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Copyright Board
Canada

Canada Coat of Arms/Armoiries du Canada

Commission du droit d’auteur
Canada

 

Date

2017-08-25

Référence

CB-CDA 2017-086

Régime

Gestion collective du droit d’exécution et du droit de communication

Gestion collective relative aux droits visés aux articles 3, 15, 18 et 21

Loi sur le droit d’auteur, paragraphes 68(3) et 70.15(1)

Commissaires

L’honorable William J. Vancise

Me Claude Majeau

Me J. Nelson Landry

Projets de tarif examinés

[Services de musique en ligne (CSI : 2011-2013; SOCAN : 2011-2013; SODRAC : 2010-2013)]

tarif des redevances à percevoir pour la communication au public par télécommunication ou la reproduction, au Canada, d’œuvres musicales

Motifs de la décision

TABLE DES MATIÈRES

I. INTRODUCTION 1

II. LES PARTIES 5

III. POSITION DES PARTIES 6

A. La SOCAN 7

B. CSI 8

C. La SODRAC 10

D. Apple 10

E. L’ACR et Pandora 12

F. Les Réseaux 12

IV. LA PREUVE 13

A. La SOCAN 13

B. CSI 16

i. Téléchargements permanents 17

ii. Téléchargements limités 18

iii. Transmissions en continu sur demande 19

iv. Webdiffusion 20

v. Transmissions en continu sur demande hybrides 21

vi. Webdiffusion hybride 22

C. La SODRAC 23

D. Les sociétés de gestion 24

E. Apple 25

F. L’ACR et Pandora 27

G. Les Réseaux 29

V. QUESTIONS JURIDIQUES 29

A. Le taux de redevances de la mise à disposition et la transmission subséquente 29

B. L’arrêt ESA et les téléchargements limités 33

C. Stockage sur nuage 33

D. Portée des projets de tarif de la SOCAN 38

i. Les webdiffusions non interactives 38

ii. Webdiffusions semi-interactives 39

VI. ANALYSE ÉCONOMIQUE 40

A. Méthode d’établissement des redevances 40

B. Redevances pour la mise à disposition 41

C. Le répertoire de CSI 41

D. Téléchargements permanents 42

i. Taux de la SOCAN 42

ii. Taux de CSI 42

iii. Écoute préalable d’extraits de chansons 42

iv. Webdiffusions préalables d’albums 43

E. Téléchargements limités 44

i. Taux de la SOCAN 44

ii. Taux de CSI 45

F. Webdiffusions non interactives, semi-interactives et interactives – Questions communes 45

i. Définitions 45

ii. Approche combinée 47

iii. Taux par écoute 47

iv. Supplément pour l’interactivité 49

v. Webdiffusion « additionnelle » gratuite 50

G. Webdiffusions non interactives 51

i. Taux de la SOCAN 51

ii. Taux de CSI 51

H. Webdiffusions interactives 54

i. Taux de la SOCAN 54

ii. Taux de CSI 55

I. Webdiffusions semi-interactives 56

i. Taux de la SOCAN 56

ii. Taux de CSI 56

J. Webdiffusions hybrides 57

i. Description 57

ii. Tarifs proposés 58

iii. Exceptions à la reproduction 59

iv. Établissement d’un taux de redevances 59

v. Répartition des redevances entre CSI et SOCAN 60

vi. Le taux de la SOCAN 62

vii. Taux de CSI 63

K. Vidéos de musique 63

i. Taux de la SOCAN 63

ii. Taux de la SODRAC 64

L. Assiette tarifaire 65

M. Redevances minimales 67

i. Téléchargements permanents 67

ii. Webdiffusions, webdiffusions hybrides et services de téléchargement limité 68

iii. Vidéos de musique 69

VII. TAUX HOMOLOGUÉS ET REDEVANCES 71

VIII. LIBELLÉ DU TARIF 72

A. Contexte 72

B. Service / exploitant d’un service 73

C. Termes et définitions 73

i. Piste audio – Définition 73

ii. Piste audio / enregistrement sonore 74

iii. Utilisateur final / abonné / destinataire 74

iv. Service de webdiffusion hybride 75

D. Rapports sur l’utilisation de la musique 75

i. Rapports mensuels 75

ii. Renseignements sur l’écoute pour les services de téléchargement limité et les services hybrides 77

iii. Communication du prix payé pour le téléchargement d’un fichier dans un ensemble 79

iv. Renseignements nécessaires sur le fichier 80

v. Renseignements disponibles 80

E. Revenus bruts et répartition des revenus 81

i. Répartition des revenus 81

ii. Définition de revenu brut 81

F. Dispositions en matière de confidentialité 83

G. Conformité et résiliation 83

H. Rapports tardifs 85

I. Dispositions transitoires 86

 


