ACR n’a pas prouvé que l’un ou l’autre des six facteurs intervenant à la deuxième étape du test donne lieu à une conclusion d’utilisation équitable. [65]

[140] Le test servant à déterminer le caractère équitable, énoncé par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt CCH Canadienne Ltée c. Barreau du Haut-Canada, [66] comporte deux volets. Le premier volet consiste à déterminer si l’utilisation correspond à une des fins prévues par la Loi. Le deuxième consiste à évaluer si l’utilisation est « équitable ». [67] Dans l’arrêt CCH, la Cour suprême a établi six facteurs qui « peuvent contribuer à la détermination du caractère équitable ou inéquitable de l’utilisation. Ces facteurs peuvent être plus ou moins pertinents selon le contexte factuel de la violation alléguée du droit d’auteur ». [68] Il n’est pas nécessaire que chacun de ces facteurs soit respecté pour qu’une utilisation soit jugée équitable.

i. L’utilisation correspond-elle à une des fins prévues par la Loi?

[141] Comme la Cour suprême l’a expliqué dans l’arrêt Bell, une analyse du caractère équitable fait intervenir « un critère relativement peu strict au premier volet, de sorte que le grand branle-bas analytique n’intervient qu’au second volet, celui de la détermination du caractère équitable ». [69]

[142] Nous acceptons que les copies d’évaluation de la musique aient pour but de déterminer si une station de radio ajoutera les pistes à sa programmation. Cela suffit pour que cette utilisation soit considérée comme étant à des fins de recherche selon le premier volet du test.

[143] Nous devons à présent déterminer si l’utilisation est équitable selon les six facteurs prévus dans l’arrêt CCH, nommément : le but de l’utilisation, l’ampleur de l’utilisation, la nature de l’utilisation, les solutions de rechange à l’utilisation, la nature de l’œuvre et l’effet de l’utilisation sur l’œuvre.

ii. Facteurs d’une utilisation équitable

a. Le but de l’utilisation

[144] Le premier facteur énoncé dans l’arrêt CCH est le but de l’utilisation. Il s’agit ici d’évaluer objectivement « le but ou le motif réel » motivant l’utilisation de l’œuvre protégée. [70] Comme la Commission l’a récemment fait remarquer dans une autre décision, [71] une certaine confusion peut découler du fait que le texte anglais de l’arrêt CCH emploie le terme « purpose » (of the dealing) dans deux parties distinctes du test de l’analyse du caractère équitable : la fin analysée dans le cadre du premier volet et le facteur relatif au but de l’utilisation dans le cadre du deuxième volet. Par souci de clarté, et inspirés par l’expression « but de l’utilisation » figurant au paragraphe 54 du texte français de l’arrêt CCH, nous estimons préférable d’utiliser « goal of the dealing » en anglais lorsqu’il est question du premier facteur du deuxième volet.

[145] Ici, le but est de décider si une piste musicale précise sera diffusée. Cela n’est guère différent des situations qui prévalaient dans les arrêts Bell et CCH, alors que la recherche était réalisée en vue de poursuivre une activité commerciale. Dans l’arrêt Bell, il a été déterminé que la reproduction servait au processus décisionnel d’achat de pistes musicales, et dans l’arrêt CCH, à la prestation de services juridiques, généralement dans un but lucratif.

[146] Certains éléments de preuve donnent à penser que les copies d’évaluation de la musique peuvent dans certains cas servir de copies à d’autres fins, notamment de copies de sauvegarde, sans avoir d’incidence sur le caractère équitable de l’utilisation. Toutefois, lorsqu’elles servent à titre de copies du système d’automatisation principal (aucun élément de preuve clair n’a été présenté à l’égard de cette hypothèse), elles peuvent alors rendre cette utilisation moins équitable.

[147] Cependant, compte tenu de la méthode de calcul des taux de redevances employée dans le cadre du présent tarif, si la copie réalisée dans le but d’évaluer une piste musicale devait servir à d’autres fins, son caractère rémunérable et sa valeur seront évalués de façon distincte comme si une autre copie avait été réalisée à ces fins additionnelles. Par conséquent, nous sommes en mesure d’évaluer les copies d’évaluation de la musique comme si l’utilisation n’avait pas de but additionnel, et nous concluons que ce facteur milite en faveur d’une utilisation équitable.

b. L’ampleur de l’utilisation

[148] Nous croyons comprendre que, de façon générale, la création d’une copie d’évaluation de la musique implique la reproduction de la totalité de l’œuvre et de l’enregistrement sonore; cela tend à rendre l’utilisation non équitable. Cependant, la Cour suprême du Canada a indiqué dans l’arrêt CCH que le but de l’utilisation peut parfois exiger la reproduction de l’œuvre complète. [72] Dans le cas présent, l’écoute de la totalité de l’œuvre pour prendre une décision éclairée ne semble pas déraisonnable, mais plutôt nécessaire, voire préférable, dans certains cas.

[149] Le fait que des copies d’évaluation de la musique ne soient pas réalisées pour tous les enregistrements sonores musicaux détenus par, ou autorisées pour, les stations de radio, mais qu’elles soient limitées à une sélection d’enregistrements qu’un directeur de programme souhaite évaluer pour une programmation précise, comme le soutient l’ACR, [73] ne tend pas à rendre l’utilisation plus ou moins équitable pour ce qui est du facteur de l’ampleur de l’utilisation. Nous nous pencherons sur cette question lorsque nous examinerons la fréquence de ce type de reproduction. Dans l’analyse qui nous occupe, nous devons appliquer les facteurs énoncés dans l’arrêt CCH aux reproductions réellement réalisées.

[150] Ainsi, si l’ampleur de l’utilisation tend à démontrer que ces copies ne sont pas équitables, cette tendance est faible.

c. La nature de l’utilisation

[151] En ce qui concerne les copies d’évaluation de la musique, les éléments de preuve présentés par les opposants montrent qu’une seule copie fonctionnelle (non chiffrée) d’un enregistrement sonore musical est généralement réalisée afin d’être utilisée exclusivement à l’interne par le personnel d’une station de radio. [74] Aucune opposition marquée ne s’est fait entendre à l’égard de cette preuve et nous n’avons pas de raison de croire que les copies d’évaluation de la musique ne sont pas utilisées de cette manière.

[152] Dans l’arrêt CCH, la Cour suprême s’est exprimée comme suit :

Pour déterminer la nature d’une utilisation, le tribunal doit examiner la manière dont l’œuvre a été utilisée. Lorsque de multiples copies sont diffusées largement, l’utilisation tend à être inéquitable. Toutefois, lorsqu’une seule copie est utilisée à une fin légitime en particulier, on peut conclure plus aisément que l’utilisation était équitable. Si la copie de l’œuvre est détruite après avoir été utilisée comme prévu, cela porte également à croire qu’il s’agissait d’une utilisation équitable. L’on peut également tenir compte de l’usage ou de la pratique dans un secteur d’activité donné pour décider si la nature de l’utilisation est équitable. [75]

[153] Appliquant ces principes à nos conclusions ci-dessus, nous concluons que cette utilisation et diffusion limitées des œuvres militent en faveur d’une utilisation équitable.

d. Solutions de rechange à l’utilisation

[154] L’ACR invoque l’arrêt Bell au soutien de son argument selon lequel [TRADUCTION] « l’existence de solutions de rechange se limite à déterminer si un “équivalent non protégé aurait pu être utilisé à la place de l’œuvre, ou si l’utilisation n’était pas raisonnablement nécessaire eu égard à la fin visée” ». [76]

[155] Bien que la Cour suprême se soit appuyée sur ces considérations dans l’arrêt CCH, [77] l’arrêt Bell confirme que des solutions de rechange peuvent être envisagées. [78] Comme il est expliqué dans cet arrêt, d’autres solutions de rechange proposées ont été évaluées dans le cadre de l’examen de ce facteur, mais ont été écartées du fait qu’elles n’étaient pas raisonnables [79] ou ne permettaient pas d’attendre la fin visée par l’utilisation. [80] Ainsi, la disponibilité d’équivalents non protégés et la non-nécessité de l’utilisation ne sont que deux exemples de solutions de rechange à envisager. Si d’autres solutions de rechange sont disponibles, elles peuvent être évaluées dans le cadre de ce facteur.

[156] CSI fait valoir que les éléments de preuve présentés par l’ACR confirment que la vaste majorité des stations de radio ne reproduisent pas de musique à des fins d’évaluation et de sélection. Elle affirme que cela signifie que des solutions de rechange s’offrent aux stations de radio : [TRADUCTION] « Le fait que, dans le cas présent, des solutions de rechange sont déjà largement utilisées – et qu’elles sont de fait employées plus souvent que les utilisations contestées – justifie d’inférer qu’elles sont effectivement viables ». [81]

[157] M. Nesbitt affirme que le système de DMDS permet le téléchargement et la diffusion en continu de musique. Il soutient également que, si les stations de radio disposent de diverses méthodes pour évaluer les pistes, la diffusion en continu du système de DMDS semble être très utilisée. De plus, la diffusion en continu à partir du système est gratuite.

[158] Les éléments de preuve montrent que près du quart des stations de radio réalisent des copies d’évaluation de la musique. [82] Si des exigences particulières ou des limites techniques rendent impossible l’utilisation de solutions de rechange, comme la diffusion en continu, les éléments de preuve dont nous sommes saisis ne nous permettent pas de conclure que ces obstacles ou problèmes existent réellement.

[159] Par conséquent, nous concluons qu’il existe bel et bien des solutions de rechange aux copies pour d’évaluation de la musique. Ainsi, ce facteur milite en faveur d’une utilisation inéquitable.

e. La nature de l’œuvre

[160] Le cinquième facteur est la nature de l’œuvre et appelle à se demander si l’œuvre en est une qui devrait être grandement diffusée. Si une œuvre musicale ne fait pas appel aux mêmes considérations d’intérêt public que celles qui s’appliquent aux documents juridiques, il ne s’agit pas non plus d’un type d’œuvre dont la diffusion restreinte serait souhaitable, comme cela pourrait être le cas d’écrits privés, par exemple.

[161] Nous soulignons également que l’effet de l’utilisation sur la diffusion est semblable à celui dont il est question dans l’arrêt Bell : il est peu probable qu’une station de radio diffuse une piste à moins qu’elle ne puisse en faire l’écoute préalable. [83] De plus, dans le cas qui nous occupe, il est raisonnable de présumer que les œuvres musicales en cause sont relativement nouvelles et qu’elles pourraient être avantagées par la diffusion.

[162] Nous concluons par conséquent que ce facteur ne milite ni en faveur d’une utilisation équitable ni en faveur d’une utilisation inéquitable.

f. L’effet de l’utilisation sur l’œuvre

[163] Dans l’arrêt Bell, les fournisseurs de services de musique en ligne avaient pris des précautions pour réduire la probabilité que les écoutes préalables remplacent l’achat d’une copie, par exemple en offrant l’écoute préalable au moyen de la diffusion en continu (au lieu d’en permettre le téléchargement), en n’offrant qu’un extrait (au lieu d’offrir la piste entière), et en utilisant un débit binaire inférieur.

[164] Aucun élément de preuve déposé devant la Commission n’étaye la proposition selon laquelle les copies d’évaluation de la musique ont un effet négatif sur les œuvres musicales ou les enregistrements sonores.

[165] De plus, il ressort de la preuve que par le passé les maisons de disques envoyaient gratuitement aux stations de radio des pistes musicales sur disques vinyles ou CD, parfois même en plusieurs exemplaires. [84] Il était donc à l’avantage des maisons de disques de fournir ces copies aux stations de radio, du fait que les maisons de disques espéraient que les stations de radio incluent ces pistes dans leurs listes de lecture après les avoir écoutées. Même de nos jours, il arrive que des personnes envoient leurs pistes musicales sur CD. [85] La situation s’apparente à celle qui était en cause dans l’arrêt Bell. En effet, parce que les écoutes préalables servaient à promouvoir l’achat ou l’utilisation des œuvres protégées, il fut conclu que ces extraits tendaient à profiter aux titulaires de droits.

[166] Il est donc très peu probable que ce type de copie puisse avoir un effet négatif sur l’œuvre. Dans le cas présent, les copies sont simplement réalisées par les stations de radio plutôt que par les titulaires de droits, mais elles sont utilisées à des fins identiques. Ainsi, nous concluons que ce facteur tend à démontrer le caractère équitable de l’utilisation.

iii. Conclusion

[167] La preuve démontre que les pratiques liées aux processus d’évaluation adoptées par les stations de radio varient, et ce même à l’intérieur d’un même groupe de stations de radio. [86] Comme nous l’avons mentionné ci-dessus en lien avec le facteur des solutions de rechange à l’utilisation, il arrive qu’aucune reproduction ne soit réalisée, les pistes musicales étant alors diffusées directement à partir du système des SDMN.

[168] Bien que nous soyons conscients que des solutions de rechange s’offrent aux stations de radio, nous concluons que, dans l’ensemble, l’utilisation des pistes musicales à des fins de sélection et d’évaluation de la musique, telle qu’exposée en preuve, correspond à une fin prévue à l’article 29 de la Loi et est équitable.

C. Article 29.24 – Copies de sauvegarde

[169] L’exception récemment adoptée dans la Loi à l’égard des copies de sauvegarde se lit comme suit :

Copies de sauvegarde

29.24 (1) Ne constitue pas une violation du droit d’auteur le fait, pour la personne qui est propriétaire de la copie (au présent article appelée « copie originale ») d’une œuvre ou de tout autre objet du droit d’auteur, ou qui est titulaire d’une licence en autorisant l’utilisation, de la reproduire si les conditions ci-après sont réunies :

a) la reproduction est effectuée exclusivement à des fins de sauvegarde au cas où il serait impossible d’utiliser la copie originale, notamment en raison de perte ou de dommage;

b) la copie originale n’est pas contrefaite;

c) la personne ne contourne pas ni ne fait contourner une mesure technique de protection, au sens de ces termes à l’article 41, pour faire la reproduction;

d) elle ne donne aucune reproduction à personne.

Assimilation

(2) Une des reproductions faites au titre du paragraphe (1) est assimilée à la copie originale en cas d’impossibilité d’utiliser celle-ci, notamment en raison de perte ou de dommage.

Destruction

(3) La personne est tenue de détruire toutes les reproductions faites au titre du paragraphe (1) dès qu’elle cesse d’être propriétaire de la copie originale ou d’être titulaire de la licence qui en autorise l’utilisation.

[170] D’un point de vue pratique, l’exception visant les copies de sauvegarde énoncée à l’article 29.24 de la Loi est susceptible d’être assez répandue dans l’industrie de la radiodiffusion. Pour qu’elle ne constitue pas une violation au droit d’auteur, et ne donne ainsi droit à aucune redevance dans le contexte de l’établissement d’un tarif, chaque copie de sauvegarde doit néanmoins répondre aux exigences prévues par la Loi.

[171] Bien qu’il soit relativement facile de se conformer aux exigences des alinéas 29.24(1)a) à c) de la Loi, il peut s’avérer en revanche plus difficile de se conformer aux exigences de l’alinéa 29.24(1)d) et du paragraphe 29.24(3) dans le cas où les stations de radio d’un même groupe partagent les mêmes copies de sauvegarde. Cependant, rien n’indique que ces copies sont données gratuitement. De plus, étant donné que les reproductions réalisées par les stations de radio ont historiquement été visées par une licence (généralement sous forme d’un tarif), il ne semble pas que la situation décrite au paragraphe 29.24(3) soit susceptible de survenir souvent.

[172] Ainsi, nous concluons que, selon la prépondérance des probabilités, les copies de sauvegarde réalisées par les stations de radio respectent presque toujours les exigences de l’article 29.24 de la Loi et sont à ce titre visées par cette exception.

[173] Cependant, nous espérons que la question des politiques et des pratiques des stations de radio relativement à l’utilisation, au partage et à la destruction possible des copies de sauvegardes sera traitée de manière plus détaillée par les parties lors de futures procédures d’établissement de tarifs.

[174] Soulignons que les copies qui ne sont pas utilisées exclusivement à des fins de sauvegarde sont implicitement prises en compte dans notre calcul du taux de redevances comme si elles avaient été réalisées à des fins autres que des copies de sauvegarde.

D. Article 30.71 – Reproductions temporaires pour processus technologiques

[175] L’article 30.71 de la Loi permet de reproduire une œuvre musicale ou d’un enregistrement sonore si la reproduction est un élément essentiel d’un processus technologique, qu’elle a pour seul but de faciliter une utilisation qui ne constitue pas une violation du droit d’auteur et qu’elle n’existe que pour la durée du processus technologique. L’article est libellé comme suit :

30.71 Ne constitue pas une violation du droit d’auteur le fait de reproduire une œuvre ou tout autre objet du droit d’auteur si les conditions suivantes sont réunies :

a) la reproduction est un élément essentiel d’un processus technologique;

b) elle a pour seul but de faciliter une utilisation qui ne constitue pas une violation du droit d’auteur;

c) elle n’existe que pour la durée du processus technologique.

[176] Mentionnons pour commencer que le rapport fourni par Mme von Lewinski, bien qu’informatif, est peu utile pour notre interprétation de l’article 30.71 de la Loi. En effet, ce dernier n’a pas été édicté par le Parlement en vue de s’acquitter d’une obligation issue d’un traité. En outre, l’analyse de Mme von Lewinski traite principalement de droit international et de dispositions législatives étrangères, ce qui n’est pas pertinent pour l’interprétation de la disposition législative canadienne en cause en l’espèce.

i. « la reproduction est un élément essentiel d’un processus technologique »

[177] L’ACR soutient que la totalité du processus d’élaboration de la programmation réalisé par les stations de radio commerciale est un processus technologique et ce, de la collecte et la création de contenu à la communication au public par signal radio. [87]

[178] Nous soulignons cependant que l’article 30.71 de la Loi fait référence à un processus technologique, et non à un processus commercial ou à une activité économique. L’interprétation de cette disposition comme le fait l’ACR pourrait avoir pour effet de caractériser de « processus technologique » toute opération commerciale comprenant une ou plus d’une étape faisant intervenir une technologie. Toute reproduction d’une œuvre protégée ou de tout objet du droit d’auteur dans le cadre d’un tel processus échapperait ainsi à l’application des dispositions sur le droit d’auteur. Rien n’indique que le législateur avait l’intention de créer une exception de si grande portée. Même si certains éléments d’un processus commercial peuvent consister en − ou faire intervenir − divers processus technologiques, cela ne fait pas du processus commercial un grand « processus technologique » au sens de l’article 30.71.

[179] Dans un de ses documents explicatifs sur la LMDA, le gouvernement du Canada a indiqué que « [l]e projet de loi précise que la reproduction temporaire, technique et accessoire d’œuvres protégées dans le cadre d’un processus technique est acceptable ». [88] Bien que nous soyons conscients de la fiabilité et de l’importance limitées à accorder à cette déclaration, nous estimons qu’elle peut néanmoins constituer une indication utile du type d’activités visées par la disposition.

[180] Nous n’irons pas jusqu’à dire qu’un processus technologique ne devrait pas faire intervenir une contribution humaine – parce que ce sera souvent le cas – mais il nous semble que la disposition vise les copies qui se font automatiquement ou sans le contrôle direct de l’utilisateur, ce qui se rapporte à l’exigence voulant que la reproduction soit un élément essentiel du processus technologique. Un « processus technologique » au sens de l’article 30.71 de la Loi ne fonctionnera généralement pas correctement ou efficacement sans qu’une reproduction ne soit effectuée. Ainsi, il n’appartiendra généralement pas à l’utilisateur de déterminer si la copie doit être réalisée ou non.

ii. « elle n’existe que pour la durée du processus technologique »

[181] Le caractère « automatique » de la reproduction est également exprimé par l’aspect temporel de la limite prescrite à l’égard de la reproduction à l’alinéa 30.71c) de la Loi, qui dispose qu’« elle n’existe que pour la durée du processus technologique ». Cela donne à penser que la destruction d’une telle reproduction est vraisemblablement automatique dans le cadre de la technologie utilisée. En revanche, dans les dispositions de la Loi où les reproductions peuvent être conservées pendant une certaine période, et où un geste concret doit être posé afin de les détruire au-delà de la période précisée, l’expression « doit être détruite » est utilisée. [89] [non souligné dans l’original]

[182] L’ACR soutient que :

[TRADUCTION] [l]’expression « processus technologique » au sens de l’article 30.71 peut servir à décrire tout processus qui s’opère sur une période de temps; il n’existe aucune exigence voulant que le processus soit instantané ou de courte durée. La seule condition temporelle énoncée à l’article 30.71 est que la reproduction « n’existe que pour la durée du processus technologique », ce qui implique que la reproduction doit nécessairement être temporaire et non permanente dans le sens qu’elle doit être détruite une fois terminé le processus technologique. [90]

[183] Comme nous ne sommes pas d’accord avec l’ACR quant à la portée du « processus technologique », nous rejetons également sa prétention selon laquelle une reproduction faite et stockée pour la durée nécessaire aux activités commerciales (p. ex. la copie du système d’automatisation principal) répond à l’exigence voulant qu’« elle n’existe que pour la durée du processus technologique ».

[184] De plus, nous nous inscrivons en faux contre la prétention de l’ACR [91] selon laquelle le refus du législateur de modifier la disposition – de sorte qu’elle établisse clairement qu’un processus admissible doit être transitoire ou de courte durée – indique qu’il n’avait pas l’intention de restreindre le droit de l’utilisateur à des processus technologiques exclusivement de nature transitoire. Nous sommes d’avis que cet argument n’a aucun fondement.

[185] En fait, la disposition établit un lien entre la durée de l’existence de la reproduction et le processus technologique utilisé, de sorte que l’exception peut s’appliquer sans discrimination à des processus technologiques qui peuvent être de longue durée (p. ex. la copie d’une transmission par télécopieur peut être stockée dans la mémoire de l’appareil pour une journée entière en raison d’un bourrage de papier ou d’un manque d’encre).

[186] Compte tenu des conclusions ci-dessus, nous excluons les types de copie suivants de la portée de cette exception : les copies d’incorporation, les copies d’évaluation de la musique, les copies du système d’automatisation principal, les copies de préenregistrement vocal, les copies de sauvegarde et les copies de prestation en direct. Ces copies ne sont pas des éléments essentiels d’un processus technologique et elles n’existent pas que pour la durée du processus technologique.

iii. « elle a pour seul but de faciliter une utilisation qui ne constitue pas une violation du droit d’auteur »

[187] Compte tenu des conclusions ci-dessus, nous poursuivons notre analyse seulement à l’égard des copies pour diffusion en continu.

