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Copyright Board
Canada

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Commission du droit d’auteur
Canada

 

Date

2018-01-12

Référence

CB-CDA 2018-004

Régime

Gestion collective du droit d’exécution et du droit de communication

Loi sur le droit d’auteur, paragraphe 68(3)

Commissaires

L’honorable Robert A. Blair

Me Claude Majeau

Me J. Nelson Landry

Projets de tarif examinés

Tarif 6.B de Ré:Sonne – Utilisation de musique enregistrée pour accompagner des activités de conditionnement physique (2013-2017)

Tarif des redevances à percevoir pour l’exécution en public ou la communication au public par télécommunication, au Canada, d’enregistrements sonores publiés constitués d’œuvres musicales et de prestations de telles œuvres

Motifs de la décision

I. INTRODUCTION

[1] Ré:Sonne, Société de Gestion de la Musique (Ré:Sonne) a déposé auprès de la Commission ses projets de tarif 6.B pour l’utilisation de musique enregistrée dans les lieux de conditionnement physique pour les années 2013 et 2014-2017, le 30 mars 2012 et le 28 mars 2013 respectivement (les « projets de tarif »), et ce, conformément à l’article 67.1 de la Loi sur le droit d’auteur (la « Loi »). [1] Les projets de tarif ont été publiés dans la Gazette du Canada le 9 juin 2012 et le 15 juin 2013, respectivement. Les utilisateurs éventuels et leurs représentants ont été avisés de leur droit de s’y opposer au plus tard le 8 août 2012 et le 14 août 2013.

[2] Les tarifs énoncent les redevances que Ré:Sonne proposait de percevoir pour l’exécution en public ou la communication au public par télécommunication d’enregistrements sonores publiés constitués d’œuvres musicales et de prestations de telles œuvres pour toutes les utilisations dans toutes les aires d’un lieu de conditionnement physique et d’un lieu de patinage, et pour accompagner des activités de conditionnement physique incluant les cours de conditionnement physique (y compris les leçons de patinage) et les cours de danse.

[3] GoodLife Fitness Centres Inc. (GoodLife), le Conseil du secteur du conditionnement physique du Canada (le « CSCP »), Life Time Fitness Inc., l’Association canadienne des professeurs de danse – Division de l’Alberta, Zoom Media Inc., et Mood Media Corporation se sont opposées.

[4] La Federation of Calgary Communities et Gymnastics Saskatchewan se sont opposées après l’échéance prescrite et, par conséquent, n’ont pas été considérées comme des opposantes dans la présente instance. Elles n’ont pas soumis de demande en vue d’obtenir le statut d’intervenant. Cependant, elles ont essentiellement affirmé que les taux proposés représentaient une augmentation déraisonnable pour les organismes sans but lucratif.

[5] En mars 2015, la Commission a rendu sa décision relative au réexamen du Tarif 6.B pour les années 2008-2012 (la « décision relative au réexamen »). [2]

[6] En juillet 2015, Ré:Sonne, GoodLife, le CSCP, Zoom Media Inc., et Mood Media Corporation ont, par requête conjointe, demandé que la Commission homologue le Tarif 6.B pour les années 2013-2017 selon la forme et le contenu convenus, comme il est précisé dans un tarif négocié (la « Convention de Tarif »).

[7] Par conséquent, seules les entités suivantes sont demeurées opposantes : l’Association canadienne des professeurs de danse – Division de l’Alberta et Life Time Fitness Inc. De plus, la Convention de Tarif comprenait des dispositions qui n’avaient pas été initialement publiées dans la Gazette du Canada. La Convention de Tarif prévoyait notamment que lorsque la musique enregistrée est obtenue d’un fournisseur de musique de fond, les redevances et les exigences de rapport du fournisseur sont établies dans le Tarif 3.A de Ré:Sonne – Fournisseurs de musique de fond. [3] Le 18 avril 2017, la Commission a demandé à Ré:Sonne d’expliquer les raisons pour lesquelles la Convention de Tarif n’aurait pas une incidence défavorable sur les intérêts des membres non représentés de l’industrie de la musique de fond.

[8] Le 18 avril 2017, la Commission a ordonné aux opposantes qui demeurent de fournir leurs points de vue sur la Convention de Tarif ou autrement, elles seraient réputées avoir renoncé à leurs oppositions aux projets de tarif pour 2013-2017. Aucune observation écrite n’a été produite ni avant ni après l’échéance prescrite et, par conséquent, les autres opposantes sont réputées avoir renoncé à leurs oppositions.