I. INTRODUCTION

[1] Les premières décisions de la Commission du droit d’auteur concernant les services de musique en ligne ont été rendues en 2007. [1] Elles ne portaient que sur trois types d’activités, à savoir : l’offre de téléchargements permanents, l’offre de téléchargements limités et l’offre de transmissions en continu sur demande. Depuis, plusieurs autres activités s’y sont ajoutées : la webdiffusion (selon des degrés d’interactivité divers), l’offre de services hybrides et l’offre de vidéos de concerts complets. Il ne fait aucun doute aujourd’hui que les téléchargements et les transmissions en continu ne sauraient être considérés comme une simple dichotomie, mais plutôt comme les deux extrémités d’un même spectre, avec de nouvelles activités se situant quelque part entre les deux. Cette caractérisation des diverses offres de services de musique en ligne a éclairé la présente décision.

[2] Le 31 mars 2010, la Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SOCAN) a déposé, conformément au paragraphe 67.1(1) de la Loi sur le droit d’auteur [2] (la « Loi »), son projet de tarif des redevances à percevoir pour la communication au public par télécommunication d’œuvres musicales ou dramatico-musicales par les services de musique en ligne (le tarif 22.A) pour l’année 2011.

[3] Le 31 mars 2010, conformément au paragraphe 70.13(1) de la Loi, CMRRA-SODRAC inc. (CSI) a déposé un projet de tarif de redevances à percevoir pour la reproduction d’œuvres musicales par les services de musique en ligne pour l’année 2011.

[4] Les 27 mars 2009 et 30 mars 2010, la Société du droit de reproduction des auteurs, compositeurs et éditeurs au Canada (SODRAC) a déposé, conformément au paragraphe 70.13(1) de la Loi, un projet de tarif des redevances à percevoir pour la reproduction d’œuvres musicales incorporées dans une vidéo de musique par les services de musique en ligne (le tarif 6) pour les années 2010 et 2011.

[5] Le 11 février 2011, Ré:Sonne s’est opposée à ce que son projet de tarifs 8.A (diffusion simultanée et webdiffusion) et 8.B (webdiffusion semi-interactive) pour les années 2009-2012 soit examiné conjointement avec les autres projets de tarif pour les services de musique en ligne.

[6] En mars 2011, la SOCAN, CSI et la SODRAC ont chacune déposé leurs projets de tarif à l’égard des services de musique en ligne pour l’année 2012. Le 29 avril 2011, la Commission a décidé de procéder à un examen consolidé des projets de tarif de la SOCAN, de CSI et de la SODRAC dans le cadre d’une instance unique, mais non de façon conjointe avec le tarif 8 de Ré:Sonne. Elle a également statué que cet examen ne commencerait qu’après la publication de la décision de la Commission au sujet du projet de tarif 22.A de la SOCAN pour les années 2007-2010 et du projet de tarif de CSI visant les services de musique en ligne pour les années 2008-2010.

[7] En mars 2012, la SOCAN, CSI et la SODRAC ont déposé leurs projets de tarif respectifs pour les services de musique en ligne pour l’année 2013. Ces projets de tarif ont également été examinés dans la présente instance.

[8] En juillet 2012, la Cour suprême du Canada a rendu plusieurs décisions ayant une incidence sur les services de musique en ligne, soient les arrêts Bell, [3] ESA [4] et Rogers. [5] La Cour suprême a notamment conclu, dans ESA, que la transmission d’une œuvre musicale par Internet qui se traduit par un téléchargement de cette œuvre ne constitue pas une communication par télécommunication. Par suite de cet arrêt, la SOCAN ne pouvait pas percevoir des redevances pour de tels téléchargements.

[9] Le 5 octobre 2012, la Commission a rendu la décision Services de musique en ligne (2012) [6] en tenant compte des arrêts susmentionnés de la Cour suprême du Canada. Le 4 décembre 2012, la Commission a établi un calendrier des procédures dans le cadre de l’instance fusionnée concernant les services de musique en ligne, avec une date d’audience prévue en novembre 2013.