[188] L’exigence voulant que la reproduction ait pour seul but de faciliter une utilisation qui ne constitue pas une violation du droit d’auteur signifie que les reproductions visées par l’article 30.71 de la Loi sont celles qui sont inutiles ou inutilisables en dehors du processus technologique duquel leur existence découle. Elles n’ont pas de buts indépendants ou d’utilisations autres que de permettre le fonctionnement du processus technologique.

[189] Au nombre des exemples qui tombent sans doute dans le champ d’application de l’article 30.71 de la Loi figurent les copies stockées en mémoire tampon d’un photocopieur ou d’une imprimante ou les reproductions réalisées dans la mémoire volatile d’un ordinateur. Ces reproductions sont issues du processus technologique utilisé dans le cadre d’une utilisation qui ne contrevient pas au droit d’auteur et cessent d’exister une fois le processus terminé.

[190] De la même manière, les copies pour diffusion en continu sont créées en tant qu’éléments d’un processus technologique (p. ex. la diffusion ou la diffusion en continu d’un programme) et n’existent pas en dehors du processus technologique. Ces copies de type « mémoire tampon » nous semblent être le produit inhérent de la technologie numérique qui les crée au moment de l’utilisation de la piste musicale. De plus, en ce qui concerne ces deux types de copies, l’utilisation qui en découle (la diffusion ou la diffusion en continu d’un programme radio) ne constitue pas une violation du droit d’auteur. Ainsi, nous concluons que le but seul de ces copies est de faciliter une utilisation qui ne constitue pas une violation du droit d’auteur.

[191] Notons que si l’ACR et CSI font référence à des observations déposées durant l’élaboration de la LMDA, ces soumissions n’ont rien à nous apprendre. Le fait qu’une partie fait valoir une théorie ou une interprétation de droit pour influencer une décision politique, alors que cette même partie soutient une théorie ou une interprétation de droit contraire dans le cadre de procédures judiciaires n’est pas pertinent en l’espèce.

iv. Application

[192] En conclusion, nous rejetons l’argument selon lequel l’ensemble du processus d’élaboration de la programmation suivi par les stations de radio commerciale ne constitue qu’un seul processus technologique. Nous concluons cependant que les copies pour diffusion en continu satisfont aux exigences prévues à l’article 30.71 de la Loi.

E. Article 30.9 – Copies éphémères des radiodiffuseurs

i. Introduction

[193] Depuis l’adoption de la LMDA, l’article 30.9 de la Loi se lit comme suit :

Enregistrements éphémères : entreprise de radiodiffusion

30.9 (1) Ne constitue pas une violation du droit d’auteur le fait pour une entreprise de radiodiffusion de reproduire, en conformité avec les autres dispositions du présent article, un enregistrement sonore ou une prestation ou œuvre fixée au moyen d’un enregistrement sonore aux seules fins de leur radiodiffusion, si les conditions suivantes sont réunies :

a) elle en est le propriétaire et il s’agit d’exemplaires autorisés par le titulaire du droit d’auteur ou elle est le titulaire d’une licence en permettant l’utilisation;

b) elle ait le droit de les communiquer au public par télécommunication;

c) elle réalise la reproduction par ses propres moyens et pour sa propre diffusion;

d) la reproduction ne soit pas synchronisée avec tout ou partie d’une autre œuvre ou prestation ou d’un autre enregistrement sonore;

e) elle ne soit pas utilisée dans une annonce qui vise à vendre ou promouvoir, selon le cas, un produit, une cause, un service ou une institution.

Registre

(2) L’entreprise doit inscrire, dans un registre qu’elle tient à jour, la date de la reproduction ainsi que, le cas échéant, celle de la destruction, ainsi que tout autre renseignement visé par règlement concernant la reproduction.

Inspection

(3) Elle met ce registre à la disposition du titulaire du droit d’auteur ou de son représentant pour inspection dans les vingt-quatre heures qui suivent la réception d’une demande à cet effet.

Destruction

(4) Elle est tenue — sauf autorisation à l’effet contraire du titulaire du droit d’auteur — de détruire la reproduction dans les trente jours suivant sa réalisation ou, si elle est antérieure, soit à la date où l’enregistrement sonore ou la prestation ou œuvre fixée au moyen d’un enregistrement sonore n’est plus en sa possession, soit à la date d’expiration de la licence permettant l’utilisation de l’enregistrement, de la prestation ou de l’œuvre.

Autorisation du titulaire

(5) Lorsque le titulaire du droit d’auteur l’autorise à garder la reproduction, elle doit verser les redevances afférentes, le cas échéant.

(6) [Abrogé, 2012, ch. 20, art. 34]

Définition de « entreprise de radiodiffusion »

(7) Pour l’application du présent article, « entreprise de radiodiffusion » s’entend d’une entreprise de radiodiffusion, au sens de la Loi sur la radiodiffusion, qui est titulaire d’une licence de radiodiffusion délivrée par le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes en vertu de cette loi.

[194] L’entrée en vigueur de la LMDA a modifié l’article 30.9 de la Loi de trois façons.

[195] Premièrement, la disposition liminaire du paragraphe 30.9(1) de la Loi a été modifiée de telle sorte que la phrase « aux seules fins de les transposer sur un support en vue de leur radiodiffusion » a été remplacée par « aux seules fins de leur radiodiffusion ». Cette modification élargit le spectre des reproductions visées par l’article 30.9. L’exception ne se limite plus aux reproductions effectuées lorsqu’un « changement de support » est nécessaire, mais s’applique désormais à toute reproduction faite par une entreprise de radiodiffusion aux seules fins d’en faire la radiodiffusion.

[196] Deuxièmement, la phrase « ou elle est le titulaire d’une licence en permettant l’utilisation » a été ajoutée à l’alinéa 30.9(1)a) de la Loi pour qu’il soit tenu compte des cas où une station de radio n’est pas propriétaire de l’enregistrement sonore ou de la prestation ou œuvre fixée au moyen d’un enregistrement sonore, mais qu’elle est titulaire d’une licence en permettant l’utilisation.

[197] Troisièmement, le paragraphe 30.9(6) de la Loi a été abrogé, ce qui constitue le point le plus important aux fins de la présente instance. Avant l’entrée en vigueur de la LMDA, il se lisait comme suit :

[l]e présent article ne s’applique pas dans les cas où l’entreprise peut obtenir, par l’intermédiaire d’une société de gestion, une licence l’autorisant à faire une telle reproduction.

[198] Cette modification est la raison pour laquelle l’ACR s’appuie sur l’article 30.9 de la Loi pour la première fois, car il était auparavant possible d’obtenir une licence par l’intermédiaire d’une société de gestion autorisant les reproductions qui autrement auraient pu être visées par l’exception au titre de l’article 30.9.

[199] Comme pour toute autre exception, l’utilisateur qui souhaite se prévaloir des dispositions l’article 30.9 de la Loi doit en respecter toutes les exigences.

ii. Respect des exigences

[200] La période maximale de conservation des reproductions visées à l’article 30.9 de la Loi, fixée à trente jours aux termes du paragraphe 30.9(4), est un élément important de l’analyse permettant de déterminer quelles reproductions satisfont aux exigences de l’article 30.9. Même si elles répondent à toutes les autres exigences, les copies ne sont considérées comme non contrefaites au sens de l’article 30.9 que si elles sont conservées pendant trente jours ou moins.

[201] L’ACR avance que les copies d’incorporation, les copies du système d’automatisation principal, les copies de préenregistrement vocal, les copies de prestation en direct ou les copies pour diffusion en continu satisfont toutes aux exigences de l’article 30.9 de la Loi. Toutefois, un examen de la preuve laisse penser que seules certaines copies dans certaines de ces catégories seraient conformes à ces exigences. Plus particulièrement, aucun élément de preuve ne précise quelles copies sont conservées trente jours ou moins, comme il est exigé au paragraphe 30.9(4), ni à quelle fréquence cela se produit. De plus, aucun élément de preuve ne montre que les stations de radio représentées par l’ACR répondent aux exigences en matière de registre prévues au paragraphe 30.9(2).

[202] Par conséquent, nous ne pouvons pas procéder à des ajustements généraux des taux en vertu de l’article 30.9 de la Loi.

F. Conviendrait-il d’opter pour une licence générale modifiée?

[203] L’ACR avance que tout tarif homologué devrait être modulé et prévoir, à l’intention des radiodiffuseurs qui commenceraient à se conformer aux exigences applicables à une ou à plusieurs exceptions, un ajustement proportionnel des redevances payables [TRADUCTION] « de façon à ce que le tarif puisse diminuer si une station démontre son respect des exigences applicables à l’exception prévue pour un type de copie ». [92]

[204] L’ACR renvoie au Tarif 2.A (stations de télévision commerciales) et au Tarif 17 (services de télévision payante et services spécialisés de télévision) de la SOCAN afin de démontrer qu’une telle licence générale modifiée (LGM) peut être homologuée même lorsqu’il n’y a pas suffisamment d’éléments de preuve pour établir le respect des exigences au moment de l’homologation. D’après elle, [TRADUCTION] « sans un mécanisme assurant qu’un changement des pratiques opérationnelles donne lieu à une réduction des tarifs, il n’y a aucune raison pour qu’une station modifie ses façons de faire ». [93]

[205] Selon CSI, un régime qui autoriserait chaque station à demander sur une base individuelle des réductions à l’égard de diverses catégories de copies serait coûteux et lourd, [94] et [TRADUCTION] « imposerait aux sociétés de gestion des coûts réels élevés et de sérieux inconvénients ». [95] En fait, entre une réduction applicable sur une licence générale et des réductions individuelles applicables sur une LGM, CSI préfère la première option, affirmant que :

[TRADUCTION] [m]ême si le respect futur des exigences était raisonnablement prévisible, il ne serait ni nécessaire ni approprié de s’écarter du modèle actuel [de licence générale], lequel est efficace et économiquement fiable. En effet, toute réduction qui pourrait à l’avenir être accordée pour un type de copie donné devrait être pratiquée sur une base générale, en fonction de la valeur relative du type de copie en question multipliée par la proportion de stations qui sont admissibles à la réduction au moment de l’audience. [96]

[206] Au moment de l’audience, les radiodiffuseurs ont clairement indiqué qu’ils ne repectaient pas les exigences énoncées à l’article 30.9 de la Loi. C’est principalement pour cette raison qu’il nous est impossible d’établir une réduction générale en vertu de l’article 30.9, comme cela a été fait pour d’autres exceptions. Toutefois, les radiodiffuseurs qui entreprennent graduellement de se conformer à ces exigences lorsqu’ils procèdent à certaines reproductions devraient pouvoir se prévaloir de l’exception sans devoir attendre la prochaine audience sur la question.

[207] Nous sommes conscients du fait que la mise en œuvre d’une LGM pourrait présenter des difficultés. Les principaux enjeux soulevés par Connect/SOPROQ ne sont toutefois pas suffisants pour justifier de renoncer à mettre en œuvre une forme de LGM.

[208] À l’heure actuelle, le fait que l’industrie ne soit pas admissible à l’exception prévue à l’article 30.9 de la Loi et que la Commission ne dispose d’aucun élément de preuve établissant que les stations apporteront les changements nécessaires pour se conformer aux exigences de l’exception ne posent toutefois pas de problème en soi, car les réductions au titre d’une LGM ne seraient accordées proportionnellement qu’aux stations capables de prouver qu’elles respectent les exigences énoncées à l’article 30.9. Quant à l’argument selon lequel la transition à une licence générale modifiée représenterait un fardeau administratif pour les sociétés de gestion, nous sommes conscients qu’il s’agit là d’une possibilité. Toutefois ce fardeau serait principalement attribuable aux dispositions législatives elles-mêmes, sur lesquelles la Commission n’a aucune prise. Par ailleurs, le fardeau administratif additionnel serait réparti entre les sociétés de gestion et les stations souhaitant se prévaloir de l’exception, et il incomberait en premier lieu aux stations d’établir leur conformité respective.

[209] Nous croyons cependant qu’une LGM dans le tarif que nous homologuons ne devrait pas s’appliquer aux copies du système d’automatisation principal, et cela pour un certain nombre de raisons.

[210] L’ACR a mentionné la possibilité de contourner l’exigence relative à la période maximale de 30 jours en procédant intentionnellement, à intervalle de 30 jours, à la destruction des reproductions des enregistrements sonores, et des œuvres et prestations fixées au moyen de ces enregistrements sonores, puis en procédant à de nouvelles reproductions de ceux-ci. Une telle interprétation irait à l’encontre de l’esprit de la disposition. [97]

[211] Si le Parlement avait eu l’intention de permettre aux radiodiffuseurs de bénéficier de l’article 30.9 de la Loi par le biais d’un mécanisme consécutif de 30 jours pour les reproductions qui y sont visées, cette disposition serait rédigée différemment, à savoir comme une exception générale sans limite temporelle. En 2012, l’article 30.9 a été modifié pour, entre autres, garantir que les entreprises de radiodiffusion puissent profiter d’une exception limitée de 30 jours. Toute autre interprétation rendrait la partie du paragraphe 30.9(4) faisant référence à la restriction de 30 jours dénuée de sens, tout particulièrement lorsque considérée dans le contexte de l’économie de la Loi et d’autres exceptions qui s’y trouvent.

[212] En tenant compte de l’article 30.9 de la Loi dans son ensemble, notamment du paragraphe 30.9(4), il devient clair que la disposition est destinée à s’appliquer aux reproductions temporaires ou éphémères qui sont faites par les stations de radio comme faisant partie de leurs activités de radiodiffusion. À notre avis, les autres reproductions qui sont de nature plus durable et qui sont conservées et utilisées par les stations de radio pour une plus longue période à cause de leur rôle ou de leur fonction dans le processus de radiodiffusion n’ont jamais été visées par l’exception prévue à l’article 30.9.

[213] La conservation des copies du système d’automatisation principal, telles que définies dans la présente décision, pendant une durée inférieure à trente jours, en conformité avec l’exigence prescrite au paragraphe 30.9(4) de la Loi, nous apparaît incompatible avec la fonction que ces copies remplissent dans le cours normal des activités d’une station de radio. Notre conclusion est étayée par le témoignage livré par M. Murphy sur le fonctionnement des stations de radio, et par les réponses fournies par les stations de radio durant le processus d’échange de renseignements. [98] Elle concorde aussi avec les connaissances de la Commission au sujet de l’industrie. Nous savons que l’ACR a répété à maintes reprises que les stations de radio, qui ne respectent pas, à l’heure actuelle, les exigences relatives à certaines exceptions de la Loi, entendaient modifier leurs pratiques pour les rendre conformes dès que la Commission leur ferait savoir ce qui est attendu d’elles.

[214] Nous concluons donc que la prétention de l’ACR, selon laquelle les radiodiffuseurs respectent les exigences de l’article 30.9 de la Loi, n’est avérée qu’à l’égard des copies d’incorporation, des copies de préenregistrement vocal et des copies de prestation en direct.

[215] Il est à espérer que des éléments d’information sur l’application de la LGM seront présentés lors de la prochaine audience sur la radio commerciale, de même qu’une preuve à jour des pratiques de l’industrie. Il pourrait être pertinent pour la Commission de savoir quels types de reproductions faites par les radiodiffuseurs satisfont aux exigences de l’article 30.9, et dans quelles proportions. Ces données permettraient à la Commission de réévaluer comment tenir compte, dans le tarif, du fait que les stations se conformeraient à l’article 30.9, soit au moyen d’une réduction générale globale, d’une LGM ou d’une autre approche.

G. Conclusion

[216] Nous avons conclu comme suit au sujet de l’application des exceptions aux types de reproductions faites par les stations de radio. Premièrement, trois types de copies effectuées par les stations de radio bénéficient d’une exception et ne sont donc de ce fait assujetties à aucune redevance. Il s’agit des copies suivantes :

  • les copies d’évaluation de la musique (en vertu de l’article 29);
  • les copies de sauvegarde (en vertu de l’article 29.24);
  • les copies pour diffusion en continu (en vertu de l’article 30.71).

[217] Nous avons également conclu, étant donné que nous ne disposons d’aucun élément de preuve établissant que les stations se conforment aux exigences prévues à l’article 30.9 de la Loi, que nous ne pouvions accorder une réduction générale sur les taux de redevances sans avoir à spéculer quant au niveau anticipé de conformité. Toutefois, les stations qui démontrent qu’elles se conforment à l’article 30.9 pourront se prévaloir d’une réduction des redevances par l’entremise d’une LGM restreinte.

[218] Enfin, vu leur nature, les copies du système d’automatisation principal sont soustraites à l’application de la LGM restreinte. Toute autre conclusion contreviendrait à l’esprit de la Loi.

[219] Nous traiterons plus loin, dans la section économique, de la valeur à attribuer à chaque type de reproduction et des réductions correspondantes applicables aux taux de redevances.

IX. REDEVANCES FONDÉES SUR LE PARAGRAPHE 69(2) – EXÉCUTIONS PUBLIQUES D’ENREGISTREMENTS SONORES AU MOYEN D’UN APPAREIL RADIOPHONIQUE RÉCEPTEUR

[220] Ré:Sonne demande à la Commission de fixer des redevances pour les exécutions publiques d’enregistrements sonores au moyen d’un appareil radiophonique récepteur, conformément au paragraphe 69(2) de la Loi, pour les années 2012-2014. [99] C’est la première fois que Ré:Sonne demande à la Commission de fixer des redevances au titre de cette disposition.

[221] Le paragraphe 69(2) de la Loi prévoit que,

[e]n ce qui concerne les exécutions publiques au moyen d’un appareil radiophonique récepteur, en tout endroit autre qu’un théâtre servant ordinairement et régulièrement de lieu d’amusement où est exigé un prix d’entrée, aucune redevance n’est exigible du propriétaire ou usager de l’appareil radiophonique récepteur; mais la Commission doit, autant que possible, pourvoir à la perception anticipée, des radio-postes émetteurs des droits appropriés aux conditions nées des dispositions du présent paragraphe, et elle doit en déterminer le montant.

[222] La Loi prévoit en outre au paragraphe 69(3) que,

[e]n ce faisant, la Commission tient compte de tous frais de recouvrement et autres déboursés épargnés ou pouvant être épargnés par le détenteur concerné du droit d’auteur ou du droit d’exécution, ou par ses mandataires, ou pour eux ou en leur faveur, en conséquence du paragraphe (2).

[223] Ré:Sonne soutient que le tarif actuel pour la radio commerciale et tous les tarifs antérieurs applicables à Ré:Sonne et à la SOCAN n’ont visé que les communications au public par télécommunication effectuées par les stations de radio commerciale à des fins privées ou domestiques. [100] Selon elle, les tarifs antérieurs n’englobaient pas les actes visés au paragraphe 69(2) de la Loi, de sorte que des redevances additionnelles devraient être payables pour ces actes.

[224] La SOCAN n’a pas demandé de redevances en vertu de cette disposition. Cependant, comme la décision de la Commission pourrait aussi avoir une incidence sur la SOCAN, la Commission a demandé à la SOCAN de se prononcer sur l’applicabilité du paragraphe 69(2) de la Loi. Dans sa réponse, la SOCAN affirme qu’elle interprète la portée du paragraphe 69(2) de la même façon que Ré:Sonne.

[225] L’ACR avance qu’aucun tarif ne devrait être homologué, étant donné que Ré:Sonne n’a pas fourni d’éléments de preuve à l’appui du tarif, qu’il n’existe aucun élément de preuve fiable sur l’ampleur de l’utilisation de la radio commerciale comme musique de fond dans les entreprises, que Ré:Sonne n’a pas déduit les coûts réellement épargnés et que l’exécution publique de la radio dans de nombreuses entreprises est en fait déjà payée au titre du Tarif 1.A. À titre subsidiaire, si un tarif était homologué, ce ne devrait être qu’à un taux nominal comparable à celui utilisé dans le cas des tarifs antérieurs homologués en vertu de cette disposition. [101]

A. Historique du paragraphe 69(2)

[226] Ainsi que Ré:Sonne l’explique en détail dans ses prétentions, la question de savoir si l’utilisation de radios dans les hôtels de manière à diffuser des œuvres musicales au bénéfice de la clientèle constituait ou non une violation du droit d’auteur a fait l’objet d’un débat dans les années 1920 et 1930. Au Canada, comme aux États-Unis et au Royaume-Uni, les tribunaux ont conclu qu’une telle utilisation était une exécution, et que cette exécution était en public. [102] Après qu’une telle décision a été rendue au Canada en 1935, le Parlement a modifié la Loi en 1938 pour y inclure la disposition suivante :

10B.(6)a) En ce qui concerne les exécutions publiques au moyen d’un appareil radiophonique récepteur ou d’un gramophone, en tout endroit autre qu’un théâtre servant ordinairement et régulièrement de lieu d’amusement où est exigé un prix d’entrée, aucun honoraire, aucune redevance ni aucun tantième ne sera exigible du propriétaire ou usager de l’appareil radiophonique récepteur ou du gramophone; mais le Tribunal d’appel du droit d’auteur devra, autant que possible, pourvoir à la perception anticipée, des radio-postes émetteurs ou des fabricants de gramophones, suivant le cas, des honoraires, redevances ou tantièmes appropriés aux nouvelles conditions nées des dispositions du présent paragraphe, et il devra en déterminer le montant. En ce faisant, le Tribunal devra tenir compte de tous frais de recouvrement et autres déboursés, s’il en est, épargnés ou pouvant être épargnés par le détenteur concerné du droit d’auteur ou du droit d’exécution, ou par ses mandataires, ou pour eux ou en leur faveur, en conséquence des dispositions du présent paragraphe. [103]

[227] En 1943, dans une décision de la Cour suprême du Canada, [104] le juge en chef Duff a affirmé

[TRADUCTION] [qu’il] était jugé […] que, dans l’état initial des choses, les acheteurs de disques de gramophone et les propriétaires d’appareils récepteurs sans fil étaient […] placés dans une posture dans laquelle ils n’auraient pas dû se trouver. Les décisions rendues au sujet du sens d’« exécution publique » avaient fait en sorte qu’il n’était plus inoffensif pour le propriétaire d’un gramophone, ou de disques de gramophone, qui tenait un salon de thé, par exemple, d’utiliser le gramophone pour faire jouer les disques dans le commerce, ou de permettre à ses clients de l’utiliser. Il pouvait être autorisé à le faire, ou ne pas l’être. La réponse à cette question dépendait d’une multitude de facteurs, par exemple si le fabricant du gramophone avait le pouvoir d’autoriser l’exécution en public des disques, si un tel pouvoir était conféré au propriétaire des disques lors de l’achat de ceux-ci, et ainsi de suite; bien entendu, le tenancier de salon de thé était bien incapable d’élucider ces questions par lui-même. La législature estimait sans doute qu’une loi qui obligeait les acheteurs de disques de gramophone à consulter un avocat pour savoir s’ils pouvaient faire jouer les disques en toute légalité en de pareilles circonstances n’était pas satisfaisante ni en conformité avec l’esprit général de la loi sur le droit d’auteur. [105]

[228] De 1939 à 1956, le Tribunal d’appel du droit d’auteur a fixé un tarif nominal de 1 000 $ à l’égard de toutes les utilisations prévues à l’ancêtre du paragraphe 69(2) de la Loi, [TRADUCTION] « à répartir entre toutes les stations de radiodiffusion au Canada ». [106] Aucune redevance n’a été fixée par la suite.