[9] La Commission a également demandé à Ré:Sonne de fournir des détails sur les négociations, les parties aux négociations et les modalités négociées. Des détails ont été fournis en avril 2017 et une réplique a été fournie par GoodLife en mai 2017.

[10] Le 25 mai 2017, après avoir examiné les renseignements fournis par les parties, la Commission a posé d’autres questions au vu d’incohérences potentielles relevées dans la Convention de Tarif qui pourraient justifier la modification d’une partie du texte.

[11] Le 8 juin 2017, Ré:Sonne a répondu et a notamment précisé que les parties discutaient de certains points dans le but de fournir un libellé modifié de la Convention de Tarif à la Commission.

[12] De juin à août 2017, Ré:Sonne a régulièrement fait un compte rendu au sujet des discussions et a fourni une version révisée de la Convention de Tarif le 12 septembre 2017 (la « Convention de Tarif révisée »).

II. LA CONVENTION DE TARIF

[13] La Convention de Tarif s’applique à trois situations : (i) quand la musique joue comme musique de fond dans un lieu de conditionnement physique (sauf un lieu de patinage); (ii) quand la musique joue dans un cours de conditionnement physique ou dans un cours de danse; et (iii) quand la musique joue dans un lieu de patinage.

A. Lieu de conditionnement physique

[14] En ce qui concerne (i) la musique de fond, le tarif établit une distinction entre a) la musique acquise des fournisseurs de musique de fond, et b) toute autre musique. Dans le premier cas, l’établissement n’est pas assujetti à des redevances et à des exigences de rapport. Le fournisseur de musique de fond est plutôt assujetti au Tarif 3.A de Ré:Sonne (2010-2013), à moins que l’établissement de conditionnement physique ait une entente avec le fournisseur en vertu de laquelle le lieu de conditionnement physique, plutôt que le fournisseur, paie les redevances pour la musique de fond. Dans un tel cas, les redevances payables par l’abonné sont établies conformément au paragraphe 4(2) du Tarif 3.A et sont calculées en fonction des montants versés par l’abonné au service de musique de fond et du nombre d’établissements de l’abonné.

[15] En ce qui concerne (b) la musique de fond qui n’est pas obtenue d’un fournisseur de musique de fond, les taux diffèrent de ceux fixés dans le tarif établi après le réexamen. [4] Les taux payables en vertu de ce tarif et du Tarif 3.B de Ré:Sonne (Utilisation de musique de fond) sont fondés sur le nombre de personnes présentes, la capacité de l’établissement ou la taille de l’établissement. Les parties soutiennent que cette structure tarifaire exige que les lieux de conditionnement physique produisent des rapports détaillés alors que plusieurs d’entre eux n’assurent pas un bon suivi des présences et qu’il est très difficile pour Ré:Sonne de surveiller ou vérifier l’application de cette structure tarifaire. Dans sa décision initiale homologuant le Tarif 6.B, [5] la Commission a rejeté la formule fondée sur le nombre de personnes présentes utilisée dans le Tarif 19 de la SOCAN (Exercices physiques et cours de danse). La Commission a conclu qu’une telle structure tarifaire « ne peut être mis[e] à exécution, qu’[elle] n’est pas appliqué[e], qu’[elle] est mal compris[e], ou toute combinaison de ces éléments ». [6]

[16] Comme il est énoncé au paragraphe 4(2) de la Convention de Tarif, Ré:Sonne, GoodLife et le CSCP proposent une structure tarifaire simplifiée, dont les redevances annuelles fixes sont fondées sur le nombre de membres de l’établissement de conditionnement physique et sont regroupées en trois catégories : moins de 1000 membres, entre 1000 et 5000 membres et plus de 5000 membres. Ré:Sonne soutient que les redevances payables reflètent la valeur de la musique puisqu’elles varient selon la taille de l’établissement de conditionnement physique et le nombre de membres qui écoutent de la musique enregistrée. Il est plus facile pour un établissement de conditionnement physique d’assurer le suivi des données sur les membres et d’en faire rapport et pour Ré:Sonne de vérifier les données fournies. Cela permet également à l’établissement de conditionnement physique d’estimer avec une certitude raisonnable le montant des redevances puisque les catégories de taux sont assez larges et qu’il est peu probable que le nombre de membres passe d’une catégorie à l’autre d’année en année.