[10] Des oppositions aux différents tarifs ont été soumises en temps opportun. Elles ont été déposées par les parties suivantes : l’Alliance des radios communautaires (ARC), l’Association des radiodiffuseurs communautaires du Québec (ARCQ) et l’Association nationale des radios étudiantes et communautaires (ANREC); Apple Canada et Apple Inc. (Apple); l’Association canadienne des radiodiffuseurs (ACR); la Société Radio-Canada (SRC); Cineplex Entertainment LLP (Cineplex); l’Entertainment Software Association (ESA); Music Canada (auparavant CRIA); Bell Canada; Rogers Communications; TELUS Communications; Vidéotron G.P.; Shaw Communications Inc.; Québecor Média; Computer & Communications Industry Association; Pandora Media (Pandora); Pelmorex Media (Pelmorex); SiriusXM Canada (Sirius); Stingray Digital (Stingray); YouTube LLC (YouTube). Par ailleurs, Google Inc. (Google) a présenté une demande afin d’intervenir en l’espèce et a obtenu le statut d’intervenante, assorti des pleins droits de participation.

[11] Les parties suivantes se sont quant à elles retirées de l’instance avant la tenue des audiences : l’ARC, l’ARCQ, l’ANREC, la SRC, Cineplex, l’ESA, Music Canada, Pelmorex, Sirius, Stingray, YouTube et Google. À l’exception de deux d’entre elles, aucune des opposantes n’a expliqué les raisons de son retrait. L’ANREC, l’ARC et l’ARCQ se sont désistées à la suite d’une décision de la Commission voulant que les activités de leurs membres ne soient pas visées par les tarifs à l’étude. Sirius a fait de même en raison d’une décision analogue sur ses activités.

[12] Au moment des audiences, les opposantes consistaient en Apple, l’ACR, les Réseaux (Bell Mobilité inc., Québecor Média inc. et Rogers Communications Partnership) et Pandora. Les audiences ont eu lieu entre les 19 et 28 novembre 2013, et les plaidoiries finales des parties ont été présentées sur une période de deux jours, les 12 et 13 mai 2014.

[13] Le 26 novembre 2015, la Cour suprême du Canada a rendu sa décision dans l’arrêt SRC c. SODRAC. [7] Elle y a statué que la Loi « ne doit être ni interprétée ni appliquée de manière à favoriser ou à défavoriser une forme de technologie en particulier ». [8] Au moyen d’un avis de la Commission du 15 décembre 2015, les parties ont été interrogées à savoir quel effet devrait avoir cet arrêt sur la présente procédure. Plus précisément, la Commission a sollicité les points de vue des parties pour savoir de quelle manière elle devrait aborder les questions suivantes : 1) le principe de la neutralité technologique, et 2) le principe de l’équilibre entre les droits de l’utilisateur et ceux du titulaire des droits, y compris les facteurs pertinents que sont les risques pris par l’utilisateur, l’ampleur de son investissement dans la nouvelle technologie et la nature de l’utilisation de l’œuvre protégée par le droit d’auteur dans la nouvelle technologie. Une réponse conjointe rédigée au nom de CSI, de la SOCAN, d’Apple, de Pandora, de l’ACR et des Réseaux se lisait comme suit :

[TRADUCTION] Les parties ne désirent adhérer à aucune des deux options énoncées dans l’avis. Elles ne souhaitent pas présenter d’autres observations ni verser de nouveaux éléments de preuve au dossier. Les parties soutiennent que, dans la présente procédure relative aux tarifs, la Commission devrait rendre une décision sans autre preuve ou argumentation visant à déterminer l’incidence que pourrait avoir l’arrêt SRC c. SODRAC.

[14] Quant à la SODRAC, elle n’a pas répondu à l’avis de la Commission.

Modifications à la Loi sur le droit d’auteur

[15] La présente procédure est directement touchée par le fait que, le 7 novembre 2012, la Loi a été modifiée par l’entrée en vigueur de la majorité des dispositions de la Loi sur la modernisation du droit d’auteur, [9] y compris l’ajout du paragraphe 2.4(1.1) de la Loi, lequel dispose que :

[p]our l’application de la présente loi, constitue notamment une communication au public par télécommunication le fait de mettre à la disposition du public par télécommunication une œuvre ou un autre objet du droit d’auteur de manière que chacun puisse y avoir accès de l’endroit et au moment qu’il choisit individuellement.