[229] La référence aux gramophones a été supprimée dans une modification apportée en 1994 au paragraphe 69(2), mais l’exception relative aux appareils radiophoniques récepteurs est demeurée applicable. [107]

B. Applicabilité du paragraphe 69(2) à la présente affaire

[230] Nous devons déterminer si le paragraphe 69(2) de la Loi est applicable en l’espèce. Pour ce faire, nous devrons d’abord examiner si le paragraphe 69(2) s’applique à l’égard des enregistrements sonores (plutôt que des œuvres musicales seulement). Nous devrons ensuite déterminer si les personnes qui exécutent un enregistrement sonore au moyen d’un appareil multifonction sont visées par le paragraphe 69(2). Enfin, nous devrons examiner si l’utilisation d’une radio constitue effectivement une « exécution d’un enregistrement sonore ».

C. Le paragraphe 69(2) est-il applicable à l’égard de l’exécution d’enregistrements sonores?

[231] Tel qu’expliqué par M. Fox dans son texte de référence sur le droit d’auteur, les dispositions actuelles du paragraphe 69(2) de la Loi visaient à l’origine à [TRADUCTION] « empêcher que les petits restaurateurs et commerçants ne soient continuellement en infraction sans le savoir ». [108] Au moment où ce paragraphe a été adopté pour la première fois, le droit d’auteur au Canada ne protégeait pas les enregistrements sonores ni les prestations fixées dans des enregistrements sonores. En outre, même aujourd’hui, l’exécution publique non autorisée d’un enregistrement sonore protégé par le droit d’auteur ne constitue pas une violation du droit d’auteur si l’utilisateur paie les redevances requises.

[232] Le libellé de la disposition est toutefois neutre, et ne vise pas l’exécution d’un type d’objet du droit d’auteur en particulier. Aucune précision n’est donnée à cet égard, de la même façon, par exemple, que l’article 29 de la Loi ne vise pas un objet du droit d’auteur en particulier. Si les effets juridiques de l’exécution d’une œuvre musicale et ceux de l’exécution d’un enregistrement sonore ne sont pas identiques, les deux peuvent donner lieu à une responsabilité à l’égard du titulaire des droits.

[233] Par conséquent, si l’ancêtre du paragraphe 69(2) de la Loi devait à l’origine s’appliquer à l’égard de l’exécution d’œuvres musicales, nous concluons que le paragraphe 69(2) s’applique également à l’exécution d’enregistrements sonores et de prestations d’artistes-interprètes.

D. Qu’est-ce qu’un « appareil radiophonique récepteur »?

[234] L’ACR avance que l’expression « appareil radiophonique récepteur » figurant au paragraphe 69(2) de la Loi appelle une interprétation stricte. [109] À l’appui de cet argument, l’ACR renvoie à une lettre que la SOCAN a adressée à la Commission en 2005. [110] Dans cette lettre, la SOCAN affirmait être d’avis que le paragraphe 69(2) [TRADUCTION] « n’exempte pas les utilisateurs qui exécutent de la musique au moyen d’appareils multifonctions comme les lecteurs de disques compacts, les récepteurs de télévision par câble ou par satellite et les appareils récepteurs de radio ou de télévision par Internet pouvant aussi recevoir des signaux de radiodiffusion ». [111] [soulignement omis] La SOCAN affirmait également que son

[TRADUCTION] expérience montre que les petites entreprises qui font jouer de la musique dans leurs locaux le font souvent au moyen d’un appareil radiophonique récepteur qui est aussi doté de connections par câble ou par satellite pouvant recevoir la programmation radiophonique et télévisuelle transmise par câble et par satellite ainsi que les signaux de radio et de télévision retransmis, d’un lecteur de disques compacts (ou de cassettes) et, dans certains cas, d’un lecteur DVD. [112] [soulignement omis]

[235] La SOCAN conclut en affirmant que [TRADUCTION] « les simples “appareils radiophoniques récepteurs” sont aujourd’hui très rares, si tant est qu’il y en ait, par rapport à l’époque où le paragraphe 69(2) de la Loi a été adopté pour la première fois (1938). Par conséquent, le paragraphe 69(2) est rarement applicable de nos jours ». [113] L’ACR appuie cette conclusion et demande à la Commission d’y souscrire. [114]

[236] Il convient de noter que la SOCAN, dans sa réponse du 8 novembre 2013 à l’ordonnance du 10 octobre 2013 de la Commission, déclare que sa position précédente selon laquelle le paragraphe 69(2) de la Loi [TRADUCTION] « ne s’applique pas aux utilisateurs qui se servent d’appareils multifonctions pour exécuter en public de la musique émise par des signaux de radiodiffusion […] doit être remise en question ». [115]

[237] De façon générale, nous souscrivons à la position selon laquelle un « appareil radiophonique récepteur » est un appareil capable de recevoir des signaux électromagnétiques se propageant sans guide dans le spectre des radiofréquences (« ondes hertziennes »). On peut donc supposer que, pour qu’un appareil puisse exécuter les fonctions prévues au paragraphe 69(2) de la Loi, il ne doit pas seulement pouvoir recevoir de tels signaux, mais également pouvoir les démoduler en un signal sonore.

[238] Cependant, nous n’acceptons pas l’argument selon lequel tout appareil doté d’autres fonctions en plus de celle d’« appareil radiophonique récepteur » échappe à l’application du paragraphe 69(2) de la Loi. Selon une telle interprétation, l’utilisation d’un appareil multifonction qui serait par exemple doté d’un lecteur de disques compacts en plus d’un récepteur radiophonique ne serait pas visée.

[239] Comme il est expliqué plus haut, en rédigeant la version antérieure du paragraphe 69(2) de la Loi, le législateur tentait manifestement de renverser une situation qu’il jugeait pernicieuse. En effet, « [t]out texte est censé apporter une solution de droit et s’interprète de la manière la plus équitable et la plus large qui soit compatible avec la réalisation de son objet ». [116] Nous ne voyons donc aucune raison d’adopter une interprétation qui exempterait les exécutions faites au moyen d’un appareil qui peut recevoir les ondes radio, mais pas celles faites au moyen d’un appareil qui peut recevoir les ondes radio et lire les disques compacts, par exemple. Une telle distinction ne serait pas compatible avec la réalisation de l’objet de cette disposition, qui est de permettre aux propriétaires d’entreprise de faire jouer la radio sans avoir à se préoccuper des conséquences juridiques d’un tel acte. Nous signalons en outre que l’interprétation stricte suggérée en l’espèce n’est pas appuyée par le libellé même de la disposition.

[240] Nous soulignons que le paragraphe 69(2) n’est pas le seul cas dans lequel la Loi fait référence à une fonction d’un appareil sans exclure les appareils dotés d’autres fonctions en plus de la fonction en question.

[241] Par exemple, le paragraphe 30.3(1) de la Loi s’applique à l’égard d’une machine à reprographier les œuvres imprimées. Il est courant que de telles machines aient des fonctions additionnelles, dont la capacité de transmettre des images numérisées par télécopieur. Cette fonction additionnelle n’enlève pas à la machine la caractéristique qui fait d’elle une « machine à reprographier ». Il nous apparaît donc que le paragraphe 30.3(1) s’applique tant aux photocopieurs dotés d’une fonction de télécopie qu’à ceux qui n’en sont pas dotés.

[242] De façon similaire, il est énoncé au paragraphe 41.18(1) de la Loi que l’interdiction générale de contourner les mesures techniques de protection contrôlant « l’accès » « ne s’applique pas à la personne qui contourne la mesure technique de protection d’un appareil radio uniquement afin d’accéder à un service de télécommunication au moyen de celui-ci ».

[243] Les débats au Parlement, [117] les discussions au sein de comités [118] et les communications du gouvernement [119] montrent clairement que cette disposition vise les téléphones cellulaires. De toute évidence, un téléphone cellulaire moderne est beaucoup plus qu’un simple appareil radio; le paragraphe 41.18(1) de la Loi continue néanmoins de s’appliquer à un tel appareil.

[244] Nous concluons donc que le paragraphe 69(2) de la Loi s’applique à tout appareil qui consiste en un « appareil radiophonique récepteur », même s’il peut effectuer d’autres fonctions ou servir à l’exécution d’enregistrements sonores par d’autres moyens.

[245] Cette conclusion cadre avec le concept de la neutralité technologique, tel que la Cour suprême du Canada l’applique dans l’arrêt ESA c. SOCAN. [120] En bref, il s’agit du principe d’interprétation selon lequel, sauf intention contraire avérée du législateur, il est préférable d’interpréter les dispositions législatives de manière à ne pas restreindre leur application à une technologie en particulier. En l’espèce, nous concluons qu’il n’y a aucune intention de restreindre l’application du paragraphe 69(2) de la Loi aux seuls appareils qui remplissent uniquement la fonction de radio.

[246] Enfin, même si notre interprétation était erronée, et qu’un appareil qui combine un récepteur radiophonique à d’autres fonctions n’était pas – dans son ensemble – désigné sous le nom d’appareil radiophonique récepteur, nous concluons que seule la portion « appareil radiophonique récepteur » de l’appareil sert à l’exécution publique d’un enregistrement sonore en captant un signal radiodiffusé et en le démodulant en un signal audio.

[247] Cela dit, nous convenons que le paragraphe 69(2) de la Loi s’applique uniquement à l’égard d’un signal de radiodiffusion traditionnel. Lorsqu’un appareil capte des signaux autres que radio, comme un signal Internet, il ne remplit pas la fonction d’un « appareil radiophonique récepteur ».

[248] Nous concluons donc que le paragraphe 69(2) de la Loi est applicable, peu importe qu’un appareil soit doté ou non d’autres fonctions en plus de celle d’« appareil radiophonique récepteur », mais que ses dispositions ne s’appliquent que si l’exécution résulte de la réception et de la démodulation de radiofréquences, et non d’autres types de signaux, comme les signaux du câble ou d’Internet.

E. Les utilisations prévues au paragraphe 69(2) sont-elles déjà rémunérées?

[249] Le tarif de la SOCAN pour 2008-2010 et le tarif de Ré:Sonne de 2008-2011 à l’égard des radios commerciales permettent aux stations de radio de « communi[quer] au public par télécommunication au Canada, et à des fins privées ou domestiques, [des] œuvres musicales ou dramatico-musicales faisant partie du répertoire de la SOCAN et [des] enregistrements sonores publiés constitués d’œuvres musicales et de prestations de telles œuvres faisant partie du répertoire de Ré:Sonne ». Les redevances à payer au titre des deux tarifs sont calculées selon un pourcentage des revenus bruts des stations de radio.

[250] L’ACR avance que [TRADUCTION] « Ré:Sonne perçoit déjà des redevances pour l’exécution publique d’enregistrements sonores par les entreprises au moyen d’appareils radiophoniques récepteurs », [121] étant donné que « les stations de radio génèrent des recettes publicitaires en fonction des parts d’auditoire et du nombre d’auditeurs». [122] Plus précisément, elle soutient que

[TRADUCTION] [p]uisque les revenus des stations de radio sont essentiellement fonction des auditoires, et que la mesure des auditoires tient compte des employés et des clients des entreprises dans lesquelles joue la radio, un élément qui se rapporte aux cotes d’écoute dans les entreprises entre actuellement dans le calcul des redevances exigibles au titre du Tarif 1.A de Ré:Sonne, lequel n’était pas pris en compte en 1938. Le fait d’exiger un paiement additionnel pour ces auditeurs en vertu du paragraphe 69(2) équivaudrait à percevoir une double rémunération. Pour éviter une telle chose dans l’éventualité où la Commission déciderait d’homologuer un tarif en vertu du paragraphe 69(2), il faudrait que les taux de redevances actuellement prévus au Tarif 1.A pour l’écoute dans les commerces soient retirés d’une manière ou d’une autre du nouveau tarif. [123]

[251] Ré:Sonne répond que [TRADUCTION] « [l]e tarif actuel pour les stations de radio commerciale et tous les tarifs antérieurs applicables à Ré:Sonne et à la SOCAN ne s’appliquent et ne se sont appliqués qu’à la communication au public par télécommunication par les stations de radio commerciale, à des fins privées ou domestiques ». [124] Le libellé du tarif n’autorise donc pas l’exécution des œuvres musicales et des enregistrements sonores contenus dans le signal diffusé par la station de radio.

[252] Ré:Sonne ajoute que [TRADUCTION] « [l]es redevances payables au titre de l’actuel Tarif 1.A ne tiennent compte que de la valeur que représente pour les stations de radio commerciale la capacité de communiquer des enregistrements sonores. Elles ne tiennent pas compte de la valeur que représente pour les entreprises la capacité à exécuter en public ces enregistrements sonores ». [125]

[253] Nous convenons que les redevances perçues par Ré:Sonne et par la SOCAN auprès des stations de radio commerciale reposent essentiellement sur les recettes publicitaires de ces stations, soit les recettes qui découlent de la diffusion de messages publicitaires durant les émissions de radio.

[254] Le nombre de personnes auquel un annonceur peut s’attendre qu’elles entendront le message publicitaire et le profil démographique de ces personnes sont les facteurs qui déterminent le montant que l’annonceur sera prêt à payer à une station de radio. [126] Pour obtenir une estimation de ce nombre, les annonceurs et les stations de radio utilisent des données fournies par des tiers, comme BBM Analytique. [127] Comme l’explique M. Schween,

[TRADUCTION] BBM est, au Canada, le service de mesure de l’auditoire qui fournit aux stations les données sur les cotes d’écoute. L’extrapolation de ces données permet de déterminer qui sont les auditeurs des stations au sein des divers groupes démographiques d’un marché, une information sur laquelle les annonceurs se fondent ensuite pour choisir les stations sur les ondes desquelles ils feront diffuser leurs messages publicitaires. [128]

[255] Bien qu’il semble que des services comme BBM parviennent à mesurer si une personne écoute la radio depuis son domicile, sa voiture ou un autre endroit, [129] les annonceurs paient en fonction de la taille de l’auditoire, sans égard au lieu d’écoute. [130]

[256] Le tarif applicable aux stations de radio commerciale permet à celles-ci d’effectuer une forme particulière d’exécution en public, soit la « communication au public par télécommunication par les stations de radio commerciale à des fins privées ou domestiques ». Le taux de redevances établi au titre de ce tarif est toutefois fondé sur l’ensemble des revenus, dont ceux pouvant théoriquement être attribuables aux auditeurs dans les établissements commerciaux. Par conséquent, les sociétés de gestion perçoivent déjà des redevances fondées sur les recettes publicitaires liées à l’écoute des exécutions des émissions radiodiffusées dans tous les contextes, y compris ceux prévus au paragraphe 69(2) de la Loi.

[257] Selon Ré:Sonne, étant donné que le principe des recettes publicitaires repose sur la part de marché, [TRADUCTION] « [l]e fait que les données de BBM puissent tenir compte des auditeurs qui se trouvent à l’extérieur de leur domicile n’a aucune incidence sur la part de marché relative, et donc aucune incidence sur les recettes publicitaires ou sur les redevances payables à Ré:Sonne au titre du Tarif 1.A ». [131]

[258] Il semble qu’il s’agisse là d’une simplification excessive. La part de marché est importante dans la mesure où elle peut servir à déterminer l’auditoire. Le nombre d’auditeurs d’une station de radio donnée est simplement le produit de la taille du marché et de la part de marché de la station de radio. La relation n’est pas nécessairement linéaire, mais il va de soi qu’une station de radio dans un marché de 5000 personnes exigera des tarifs de publicité moindres qu’une station de radio détenant une part de marché identique dans un marché de 500 000 personnes.

[259] Il convient de noter que ce qui ressort avant tout du tarif pour les stations de radio commerciale est l’importance de l’écoute par l’utilisateur final. Même si le tarif n’autorise que la communication au public par télécommunication par les stations de radio commerciale, la diffusion d’une œuvre musicale ou d’un enregistrement sonore, si elle ne trouve pas d’auditeurs et ne donne pas lieu à une exécution, n’a aucune valeur pour les annonceurs ni, par le fait même, pour les radiodiffuseurs. Le modèle d’affaires axé sur la publicité de la plupart des stations de radio ne pourrait fonctionner si les activités de celles-ci ne rejoignaient pas les consommateurs.

[260] Par conséquent, nous ne souscrivons pas à l’allégation de Ré:Sonne selon laquelle les tarifs existants [TRADUCTION] « ne tiennent compte que de la valeur, pour les stations de radio commerciale, de la capacité de communiquer des enregistrements sonores ». Les stations de radio ne peuvent générer aucune valeur si le signal radiodiffusé n’est pas entendu; une station de radio n’encaisserait pas de recettes publicitaires le cas échéant, et les redevances à verser, s’il y en avait, seraient minimes. La « consommation » de l’enregistrement sonore, par une personne qui en écoute la diffusion au moyen d’un récepteur de radio, est cruciale. Sans cette étape finale, les activités de la station de radio n’ont aucune valeur.

F. Comment un taux en vertu du paragraphe 69(2) pourrait être établi

[261] Aux termes du paragraphe 69(2) de la Loi, la Commission « doit, autant que possible, pourvoir à la perception anticipée, des radio-postes émetteurs des droits appropriés aux conditions nées des dispositions du présent paragraphe, et elle doit en déterminer le montant ».

[262] Ré:Sonne avance que le montant total des droits à payer en application du paragraphe 69(2) de la Loi est égal aux droits qui seraient exigibles des entreprises qui, selon son estimation, seraient assujetties au Tarif 3 de Ré:Sonne (Utilisation et distribution de musique de fond) n’eût été l’exception prévue pour les appareils radiophoniques récepteurs dans ce tarif. [132]

[263] Ré:Sonne affirme qu’elle a été en mesure d’obtenir une estimation de ce nombre en se fondant sur l’information relative à l’utilisation de la musique par les entreprises contenue dans sa base de données. Ré:Sonne ajoute que puisque les activités entreprises par le service des licences de Ré:Sonne doivent être menées à bien, peu importe qu’une entreprise puisse se prévaloir ou non de l’exception prévue pour les appareils radiophoniques récepteurs, les montants qui seraient épargnés dans les faits par l’application du paragraphe 69(2) de la Loi seraient relativement peu élevés. [133]

[264] L’ACR soutient que la méthode que Ré:Sonne utilise pour calculer ses estimations ne fait aucune distinction entre l’utilisation d’une radio dans une entreprise et l’utilisation d’une radio dans une entreprise d’une façon qui constitue une exécution en public. Au soutien de ses prétentions, elle invoque le témoignage de M. Gangnier, selon lequel « [CONFIDENTIEL] ». [134]

[265] L’ACR soumet en outre que le Tarif 3 ne représente pas un point de référence adéquat, [TRADUCTION] « étant donné les différences entre l’utilisation de la radio commerciale en guise de musique de fond et le recours à un fournisseur de musique de fond ». [135] Elle énumère les autres problèmes que pose à son avis la méthodologie de Ré:Sonne. Premièrement, cette dernière est fondée sur le principe que le contenu de la radio commerciale est à 100 pour cent musical. [136] Deuxièmement, la radio commerciale n’offre pas la même expérience qu’un fournisseur de musique de fond, ce dernier offrant une sélection musicale plus personnalisée. [137] Troisièmement, il n’y a aucune raison économiquement valable d’utiliser des services de musique payants comme point de référence pour un service gratuit tel que la radio. [138] Quatrièmement, la méthode ne tient pas compte du faible taux de conformité au Tarif 3. Enfin, contrairement à ce qu’avance Ré:Sonne, il serait plus probable que les entreprises qui font affaire avec des fournisseurs de musique de fond soient d’un type différent que celles qui font jouer gratuitement la radio commerciale diffusée en direct. [139]

[266] En dernier lieu, l’ACR estime que Ré:Sonne évalue mal les économies totales qu’elle pourrait réaliser en [TRADUCTION] « n’ayant pas à solliciter les [CONFIDENTIEL] établissements, et les économies administratives que représenterait le fait de recevoir des paiements “garantis” des radiodiffuseurs [CONFIDENTIEL] ». [140] Elle insiste en particulier sur le fait que Ré:Sonne [CONFIDENTIEL], mais que, en vertu du paragraphe 69(2) de la Loi, elle recevrait des redevances à l’égard de ces commerces, sans coût ni effort additionnels. [141]

[267] Si nous devions fixer un taux de redevances aux termes du paragraphe 69(2) de la Loi, nous procéderions très probablement comme suit. Premièrement, en vue d’éviter une double rémunération, nous déduirions des redevances existantes des radios commerciales le montant provenant des recettes publicitaires attribuables aux émissions de radio écoutées autrement qu’en contexte privé et domestique. Selon une interprétation restrictive du tarif actuel, c’est-à-dire qui ne tient pas compte de telles activités, les radiodiffuseurs ne devraient pas avoir à payer pour des activités que le tarif n’autorise pas. En l’espèce, la preuve ne nous permet pas de déterminer le montant réel des redevances attribuables à ces fins privées ou domestiques. Néanmoins, ce montant théorique est important, comme nous le verrons ci-après.

[268] Nous établirions ensuite les redevances applicables selon les conditions énoncées au paragraphe 69(2) de la Loi, soit une situation selon laquelle ce sont les stations de radio qui paient les redevances. Même si Ré:Sonne soutient que les établissements qui font jouer la radio en retirent une certaine valeur, aucune évaluation du montant de cette valeur reposant sur une analyse économique appropriée ne nous a été fournie. Nous ne connaissons donc pas la valeur nette de la musique pour ces établissements.