[17] Les taux proposés ont été calculés en function du nombre de membres à partir du point milieu de chaque catégorie, [7] multiplié par le taux de presence prévu dans le Tarif 3 (2003-2009) indexé selon l’inflation depuis 2006, [8] multiplié par le nombre annuel moyen de présences par membre. [9]

B. Cours de danse et de conditionnement physique

[18] En ce qui concerne (ii) les cours de danse et de conditionnement physique, la Convention de Tarif propose la même structure et les mêmes taux que ceux proposés dans le tarif établi après le réexamen, sous réserve d’augmentations annuelles différentielles. Les parties soutiennent que la structure de redevance par cours reflète l’utilisation et la valeur de la musique puisqu’elle varie selon le nombre de cours offerts par un établissement de conditionnement physique. Le taux applicable aux cours de danse et aux cours de conditionnement physique correspond aux redevances payables à la SOCAN en application du Tarif 19 et reflète le fait que la musique enregistrée est utilisée sensiblement de la même façon dans les deux types de cours. Les parties réfèrent à la Commission qui a statué dans la décision relative au réexamen que « [l]a Convention de Tarif peut cependant nous servir de fondement pour l’établissement d’un tarif, ce que nous jugeons juste et équitable », [10] et que « les meilleurs intérêts de l’industrie sont servis par la certitude, la stabilité et le caractère définitif que procure la Convention de Tarif ». [11]

C. Lieu de patinage

[19] Les taux proposés pour (iii) les lieux de patinage à l’article 6 de la Convention de Tarif sont les mêmes que ceux prévus dans le tarif établi après le réexamen, à l’exception de la redevance minimale qui a été majorée de 38,18 $ à 49,05 $.

[20] Les parties soutiennent que la structure et les taux prévus dans la Convention de Tarif ont été attentivement examinés et approuvés par les parties qui y seront assujetties, à savoir les titulaires de droits représentés par Ré:Sonne, les membres de l’industrie du conditionnement physique au Canada représentés par le CSCP et GoodLife et les fournisseurs de musique de fond représentés par Zoom Media Inc. et Mood Media Corporation.

III. ANALYSE

[21] Premièrement, nous soulignons que les taux convenus dans la Convention de Tarif sont plus bas que les taux initialement proposés par Ré:Sonne dans les projets de tarif. Par conséquent, on peut supposer que les utilisateurs éventuels qui ne se sont pas opposés aux projets de tarif ne s’opposeraient pas non plus à la Convention de Tarif. [12]

[22] Deuxièmement, comme l’a fait remarquer la Commission dans sa décision relative au réexamen, « le CSCP et Goodlife, représentent la majorité des établissements de conditionnement physique au Canada; ensemble, ils représentent plus de 5000 établissements de conditionnement physique et comptent plus de quatre millions de membres ». [13] La Commission a aussi affirmé que, « lorsqu’une résolution relative à un tarif est appuyée par une association de l’industrie représentant la vaste majorité des utilisateurs, la Commission “dédui[t] que l’entente sert les intérêts de tous les utilisateurs assujettis à ce tarif” ». [14] Collectivement, le CSCP et GoodLife représentent un grand nombre d’établissements de conditionnement physique au Canada, allant de petits établissements de 10 membres à de très grandes chaînes comme GoodLife. En outre, Zoom Media Inc. et Mood Media Corporation représentent deux importants fournisseurs de musique de fond qui fournissent de la musique enregistrée aux établissements de conditionnement physique. Nous considérons donc que la Convention de Tarif représente les intérêts de tous les utilisateurs éventuels. [15]

[23] La Commission doit aussi tenir compte des prétentions présentées par les tiers comme la Federation of Calgary Communities et Gymnastics Saskatchewan pour évaluer la Convention de Tarif. [16] Ces organismes étaient préoccupés par l’augmentation prévue dans les projets de tarif ou par la possibilité que les redevances prévues par le Tarif 6.B s’ajoutent à celles prévues par les tarifs de la SOCAN applicables.

[24] Ré:Sonne a droit à un tarif pour l’utilisation d’enregistrements sonores par les établissements de conditionnement physique, qu’il s’agisse d’organismes à but lucratif ou à but non lucratif. Ces organismes s’efforcent d’assumer leurs frais, y compris les redevances musicales – dans la mesure où ils choisissent d’utiliser un contenu protégé. Le fait que le Tarif 6.B de Ré:Sonne s’ajoute aux tarifs de la SOCAN applicables ne devrait pas être une raison de refuser le droit de Ré:Sonne à un tarif.

[25] De plus, les taux susceptibles de s’appliquer aux centres communautaires et autres organismes sans but lucratif restent raisonnables. Par exemple, les frais annuels pour la diffusion de la musique de fond dans un établissement qui ne compte pas le nombre de ses membres sont fixés à 250 $; les lieux de patinage dont l’entrée est gratuite payent des redevances annuelles fixes de 49,05 $ et un centre communautaire qui aurait offert 100 cours de danse ou de conditionnement physique en 2017 paiera 40,04 $.