[16] Le 28 novembre 2012, la SOCAN a fait valoir qu’à son avis, la question de l’effet du paragraphe 2.4(1.1) de la Loi sur ses projets de tarif pour les services de musique en ligne pouvait et devrait être tranchée par la Commission en tant que question purement juridique. Plus particulièrement, la SOCAN a soutenu que cette disposition rendait caduque la décision de la Cour suprême dans ESA et obligeait les entités, comme les fournisseurs de services de musique en ligne, à payer des redevances à la SOCAN lorsqu’elles mettent des œuvres musicales sur leurs serveurs Internet de manière à ce que leurs consommateurs finaux puissent y avoir accès, peu importe que les œuvres musicales soient par la suite transmises ou non aux utilisateurs finaux au moyen de téléchargements ou de diffusions en continu.

[17] Le 7 décembre 2012, la Commission a émis un avis dans lequel elle déclarait être saisie de la question de l’effet du paragraphe 2.4(1.1) de la Loi à titre d’incident nécessaire à l’exercice de sa compétence essentielle. Elle ajoutait qu’elle ne pouvait homologuer les tarifs de la SOCAN sans décider si, et dans quelle mesure, l’adoption du paragraphe 2.4(1.1) faisait en sorte que la SOCAN puisse percevoir des redevances pour de telles activités. Certaines personnes et certains groupes ayant présenté des observations comme suite à cet avis sont parties à la présente instance.

[18] La décision de la Commission quant à l’effet du paragraphe 2.4(1.1) de la Loi est rendue en même temps que la présente, et elle est examinée plus à fond ci-dessous, dans la section portant sur les questions juridiques.

[19] Divers facteurs expliquent pourquoi la publication de cette décision a tardé. Il convient de noter que la Commission a rendu sept ordonnances, dix décisions et trente-huit avis dans le cadre de l’instance. Un des défis les plus importants auxquels les membres de cette formation ont eu à faire face a été de veiller à la cohérence dans le contexte d’une matrice juridique et factuelle complexe. Les questions nouvelles soulevées par le vaste éventail de services – et leurs combinaisons – sur lesquelles portaient les divers projets de tarif en l’espèce ont nécessité un examen approfondi. Les activités différentes visées et les différentes terminologies utilisées par les sociétés de gestion ont ajouté aux difficultés d’en arriver à un résultat utile et cohérent.

[20] Les consultations sur le libellé du tarif ont commencé en juin 2016 et se sont poursuivies pendant plusieurs mois. Étant donné la complexité de l’exercice, plusieurs requêtes ont été faites pour allonger les délais de réponse aux ordonnances de la Commission. Finalement, le processus et la décision connexes traitant de la question très importante de la portée de la « mise à disposition » furent en soi une tâche d’envergure. Nous tenons à remercier les parties pour leurs observations et argumentaires utiles dans le contexte de ce nouveau domaine de droit.

II. LES PARTIES

[21] La SOCAN est une société de gestion qui administre les droits d’exécution d’œuvres musicales pour le compte d’auteurs, de compositeurs et d’éditeurs de musique canadiens, ainsi que des sociétés affiliées représentant des auteurs, compositeurs et éditeurs étrangers.

[22] CSI est une société de gestion créée par deux sociétés de gestion, c’est-à-dire l’Agence canadienne des droits de reproduction musicaux (CMRRA) et la SODRAC. Ces deux sociétés ont confié à CSI le mandat exclusif de délivrer des licences pour la reproduction d’œuvres musicales de leurs répertoires à l’égard de certaines utilisations.

[23] La CMRRA est un organisme canadien qui délivre des licences et perçoit les droits de reproduction d’œuvres musicales au Canada. Elle représente plus de 6000 éditeurs canadiens et américains qui possèdent et administrent la majorité des œuvres musicales enregistrées et exécutées au Canada.

[24] La SODRAC gère les redevances découlant de la reproduction d’œuvres musicales. Elle représente quelque 6000 auteurs, compositeurs et éditeurs de musique canadiens, ainsi que le répertoire musical provenant de plus de 89 pays.

[25] Apple conçoit, fabrique et commercialise des appareils de communication et des dispositifs multimédias portables ainsi que des ordinateurs personnels et des lecteurs de musique électroniques portables, en plus de vendre ou de proposer une variété de logiciels, services, périphériques et solutions réseaux connexes, de même que du contenu numérique et des applications de tiers. En particulier, Apple vend et distribue du contenu numérique, notamment des téléchargements permanents et des applications, par l’entremise de la boutique iTunes Store.

[26] Les membres de l’ACR concernés par les projets de tarif sont des radiodiffuseurs qui exploitent des sites Internet. Ces sites web communiquent de la musique via la diffusion simultanée en ligne du signal hertzien de la station de radio, et, dans quelques cas, sous forme de webdiffusions non interactives ou de transmissions en continu sur demande gratuites.