[269] Ré:Sonne avance que ses chiffres, qui proviennent des taux de redevances établis dans le Tarif 3, peuvent servir à calculer ce montant. Toutefois, il ressort des éléments de preuve – et plus particulièrement du témoignage de M. Gangnier – que ces chiffres ne permettent pas de faire la distinction entre les cas où la musique jouée dans une entreprise constitue une exécution en public de ceux où elle n’en constitue pas une (et où la décision de faire jouer la musique ne relève pas de l’entreprise elle-même). Certes, nous comprenons que Ré:Sonne ne peut pas effectuer un recensement parfait et qu’elle ne dispose pas de ressources illimitées pour effectuer un sondage, mais il aurait été utile d’obtenir de l’information sur la proportion d’exécutions qui sont faites pour le public dans de telles situations.

[270] Or, même sans disposer du montant exact, nous savons ce que les stations de radio paient à l’heure actuelle pour atteindre les auditeurs dont il est question : ce sont les redevances calculées d’après les revenus attribuables aux auditeurs qui font l’écoute autrement qu’en contexte privé ou domestique. Il s’agit exactement du montant qui aurait été retranché initialement pour éviter le comptage en double de ces mêmes auditeurs.

[271] Nous ferions ensuite une autre déduction, tel que le prévoit le paragraphe 69(3) de la Loi, en fonction des frais de recouvrement que Ré:Sonne aurait épargnés en n’ayant à percevoir les redevances qu’auprès d’une seule source plutôt que d’une multitude de commerces. Nous n’avons pas besoin d’établir le montant exact des frais épargnés pour conclure que, tout compte fait, les redevances totales exigibles ne seraient pas nécessairement plus élevées qu’elles le sont actuellement.

[272] Toutefois, étant donné que

  1. nous ne disposons pas de suffisamment d’éléments de preuve pour déterminer les recettes publicitaires qui sont attribuables aux exécutions visées au paragraphe 69(2) de la Loi nous permettant de soustraire les redevances associées à ses activités,

  2. nous n’avons pas de fondement fiable sur lequel établir une rémunération équitable pour l’exécution d’enregistrements sonores dans les in our opinion, it is not reasonably possible to provide for the collection of the appropriate royalties contemplated in subsection 69(2) of the Act and we are therefore not setting a royalty under this subsection. entreprises,

  3. une redevance à l’égard de ces exécutions est déjà payée au titre des tarifs de la radio commerciale en raison de la structure tarifaire,

  4. l’application du paragraphe 69(2) de la Loi exigerait d’établir les modalités d’une autre réduction conformément au paragraphe 69(3),

nous sommes d’avis qu’il n’est pas raisonnablement possible d’assurer la perception des redevances appropriées prévues au paragraphe 69(2) de la Loi et nous n’établissons donc pas de taux de redevances aux termes de ce paragraphe.

[273] Lors de la présentation des conclusions finales des parties, le 4 mars 2014, le vice-président, Me Majeau, a demandé à l’avocat de Ré:Sonne de donner son interprétation de l’expression « autant que possible » figurant dans le libellé du paragraphe 69(2) de la Loi. L’avocat a répondu que la phrase signifiait [TRADUCTION] « dans la mesure où la Commission dispose de l’information nécessaire pour établir le taux ». [142] L’avocat de l’ACR a par la suite affirmé que cette expression devrait être interprétée étroitement de manière à limiter autant que possible l’obligation de la Commission de fixer des redevances aux termes du paragraphe 69(2).

[274] Par la suite, après réflexion, l’avocat de Ré:Sonne a déclaré qu’il ne pensait pas, en définitive, que l’expression « autant que possible » faisait référence aux éléments de preuve, mais plutôt à l’obligation de la Commission de pourvoir à la perception anticipée. [143] À l’appui de sa position révisée, l’avocat de Ré:Sonne a fait mention de la thèse exposée par Normand Tamaro dans Annotated Copyright Act, à savoir que « l’utilisation de l’expression “autant que possible” qualifie la seule obligation éventuelle de pourvoir à une perception prévue d’une redevance ». [144] Cette interprétation semble corroborée dans une décision rendue en 1945 dans laquelle le Conseil privé a interprété la version précédente de l’actuel paragraphe 69(2) de la Loi :

[TRADUCTION] […] comme il a été mentionné, les lords juges, selon les conseils qu’ils ont reçus jusqu’à présent, ne partagent pas son opinion selon laquelle l’expression « autant que possible » s’applique à cette obligation de quelque manière que ce soit, sauf en ce qui concerne la prise de dispositions pour la perception anticipée. [145]

[275] La comparaison des structures grammaticales et des libellés de la version actuelle et de la version précédente du paragraphe 69(2) de la Loi [146] montre que l’interprétation du Conseil privé s’accorde avec cette interprétation et n’a aucune incidence sur notre conclusion selon laquelle aucune redevance ne devrait être fixée au titre du paragraphe 69(2) en l’espèce.

[276] Le législateur a inséré l’expression « autant que possible » dans cette disposition législative pour qualifier uniquement la période de la perception des redevances en question, imposant probablement à la Commission (ou à son prédécesseur) l’obligation d’établir un montant à payer par les radiodiffuseurs. Or, nous devons nous assurer qu’un tel tarif est équitable, comme c’est le cas pour chaque tarif homologué par la Commission. Pour les motifs exposés précédemment, nous estimons qu’il n’est ni raisonnable ni possible de le faire en l’espèce. provision are equally applicable to an

[277] Il convient de noter que Lord Russell of Killowen a déclaré, au sujet de l’ancêtre du paragraphe 69(2) de la Loi, que [TRADUCTION] « [l]e montant à fixer est apparemment un montant que la Commission doit fixer de sa propre initiative, et non pas, comme dans d’autres cas, une somme proposée dans un exposé soumis à l’examen et à l’approbation de la Commission ». [147] Si nous admettons que cette interprétation est exacte, la demande présentée par Ré:Sonne à l’égard du paragraphe 69(2) serait inadmissible et la Commission devrait fixer ce montant de sa propre initiative. En définitive, le résultat est le même, car les motifs susmentionnés de refuser de fixer des redevances aux termes de cette disposition peuvent s’appliquer autant à un examen entrepris à la demande d’une société de gestion qu’à un examen entrepris à l’initiative de la Commission.

X. ANALYSE ÉCONOMIQUE

A. Modèle tarifaire axé sur le groupe

[278] Connect/SOPROQ, appuyée par les autres sociétés de gestion collective prenant part à l’instance, demande à la Commission d’homologuer un tarif selon un modèle tarifaire axé sur le groupe (MTAG) plutôt qu’un modèle tarifaire axé sur la station. Cette proposition prend appui sur le rapport de M. Boyer et Mme Pinheiro, qui traite de l’incidence qu’aurait le passage du tarif actuel axé sur la station à un tarif axé sur le groupe. M. Boyer et Mme Pinheiro ont fait une estimation des redevances qui seraient versées si le MTAG était adopté, en additionnant les revenus bruts de chacune des stations faisant partie des différents groupes de stations, puis en appliquant les tarifs actuels au total des revenus bruts de ces différents groupes. Selon le rapport, les stations de radio verseraient ainsi à Connect/SOPROQ des redevances supplémentaires de quelque 4 millions de dollars, ce qui représente une hausse d’environ 22 pour cent. Selon eux, il s’agit du montant de la subvention que les titulaires de droits d’auteur accordent aux stations de radio commerciale, découlant des taux étagés qui s’appliquent actuellement aux stations prises individuellement.

[279] L’ACR est d’avis que le MTAG se traduirait par une augmentation de 30 pour cent des redevances (et non par une hausse de 22 pour cent, comme le fait valoir Connect/ SOPROQ), déguisé comme un changement d’assiette tarifaire. Dans les faits, le modèle, qui n’est pas lié à une évolution de l’utilisation ou de la valeur de la musique, aurait aussi pour effet d’éliminer les tranches de revenus qui composent le tarif, ce qui donnerait lieu à des hausses injustifiées des redevances.

[280] Essentiellement – et pour les motifs précisés ci-après –, nous sommes d’accord avec l’ACR et rejetons le modèle tarifaire axé sur le groupe. L’adoption du MTAG entraînerait une hausse spectaculaire des redevances versées par les stations de radio commerciale. Selon nous, les augmentations de redevances substantielles comme celle proposée par Connect/SOPROQ ne peuvent être examinées qu’en tenant compte de l’utilisation et de la valeur de la musique. Or, comme toutes les parties en conviennent et comme la Commission en a décidé, les questions de l’utilisation et de la valeur de la musique ne se posent pas en l’espèce.

[281] Le MTAG proposé par les sociétés de gestion collective repose essentiellement sur deux prémisses : les redevances moindres versées par les petites stations qui font partie d’un groupe de stations devraient être augmentées, et le taux effectif des redevances à percevoir de ces groupes devrait être fixé à des taux cibles équivalant à un taux pour la SOCAN de 4,2 pour cent des revenus bruts. Ces taux équivalents sont de 1,138 pour cent dans le cas de Connect/ SOPROQ et de 1,181 pour cent dans le cas de CSI.

[282] Nous convenons avec l’ACR que le MTAG proposé élimine dans les faits les tranches de revenus qui composent le tarif. Si la Commission, dans des décisions antérieures, a exprimé des réserves quant à la nécessité que certaines petites stations bénéficient d’un taux de redevances moindre, nous ne sommes pas convaincus que les tranches de revenus qui composent le tarif doivent être abandonnées. À maintes reprises dans des décisions passées, la Commission a conclu que les taux étagés en fonction des revenus étaient justes et équitables.

[283] Dans sa décision de 2003 à l’égard du Tarif CMRRA/SODRAC inc. pour la radio commerciale, [148] la Commission a adopté pour la première fois, à la demande de CSI et de l’ACR, une structure étagée selon les revenus. Selon la Commission, la modulation du tarif par tiers, comme le proposait CSI, tenait compte de la situation particulière des petites stations. Elle permettait aux petites stations, dont la santé financière est souvent plus fragile, de payer moins pour leur licence. La Commission a toujours reconnu qu’un tarif équitable doit prendre en compte la capacité de payer des utilisateurs visés. La Commission a conclu à l’époque que le Tarif de CSI pour la radio commerciale établissait des versements de redevances équitables.

[284] Dans sa décision de 2005 à l’égard du Tarif SOCAN-SCGDV pour la radio commerciale [149] et, plus tard, en 2008, dans le réexamen de cette décision, [150] la Commission a conclu, pour des motifs qui n’ont pas à être repris ici, que la valeur de la musique pour les radios commerciales avait progressé d’environ 32 pour cent. Le taux devait ainsi passer à 4,2 pour cent, soit 32 pour cent de plus que le taux de 3,2 pour cent qui s’appliquait jusqu’alors aux stations, toutes tailles confondues.

[285] Toutefois, vu l’importance de la hausse de taux, et pour tenir compte de la situation financière et de la capacité de payer des petites stations, la Commission a plafonné le taux à 3,2 pour cent dans le cas de ces dernières. Elle en a décidé ainsi pour que les stations les plus petites n’aient pas à subir les contrecoups d’une forte hausse des taux. La Commission a conclu à l’époque qu’il s’agissait de taux équitables.

[286] Dans la décision Radio commerciale (2010), la Commission a revu les taux de CSI pour tenir compte de la hausse de 32 pour cent qu’elle avait appliquée aux taux de la SOCAN, et elle a homologué pour la première fois des taux dans le cas d’Artisti et de Connect/ SOPROQ. Comme dans la décision SOCAN-SCGDV, 2003-2007, seul le taux supérieur a été augmenté. L’augmentation a été obtenue en appliquant un ratio de 1 à 3,2 [151] au taux supérieur de la SOCAN, qui était de 4,4 pour cent, puis en ajustant ce taux en fonction de l’étendue du répertoire de CSI, soit 90 pour cent. Les taux applicables aux tranches de revenus inférieures ont été plafonnés pour tenir compte de la situation financière des petites stations.

[287] Comme il a été mentionné, la Commission a eu à plusieurs reprises l’occasion d’examiner la question de la modulation des taux en fonction des revenus. Chaque fois, elle a conclu que les tarifs étagés étaient équitables et raisonnables. En l’espèce, nous ne disposons d’aucun élément de preuve qui nous amènerait à conclure le contraire. De plus, nous ne disposons d’aucun élément de preuve convaincant selon lequel la structure tarifaire devrait être axée sur le groupe, pour les motifs qui suivent.

[288] Premièrement, si les sociétés de gestion collective ont présenté des éléments de preuve concernant la mise en commun de la technologie et des ressources entre stations d’un même groupe, elles n’ont pas démontré que les choix relatifs à l’utilisation de la musique étaient faits en groupe. En fait, les éléments de preuve montrent à l’opposé que la mise en commun de la technologie et des ressources n’est pas une pratique répandue dans le secteur de la radio commerciale.

[289] Deuxièmement, dans leur modèle, M. Boyer et Mme Pinheiro proposent une assiette tarifaire correspondant à la somme des revenus bruts de l’ensemble des stations d’un même groupe de stations. Les revenus bruts des stations de radio commerciale sont principalement tirés de la publicité. Or, la plupart des publicités sont régionales, et elles sont généralement vendues en fonction de la station, et non du groupe de stations. Au cours de son témoignage, M. Schween a expliqué que la répartition des recettes publicitaires entre différentes stations était rarissime et que, le cas échéant, la répartition se faisait en fonction de l’horaire et des taux de publicité des stations en question. Étant donné que l’assiette tarifaire est surtout composée de recettes publicitaires, l’adoption d’un modèle tarifaire axé sur le groupe ne semble pas être l’avenue la plus raisonnable. [152]

[290] Troisièmement, M. Boyer et Mme Pinheiro ont fait valoir que la structure étagée avait initialement été adoptée pour alléger le fardeau des petites stations et que l’ACR n’avait déposé aucun élément de preuve concernant les difficultés auxquelles se heurtent les petites stations. Cela dit, les sociétés de gestion collective n’ont présenté aucun élément de preuve au regard de l’incidence financière qu’aurait le modèle qu’elles proposent sur les petites stations.

[291] Ainsi, selon nous, la prémisse selon laquelle les redevances versées par les petites stations appartenant à un groupe devraient être augmentées n’est pas étayée par la preuve et ne peut être retenue.

[292] La deuxième prémisse sur laquelle M. Boyer et Mme Pinheiro font reposer leur proposition de MTAG est que les taux cibles de Connect/SOPROQ et de CSI visés par la Commission dans le cas des stations de radio sont l’équivalent du taux de 4,2 pour cent de la SOCAN. Or, aucun élément de preuve ne nous permet de déterminer un tel taux cible. En outre, aucune des décisions antérieures n’est particulièrement utile à cet égard selon nous.

[293] Dans sa décision de 2005, quand la Commission a décidé de fixer le taux de la SOCAN à 3,2 pour cent pour la première tranche de revenus de 1,25 million de dollars, elle a retenu un taux supérieur à 4,2 pour cent pour les revenus excédant 1,25 million de dollars afin de récupérer les bénéfices que tireraient les grandes stations. La Commission estimait qu’un taux de 4,6 pour cent était nécessaire pour maintenir un taux effectif moyen de 4,2 pour cent dans le cas de ces stations. Cela dit, la Commission a déterminé qu’un taux de 4,6 pour cent pour les tranches de revenus supérieures était trop élevé; elle a donc homologué un taux de 4,4 pour cent pour les revenus supérieurs à 1,25 million de dollars. Il est manifeste que la Commission était consciente du fait que le taux effectif, ou taux cible, serait par conséquent inférieur à 4,2 pour cent.

[294] Ainsi, nous concluons que la deuxième prémisse est également non étayée par la preuve. Cette question de taux cible ou taux effectif ne peut manifestement pas être examinée isolément, mais doit plutôt s’inscrire dans une analyse plus exhaustive et plus large tenant compte, en particulier, de l’utilisation et de la valeur de la musique.

B. L’incidence des exceptions relatives à la reproduction

i. Les taux de reproduction devraient-ils être répartis entre différents types de copies?

[295] L’ACR a proposé que le taux de CSI soit réparti entre différents types de copies. Dans ses observations, elle a fait valoir que [TRADUCTION] « […] le fait qu’il y a un nombre moindre de reproductions donnant droit à des redevances a inexorablement pour conséquence des redevances moindres aux termes des tarifs pertinents ». [153] L’expert de l’ACR, M. Reitman, a présenté une méthode de répartition. Selon lui, si une certaine portion du taux de CSI peut être attribuée à des types de copies ne donnant plus droit à rémunération, alors la valeur relative desdites copies devait être déduite du taux de CSI.

[296] Connect/SOPROQ et CSI ont rejeté la proposition de l’ACR. Premièrement, elles n’étaient pas d’accord pour dire qu’il y a moins de reproductions donnant droit à des redevances. Deuxièmement, elles ont fait valoir qu’une diminution des taux de redevances, même s’il y avait moins de reproductions donnant droit à des redevances, n’est pas une réponse propre à un marché concurrentiel. Enfin, sans toutefois céder sur les deux premiers points, les experts de Connect/ SOPROQ et de CSI, MM. Boyer et Cremieux, ont proposé une autre méthode de répartition.

[297] La question de savoir s’il y a moins de reproductions donnant droit à des redevances est une question mixte de fait et de droit. Il convient en premier lieu de déterminer, au regard du droit, si certains types de reproductions ne donnent désormais plus droit à des redevances. Cette question a été tranchée précédemment dans la présente décision. Il convient en deuxième lieu de déterminer, au regard des faits, la fréquence et la valeur de ces reproductions. En d’autres termes, une fois les questions de droit tranchées, nous devons avoir recours à une méthode de répartition pour répondre à la question de l’évaluation de ces reproductions.

[298] Avant d’examiner la question de la méthode de répartition, toutefois, il y a lieu de se pencher sur la question de la tarification efficiente. Les arguments de MM. Boyer et Cremieux à cet égard peuvent être résumés comme suit. Premièrement, le taux existant de CSI n’a pas été obtenu en additionnant les valeurs liées aux différents types de reproduction. Par conséquent, il ne serait pas approprié de répartir le taux entre les différents types de reproduction qui ont cours actuellement. Le taux de CSI correspond plutôt au prix de l’option de reproduire pour les stations de radio commerciale. [154] Deuxièmement, dans un marché concurrentiel, la marge bénéficiaire d’une entreprise est soumise aux forces concurrentielles. S’il y a une forme de règlementation faisant en sorte que certains prix sont plafonnés à une valeur inférieure à celle d’un marché concurrentiel, les entreprises réagiront soit en diminuant leur offre de musique enregistrée, soit en augmentant le prix d’un autre élément qu’elles vendent. Au bout du compte, il n’y aura pas de réduction des redevances liées au droit de reproduire de la musique enregistrée. [155]

[299] Nous convenons avec MM. Boyer et Cremieux que le taux existant n’a pas précisément été obtenu en additionnant la valeur liée aux différentes composantes. Cela dit, il ressort clairement des différentes décisions portant sur le taux de CSI que la Commission était consciente des types de reproductions qu’autorisait, ou non, le tarif.

[300] Dans sa première décision établissant les taux relatifs aux reproductions effectuées par les stations de radio commerciale, [156] la Commission, bien que les éléments de preuve ne permettaient pas de faire de distinction entre les différents types de reproduction, a convenu de fixer un taux moindre pour les stations n’ayant pas recours aux reproductions conservées sur un disque dur, un des types de reproductions. Dans la décision suivante relative à CSI et portant sur les années 2005 et 2006, [157] la Commission s’est penchée sur la question des utilisations autorisées, et a expliqué que certains types de reproductions étaient visés par le tarif, alors que d’autres ne l’étaient pas.

[301] Dans la quatrième décision concernant CSI, qui portait également sur les tarifs relatifs à la radio commerciale de la SOCAN, de Ré:Sonne, de Connect/SOPROQ et d’Artisti, [158] la Commission s’est également penchée sur la question des types de reproductions, dans le contexte des activités des radiodiffuseurs.

[302] Contrairement à ce que font valoir MM. Boyer et Cremieux, la Commission n’a jamais eu l’intention d’établir une valeur pour l’option de reproduire, peu importe la nature et l’importance des activités de reproduction. Le manque d’éléments de preuve est la seule raison pour laquelle il n’y a pas eu d’analyse de la valeur des différents types de copies. En l’espèce, la preuve nous permet de faire un tel exercice. Rien dans le fait que le taux de CSI a initialement été fixé à une valeur unique ne nous empêche de dégrouper les différents types de copies, dans la mesure où la preuve dont nous disposons nous permet maintenant de le faire.

[303] MM. Boyer et Cremieux font également valoir que les redevances liées à la reproduction de musique enregistrée devraient demeurer les mêmes lorsque certains types de reproductions cessent de donner droit à rémunération. Nous ne sommes pas d’accord.

[304] Comme l’a souligné M. Reitman, le marché concurrentiel abstrait en question ne doit pas seulement tenir compte d’une multitude d’acheteurs, mais également d’une multitude de fournisseurs. Dans ce contexte, les forces concurrentielles du « marché des reproductions » amèneraient également les fournisseurs à offrir différents ensembles de types de copies, à différents prix, aux fins de la radio commerciale. Comme les consommateurs ont chacun des besoins différents et peuvent utiliser différents ensembles de types de copies, les producteurs tenteraient nécessairement de tirer profit de la situation en offrant différents forfaits, à différents prix. Afin d’attirer de nouveaux consommateurs, les fournisseurs vendraient des licences assorties de droits moindres, à prix moindre.

[305] Dans la présente décision, nous concluons qu’un certain nombre d’exceptions s’appliquent aux activités de reproduction des stations de radio. Ainsi, les ensembles de types de copies dont les stations ont désormais besoin contiennent nécessairement moins de droits. Dans l’environnement concurrentiel décrit précédemment, cette situation devrait entraîner une baisse de prix.