[26] Compte tenu de ce qui précède, nous homologuons la Convention de Tarif révisée, à laquelle nous apportons quelques modifications de forme se rapportant aux renvois au Tarif 3.A (Fournisseurs de musique de fond).

[27] Aux termes de la Convention de Tarif révisée, les redevances applicables lorsqu’un établissement de conditionnement physique obtient sa musique d’un fournisseur de musique de fond sont établies en fonction du Tarif 3.A. De cette façon, le fournisseur est assujetti à un seul tarif de Ré:Sonne plutôt que d’être également assujetti au Tarif 6.B.

[28] Quand un établissement de conditionnement physique a une entente avec un fournisseur de musique de fond aux termes de laquelle il est tenu de payer les redevances, la Convention de Tarif révisée prévoit que les redevances payables par l’abonné (c.-à-d. l’établissement de conditionnement physique) sont fixées en fonction du paragraphe 4(2) du Tarif 3.A. Cependant, cette disposition tient compte de la situation où le fournisseur de musique de fond paie les redevances au nom de l’abonné.

[29] Nous comprenons l’intention implicite des parties de citer le paragraphe 4(2) « avec les ajustements nécessaires ». Par souci de clarté, nous modifions la Convention de Tarif révisée de manière à ce que les redevances pour la musique diffusée par un établissement de conditionnement obtenue d’un fournisseur de musique de fond, et payées par l’établissement, soient établies en fonction d’un taux de 3,2 pour cent (comme il est prévu dans le Tarif 3.A de Ré:Sonne (2010-2013). Ce taux sera appliqué aux montants payés par un abonné pour le service de musique de fond pour chacun de ses établissements, sous réserve d’une redevance minimale de 2,15 $ par établissement par trimestre.

Le secrétaire général,

Signature

Gilles McDougall



[1] Loi sur le droit d’auteur, L.R.C., 1985, ch. C-42.

[2] Tarif no6.B de Ré:Sonne – Utilisation de musique enregistrée pour accompagner des activités de conditionnement physique, 2008- 2012 (27 mars 2015) décision de la Commission du droit d’auteur. [décision relative au réexamen]

[3] Tarif 3.A de Ré:Sonne – Fournisseurs de musique de fond, 2010-2013, Gazette du Canada, 2 septembre 2017. [Tarif 3.A de Ré:Sonne (2010-2013)]

[4] Tarif no 6.B de Ré:Sonne – Utilisation de musique enregistrée pour accompagner des activités de conditionnement physique, 2008- 2012, Gazette du Canada, 28 mars 2015. [tarif établi après le réexamen]

[5] Tarif no 6.B de Ré:Sonne – Utilisation de musique enregistrée pour accompagner des activités physiques, 2008-2012 (6 juillet 2012) décision de la Commission du droit d’auteur.

[6] Ibid au para 147.

[7] Pour la catégorie de moins de 1000 membres, le nombre 500 a été utilisé pour calculer les redevances; pour la catégorie de 1000 à 5000 membres, le nombre 2500 a été utilisé; pour la catégorie de plus de 5000 membres, le nombre 5000 a été utilisé.

[8] Les calculs ont été faits en 2013, en utilisant un IPC de 12,33 % pour 2006-2013, plus un IPC moyen de 1,67 % pour chaque année de 2014 à 2017, pour une augmentation totale de 19,01 %. Le taux de présence de 0,0831 ¢ prévu par le tarif 3 a été de 19,01 % pour se fixer à 0,0989 ¢.

[9] Selon le rapport de 2012 de l’International Health, Racquet & Sportsclub Association (IHRSA) intitulé Global Report on the State of the Health Club Industry, le membre américain moyen se rend au lieu de conditionnement physique 102,5 fois par année. Les données touchant le Canada n’étaient pas disponibles. L’IHRSA est l’association professionnelle qui regroupe les membres de l’industrie de la santé et du conditionnement physique.

[10] Supra note 2 au para 37.

[11] Ibid au para 35.

[12] Netflix, inc. c. Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, 2015 CAF 289 au para 44 : « […] Il n’y a pas de doute que l’avis donné publiquement à l’industrie par l’entremise de la Gazette du Canada est crucial en ce qui concerne la décision de s’opposer ou non à un projet de tarif. »

[13] Supra note 2 au para 55.

[14] Ibid.

[15] Tarif 5 de Ré:Sonne Utilisation de musique pour accompagner des événements en direct, 2008-2012 (Parties A à G) (25 mai 2012) décision de la Commission du droit d’auteur au para 10.

[16] Ibid.

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