[27] Quant aux Réseaux, ils comptent parmi les plus grandes entreprises de médias et de télécommunications au Canada. Bell offrait à ses clients des services mobiles la possibilité de s’abonner à un service de téléchargement limité et d’acheter des téléchargements de pistes de musique complètes; ces services ont par la suite été abolis. Quant au service « urMusic » de Rogers, il permettait aux abonnés d’acheter des téléchargements de pistes de musique complètes ou de vidéos de musique et de s’inscrire à un service de téléchargement limité. Ce service a été offert jusqu’en novembre 2012, date à laquelle il a été éliminé. Pour sa part, Québecor Média proposait des services de musique par l’entremise de deux filiales, soient Archambault et Vidéotron. Archambault exploitait un service de transmission en continu sur demande appelé Zik.ca, grâce auquel les clients pouvaient créer des copies locales pour une écoute hors ligne. Archambault offrait des téléchargements permanents sur le site Archambault.ca. Le site Zik.ca a été fermé en août 2015, [10] alors que la filiale Archambault a été vendue en septembre 2015.

[28] Pandora administre le plus grand et le plus fructueux des services de transmission en continu aux États-Unis. Il n’offre pas de téléchargements. En date de la rédaction de la présente décision, les services de webdiffusion de Pandora ne sont pas offerts au Canada.

III. POSITION DES PARTIES

[29] Avant d’exposer la position de chaque partie, nous notons qu’il est difficile de décrire les taux de redevances proposés par la SOCAN et CSI dans les projets de tarif publiés dans la Gazette sans recourir à une simplification ou sans reproduire l’ensemble de la structure de redevances proposée. Cette difficulté découle en grande partie du fait que ces projets de tarif reposent principalement sur la combinaison de services qu’une entité en particulier fournit.

[30] Par exemple, selon les projets de tarif de la SOCAN, une entité qui ne fournissait que des transmissions en continu sur demande ne paierait que 15,2 pour cent de ses revenus, alors qu’une entité qui fournirait des transmissions en continu sur demande avec des téléchargements limités paierait 12,6 pour cent de ses revenus. Ainsi, le taux effectif applicable aux revenus attribuables à l’offre de transmissions en continu sur demande s’élèverait à 15,2 pour cent dans un cas, mais à 12,6 pour cent dans l’autre.

[31] La situation se complique encore en raison du fait que la SOCAN a proposé d’ajouter un taux par écoute « additionnel » pour les transmissions en continu sur demande gratuites devant être payé par les entités qui fournissent déjà un autre service couvert par le projet de tarif. Par exemple, selon le projet de tarif de la SOCAN pour 2012, une entité fournissant des téléchargements limités avec des transmissions en continu paierait 12,6 pour cent de ses revenus bruts, plus 4,6 ¢ par transmission.

[32] Malgré ces complications, cette structure n’est pas nouvelle; on retrouvait une structure similaire pour les tarifs homologués suivants : SOCAN – Services de musique en ligne (2007); CSI – Services de musique en ligne (2007); CSI – Services de musique en ligne (2012).

[33] Par souci de simplification, quand nous renvoyons dans les présents motifs aux taux proposés pour un service en particulier, nous ne renvoyons généralement qu’au taux qui s’appliquerait dans le cas où une entité ne fournirait que ce service. De plus, toutes les sociétés de gestion ont révisé leurs taux proposés au cours de l’instance. Sauf indication contraire, les présents motifs font référence aux derniers taux proposés par chacune des sociétés.

[34] Cette simplification que nous faisons a l’avantage de bien cadrer avec le type de preuve présenté par les témoins experts. Les experts en économie ont présenté des analyses de points de référence fondées sur des offres séparées, et non des offres conjointes, ce qui n’est pas surprenant. En effet, il est notoire que les modèles économiques proposant des prix conjoints sont complexes. Pour établir un prix conjoint, il faut établir deux fonctions de revenus marginaux distinctes et la fonction de coût marginal conjointe, où les intrants de production peuvent être communs en tout ou en partie. Les problèmes associés à l’identification de trois fonctions sont beaucoup plus pernicieux que ceux associés à l’identification de deux fonctions.

[35] Toutefois, la simplification comporte un inconvénient important. Il est difficile, voire impossible, de comparer des tarifs basés sur des prix conjoints et le tarif que nous sommes appelés à homologuer aujourd’hui. Pour dissocier les éléments dans les prix conjoints, nous aurions besoin d’avoir la proportion des revenus associée à chaque activité ainsi que des indications de l’intensité de chaque activité. Cet inconvénient n’est pas en soi problématique, mais nous le mentionnons en raison de l’accent souvent mis, par la Commission, les sociétés de gestion et utilisateurs des tarifs, sur la comparaison entre les tarifs actuels et antérieurs.