[306] Ce résultat concorde également avec la façon dont la Commission a généralement traité les nouveaux droits auparavant. La Commission a toujours adopté comme position que si le législateur crée un droit, alors cette décision doit avoir un sens; cela tend à favoriser l’établissement d’une redevance plus que nominale. Le même raisonnement vaut dans le contexte des exceptions. Si le législateur crée des exceptions, et si la Commission conclut que celles-ci s’appliquent dans une affaire dont elle est saisie, alors cette décision doit avoir des conséquences plus que nominales.

ii. Les données

[307] Le présent dossier contient les résultats d’une enquête menée auprès de 212 stations de radio commerciale du Canada. Ces stations ne sont pas représentatives des trois types de stations de radio au Canada, à savoir les stations appartenant à des intérêts nationaux, régionaux ou locaux. Le premier type a été délibérément sous-échantillonné, alors que les deux autres ont été délibérément suréchantillonnés, afin d’obtenir un portrait révélateur des différentes pratiques de reproduction et des résultats financiers des stations selon leur type. [159]

[308] En gros, le questionnaire était divisé en trois parties. Dans la première, les stations devaient identifier, parmi dix types de copies, lesquels elles effectuaient. Dans la deuxième, elles devaient noter l’utilité des types de copies sur une échelle de 1 à 8. Dans la troisième, elles devaient classer en ordre d’importance les différents types de copies effectuées, sur une échelle allant de 1 au nombre de types de copies effectuées. Dans la deuxième partie, les répondants pouvaient accorder le même score à plusieurs types, ce qui n’était pas le cas dans la troisième partie. En outre, les échelles étaient inversées. Ainsi, 8 correspondait à l’utilité maximale dans la deuxième partie, tandis que 1 correspondait à la copie la plus importante dans la troisième partie. [160]

[309] Comme il est mentionné précédemment, les données sur l’utilité contiennent 212 enregistrements, dont 6 étaient vides dans la feuille de calcul déposée devant la Commission. [161] Par ailleurs, 86 enregistrements ne faisaient état d’aucune variation, c’est-à-dire que tous les types de copies étaient considérés comme ayant la même utilité. Ces résultats, bien que possibles, témoignent peut-être de cas de réponses rectilignes. [162] Nous soulignons que les répondants qui semblent avoir donné des réponses rectilignes ont pris très peu de temps pour remplir le questionnaire, souvent moins de 30 secondes. Nous concluons que ces résultats sont vraisemblablement attribuables à des répondants ayant donné des réponses rectilignes, et nous les retirons donc de l’ensemble de données.

[310] Nous considérons que l’ensemble de données déposé contient 120 enregistrements utilisables : les données sur l’utilisation ont été correctement fournies pour ces 120 enregistrements, de sorte qu’il n’y a pas lieu de supprimer d’autres enregistrements.

[311] Enfin, nous soulignons que deux autres ensembles de données ont été déposés devant la Commission, soit un ensemble de données sur l’importance, et un ensemble de données tiré des demandes de renseignements. L’ensemble de données sur l’importance ne contenait que sept enregistrements vides et, puisqu’il n’était pas permis d’accorder le même score deux fois, aucun enregistrement n’était sans variation. À certains égards, il s’agissait du meilleur ensemble de données à utiliser. Cela dit, le codage a pu donner lieu à des réponses contradictoires (un score de « 1 » signifiait « le plus important » et un score de « 8 » signifiait « le moins important »). En outre, aucune des parties n’a eu recours à l’ensemble de données sur l’importance. Pour ces deux motifs, nous ne nous sommes pas attardés à l’utilisation de l’ensemble de données sur l’importance.

[312] M. Reitman a eu recours à l’ensemble de données tiré des demandes de renseignements, mais seulement à des fins de validation des données sur l’utilité. Comme sa mesure de prédilection reposait sur les données sur l’utilité, il n’est pas nécessaire en l’espèce d’examiner de plus près les données tirées des demandes de renseignements.

iii. La proposition de M. Reitman

[313] Le questionnaire portait sur sept types spécifiques de copies (copie d’incorporation, copie d’évaluation de la musique, copie du système d’automatisation principal, copie de préenregistrement vocal, copie de prestation en direct, copie pour diffusion en continu, et copie de sauvegarde), ainsi que sur trois autres types de copies que le répondant devait inscrire. La portion « utilité » de chaque enregistrement comprend donc dix données.

[314] M. Reitman a calculé la moyenne des scores d’utilité attribués aux dix types de copies, pour chaque enregistrement, obtenant ainsi dix scores moyens, soit un pour chacun des types de copies. [163] Il a ensuite converti ces scores pour obtenir la valeur relative des différents types de copies. Pour ce faire, il a d’abord additionné les scores correspondant aux différents types de copies, puis divisé le score de chacun des types de copie par ce total. Cette méthode de normalisation des scores garantit que la somme de toutes les valeurs relatives est égale à 100 pour cent.

[315] M. Reitman a calculé les scores d’utilité de deux manières. Premièrement, il a utilisé les données telles quelles. Deuxièmement, il a modifié chaque enregistrement afin de remplacer tout score de 8 (le plus utile) par la valeur 10 dans les cas où la station avait indiqué que le type de copies en question était absolument nécessaire.

[316] Dans le cadre de l’enquête, sous la catégorie « autre copie », les stations ont indiqué principalement trois types de copies : les copies de ruban-témoin aux fins du respect des exigences du CRTC, les copies excédentaires (une catégorie fourre-tout) et les copies de contrôle d’enregistrement, mentionnées par une seule station. M. Reitman a par la suite décidé de ne pas tenir compte des copies de ruban-témoin dans son analyse, étant donné que ces copies ne donnent pas droit à rémunération. Il a également décidé de considérer les copies excédentaires et les copies de contrôle d’enregistrement comme formant une seule catégorie.

[317] Enfin, M. Reitman a combiné les données sur l’utilité et les données sur l’utilisation de la manière qui suit. Il a multiplié la moyenne normalisée des données sur l’utilité par le pourcentage de stations effectuant chacun des types de copies, puis il a normalisé les données de nouveau. Encore une fois, il a fait cet exercice pour les données non recodées et pour les données recodées. [164]

[318] Les résultats finaux de M. Reitman sont indiqués au tableau 1 de l’annexe A.

iv. La proposition de MM. Boyer et Cremieux

[319] La proposition de MM. Boyer et Cremieux repose sur la théorie des jeux coopératifs. Dans un jeu coopératif, les parties négocient entre elles, et une solution mutuellement acceptable existe. La valeur de Shapley est une de ces solutions. MM. Boyer et Cremieux citent Roth et Verrechia (1979), qui définissent la valeur de Shapley comme étant [TRADUCTION] « une solution de rechange juste, équitable, neutre et sans coût que l’on peut retenir plutôt que de laisser les participants à un exercice de répartition des coûts négocier entre eux pour déterminer comment seront répartis les coûts ou valeurs ». Cette valeur est particulièrement utile lorsque les parties n’ont pas le même pouvoir de négociation, qu’elles ont des positions asymétriques ou que le jeu présente des économies d’envergure (le tout étant plus grand que la somme de ses parties).

[320] Il n’est pas évident présenter visuellement ce concept de solution, car celui-ci n’est pas linéaire par rapport au nombre de joueurs. Le concept peut être résumé comme suit. Chaque joueur forme des coalitions avec d’autres joueurs. Prenons, par exemple, les joueurs A, B et C. Les coalitions possibles sont les suivantes : {A}, {B}, {C}, {A,B}, {A,C}, {B,C} et {A,B,C}. Pour chaque coalition, il existe une valeur qui correspond à la somme des valeurs marginales associées aux différents joueurs de la coalition. La valeur de Shapley attribue à chaque joueur la moyenne des valeurs marginales liées à l’ensemble des coalitions auxquelles il prend part.

[321] L’idée de MM. Boyer et Cremieux était de traiter chaque type de copie comme un joueur. Ainsi, les différents types de copies « négocient entre elles ». À des fins de résolubilité analytique, MM. Boyer et Cremieux redéfinissent l’ensemble des types de copies possibles en un ensemble de cinq types de copies : système d’automatisation principal, incorporation, sauvegarde, préenregistrement vocal, et autres.

[322] MM. Boyer et Cremieux utilisent les données de M. Reitman comme point de départ. En particulier, ils ont recours aux données recodées, sans les zéros ajoutés, avant la deuxième normalisation des données sur l’utilisation. [165] Ces données figurent au tableau 4, colonne 3, de M. Reitman.

[323] MM. Boyer et Cremieux posent ensuite différentes hypothèses pour déterminer les valeurs marginales requises pour procéder à l’analyse de la valeur de Shapley. Premièrement, ils posent que les copies du système d’automatisation principal sont un joueur essentiel. Autrement dit, toute coalition dont ne feraient pas partie les copies du système d’automatisation principal a une valeur totale nulle, et chaque membre d’une telle coalition se voit attribuer une valeur marginale nulle dans le cas de cette coalition. Deuxièmement, ils supposent que la valeur marginale de chaque joueur non essentiel est la même dans toutes les coalitions dont il est membre. Par exemple, la valeur des copies de sauvegarde est la même que la coalition comprenne à la fois les copies du système d’automatisation principal et les copies d’incorporation, ou uniquement les copies du système d’automatisation principal. En dernier lieu, à des fins de comparabilité du modèle avec celui de M. Reitman, ils ont normalisé les valeurs de Shapley afin que leur somme soit égale à un.

[324] MM. Boyer et Cremieux ont présenté une variante de leur modèle principal, dans laquelle l’ « option de reproduire » est également un joueur essentiel. Ils ont ensuite recalculé la valeur de Shapley et procédé à une nouvelle normalisation des valeurs. Cette variante constitue leur mesure de prédilection au regard de la répartition de la valeur, laquelle est présentée dans le tableau 2 de l’annexe A.

[325] La répartition des redevances est présentée séparément pour Connect/SOPROQ et pour CSI, étant donné que, selon les experts, le tarif de Connect/SOPROQ ne vise pas les copies de prestation en direct et les copies pour diffusion en continu.

v. Raisons pour lesquelles nous rejetons la proposition de MM. Boyer et Cremieux

[326] Des éléments de preuve relatifs à la valeur de Shapley ont déjà été présentés à la Commission. Dans sa décision de 2009 à l’égard des services de radio satellitaire, la Commission écrivait :

À notre avis, la méthode Shapley est intéressante parce qu’elle fournit de l’information sur la valeur fondamentale de la musique pour les services par satellite. Cependant, elle repose largement sur les données d’une enquête où les répondants sont questionnés sur des scénarios hypothétiques. Malheureusement, l’insuffisance des données ne nous permet pas de tester la variabilité et la stabilité de ce modèle. C’est pourquoi nous ne pouvons utiliser cette approche dans le cas présent. Les parties pourraient éventuellement la perfectionner et mieux l’utiliser si elles se mettaient d’accord sur le modèle et la méthodologie de collecte des données. La Commission serait alors en mesure d’analyser et de valider les résultats. [166]

[327] Il est aisé d’établir une distinction entre cette décision et celle en l’espèce. Lors de l’enquête menée dans le cadre de la présente affaire, les stations de radio n’étaient pas interrogées à propos de scénarios hypothétiques, mais plutôt au sujet des copies qu’elles effectuaient. Qui plus est, les données déposées auprès de la Commission permettent de tester les variations et la stabilité du modèle de Shapley.

[328] Pour les motifs qui suivent, nous rejetons toutefois la proposition de MM. Boyer et Cremieux.

[329] Premièrement, MM. Boyer et Cremieux tiennent pour acquis que les copies du système d’automatisation principal sont un joueur essentiel, et le seul joueur essentiel. Bien que les copies du système d’automatisation principal soient probablement essentielles, la preuve montre que les copies d’incorporation le sont aussi probablement, du moins à certains moments. Or, la méthode de Shapley, dans la version présentée par MM. Boyer et Cremieux, ne permet pas le partage du caractère essentiel.

[330] Deuxièmement, MM. Boyer et Cremieux supposent que la contribution marginale d’un type de copies non essentiel, quel qu’il soit, est la même dans toutes les coalitions dont il est membre (avec les copies du système d’automatisation principal). Or, il est peu probable que ce soit le cas. Si les sociétés de gestion collective avaient souhaité utiliser la valeur de Shapley d’un bout à l’autre, elles auraient pu poser des questions relatives aux coalitions. L’hypothèse de la constance de la contribution marginale, bien qu’elle facilite les calculs, est difficile à justifier.

[331] Troisièmement, MM. Boyer et Cremieux supposent que les copies du système d’automatisation principal sont un joueur essentiel. L’information contenue dans cette hypothèse est déjà intégrée, dans une certaine mesure, dans les données montrant que la plupart des stations ont recours aux copies du système d’automatisation principal et y accordent une grande valeur. Retenir une telle hypothèse dans le jeu de Shapley revient à une forme de double comptage.

[332] Quatrièmement, les données montrent que de nombreux répondants n’ont pas compris les questions. Par exemple, deux stations de radio du Québec ont déclaré ne pas avoir recours aux copies du système d’automatisation principal. L’une transmet vraisemblablement en utilisant des copies d’évaluation de la musique, et l’autre, probablement en ayant recours à des copies d’incorporation. Dans ces deux cas, les copies d’évaluation de la musique et les copies d’incorporation sont devenues, sur le plan fonctionnel, des copies du système d’automatisation principal, car c’est par ces copies qu’a lieu la radiodiffusion. Le problème que pose la mauvaise identification des données, dans la méthode de Shapley, est que l’erreur de mesure « se répand » du joueur non essentiel au joueur essentiel. L’incidence sur la répartition se manifeste de deux façons plutôt qu’une.

[333] Cinquièmement, MM. Boyer et Cremieux ont recours à un jeu à cinq joueurs, lesquels sont représentés par cinq types de copies. Cela dit, il y a sept principaux types de copies, ainsi qu’un certain nombre de types de copies qui ne font pas partie des principaux et qui sont identifiés dans l’enquête comme étant les types de copies « autres ». MM. Boyer et Cremieux ont dû regrouper tous les autres types de copies en une seule catégorie, ce qui signifie que ces autres types de copies auraient à prendre part à un nouveau jeu de négociation après avoir négocié avec les types de copies les plus courants. Or, aucun modèle n’a été élaboré pour ce second jeu de négociation.

[334] Sixièmement, l’étape « additionnelle » qui consiste à inclure l’option de reproduire en tant que joueur est contraire à la règle voulant que tous les joueurs doivent être du même type. À l’étape additionnelle, cinq joueurs représentent des types de copies, et un autre joueur un droit. Cela complique trop l’interprétation des résultats du jeu.

vi. Comment nous modifions la proposition de M. Reitman

[335] Après avoir rejeté la proposition de MM. Boyer et Cremieux, nous examinons maintenant celle de M. Reitman.

[336] Premièrement, comme il en a été fait mention ci-dessus, nous avons retiré un certain nombre d’enregistrements de l’ensemble de 212 enregistrements, en raison surtout de réponses rectilignes. Il nous reste ainsi 120 enregistrements utilisables.

[337] Deuxièmement, nous rejetons l’option de recodage, pour trois raisons. En premier lieu, recoder une réponse de « 8 » à « 10 » est totalement arbitraire; à cet égard, il n’y a aucune raison de ne pas choisir un « 9 » ou un « 15 ». De plus, il s’agit d’une forme de double comptabilisation. Comme le répondant a attribué un « 8 » à la copie, la valeur accordée est déjà très élevée. Recoder cette valeur à « 10 » reflète une seconde fois cette valeur élevée. Finalement, à notre avis, l’utilité d’une copie et la nécessité de cette copie ne sont pas directement comparables, mais c’est précisément ce que la version du modèle qui prévoit le recodage propose de faire.

[338] Troisièmement, nous rejetons l’option de l’ajout de zéros, puisqu’elle réduit arbitrairement les moyennes avant la normalisation.

[339] Les calculs sont présentés au tableau 3 de l’annexe A. Nous obtenons les chiffres des colonnes A et B de nos calculs après avoir apporté les changements que nous venons de décrire. Le chiffre de la colonne C est le produit des chiffres figurant dans les deux premières colonnes, et correspond à une mesure de l’utilité pondérée en fonction des données sur l’utilisation. Le chiffre de la colonne D correspond au chiffre de la colonne C divisé par la somme de tous les éléments de la colonne C. Il correspond également à la valeur relative de chaque type de copie.

C. Les taux de CSI

[340] Le point de départ est le taux de 1,375 pour cent, égal au taux de la SOCAN de 4,4 pour cent multiplié par le rapport de 1 à 3,2. La Commission s’est fondée sur ce point de départ et sur les taux correspondants pour les tranches de revenus les moins élevées et les stations utilisant peu de musique [167] dans la décision Radio commerciale (2010). Dans cette décision, la Commission a appliqué à ces taux une réduction de 10 pour cent en fonction du répertoire, et a homologué une structure tarifaire comme celle qui figure à la première colonne du tableau 4 de l’annexe A, un taux de 1,238 pour cent étant applicable à la tranche de revenus la plus élevée. [168] Étant donné que personne ne s’est opposé à l’utilisation de cet ajustement en fonction du répertoire, nous l’appliquons également. Par conséquent, les taux homologués en 2010 sont maintenant utilisés comme des taux de départ, auxquels nous appliquerons d’autres réductions.

[341] Comme nous l’avons vu à la section VIII ci-dessus, il y a trois types de copies pour lesquelles une réduction générale peut être appliquée aux taux de CSI pour la période considérée :

  • Copies d’évaluation de la musique;
  • Copies pour diffusion en continu;
  • Copies de sauvegarde.

[342] Ensemble, ces trois types de copies représentent actuellement 23,42 pour cent de la valeur relative des copies faites par les stations de radio. Nous appliquons la réduction de 23,42 pour cent aux taux de départ et obtenons les nouveaux taux de base pour CSI indiqués au tableau 4 de l’annexe A. Ces nouveaux taux de base sont toutefois l’objet d’une réduction additionnelle potentielle.

[343] Plus tôt dans la présente décision, nous avons décidé que les diffuseurs en mesure de démontrer qu’ils se conforment à l’article 30.9 de la Loi devraient pouvoir bénéficier d’une réduction additionnelle des redevances à l’égard du droit de reproduction à la faveur d’une « LGM limitée ». Cette réduction sera proportionnelle à la quantité de copies dont les diffuseurs pourront démontrer le caractère éphémère, au sens de cet article. Puisque nous avons également décidé que l’article 30.9 ne s’appliquerait pas aux copies du système d’automatisation principal, la réduction sera consentie uniquement à l’égard des trois types de copies suivants :

  • Copies d’incorporation;
  • Copies de préenregistrement vocal;
  • Copies de prestation en direct.

[344] En additionnant les valeurs relatives de ces trois types de copies, nous obtenons une valeur relative totale de 27,80 (16,90 + 9,46 + 1,44) pour cent. En proportion de la valeur totale de tous les types de copies qui ne bénéficient pas de la réduction générale (c.-à-d. 76,58 pour cent), nous obtenons une proportion de 36,3 pour cent. Par conséquent, la réduction additionnelle potentielle des taux exposés ci-dessus au titre de la LGM limitée sera calculée de la manière suivante :

où le dénominateur du rapport, B, est le nombre total de copies des trois types (copies d’incorporation, copies de préenregistrement vocal et copies de prestation en direct) faites par les stations de radio. Le numérateur du rapport, A, est le nombre réel de copies dont la conformité aux exigences prévues à l’article 30.9 de la Loi peut être démontrée par le diffuseur.

[345] Nous savons que la valeur relative des copies d’incorporation est beaucoup plus élevée que celle des copies de préenregistrement vocal, laquelle est plus élevée que celle des copies de prestation en direct. Nous aurions pu élaborer une formule de réduction qui aurait tenu compte de ces différentes valeurs. Toutefois, pour simplifier les choses et faciliter l’administration, nous croyons qu’il est approprié de postuler que chacun de ces trois types de copies a la même valeur moyenne.

[346] Afin d’être admissible à cette réduction additionnelle à l’égard des reproductions éphémères, le diffuseur devra démontrer que chacune des copies pour lesquelles il demande une réduction respecte l’ensemble des exigences prescrites par l’article 30.9 de la Loi. Pour ce faire, le diffuseur remplira un rapport et le présentera à CSI. Les détails de ce rapport sont exposés ci-dessous, à la section portant sur le libellé du tarif.

[347] Dans une décision provisoire datée du 21 décembre 2012, la Commission a rendu le Tarif pour la radio commerciale (SOCAN : 2008-2010; Ré:Sonne : 2008-2011; CSI : 2008-2012; AVLA/SOPROQ : 2008-2011; ArtistI : 2009-2011) applicable, en ce qui concerne CSI, à titre provisoire à compter du 7 novembre 2012. Le taux que nous fixons s’applique donc à CSI pour la période allant du 7 novembre 2012 au 31 décembre 2013.

D. L’entente tripartite

[348] Artisti a signé une entente avec Connect/ SOPROQ et l’ACR, entente qui a été déposée conjointement auprès de la Commission le 6 août 2013 (l’ « entente tripartite »). Dans l’entente tripartite, les parties ont convenu de ce qui suit :

[TRADUCTION] Du taux de départ applicable aux prestations d’artistes-interprètes, 0,028 pour cent devrait être payable à ArtistI pour l’utilisation des prestations de son répertoire pendant la période d’application de son tarif proposé, et le reste, à savoir 0,66 pour cent, devrait être payable à AVLA/SOPROQ. À moins que la Commission n’en décide autrement, l’augmentation ne doit être attribuée expressément ni à une hausse de la part de répertoire d’ArtistI ni à une redistribution de la valeur entre les prestations vocales et instrumentales. De plus, ce règlement n’implique aucune admission sur ces questions (ni sur d’autres questions) et est sans préjudice du droit d’AVLA/SOPROQ et d’ArtistI de soulever de telles questions dans de futures instances. […] Dans la mesure où la Commission estime que le taux de départ applicable aux prestations d’artistes-interprètes devrait être réduit pour tenir compte des exceptions prévues par la Loi sur le droit d’auteur (ou d’autres facteurs), les réductions devraient s’appliquer au prorata à AVLA/SOPROQ et à ArtistI. [169]

[349] La Commission a pris acte de l’entente et publié l’avis suivant le lendemain :

La Commission prend acte de l’entente entre AVLA/SOPROQ, ArtistI et l’ACR telle que décrite dans la requête ci-jointe. Conformément à cette entente, la Commission confirme que les questions faisant l’objet de l’entente n’ont pas à être examinées dans le cadre des audiences et ne nécessiteront pas de dépôt de preuve de la part d’aucune des parties. [170]

[350] L’entente a les répercussions suivantes sur notre décision. Premièrement, la méthode que nous avions utilisée dans la décision Radio commerciale (2010) pour fixer le taux d’Artisti ne sera pas employée dans la présente affaire. Deuxièmement, le taux le plus élevé d’Artisti correspondra à 4,07 (0,028 ÷ 0,688) pour cent du taux de départ applicable aux prestations d’artistes-interprètes. Troisièmement, tous les taux auxiliaires d’Artisti seront établis en proportion de son taux le plus élevé, au moyen des proportions énoncées dans la décision de 2010.