A. La SOCAN

[36] Selon la position de la SOCAN, le droit de mise à disposition (DMD), qui fait maintenant partie du droit de communication en raison de l’ajout du paragraphe 2.4(1.1) à la Loi, entre en jeu dans le contexte des téléchargements, des transmissions en continu et des combinaisons de ceux-ci. La SOCAN affirme également que l’arrêt ESA de la Cour suprême n’a pas eu pour effet d’invalider son droit à un tarif pour les téléchargements limités ou les webdiffusions hybrides (qui permettent la mise en antémémoire de chansons en vue d’une écoute ultérieure). L’arrêt ESA faisait référence à des copies permanentes; or, selon la SOCAN, les téléchargements limités et les copies en antémémoire ne sont pas des copies permanentes.

[37] La SOCAN soutient qu’un service qui offre des webdiffusions hybrides devrait lui verser la moitié des redevances exigibles en vertu du tarif de la SOCAN, et remettre l’autre moitié à CSI. Enfin, la SOCAN fait valoir que l’assiette tarifaire devrait être basée sur les revenus bruts, et non sur les montants payés par les consommateurs. En apportant ce changement, on tiendrait compte des modèles d’affaires n’exigeant aucun paiement des consommateurs.

[38] Dans son énoncé de cause, [11] la SOCAN a proposé un taux de 3,4 pour cent des revenus associés aux téléchargements permanents. Les redevances minimales s’établiraient à 1,7 ¢ par chanson dans un ensemble de 13 chansons ou plus, et à 2,3 ¢ pour toutes les autres chansons. La SOCAN a également proposé un taux de 3,4 pour cent des revenus pour les téléchargements limités. Les redevances minimales seraient de 60,9 ¢ par abonné par mois en ce qui a trait aux téléchargements limités portables, et de 39,9 ¢ par abonné par mois pour les téléchargements limités non portables.

[39] La SOCAN a proposé un taux de 8,6 pour cent pour les transmissions en continu sur demande et les transmissions en continu recommandées. La redevance minimale serait fixée à 50,67 ¢ par abonné par mois, sauf dans le cas des transmissions en continu sur demande gratuites, où la redevance minimale correspondrait au plus bas des montants entre 50,67 ¢ par visiteur unique par mois et 0,13 ¢ par chanson transmise. Pour ce qui est des transmissions en continu sur demande hybrides, la SOCAN a proposé un taux de 8,6 pour cent applicable au palier des transmissions en continu de base, et de 50 pour cent du taux combiné devant être homologué par la Commission pour le palier des services de transmission en continu hybrides. En ce qui a trait aux vidéos de musique, la SOCAN a proposé un taux de 2,24 pour cent pour les téléchargements permanents et limités, et de 5,67 pour cent pour les transmissions en continu sur demande et recommandées.

B. CSI

[40] CSI a proposé un taux de 9,9 pour cent des revenus tirés des téléchargements permanents. Pour chaque chanson dans un ensemble de 13 chansons ou plus, les redevances minimales seraient de 4,1 ¢ par chanson pour 2011, et de 4 ¢ pour 2012-2013. Quant aux chansons ne faisant pas partie d’un ensemble, les redevances minimales s’élèveraient à 7,6 ¢ pour 2011, et à 7,8 ¢ pour les années 2012-2013. Pour la période à venir (2014 et les années suivantes, jusqu’à ce qu’un nouveau tarif soit homologué), CSI a demandé à ce qu’un ensemble soit défini comme étant constitué de 15 chansons ou plus, au lieu de 13 chansons ou plus.

[41] CSI a proposé un taux de 9,9 pour cent des revenus pour les téléchargements limités. Les redevances minimales équivaudraient au plus élevé des montants suivants : 99 ¢ par abonné par mois et 0,17 ¢ par écoute pour les téléchargements limités portables. Dans le cas des téléchargements limités non portables, les redevances minimales correspondraient au plus élevé des deux montants suivants : 66 ¢ par abonné par mois et 0,17 ¢.

[42] CSI a proposé un taux de 5,39 pour cent des revenus pour les transmissions en continu sur demande. Les redevances minimales correspondraient au montant le plus élevé entre 35,93 ¢ par abonné par mois et 0,094 ¢ par écoute, sauf dans le cas des transmissions en continu sur demande gratuites, où la redevance minimale correspondrait au plus bas des montants entre 35,93 ¢ par visiteur unique par mois et 0,094 ¢ par chanson transmise en continu.

[43] CSI a proposé deux taux possibles pour les transmissions en continu sur demande hybrides, tous les deux étant établis en fonction de la moitié du taux applicable aux transmissions en continu et la moitié de celui applicable aux téléchargements limités. Le premier taux reposait sur l’hypothèse que la SOCAN perçoive 3,4 pour cent des revenus pour les téléchargements limités, et le second, sur l’hypothèse que la SOCAN ne reçoive aucune redevance pour ceux-ci. À supposer que la SOCAN reçoive des redevances pour les téléchargements limités, CSI a proposé que les redevances soient fixées à 7,65 pour cent des revenus, sous réserve d’une redevance minimale correspondant au plus élevé des deux montants suivants : 50,96 ¢ par abonné par mois et 0,13 ¢ par écoute. Dans l’hypothèse où la SOCAN ne percevrait pas de redevances pour les téléchargements limités, CSI a proposé des redevances atteignant 9,35 pour cent des revenus, sous réserve d’un minimum du plus haut montant entre 62,31 ¢ par abonné par mois et 0,16 ¢ par écoute.

[44] CSI a proposé des redevances équivalant au plus élevé des montants entre 3,24 pour cent des revenus et 0,022 ¢ par écoute pour la webdiffusion non interactive. S’agissant de la webdiffusion interactive, elle a proposé des redevances correspondant au montant le plus élevé entre 6,22 pour cent des revenus et 0,042 ¢ par écoute. Pour la webdiffusion hybride non interactive, CSI a proposé des redevances qui équivaudraient au plus élevé des deux montants suivants : 6,68 pour cent des revenus et 0,045 ¢ par écoute, advenant que la SOCAN ait droit à des redevances pour les téléchargements limités. Dans le cas contraire, CSI a proposé que les redevances soient fixées au montant le plus élevé entre 8,42 pour cent des revenus et 0,057 ¢ par écoute. En ce qui a trait à la webdiffusion interactive hybride, CSI a proposé que les redevances soient fixées au plus élevé des montants entre 12,83 pour cent des revenus et 0,088 ¢ par écoute, et ce, en supposant que la SOCAN ait le droit de percevoir des redevances pour les téléchargements limités. Dans la négative, CSI a proposé des redevances fixées au plus haut des montants entre 16,17 pour cent des revenus et 0,110 ¢ par écoute.

[45] CSI propose que le code international normalisé des enregistrements (ISRC), le code universel des produits (CUP) et les champs identifiant les auteurs deviennent obligatoires pour les services de musique en ligne. De l’avis de CSI, la Commission a ouvert la voie à cette possibilité dans sa décision de 2012.

[46] CSI propose que les factures consécutives à un rapport tardif soient émises à l’occasion de son cycle de facturation suivant, plutôt que 20 jours après qu’elle ait reçu le rapport tardif, car la société de gestion a recours à un cycle de facturation normalisé, en dehors duquel elle trouve difficile d’envoyer des factures. Elle demande également qu’une pénalité de 50 $ soit imposée afin de décourager les rapports et paiements tardifs.

[47] CSI a également proposé une modification de l’assiette tarifaire. À l’heure actuelle, l’assiette tarifaire correspond aux montants payés par les abonnés ou les utilisateurs, et ne comprend pas les recettes publicitaires provenant de transactions de musique en ligne. La proposition de CSI visant à modifier l’assiette tarifaire afin qu’elle corresponde aux revenus bruts permettrait d’englober toutes ces « recettes indirectes ».

C. La SODRAC

[48] La SODRAC est la seule société de gestion à avoir proposé un tarif pour la reproduction de vidéos de musique. Dans ses projets de tarif, la SODRAC a proposé un taux de 9,9 pour cent des revenus pour la reproduction de vidéos de musique sous forme de téléchargements permanents. Pour les ensembles de 15 fichiers ou plus, la SODRAC a proposé une redevance minimale du plus élevé de 4,4 ¢ par œuvre et le double du minimum payable selon le tarif 22 de la SOCAN pour un tel téléchargement. Dans les autres cas, une redevance minimale du plus élevé de 6,6 ¢ par œuvre et le double du minimum payable selon le tarif 22 de la SOCAN. Dans son énoncé de cause, elle a proposé un taux de 6,5 pour cent des revenus pour la reproduction de tels vidéos sous forme de téléchargements permanents. Pour les ensembles de 20 vidéos ou plus, la SODRAC a proposé une redevance minimale de 2,7 ¢ par vidéo et de 9,9 ¢ par vidéo dans les autres cas.