E. Les taux de Connect/SOPROQ

[351] Dans la décision Radio commerciale (2010), le point de départ pour la portion du taux de Connect/SOPROQ revenant aux producteurs était de 0,688 pour cent (la moitié du taux le plus élevé de CSI). Nous utilisons le même point de départ et appliquons une réduction générale, comme nous l’avons fait pour CSI. Toutefois, nous devons modifier la valeur de cette réduction générale en apportant des modifications aux valeurs relatives des types de copies, telles qu’elles apparaissent au tableau 1 de l’annexe A.

[352] Les copies de prestation en direct, présentées au tableau 3, n’impliquent pas la reproduction d’enregistrements sonores ni de prestations d’artistes-interprètes. Les copies d’un deuxième type, les copies pour diffusion en continu, ne sont pas non plus visées par le tarif parce que, exception faite de CSI, le tarif vise uniquement les activités de radiodiffusion hertzienne d’une station. Par conséquent, ces deux types de copies doivent être retirés du calcul de la réduction applicable au taux de Connect/SOPROQ. Le tableau 5 montre le calcul de la valeur relative des autres types de copies.

[353] La réduction générale calculée pour CSI s’applique à trois types de reproductions : les copies d’évaluation de la musique, les copies pour diffusion en continu et les copies de sauvegarde. La réduction générale que nous calculons maintenant pour Connect/SOPROQ s’applique seulement à deux types de reproductions : les copies d’évaluation de la musique et les copies de sauvegarde. La valeur relative de ces deux types de reproductions est de 0,07 pour cent et de 23,66 pour cent, respectivement. Toutefois, alors que la réduction pour les copies d’évaluation de la musique entre en vigueur à partir du 1er janvier 2012, la réduction pour les copies de sauvegarde ne s’applique qu’à partir du 7 novembre 2012. Nous devons donc calculer des taux de Connect/SOPROQ pour chacune des périodes suivantes.

i. Du 1er janvier 2012 au 6 novembre 2012

[354] L’application de la réduction de 0,07 pour cent pour les copies d’évaluation de la musique résulte en une baisse du point de départ de 0,688 à un taux de 0,687.

[355] L’ajustement de répertoire de 93,72 pour cent est fondé sur la décision Radio commerciale (2010) et sur l’entente tripartite. Si nous appliquons cet ajustement de répertoire, la part des producteurs d’enregistrements sonores (pour le taux le plus élevé) est de 0,644 pour cent des revenus.

[356] La part des artistes-interprètes de 0,688 pour cent des revenus est ajustée de la manière suivante. Nous appliquons d’abord une réduction de 5 pour cent pour tenir compte des prestations pour lesquelles le droit d’auteur appartient toujours à l’artiste-interprète. Cet ajustement a été fait dans la décision de 2010, et il n’y a aucune raison de ne pas l’appliquer à nouveau. Nous appliquons également la réduction générale de 0,07 pour cent et l’ajustement de répertoire (93,72 pour cent).

[357] Par suite de ces trois ajustements, nous obtenons un taux de 0,612 pour cent. Toutefois, ce taux doit être divisé entre Connect/SOPROQ et Artisti selon un rapport de 0,660 à 0,028, soit 95,93 pour cent pour Connect/SOPROQ et 4,07 pour cent pour Artisti. La part des artistes-interprètes pour Connect/SOPROQ est de 0,5872 (0,612 × 0,9593) pour cent. Par conséquent, le taux le plus élevé de Connect/ SOPROQ est de 1,231 (0,644 + 0,587) pour cent.

[358] En ce qui concerne les autres catégories de revenus, les taux sont établis de la façon suivante. Les taux homologués en 2010 sont présentés au tableau 6 de l’annexe A; toutefois, ces taux ne peuvent être utilisés d’emblée. Connect/SOPROQ soutient que son taux n’a pas été établi correctement dans la décision Radio commerciale (2010) parce qu’une part constante de 0,23 pour Artisti a été soustraite de tous les taux, alors qu’une part inférieure aurait dû être soustraite dans le cas des taux inférieurs. Nous sommes d’accord. Les résultats de cette correction sont présentés au tableau 6 de l’annexe A. D’après les ratios résultant des taux corrigés, les nouveaux taux de base de Connect/SOPROQ, qui feront également l’objet d’une réduction additionnelle potentielle, sont également présentés au tableau 6.

[359] Ces taux sont plus élevés que les taux homologués par la Commission en 2010 puisque nous avons éliminé dans la présente instance la réduction SDMN qui avait été appliquée en 2010. La réduction additionnelle que nous appliquons à l’égard des copies d’évaluation de la musique ne compense qu’en partie cette élimination de la réduction SDMN.

ii. Du 7 novembre 2012 au 31 décembre 2017

[360] Pour la période du 7 novembre 2012 au 31 décembre 2017, les deux réductions à l’égard des copies d’évaluation de la musique et des copies de sauvegarde s’appliquent. La réduction totale qui en résulte est de 23,73 pour cent (0,07 + 23,66). Cette réduction, appliquée au point de départ de 0,688, amène à un taux de 0,5244 pour cent. Le même ajustement de répertoire de 93,72 pour cent mène à un taux de 0,492 pour cent pour les producteurs d’enregistrements sonores.

[361] Comme nous l’avons fait ci-dessus, nous appliquons au point de départ pour la part des artistes-interprètes de 0,688 pour cent, la déduction pour tenir compte des prestations pour lesquelles le droit d’auteur appartient toujours à l’artiste-interprète (5 pour cent), la réduction générale pour les copies bénéficiant d’une exemption (23,73 pour cent) et l’ajustement de répertoire (93,72 pour cent). Cela nous amène à un taux de 0,467 pour cent. La part de l’artiste-interprète pour Connect/ SOPROQ est 0,488 pour cent (0,467 × 0,9593). Conséquemment, le taux le plus élevé pour Connect/SOPROQ est de 0,940 pour cent (0,492 + 0,448). Les taux pour les autres catégories de revenus sont déterminés comme ci-dessus et indiqués au tableau 6.

[362] Comme nous l’avons fait pour le taux de CSI, nous permettrons aux diffuseurs de profiter d’une autre réduction potentielle, ou LGM limitée, par rapport aux nouveaux taux de Connect/SOPROQ obtenus ci-dessus. La valeur totale des deux derniers types de copies (copies d’incorporation et copies de préenregistrement vocal) qui pourraient bénéficier de l’exception prévue à l’article 30.9 de la Loi est de 26,76, ce qui correspond à 35,1 pour cent de 76,27 pour cent, la valeur relative totale des types de copies restants qui ne bénéficiaient pas de la réduction générale. Ainsi, la réduction additionnelle potentielle sera égale à :

où D représente le nombre total de copies d’incorporation et de copies de sauvegarde faites par les stations de radio, et C représente le nombre réel de ces copies dont la conformité aux exigences prévues à l’article 30.9 peut être démontrée par le diffuseur.

F. Les taux d’Artisti

[363] Comme nous l’avons fait à l’égard des taux de Connect/SOPROQ et pour les mêmes raisons, nous devons homologuer pour Artisti des taux pour deux périodes. Pour la première période, entre le 1er janvier 2012 et le 6 novembre 2012, nous avons déterminé ci-dessus que le taux total devant être partagé entre Connect/SOPROQ et Artisti dans le cas des artistes-interprètes est de 0,612 pour cent. Comme Artisti doit recevoir une part de 4,07 pour cent, le taux d’Artisti est donc de 0,025 pour cent pour la tranche de revenus la plus élevée des stations de radio. Utilisant les ratios de la décision Radio commerciale (2010), nous obtenons les taux de base indiqués au tableau 7 de l’annexe A. Pour les raisons invoquées à l’égard des nouveaux taux pour Connect/SOPROQ, les nouveaux taux d’Artisti pour cette première période sont plus élevés que les taux homologués en 2010.

[364] Pour la seconde période, entre le 7 novembre 2012 et le 31 décembre 2014, le taux total à être partagé entre Connect/ SOPROQ et Artisti à l’égard des artistes-interprètes est de 0,467 pour cent. Le taux correspondant d’Artisti est de 0,019 pour cent (0,467 × 0,0407) pour la plus haute tranche de revenus. Les nouveaux taux de base pour les autres tranches de revenus, calculés tel que décrit ci-dessus, sont indiqués au tableau 7.

[365] Une réduction additionnelle potentielle sera également appliquée aux nouveaux taux de base d’Artisti, identique à celle calculée à l’aide de la formule établie pour Connect/SOPROQ.

G. Les taux de la SOCAN et de Ré:Sonne

[366] La SOCAN ne demandait pas la modification du statu quo relativement aux taux. Ré:Sonne demandait deux changements, le changement fondé sur le paragraphe 69(2) de la Loi et celui concernant le MTAG, que nous avons rejetés. De plus, pour des raisons mentionnées dans la partie V ci-dessus, l’ajustement pour le répertoire utilisé dans la décision Radio commerciale (2010) est également utilisé pour les taux de Ré:Sonne dans la présente instance. Par conséquent, les taux que nous avons homologués en 2010 ne changeront pas pour la SOCAN ni pour Ré:Sonne. Nous homologuons les taux indiqués au tableau 8 de l’annexe A.

[367] Malgré le paragraphe précédent, le sous-alinéa 68.1(1)a)(i) de la Loi confère aux diffuseurs le droit de ne verser à Ré:Sonne que 100 $ de redevances sur leur première tranche de 1,25 million de dollars de « recettes publicitaires » annuelles.

XI. TARIFS FINAUX HOMOLOGUÉS ET REDEVANCES GÉNÉRÉES

[368] Les tableaux à l’annexe B résument les taux que nous homologuons pour toutes les sociétés de gestion.

[369] À l’aide de données financières provenant de la pièce Collectives-4, annexe Q, pour l’année 2011 et des relevés financiers du CRTC à l’égard de la radio commerciale, [171] nous estimons que pour l’année 2013, les taux que nous homologuons généreront quelque 93,5 millions de dollars en redevances pour l’ensemble des sociétés de gestion. Cette estimation reflète les taux inchangés de la SOCAN et de Ré:Sonne de même que les taux pour la reproduction auxquels la réduction générale est appliquée, mais ne reflète pas la réduction additionnelle potentielle à l’égard des reproductions éphémères. L’estimation tient également compte du paiement réduit de 100 $ par année versé à Ré:Sonne sur la première tranche de 1,25 million de dollars de recettes publicitaires. Du montant total, environ 55 millions de dollars iront à la SOCAN, 18 millions de dollars à Ré:Sonne, 10 millions de dollars à CSI, 10 millions de dollars à Connect/SOPROQ et 200 000 $ à Artisti.

[370] D’après les mêmes données financières, la réduction générale appliquée aux taux pour la reproduction se traduit par une diminution d’environ 5,6 millions de dollars des redevances totales versées par les stations de radio. Les stations de radio pourront bénéficier d’autres réductions de redevances dans la mesure où elles se prévaudront de la licence générale modifiée. Dans ce cas, la réduction maximale additionnelle de redevances qui pourrait en résulter est d’environ 7 millions de dollars.

[371] Toujours selon les mêmes données, les revenus totaux des stations de radio commerciale s’élèvent à un peu plus de 1,5 milliard de dollars pour 2011. Comme les redevances atteignent 93 millions de dollars, le taux de redevances totales effectif des stations de radio est de 5,95 pour cent. Il s’agit de la mesure de la proportion des revenus qui est payée en redevances à l’ensemble des sociétés de gestion, en tenant compte des taux inférieurs pour les stations à faibles revenus et celles qui utilisent peu de musique, ainsi que du paiement réduit de 100 $ pour Ré:Sonne.

XII. LIBELLÉ DU TARIF

A. « Revenus bruts »

[372] Comme nous l’avons mentionné ci-dessus à la partie II, les sociétés de gestion ont demandé à ce que la définition de revenus bruts soit modifiée de manière à comprendre explicitement la valeur du troc et de la publicité réciproque de même que les recettes publicitaires d’agence. Selon les sociétés de gestion, la modification est nécessaire pour les raisons suivantes :

[TRADUCTION] Selon ce que la SOCAN a découvert durant les audits de deux groupes de stations, bien que la plupart des stations incluent la valeur de la publicité réciproque dans les revenus bruts de la station aux fins du calcul du tarif de la SOCAN, certaines stations n’ont pas compris que la juste valeur de la publicité réciproque, des échanges et du troc devait être incluse. [172]

[373] L’ACR a déclaré qu’elle ne contestait pas l’inclusion de la valeur de la publicité réciproque; elle veut toutefois s’assurer que la modification de la définition n’entraînera pas l’inclusion d’autres sources de revenus. En outre, allègue l’ACR, les éléments de preuve montrent qu’une telle modification n’est pas nécessaire, car la majorité des diffuseurs incluent déjà ces revenus dans leurs calculs. [173]

[374] Néanmoins, si la définition de « revenus bruts » doit être modifiée, l’ACR propose qu’elle le soit de la manière suivante :

[TRADUCTION] « revenus bruts » s’entend des sommes brutes payées par toute personne pour l’utilisation d’un ou de plusieurs services ou d’une ou de plusieurs installations de radiodiffusion offerts par l’exploitant d’une station, y compris la valeur de tout bien ou service fourni par toute personne en échange de l’utilisation de ces services ou de ces installations et la juste valeur marchande de toute contrepartie non monétaire (p. ex. troc ou publicité réciproque), mais à l’exclusion de ce qui suit […] [174]

[375] Comme nous l’avons indiqué ci-dessus, la SOCAN a accepté ce libellé. [175]

[376] Nous estimons que ce libellé est acceptable. La définition figurant dans le tarif est modifiée de manière à intégrer une formulation équivalente.

B. « À des fins privées ou domestiques »

[377] Les projets de tarifs de la SOCAN et de Ré:Sonne permettraient aux stations de radio commerciale de communiquer au public par télécommunication les œuvres et les enregistrements sonores publiés « à des fins privées ou domestiques », dans le cadre de leurs activités de diffusion hertzienne. Par exemple, la SOCAN a proposé le libellé suivant :

[TRADUCTION] 3. (1) Le présent tarif établit les redevances payables chaque mois par une station de radio commerciale pour la communication au public par télécommunication, par radiodiffusion hertzienne et à des fins privées ou domestiques, d’œuvres musicales et dramatico-musicales faisant partie du répertoire de la SOCAN et d’enregistrements sonores publiés constitués d’œuvres musicales et de prestations de telles œuvres faisant partie du répertoire de RÉ:SONNE. [non souligné dans l’original]

[378] Signalons que, dans le passé, les tarifs ne comprenaient pas toujours une telle restriction. Voir, par exemple, SCGDV (1998, 1999, 2000, 2001 et 2002). Des tarifs ultérieurs, comme le Tarif pour la radio commerciale (2008) [176] et le Tarif pour la radio commerciale (2010) [177] comprenaient cette restriction. Les tarifs antérieurs de la SOCAN à l’égard de la radio commerciale font référence aux fins privées ou domestiques.

[379] Pour les motifs exposés ci-dessous, nous n’inclurons pas ce libellé dans le tarif que nous homologuons.

[380] Tout d’abord, d’un point de vue grammatical, cette restriction est ambigüe au regard de ceux à qui elle s’applique. Selon une interprétation possible, elle pourrait s’appliquer à la station de radio commerciale. Ce n’est manifestement pas l’intention de cette disposition : le radiodiffuseur utilise ces communications à des fins publiques et commerciales. Le libellé semble donc restreindre la licence aux communications qui serviront à des fins privées ou domestiques.

[381] Voilà le principal problème causé par une telle restriction : les radiodiffusions commerciales par ondes hertziennes sont, par leur nature même, transmises sans discrimination. Quiconque dispose d’un récepteur ou d’un appareil radio se trouvant dans le champ de radiodiffusion de la station de radio peut recevoir le signal de radiodiffusion, et donc entendre les enregistrements sonores – peu importe l’utilisation qui en est faite.

[382] Le radiodiffuseur n’a aucun moyen de restreindre ni de contrôler l’utilisation qui sera faite de sa diffusion, ni même de savoir quelle utilisation en sera faite. De plus, les revenus d’une station de radio dépendent généralement du nombre de ses auditeurs, que ces auditeurs se trouvent dans une situation privée ou domestique ou non. Comme nous l’avons vu ci-dessus à la partie IX, les redevances que versent les stations de radio sont calculées sans que cette restriction n’entre en ligne de compte.

[383] La restriction est donc fictive : non seulement les stations de radio ne limitent-elles pas leurs radiodiffusions « à des fins privées ou domestiques », mais les redevances qu’elles versent sont calculées d’une manière étroitement liée à un auditoire qui comprend ceux qui utilisent les enregistrements sonores à des fins autres que simplement privées ou domestiques.

[384] Par conséquent, la partie pertinente du sous-alinéa 3(1)a)(i) du tarif sera libellée ainsi :

pour la communication au public par télécommunication au Canada d’œuvres musicales ou dramatico-musicales faisant partie du répertoire de la SOCAN et d’enregistrements sonores publiés constitués d’œuvres musicales et de prestations de telles œuvres faisant partie du répertoire de Ré:Sonne […]

[385] Cette modification du libellé du tarif ne modifie pas les activités visées par le tarif; elle ne fait qu’illustrer la réalité.

C. Renseignements sur l’utilisation de la musique

[386] Aux termes du Tarif pour la radio commerciale (2010), les stations de radio doivent fournir :

la date et l’heure de sa diffusion, le titre de l’œuvre, le titre de l’album, la maison de disques, le nom de l’auteur, celui du compositeur, celui de l’interprète ou du groupe d’interprètes, la durée d’exécution, en minutes et secondes [178] aux sociétés de gestion pertinentes qui en font la demande. D’autres renseignements, à savoir le code-barres (UPC) de l’album et le code international normalisé des enregistrements (CINE) de l’enregistrement sonore duquel vient l’œuvre musicale, doivent être fournis seulement dans la mesure du possible. [179]

[387] De plus, ces renseignements doivent être fournis à l’égard de 28 jours par année seulement. Il s’agit d’une hausse par rapport aux exigences en matière de rapports contenues dans le Tarif pour la radio commerciale (2008), [180] selon lesquelles les renseignements devaient être fournis à l’égard de 14 jours par année seulement.

[388] Dans la présente instance, les sociétés de gestion ont proposé que les stations de radio fournissent d’autres renseignements (le numéro de catalogue de l’album, le numéro de piste sur l’album, la durée de l’enregistrement sonore, le type d’utilisation, la question de savoir si la piste est un enregistrement sonore publié et les feuilles de minutage dans le cas de la programmation en souscription) et que les renseignements fournis couvrent chaque jour de l’année. [181]

i. Renseignements devant être fournis

[389] Les sociétés de gestion soutiennent que les renseignements additionnels sont nécessaires, bien qu’ils ne soient pas tous indispensables pour identifier chaque piste. Néanmoins, [TRADUCTION] « le fait de disposer de catégories de renseignements additionnelles accroît la probabilité que chaque société de gestion puisse dûment identifier l’enregistrement sonore particulier et, le cas échéant, la ou les œuvres musicales et les prestations de telles œuvres qu’il contient ». [182]

[390] L’ACR soutient que

[TRADUCTION] les radiodiffuseurs ne peuvent être tenus de fournir des renseignements qui ne leur ont pas été communiqués et qu’ils n’ont pas. La vaste majorité des radiodiffuseurs obtiennent leur musique du système DMDS, et ces catégories de renseignements sur l’utilisation de la musique ne sont pas toutes transmises avec les chansons lorsqu’elles sont obtenues du système DMDS. Cela est particulièrement vrai dans le cas du code-barres et du CINE. Le système DMDS est un service offert par les maisons de disques, lesquelles sont membres d’AVLA, et indirectement de Ré:Sonne. Les stations de radio ne devraient pas être tenues de fournir aux sociétés de gestion des renseignements que les membres des sociétés de gestion ont eux-mêmes omis de transmettre au départ.

De plus, quand les stations obtiennent des pistes individuelles ou des parutions qui ne font pas partie d’un album, comme c’est souvent le cas en cette époque d’enregistrement et de production de musique numérique, il se peut même qu’il n’y ait pas de numéro de catalogue pour l’album ni de numéro de piste sur l’album parce qu’il n’y a pas d’album. Par ailleurs, en raison de l’environnement musical numérique, il peut être difficile pour une station de radio de déterminer si une piste est un « enregistrement sonore publié », car ce terme a une définition juridique qui peut ne pas être évidente pour l’exploitant d’une station de radio. [183]

[391] Nous reconnaissons qu’une station de radio ne peut fournir les renseignements qu’elle n’a pas, et nous n’estimons pas qu’il serait raisonnable qu’une station de radio ait à faire des recherches pour trouver de tels renseignements, ou tente de tirer des conclusions juridiques sur la question de savoir si un enregistrement sonore est « publié » ou non, au sens de la Loi. Par conséquent, l’obligation de fournir les renseignements demeurera sous réserve que ces renseignements soient fournis « lorsque disponibles ».

[392] CSI allègue que la norme consistant à fournir les renseignements « lorsque disponibles » est insuffisante, soulignant des cas où les stations de radio n’avaient pas fourni les codes-barres et les CINE alors qu’elles disposaient de ces renseignements. [184]

[393] Toutefois, comme ces renseignements ne sont pas toujours disponibles, aucun moyen concret ne permettrait de rendre leur production obligatoire. Si les stations de radio ne fournissent pas les renseignements auxquels elles ont aisément accès, il s’agit alors d’un problème de conformité aux modalités du tarif, et non de libellé.

[394] Nous voulons souligner ici que la norme consistant à fournir les renseignements « lorsque disponibles » n’est pas censée, et ne devrait pas, être interprétée comme une norme conférant un quelconque degré de latitude à la personne ou à l’entité ayant l’obligation de fournir les renseignements sur l’utilisation de la musique. Tous les renseignements énumérés qu’une station de radio possède ou contrôle, peu importe sous quelle forme, ou de quelle façon ils ont été obtenus, doivent obligatoirement être fournis pour que l’exigence établie par la Commission soit effectivement respectée.

[395] À la suite de consultations menées par la Commission auprès des parties, [185] les sociétés de gestion ont conjointement affirmé qu’une disposition sur les obligations de rapports relatives à l’utilisation de la musique qui ferait référence à l’expression « lorsque disponibles » « [TRADUCTION] rendrait non obligatoire toute l’information relative à l’utilisation de musique », « [TRADUCTION] constituerait un relâchement significatif des exigences contenues dans le tarif présentement homologué et menacerait la possibilité pour les ayants droit de recevoir les redevances auxquelles ils ont droit ». Ce n’est ni l’intention ni l’effet de la disposition telle qu’elle apparaît dans le libellé du tarif. Il s’agit de l’opinion partagée par l’ACR qui affirme, dans sa réponse aux consultations de la Commission, que « [TRADUCTION] [l]’ACR ne conteste pas l’exigence que les stations fournissent toute l’information qu’elles possèdent à l’égard de la musique qu’elles utilisent. L’ACR et ses membres comprennent l’importance de fournir des informations précises sur l’utilisation de musique pour assurer une distribution précise des redevances aux ayants droit ».

[396] Des précisions sont ajoutées au tarif pour mettre en relief le caractère obligatoire des obligations de rapport de toutes les informations disponibles pour les stations de radio.

ii. Nombre de jours couverts par les rapports

[397] Aux termes du tarif actuel, les stations de radio doivent fournir des renseignements sur les enregistrements sonores qu’elles diffusent à l’égard de 28 jours par année. Toutefois, environ 40 pour cent des stations de radio fournissent volontairement des rapports couvrant chaque jour de l’année. [186] Lorsque des rapports couvrant 28 jours seulement sont reçus, les données sur les 28 jours sont majorées et servent d’approximation pour le reste de l’année. [187]

[398] Ré:Sonne complète ces renseignements en achetant des données auprès de Nielsen BDS. [188] Les données produites par Nielsen BDS fournissent une liste séquentielle couvrant l’utilisation de la musique chaque jour de l’année pour quelque 236 stations. Le coût est d’environ 110 000 $ par année. Mme Tay, directrice de la distribution de Ré:Sonne, explique que l’achat des données de Nielsen BDS a commencé en 2010, alors que Ré:Sonne recevait des stations de radio des rapports couvrant seulement 14 jours, et que cette mesure devait être temporaire. Toutefois, comme les systèmes avaient été adaptés pour utiliser les données de Nielsen BDS, et parce que les stations de radio ne produisaient pas toutes des rapports couvrant chaque jour de l’année, l’utilisation des données de Nielsen BDS s’est poursuivie. Mme Tay affirme toutefois qu’il n’est plus possible de continuer à payer 110 000 $ par année. [189]

[399] La création de rapports couvrant une période complète de 365 jours est grandement facilitée par l’utilisation d’un logiciel de programmation, comme MusicMaster ou Selector. D’après les rapports qu’elle reçoit, Ré:Sonne croit qu’environ 80 pour cent des stations de radio utilisent un logiciel de programmation. De ces stations, environ 47 pour cent fournissent des rapports couvrant chaque jour de l’année. [190] Les sociétés de gestion font remarquer que, selon les réponses données par les stations de radio dans le cadre des demandes de renseignements, 90 des 98 stations de radio interrogées utilisent [TRADUCTION] « une certaine forme de logiciel de programmation ». [191] Les sociétés de gestion soutiennent que toutes les stations qui utilisent un logiciel de programmation devraient être en mesure de produire des listes séquentielles couvrant chaque jour de l’année. [192]

[400] Selon l’ACR, [TRADUCTION] « si toutes les stations ayant la capacité technologique de se conformer aux propositions devraient généralement être tenues de le faire, […] une disposition doit être prise pour les stations n’ayant pas les ressources technologiques nécessaires pour se conformer de la manière proposée ». [193] L’ACR affirme également que [TRADUCTION] « les stations de radio parlée n’utilisent pas de logiciel de programmation capable de produire les listes demandées par les sociétés de gestion et ne seraient donc pas en mesure de fournir ces renseignements ». [194] Par conséquent, bien que l’ACR ne s’oppose pas en soi à la disposition prévoyant que soient fournies des listes séquentielles couvrant chaque jour de l’année, elle veut néanmoins que cette exigence ne soit imposée qu’aux stations ayant la capacité technologique de le faire.

[401] Nous sommes également d’avis que le fait de fournir de meilleurs renseignements relativement à la diffusion de la musique peut effectivement se traduire par le versement de paiements plus justes aux titulaires de droits. Un petit échantillon (comme un échantillon couvrant 14 ou 28 jours) favorisera généralement les titulaires de droits dont la musique est diffusée souvent, tandis que les titulaires de droits dont la musique est diffusée moins souvent risquent davantage de ne pas être représentés dans un tel échantillon.

[402] Le témoignage de Mme Tay sur la hausse du nombre de pistes uniques relevées dans une année quand les rapports couvrent un plus grand nombre de jours est très révélateur à cet égard. [195] Abstraction faite des rapports couvrant chaque jour de l’année produits par certaines stations sur une base volontaire et par Nielsen BDS, le nombre de pistes uniques qui seraient vraisemblablement relevées si les rapports exigés devaient couvrir chaque jour de l’année serait environ deux fois plus élevé que lorsque les rapports exigés couvrent 28 jours (c.-à-d. de 100 000 par année environ à 200 000 par année environ).

[403] Il est raisonnable de croire que les stations de radio qui utilisent un logiciel de programmation seraient en mesure de produire facilement des listes séquentielles couvrant chaque jour de l’année sans coûts additionnels importants, étant donné que près de la moitié de ces stations le font déjà volontairement. Les éléments de preuve montrent également que certaines stations qui fournissent déjà des listes séquentielles couvrant chaque jour de l’année n’utilisent pas de logiciels de programmation. À la lumière de ce qui précède, le libellé du tarif sera modifié par l’ajout de l’exigence selon laquelle toutes les stations de radio devront fournir des listes séquentielles couvrant chaque jour de l’année; une période de mise en œuvre progressive de 180 jours sera prévue pour les stations de radio qui n’ont jamais fourni de listes séquentielles couvrant chaque jour de l’année dans le passé et qui ne sont pas en mesure de se conformer immédiatement à cette exigence.

[404] Nous croyons que ce changement, envisagé depuis un certain temps, se traduira par une redistribution plus juste des redevances perçues par les sociétés de gestion.

iii. Pénalités pour rapports tardifs

[405] En ce qui concerne l’imposition de pénalités pour présentation tardive des données financières et des renseignements sur l’utilisation de la musique, telle que proposée par les sociétés de gestion, nous convenons avec l’ACR qu’il s’agit d’une question de conformité et de mise à exécution du tarif, plutôt qu’une question d’homologation du tarif. Comme la Commission l’a déjà fait remarquer dans le passé, les questions d’exécution ne relèvent pas de la compétence de la Commission. [196] Par conséquent, nous n’établirons pas de pénalités pour rapports tardifs dans le tarif que nous homologuons.

D. Communication de renseignements

[406] Les sociétés de gestion proposent des changements aux dispositions en matière de confidentialité pour permettre le partage d’informations confidentielles avec les prestataires de services. Après avoir examiné la preuve, soit les prétentions des parties durant l’audience et les consultations sur le libellé, [197] nous avons décidé d’inclure la possibilité que l’information soit partagée avec les prestataires de services qui sont des « fournisseur[s] de services professionnels dont une société de gestion peut retenir les services aux fins de la réalisation d’une vérification ou de la distribution des redevances aux titulaires de droits ». Le partage de l’information confidentielle est également limité à ce qui est requis par les fournisseurs pour rendre les services pour lesquels ils ont été retenus. Par mesure de protection, un fournisseur de services avec qui des informations confidentielles à l’égard d’une station de radio sont partagées aura à signer une entente de confidentialité avant d’avoir accès à cette information.

E. Dispositions transitoires

[407] Le tarif contient certaines dispositions transitoires nécessaires parce que le tarif prend effet à une date antérieure, [198] et parce que les exigences prévues au tarif en matière de rapports, fondées sur la production de rapports couvrant chaque jour de l’année, ne correspondent pas nécessairement aux pratiques passées des stations de radio visées par le tarif. Les stations de radio ne peuvent être tenues de fournir des renseignements qu’elles n’ont pas conservés ou obtenus. Par ailleurs, pour la plupart des sociétés de gestion, la période d’application du tarif a déjà pris fin. Pour ces motifs, le tarif doit comporter des dispositions transitoires pour tenir compte des stations de radio qui ne sont peut-être pas en mesure de se conformer immédiatement aux exigences concernant les renseignements sur l’utilisation de la musique qui s’appliqueront dorénavant. Nous estimons qu’une période de transition de six mois est suffisante.

F. Autre libellé provenant des consultations

[408] Nous avons examiné toutes les prétentions des parties en réponse aux consultations des parties à l’égard du libellé proposé des définitions et des dispositions administratives du tarif. [199] Nous avons incorporé celles que nous considérons raisonnables et fondées sur la preuve en l’instance. Toutefois, certains changements proposés au libellé équivalaient à des changements inappropriés sur des questions de fond, non conformes aux paramètres établis par la Commission dans son avis de consultation. Ces changements ont été rejetés.

G. Intérêts

[409] Le tarif comprend un tableau qui présente les facteurs d’intérêt multiplicatifs devant être appliqués aux sommes dues par suite de l’homologation du présent tarif. Étant donné que les taux de la SOCAN et de Ré:Sonne ne sont pas modifiés, les facteurs d’intérêt s’appliqueront uniquement à l’égard des redevances versées au titre des taux de CSI, de Connect/SOPROQ et d’Artisti. Les facteurs sont fondés sur le taux d’escompte de la Banque du Canada en vigueur le dernier jour du mois précédent. Les intérêts ne sont pas composés. Les sommes dues pour un mois donné correspondent à la différence entre le montant payé (ou reçu) selon le tarif précédent et le montant devant être payé (ou reçu) par suite du tarif que nous homologuons maintenant. Étant donné que les tarifs que nous homologuons maintenant sont inférieurs dans le cas de certaines sociétés de gestion, les facteurs multiplicatifs s’appliqueront aux sommes dues par ces sociétés de gestion (c.-à-d. sur les paiements versés en trop par les stations de radio).

Le secrétaire général,

Signature

Gilles McDougall

XIII. ANNEXE A

TABLEAU 1 : VALEUR RELATIVE DES TYPES DE COPIES – CALCULS DE M. REITMAN

TYPES DE COPIES

SCORE D’UTILITÉ AJUSTÉ

 

 

(A)

POURCENTAGE DE STATIONS AYANT RECOURS AU TYPE DE COPIE

(B)

UTILITÉ PONDÉRÉE

 

 

 

(C) = (A) × (B)

VALEUR RELATIVE

 

 

 

(D)

Incorporation

7,6

84,5 %

6,4

25,2 %

Évaluation de la musique

7,3

9,6 %

7,0

2,8 %

Système d’automatisation principal

9,8

91,7 %

9,0

35,2 %

Préenregistrement vocal

6,7

26,4 %

1,8

7,0 %

Prestation en direct

5,3

31,0 %

1,6

6,5 %

Diffusion en continu

5,4

3,0 %

0,2

0,6 %

Sauvegarde

6,2

90,8 %

5,6

22,3 %

Copies excédentaires

1,9

5,9 %

0,2

0,4 %

TABLEAU 2 : RÉPARTITION DES REDEVANCES – CALCULS DE MM. BOYER ET CREMIEUX

TYPES DE COPIES

EN TENANT COMPTE DE L’INTERDÉPENDANCE DANS LE CAS DE CONNECT/SOPROQ

EN TENANT COMPTE DE L’INTERDÉPENDANCE DANS LE CAS DE CSI

Incorporation

11,3

10,4

Évaluation de la musique

3,6

3,4

Système d’automatisation principal

68,3

66,9

Préenregistrement vocal

4,9

4,5

Prestation en direct

N/A

3,4

Diffusion en continu

N/A

0,4

Sauvegarde

11,5

10,7

Autres

0,4

0,4

TABLEAU 3 : VALEUR RELATIVE DES TYPES DE COPIES – CALCULS DE LA COMMISSION

TYPES DE COPIES

UTILITÉ

 

(A)

UTILISATION

 

(B)

UTILITÉ PONDÉRÉE

(C) = (A) × (B)

VALEUR RELATIVE

(D)

Incorporation

18,40 %

77,60 %

14,28 %

16,90 %

Évaluation de la musique

0,86 %

7,26 %

0,06 %

0,07 %

Système d’automatisation principal

41,75 %

98,73 %

41,22 %

48,78 %

Préenregistrement vocal

14,00 %

57,11 %

8,00 %

9,46 %

Prestation en direct

3,92 %

30,98 %

1,22 %

1,44 %

Diffusion en continu

1,11 %

3,17 %

0,04 %

0,04 %

Sauvegarde

19,95 %

98,73 %

19,70 %

23,31 %

TABLEAU 4 : NOUVEAUX TAUX DE BASE DE CSI

CATÉGORIE

TAUX DE DÉPART DE 2010 DE CSI

NOUVEAUX TAUX DE BASE DE CSI

Stations utilisant peu de musique

Pour des revenus :

  • ne dépassant pas 625 000 $
  • supérieurs à 625 000 $ mais ne dépassant pas 1,25 million de dollars
  • supérieurs à 1,25 million de dollars

 

 

0,135 %

 

0,259 %

0,434 %

 

 

0,103 %

 

0,198 %

0,332 %

Autres stations

Pour des revenus :

  • ne dépassant pas 625 000 $
  • supérieurs à 625 000 $ mais ne dépassant pas 1,25 million de dollars
  • supérieurs à 1,25 million de dollars

 

 

0,304 %

 

0,597 %

1,238 %

 

 

0,233 %

 

0,457 %

0,948 %

TABLEAU 5 : VALEUR RELATIVE DES TYPES DE COPIES DANS LE CAS DE CONNECT/SOPROQ –CALCULS DE LA COMMISSION

TYPES DE COPIES

UTILITÉ

 

(A)

UTILISATION

 

(B)

UTILITÉ PONDÉRÉE

(C) = (A) × (B)

VALEUR RELATIVE

(D)

Incorporation

18,40 %

77,60 %

14,28 %

17,15 %

Évaluation de la musique

0,86 %

7,26 %

0,06 %

0,07 %

Système d’automatisation principal

41,75 %

98,73 %

41,22 %

49,51 %

Préenregistrement vocal

14,00 %

57,11 %

8,00 %

9,61 %

Sauvegarde

19,95 %

98,73 %

19,70 %

23,66 %

TABLEAU 6 : NOUVEAUX TAUX DE BASE CONNECT/SOPROQ

CATÉGORIE

TAUX DE CONNECT/ SOPROQ

HOMOLOGUÉS EN 2010

TAUX DE 2010 DE CONNECT/ SOPROQ

CORRIGÉS

NOUVEAUX TAUX DE BASE DE

CONNECT/SOPROQ

 

(1 jan. 2012-

6 nov. 2012)

(7 nov. 2012-

31 déc. 2017)

Stations utilisant peu de musique

 

 

 

 

Pour des revenus :

 

 

 

 

  • ne dépassant pas 625 000 $

0,113 %

0,130 %

0,134 %

0,103 %

  • supérieurs à 625 000 $ mais ne dépassant pas 1,25 million de dollars

0,234 %

0,249 %

0,257 %

0,196 %

  • supérieurs à 1,25 million de dollars

0,405 %

0,417 %

0,431 %

0,329 %

Autres stations

 

 

 

 

Pour des revenus :

 

 

 

 

  • ne dépassant pas 625 000 $

0,278 %

0,292 %

0,302 %

0,230 %

  • supérieurs à 625 000 $ mais ne dépassant pas 1,25 million de dollars

0,564 %

0,574 %

0,593 %

0,452 %

  • supérieurs à 1,25 million de dollars

1,192 %

1,192 %

1,231 %

0,940 %

TABLEAU 7 : NOUVEAUX TAUX DE BASE D’ARTISTI

CATÉGORIE

TAUX D’ARTISTI DE 2010

NOUVEAUX TAUX DE BASE

D’ARTISTI

 

 

(1 jan. 2012-

6 nov. 2012)

(7 nov. 2012-

31 déc. 2014)

Stations utilisant peu de musique

 

 

 

Pour des revenus :

  • ne dépassant pas 625 000 $
  • supérieurs à 625 000 $ mais ne dépassant pas 1,25 million de dollars
  • supérieurs à 1,25 million de dollars

 

0,003 %

0,005 %

 

0,008 %

 

0,003 %

0,005 %

 

0,009 %

 

0,003 %

0,004 %

 

0,007 %

Autres stations

 

 

 

Pour des revenus :

 

 

 

  • ne dépassant pas 625 000 $

0,006 %

0,007 %

0,005 %

  • supérieurs à 625 000 $ mais ne dépassant pas 1,25 million de dollars

0,011 %

0,012 %

0,009 %

  • supérieurs à 1,25 million de dollars

0,023 %

0,025 %

0,019 %

TABLEAU 8 : NOUVEAUX TAUX DE LA SOCAN ET DE RÉ:SONNE

CATÉGORIE

TAUX DE LA

SOCAN

TAUX DE

RÉ:SONNE

Stations utilisant peu de musique

Pour des revenus :

  • ne dépassant pas 625 000 $
  • supérieurs à 625 000 $ mais ne dépassant pas 1,25 million de dollars
  • supérieurs à 1,25 million de dollars

 

 

1,5 %

1,5 %

 

1,5 %

 

 

0,75 %

0,75 %

 

0,75 %

Autres stations

Pour des revenus :

  • ne dépassant pas 625 000 $
  • supérieurs à 625 000 $ mais ne dépassant pas 1,25 million de dollars
  • supérieurs à 1,25 million de dollars

 

 

3,2 %

3,2 %

 

4,4 %

 

 

1,44 %

1,44 %

 

2,1 %

XIV. ANNEXE B

Taux de la SOCAN, de Ré:Sonne et de CSI homologués par la Commission, en pourcentage des revenus bruts

 

SOCAN

Ré:Sonne

CSI

 

(2011-2013)

(2012-2014)

(7 nov. 2012-

31 déc. 2013)

Stations utilisant peu de musique

 

 

 

Pour des revenus :

  • ne dépassant pas 625 000 $
  • supérieurs à 625 000 $ mais ne dépassant pas 1,25 million de dollars
  • supérieurs à 1,25 million de dollars

 

1,5

1,5

 

1,5

 

0,75

0,75

 

0,75

 

(0,103 × X)

(0,198 × X)

 

(0,332 × X)

Autres stations

 

 

 

Pour des revenus :

 

 

 

  • ne dépassant pas 625 000 $

3,2

1,44

(0,233 × X)

  • supérieurs à 625 000 $ mais ne dépassant pas 1,25 million de dollars

3,2

1,44

(0,457 × X)

  • supérieurs à 1,25 million de dollars

4,4

2,1

(0.948 × X)

où le coefficient de réduction X = 1 - (0,363 × (A ÷ B)), et où

B est le nombre total de copies d’incorporation, de copies de prestation en direct et de copies de préenregistrement vocal effectuées par la station de radio, et

A est le nombre réel de ces copies qui sont conformes aux exigences de l’article 30.9 de la Loi.

Taux de Connect/SOPROQ et d’Artisti homologués par la Commission, en pourcentage des revenus bruts

 

Connect/SOPROQ

Artisti

 

(1 jan. 2012-

6 nov. 2012)

(7 nov. 2012-

31 déc. 2017)

(1 jan. 2012-

6 nov. 2012)

(7 nov. 2012-

31 déc. 2014)

Stations utilisant peu de musique

 

 

 

 

Pour des revenus :

  • ne dépassant pas 625 000 $
  • supérieurs à 625 000 $ mais ne dépassant pas 1,25 million de dollars
  • supérieurs à 1,25 million de dollars

 

0,134

 

0,257

 

 

0,431

 

(0,103 × Y)

 

(0,196 × Y)

 

 

(0,329 × Y)

 

0,003

 

0,005

 

 

0,009

 

(0,003 × Y)

 

(0,004 × Y)

 

 

(0,007 × Y)

Autres stations

 

 

 

 

Pour des revenus :

  • ne dépassant pas 625 000 $
  • supérieurs à 625 000 $ mais ne dépassant pas 1,25 million de dollars
  • supérieurs à 1,25 million de dollars

 

0,302

0,593

 

 

 

1,231

 

(0,230 × Y)

(0,452 × Y)

 

 

 

(0,940 × Y)

 

0,007

0,012

 

 

 

0,025

 

(0,005 × Y)

(0,009 × Y)

 

 

 

(0,019 × Y)

où le coefficient de réduction Y = 1 - (0,351 × (C ÷ D)), et où

D est le nombre total de copies d’incorporation et de copies de préenregistrement vocal effectuées par la station de radio, et

C est le nombre réel de ces copies qui sont conformes aux exigences de l’article 30.9 de la Loi.



[1] Pour des explications détaillées sur ces droits, voir Tarif pour la radio commerciale (SOCAN : 2008-2010; Ré:Sonne : 2008-2011; CSI : 2008-2012; AVLA/SOPROQ : 2008-2011; ArtistI : 2009-2011) (9 juillet 2010), décision de la Commission du droit d’auteur, aux para 9 à 13. [Radio commerciale (2010)]

[2] Loi sur le droit d’auteur, L.R.C. 1985, ch. C-42.

[3] Le 3 mars 2014, l’Agence pour les licences de production audiovisuelle (AVLA) est devenue Connect Music Licensing Service Inc. Nous utilisons « Connect » dans les présents motifs même lorsqu’il est question d’événements antérieurs au changement de nom d’AVLA.

[4] Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique c. Bell Canada, 2012 CSC 36, [2012] 2 RCS 326. [Bell]

[5] Loi sur la modernisation du droit d’auteur, L.C. 2012, ch. 20 (sanctionnée le 29 juin 2012). [LMDA]

[6] Demande de redressement provisoire et permanent de l’Association canadienne des radiodiffuseurs, 7 novembre 2012 : http://www.cb-cda.gc.ca/avis-notice/active/2012/commercialradio-12112012.pdf (en anglais seulement).

[7] Tarif pour la radio commerciale (SOCAN : 2008-2010; Ré:Sonne : 2008-2011; CSI : 2008-2012; AVLA/ SOPROQ : 2008-2011; ArtistI : 2009-2011) (21 décembre 2012), décision provisoire de la Commission du droit d’auteur.

[8] Ibid aux para 6−13.

[9] En raison de la décision de la Commission rendant provisoire à compter du 7 novembre 2012 le Tarif pour la radio commerciale pour autant qu’il vise CSI (2008-2012), la période du 7 novembre au 31 décembre 2012 est aussi visée en l’espèce.

[10] Supra note 7 au para 17.

[11] Supra note 7 au para 19.

[12] Pièce Collectives-1 au para 63.

[13] Transcriptions, vol. 1 à la p 26:2−11.

[14] Pièce CAB-1A au para 44 (souligné dans l’original).

[15] Radio commerciale (2010), supra note 1 aux para 247−261; Pièce AVLA/ SOPROQ-1 aux para 3 et 8−25.

[16] Radio commerciale (2010), supra note 1 aux para 99, 241−242.

[17] Pièce Collectives-4: Tiered Royalties: Comparison of the Group and Station Rate Base Models, par M. Marcel Boyer et Mme Lisa Pinheiro, 9 août 2013.

[18] Pièce Collectives-3: Report on Radio Technology by Station Groups and Networks, par Michael J. Murphy, 9 août 2013.

[19] Radio commerciale (2010), supra note 1 aux para 293 et 294.

[20] Un ratio de concentration est une mesure de la production totale d’un certain nombre d’entreprises dans une industrie donnée. Les ratios de concentration servent généralement à déterminer la part de marché des principales entreprises dans l’industrie et représentent la mesure dans laquelle l’industrie est oligopolistique.

[21] Tarif des redevances à percevoir par la SOCAN (2008-2010), Ré:Sonne (2008-2011), CSI (2008-2012), AVLA/SOPROQ (2008-2011) et ArtistI (2009-2011) à l’égard des stations de radio commerciale, Gazette du Canada, 10 juillet 2010. [Tarif pour la radio commerciale (2010)]

[22] Pièce AVLA/SOPROQ-CSI-66: Reply Report on Radio Technology used by Station Groups and Networks, par M. Michael J. Murphy, 3 octobre 2013.

[23] Pièce CAB-5: Economic Perspectives on the Use of an Ownership Group Tariff Rate Base for Commercial Radio Stations, par M. David Reitman, 17 septembre 2013.

[24] Pièce CAB-4A au para 7.

[25] Pièce CAB-6 au para 18.

[26] Dans le cadre de ce témoignage, ce terme fait référence aux experts-conseils et aux fournisseurs de services externes auxquels Ré:Sonne a recours pour l’aider à remplir son mandat, comme Erin Research. Voir Pièce Re:Sound-1A au para 66; Pièce Re:Sound-3 au para 9.

[27] Avis de la Commission (18 février 2014).

[28] Pièce Re:Sound-1 à la p 12; Pièce Re:Sound-2 au para 27, citant le directeur des finances de Ré:Sonne.

[29] Tarif pour la radio commerciale (2010), supra note 21.

[30] Pièce CAB-2: Report on the Economic Value of Reproductions of Music to Commercial Radio Stations, par M. David Reitman, 9 août 2013.

[31] Voir partie IV ci-dessous pour la liste des types de copies pris en compte.

[32] Il s’agit de sommes approximatives. Pour les calculs exacts, voir Pièce Collectives-38 aux pp 9 et 10.

[33] Pièce CAB-11 au para 63.

[34] Pièce AVLA/SOPROQ-CSI-2 : Exceptions in Respect of Temporary Reproductions for Technological Process in Selected Countries, par Mme Silke von Lewinski, déposé le 20 septembre 2013.

[35] Mme von Lewinski fait référence à l’exception relative aux enregistrements éphémères prévue à l’article 11bis (3) de la Convention de Berne et à l’alinéa 4) de l’article premier du Traité de l’OMPI sur le droit d’auteur (WCT); voir Pièce AVLA/SOPROQ/CSI-2 au para 22.

[36] Transcriptions (confidentielles), vol. 7 aux pp 479:12 à 481:14.

[37] Pièce AVLA/SOPROQ-CSI-3: Report on Radio Technology and Workflow, par M. Michael J. Murphy, 20 septembre 2013.

[38] Supra note 18.

[39] Transcriptions, vol. 7 aux pp 813:15 à 814:22.

[40] Pièce CAB-11 au para 9.

[41] Pièce AVLA/SOPROQ-CSI-3 aux para 45, 116 et 126; Pièce AVLA/ SOPROQ-CSI-71 à la diapositive 10; Transcriptions, vol. 9 aux pp 1223:22 à 1224:13.

[42] Loi sur le droit d’auteur, supra note 2 aux para 19(1), 19(1.1) et 19(1.2).

[43] Loi sur le droit d’auteur, L.R.C. 1985, ch. C-42, al. 20b) (modifiée par 1994, ch. 47, art. 59; 1997, ch. 24, art. 14; 2001, ch. 27, art. 238), dans la version qui était en vigueur le 6 novembre 2012.

[44] Déclaration limitant le droit à rémunération équitable pour certains pays parties à la Convention de Rome, DORS/99-143 (23 mars 1999) : http://www.cb-cda.gc.ca/act-loi/regulations-reglements/99143-e.pdf (abrogé le 13 août 2014 par DORS/2014-181, art. 8). [Déclaration de 1999]

[45] Loi sur le droit d’auteur, supra note 2, au para 20(1.2); LMDA, supra note 5 au para 20(2) (non souligné dans l’original). Voir la définition de « pays partie au traité de l’OIEP » dans la Loi sur le droit d’auteur, supra note 2, art. 2 (« “pays partie au traité de l’OIEP” s’entend d’un pays partie au Traité de l’OMPI sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes, adopté à Genève le 20 décembre 1996 »).

[46] Décret fixant plusieurs dates d’entrée en vigueur de diverses dispositions de la loi, TR/2012-85 (7 novembre 2012) : http://canadagazette.gc.ca/rp-pr/p2/2012/2012-11-07/html/si-tr85-fra.html.

[47] Déclaration limitant le droit à rémunération équitable pour certains pays parties à la Convention de Rome ou au Traité de l’OIEP, DORS/2014-181 (14 juillet 2014), http://www.gazette.gc.ca/rp-pr/p2/2014/2014-07-30/pdf/g2-14816.pdf. [Déclaration de 2014]

[48] Ceci a été confirmé par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Ré:Sonne c. Conseil du secteur du conditionnement physique du Canada, 2014, CAF 48, le juge Evans (« [L]a plupart des […] régimes prévus par la Loi ne permettent à une société de gestion de recouvrer des redevances qu’à l’égard des enregistrements inclus dans son répertoire […] [U]ne société de gestion perçoit des redevances pour le compte des personnes qui l’ont autorisée d’une manière quelconque à procéder en leur nom à la gestion collective des droits […] [A]ux termes de l’article 67 de la Loi, les sociétés de gestion sont tenues de répondre aux demandes de renseignements du public concernant leur répertoire de prestations d’artistes-interprètes et d’enregistrements sonores d’exécution courante. Il est difficile de concevoir comment cette obligation pourrait être exécutée si, comme le soutient Ré:Sonne, son répertoire comprend l’ensemble des exécutions et des enregistrements donnant droit à une rémunération équitable […] [Enfin], il serait anormal qu’une société de gestion puisse percevoir des redevances pour tous les enregistrements admissibles utilisés dans un contexte donné, mais ne puisse les répartir qu’entre les artistes-interprètes et producteurs de son répertoire et ceux qu’elle serait en mesure de repérer ».) aux para 92 à 111.

[49] SCGDV – Tarif 1.A 1998-2002 (13 août 1999) décision de la Commission du droit d’auteur.

[50] Ibid à la p 21.

[51] Déclaration de 2014, supra note 47, para 2(2) (non souligné dans l’original).

[52] Loi sur le droit d’auteur, supra note 2, au para 3(1).

[53] Pièce CAB-11 au para 29.

[54] En ce qui concerne les prestations d’artistes-interprètes et les enregistrements sonores, les articles 15 et 18 de la Loi prévoient un critère de la « partie importante » similaire.

[55] Pièce AVLA/SOPROQ-2.

[56] Radio commerciale (2010), supra note 1 au para 156.

[57] Pièce AVLA/SOPROQ-1 au para 14; Pièce AVLA/SOPROQ-3.

[58] Radio commerciale (2010), supra note 1 au para 252.

[59] Pièce AVLA/SOPROQ-CSI-75 au para 14.

[60] Pièce CAB-11 aux para 64 et 65 (notes de bas de page omises).

[61] Ibid au para 63.

[62] Ibid.

[63] Ibid aux para 63 à 65.

[64] Pièce CAB-11 aux para 27 et 28.

[65] Pièce AVLA/SOPROQ-CSI-75 au para 59.

[66] CCH Canadienne Ltée c. Barreau du Haut-Canada, 2004 CSC 13, [2004] 1 RCS 339. [CCH]

[67] Voir Bell, supra note 4 au para 13.

[68] CCH, supra note 60 au para 54.

[69] Bell, supra note 4 au para 27.

[70] CCH, supra note 66 au para 54.

[71] Access Copyright – Gouvernements provinciaux et territoriaux (2005-2014) (22 mai 2015), décision de la Commission du droit d’auteur aux para 258 et 259.

[72] CCH, supra, note 66, la juge en chef McLachlin (« Il est possible d’utiliser équitablement une œuvre entière. Comme le signale Vaver, […] il peut n’y avoir aucune autre manière de critiquer certains types d’œuvre (p. ex. une photographie) ou d’en faire le compte rendu. L’ampleur de l’extrait peut aussi être plus ou moins équitable selon la fin poursuivie. Par exemple, aux fins de recherche ou d’étude privée, il peut être essentiel de reproduire en entier un exposé universitaire ou une décision de justice. » au para 56).

[73] Pièce CAB-11 au para 44.

[74] Voir, p. ex, Transcriptions, vol. 9 aux pp 1207:18 à 1208:13 et 1218:15 à 1222:3 (témoignage de M. Murphy sur l’utilisation des copies d’évaluation de la musique).

[75] CCH, supra note 66 au para 55.

[76] Pièce CAB-11 au para 44.

[77] CCH, supra note 66 au para 57.

[78] Bell, supra note 4 aux para 44 à 46.

[79] Ibid, la juge Abella (« [L]orsqu’il s’agit d’aider le consommateur à trouver des pièces musicales qui lui plaisent, l’échange constitue une solution coûteuse, complexe sur le plan technologique et défavorable à l’essor du secteur d’activité en cause. ») au para 46.

[80] Ibid, la juge Abella (« [A]ucune des solutions de rechange proposées ne permet au consommateur, comme seule le fait l’écoute préalable, d’entendre l’œuvre musicale, du moins en partie. ») au para 46.

[81] Pièce AVLA/SOPROQ-CSI-75 au para 60.

[82] Pièce CAB-2, au para 33 tableau 1 (24,5 pour cent des stations utilisent des copies d’évaluation de la musique).

[83] Bell, supra note 4 au para 47.

[84] Voir p ex., Pièce CAB-3 aux para 9 à 12 ([TRADUCTION] « À la fin des années 1980, [certaines] stations […] utilisaient des disques vinyle directement, de sorte qu’ils s’abîmaient et devaient être constamment remplacés par de nouveaux disques dont le son était moins altéré par les rayures. Les maisons de disques envoyaient généralement plusieurs copies à cette fin. […] Au début de l’ère de DMDS, des CD étaient généralement envoyés en complément des pistes de DMDS […] »).

[85] Ibid.

[86] Ibid aux para 20 à 24.

[87] Pièce CAB-11 au para 37.

[88] Industrie Canada, Fiche d’information sur la Loi sur la modernisation du droit d’auteur (29 septembre 2011) : https://www.ic.gc.ca/eic/site/064.nsf/fra/06803.html.

[89] Voir p. ex., Loi sur le droit d’auteur, supra note 2 aux para 29.22(4), 29.24(3), 29.7(2), 30.01(5), 30.01(6) et 30.1(3).

[90] Pièce CAB-11 au para 36.

[91] Ibid ([TRADUCTION] « Durant les discussions qui ont mené à la modification de la Loi sur le droit d’auteur, certaines des sociétés de gestion du droit de reproduction ont précisément demandé à ce que l’article 30.71 soit modifié de sorte qu’il établisse clairement qu’un processus admissible doit être transitoire ou de courte durée. Le législateur a refusé de modifier ainsi l’article, ce qui indique qu’il n’avait pas l’intention de restreindre le droit de l’utilisateur à des processus technologiques exclusivement de nature transitoire. »).

[92] Pièce CAB-11 au para 5.

[93] Pièce CAB-12 au para 28.

[94] Pièce AVLA/SOPROQ-CSI-75 au para 3.

[95] Ibid au para 16.

[96] Ibid au para 5.

[97] Transcriptions, vol. 7 aux pp 499 et 500.

[98] Pièce AVLA/SOPROQ-CSI-3 aux pp 48 et 49.

[99] Pièce Re:Sound-1 au para 4.

[100] Ibid au para 6.

[101] Pièce CAB-11 aux para 133 et 134.

[102] Canadian Performing Society v. Ford Hotel, [1935] 2 D.L.R. 391; Buck v. Jewell-La Salle Realty Co. (1931), 283 U.S. 191; Performing Rights Society Ltd. v. Hammond’s Bradford Brewery Co., [1934] Ch. 121.

[103] Loi modifiant la Loi modificative du droit d’auteur, 1931, et la Loi du droit d’auteur, L.C. 1938, ch. 27, 2 George VI, art. 4.

[104] Vigneux v. Canadian Performing Right Society Ltd., [1943] S.C.R. 348.

[105] Ibid à la p. 354.

[106] Pièce CAB-11 au para 145.

[107] Loi de mise en œuvre de l’Accord de libre-échange nord-américain, L.C. 1993, ch. 44.

[108] Harold G. Fox, Canadian Law of Copyright and Industrial Designs, 2e éd., Toronto, Carswell, 1967 aux pp 407 et 408.

[109] Pièce CAB-11 au para 142.

[110] Pièce CAB-Compendia, onglet 35 : lettre de Paul Spurgeon, vice-président, Affaires juridiques et chef du Contentieux à la SOCAN à Claude Majeau, secrétaire général de la Commission du droit d’auteur du Canada (4 février 2005).

[111] Ibid à la p 4.

[112] Ibid.

[113] Ibid.

[114] Pièce CAB-11 aux para 142 et 143.

[115] SOCAN, réponse à l’avis de la Commission (10 octobre 2013) au sujet du paragraphe 69(2) (8 novembre 2013).

[116] Loi d’interprétation, L.R.C. 1985, ch. I-21, art. 12.

[117] Voir par exemple : « L’exception prévue pour les verrous réseau sur les cellulaires sera également appréciée par la population. Les Canadiens auront le droit de déverrouiller leurs téléphones s’ils veulent changer d’entreprise tant qu’ils respectent les conditions du contrat avec leur fournisseur ». (http://www.parl.gc.ca/HousePublications/Publication.aspx?DocId=4758070&Mode=1&Language=F (à 17 h 35).

[118] Cette disposition visait à prévoir une exception à l’interdiction pour les téléphones cellulaires, comme l’a déclaré Jean-Pierre Blais, alors sous-ministre adjoint, Affaires culturelles, au ministère du Patrimoine canadien, devant le Comité législatif chargé du projet de loi C-32 (40e législature, 3e session) le 25 novembre 2010 (à 9 h 55).

[119] Le gouvernement du Canada a affirmé que la Loi sur la modernisation du droit d’auteur permettrait le « crochetage » des serrures numériques pour le déverrouillage d’un appareil sans fil. Voir Gouvernement du Canada, « Ce que dit la Loi sur la modernisation du droit d’auteur au sujet des serrures numériques » (28 septembre 2011) (« Les consommateurs seront en mesure de déverrouiller leurs appareils mobiles, comme les téléphones cellulaires, afin de pouvoir les connecter à un autre réseau sans fil, par exemple pour changer de fournisseur de services. Cependant, ces dispositions seront subordonnées à toute entente, contractuelle ou autre, entre un consommateur et son fournisseur de services. »).

[120] Entertainment Software Association c. Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, 2012 CSC 34, [2012] 2 R.C.S. 231. [ESA]

[121] Pièce CAB-1A aux para 29 et 30; Pièce CAB-11 au para 133.

[122] Pièce CAB-11 aux para 168 et 169.

[123] Ibid au para 170.

[124] Pièce Re:Sound-1 au para 6.

[125] Pièce Re:Sound-7 au para 17.

[126] Transcriptions, vol. 4 aux pp 310 à 319.

[127] Ibid à la p 314.

[128] Ibid à la p 311.

[129] Ibid à la p 317:2–12.

[130] Ibid aux pp 317:19 à 318:5.

[131] Pièce Re:Sound-7 au para 18.

[132] Ibid aux para 6 et 7.

[133] Ibid au para 10.

[134] Pièce CAB-11 au para 141.

[135] Ibid au para 158.

[136] Ibid au para 159.

[137] Ibid au para 160.

[138] Ibid au para 161.

[139] Ibid au para 163.

[140] Ibid au para 166.

[141] Ibid.

[142] Transcriptions, vol. 12 aux pp 2050 et 2051.

[143] Ibid à la p 2189.

[144] Normand Tamaro, Loi sur le droit d’auteur, texte annoté, Thompson Canada, Toronto, 2003, à la p 782.

[145] Vigneux v. Canadian Performing Right Society, Ltd. [1945] J.C.J. No. 2, au para 16.

[146] Supra note 108.

[147] Supra note 145 au para 7.

[148] CMRRA/SODRAC inc. (Stations de radio commerciales) pour les années 2001 à 2004 (28 mars 2003) décision de la Commission du droit d’auteur.

[149] SOCAN-SCGDV – Tarif 1.A (Radio commerciale) pour les années 2003 à 2007 (14 octobre 2005) décision de la Commission du droit d’auteur. [SOCAN-SCGDV, 2003-2007]

[150] SOCAN-SCGDV – Tarif 1.A (Radio commerciale) pour les années 2003 à 2007 [Réexamen] (22 février 2008) décision de la Commission du droit d’auteur.

[151] Pour une analyse de la source de ce ratio, voir supra note 1 aux para 217 à 223.

[152] Transcriptions, vol. 4 aux pp 299 à 303.

[153] Transcriptions, vol. 11 aux pp 1750 et 1751.

[154] Pièce AVLA/SOPROQ-CSI-4 au para 39.

[155] Ibid aux para 50 à 58.

[156] Tarif CSI – Stations de radio commerciales (2001-2004) (28 mars 2003) décision de la Commission du droit d’auteur.

[157] Tarif CSI – Stations de radio commerciales (2005-2010) (31 mars 2006) décision de la Commission du droit d’auteur.

[158] Supra note 1.

[159] Lettre de CSI à la Commission, le 1er mai 2013, note de M. Gauthier à la p 2.

[160] Pièce CAB-2 au para 37.

[161] Pièce CAB-2, « Exhibit 4 ».

[162] Dans le domaine des enquêtes, les réponses rectilignes sont celles qui, présentées sur une feuille de papier, donnent une ligne droite. Règle générale, les données rectilignes ne sont pas utiles, c’est pourquoi elles sont généralement éliminées.

[163] M. Reitman a calculé la moyenne de deux façons : en attribuant la valeur de zéro aux copies que les stations n’ont pas effectuées, et en n’attribuant pas la valeur de zéro à ces copies. Sa méthode de prédilection ne tient pas compte des zéros ajoutés.

[164] M. Reitman a aussi fait les calculs au moyen des données tirées des demandes de renseignements, séparément et en combinaison avec les données sur l’utilité tirées de l’enquête. Bien que ces mesures n’étaient pas vraiment utilisables selon lui, il les a tout de même présentées à des fins de comparaison.

[165] Pièce AVLA/SOPROQ-CSI-4 au para 110.

[166] Tarif des redevances à percevoir par la SOCAN, la SCGDV et CSI à l’égard des services de radio satellitaire à canaux multiples par abonnement, SOCAN (2005-2009), SCGDV (2007-2010), CSI (2006-2009) (6 mai 2009, version corrigée) décision de la Commission du droit d’auteur au para 146.

[167] Supra note 1 au para 223.

[168] Ibid au para 226.

[169] Lettre envoyée par Connect/SOPROQ à la Commission, 6 août 2013 à la p 2.

[170] Avis de la Commission (7 août 2013).

[171] Radio commerciale – Relevés statistiques et financiers, 2010-2014, CRTC.

[172] Pièce Collectives-1 au para 55.

[173] Pièce CAB-1A au para 43.

[174] Pièce CAB-1A au para 44.

[175] Transcriptions, vol. 1 à la p 26:2–11.

[176] Tarif des redevances à percevoir par la SOCAN (2003-2007) et la SCGDV (2003-2007) à l’égard de la radio commerciale, Gazette du Canada, 23 février 2008. [Tarif pour la radio commerciale (2008)]

[177] Tarif pour la radio commerciale (2010), supra note 21.

[178] Ibid à l’al. 10(1)a).

[179] Ibid à l’al. 10(1)b).

[180] Supra note 176 au para 7(3).

[181] Pièce Collectives-1 aux para 70 à 78.

[182] Pièce Collectives-1 au para 76.

[183] Pièce CAB-1A aux para 52 et 53.

[184] Transcriptions, vol. 12 à la p 2049:11–17.

[185] Voir avis de la Commission CB-CDA 2015-078, 11 décembre 2015.

[186] Ibid à la p 83:4–11.

[187] Ibid à la p 76:6–11.

[188] Ibid à la p 73:2–5.

[189] Ibid aux pp 74 et 75.

[190] Ibid à la p 85:5–18.

[191] Pièce Collectives-1 au para 71.

[192] Ibid.

[193] Pièce CAB-1A au para 46.

[194] Ibid au para 48.

[195] Pièce Re:Sound-5 à la p 2.

[196] Mise à exécution du tarif de la copie privée en 2001, 2002, 2003 (19 janvier 2004) décision de la Commission du droit d’auteur.

[197] Supra note 185.

[198] Le 1er janvier 2011 pour la SOCAN, le 1er janvier 2012 pour Ré:Sonne, Artisti et Connect/SOPROQ, et le 7 novembre 2012 pour CSI.

[199] Supra note 185.

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