D. Apple

[49] Apple fait valoir que les conclusions tirées par la Commission au sujet des tarifs de la SOCAN et de CSI dans sa décision Services de musique en ligne (2012) devraient être maintenues. Ces conclusions étaient divisées en trois volets. Premièrement, la Commission a tranché que le taux de CSI pour les téléchargements permanents et les téléchargements limités s’établissait à 9,9 pour cent. Deuxièmement, la Commission a conclu que la SOCAN n’avait pas le droit de percevoir des redevances pour les téléchargements. Et, troisièmement, la Commission a tranché que, même si la SOCAN avait eu le droit de percevoir des redevances à l’égard des téléchargements, elle aurait rejeté la base proposée par celle-ci pour le calcul des redevances concernées.

[50] Apple est d’avis que l’assiette tarifaire de CSI pour les téléchargements devrait demeurer la même, à savoir les recettes provenant des ventes. Apple a expliqué ne pas percevoir d’autres recettes. [12]

[51] Dans la Gazette du Canada, CSI a proposé des redevances mensuelles minimales pour tous les services, sauf les téléchargements permanents. Par ailleurs, dans son énoncé de cause, CSI a proposé des redevances minimales correspondant au plus élevé des montants entre une redevance mensuelle et une redevance par écoute. (voir l’annexe A) Apple soutient que la structure de redevances minimales proposée par CSI est ultra petita, puisqu’elle ne figurait pas dans la Gazette du Canada.

[52] CSI demande qu’Apple fournisse des renseignements sur les auteurs-compositeurs lorsqu’elle vend des téléchargements permanents. Toutefois, Apple fait remarquer que ces renseignements relèvent des éditeurs, et non des services. On ne devrait donc pas lui demander de fournir des renseignements sur lesquels elle n’exerce aucun contrôle.

[53] Enfin, Apple indique qu’elle offre gratuitement des extraits en écoute préalable d’œuvres musicales d’une durée d’au plus 90 secondes. Par conséquent, le libellé du tarif devrait être ajusté afin de tenir compte du fait que les extraits peuvent durer plus de 30 secondes.

[54] Au sujet de la SOCAN, Apple fait valoir que, s’il est rétabli par le paragraphe 2.4(1.1) de la Loi, le droit de percevoir des redevances pour les téléchargements n’a pris effet que le 7 novembre 2012, soit la date d’entrée en vigueur de la plupart des dispositions de la LMDA, y compris le paragraphe 2.4(1.1). Ainsi, conformément à la décision ESA, la SOCAN ne serait autorisée à réclamer aucune redevance pour des téléchargements effectués avant cette date au cours de la période visée par le tarif. Qui plus est, Apple allègue que la SOCAN n’a pas dûment soumis un projet de tarif pour la mise à disposition des œuvres musicales. Enfin, la SOCAN fonde sa détermination de la valeur de l’acte de mise à disposition sur l’évaluation du taux pour les téléchargements, qui est désormais écartée.

[55] Selon ce qu’affirme Apple, l’acte de mise à disposition fusionne avec l’acte de transmission dans le cas de chansons effectivement téléchargées. Ainsi, en vertu de la décision ESA, aucune redevance n’est payable pour ces actes. Pour ce qui est des chansons qui ne sont pas téléchargées, la valeur de la mise à disposition est minime. Apple souligne que la mise à disposition ne saurait s’appliquer à la webdiffusion, puisque, selon elle, les termes de la loi l’interdisent expressément.

[56] Apple soutient qu’elle tient très peu de vidéos de musique contenant des œuvres musicales faisant partie du répertoire de la SODRAC. [13]

[57] Apple a proposé les taux suivants pour la SOCAN : pour les téléchargements permanents et limités, des taux se situant entre 0,31 et 0,85 pour cent des revenus; pour les transmissions en continu recommandées, un taux de 5,25 pour cent des revenus.

[58] En ce qui concerne CSI, Apple a proposé les taux suivants : dans le cas des téléchargements permanents et limités, un taux de 9,9 pour cent des revenus; dans le cas de la webdiffusion, interactive ou non, un taux de 1,719 pour cent des revenus.

[59] Enfin, Apple a proposé un taux de 5,6 pour cent des revenus pour le tarif de la SODRAC applicable aux vidéos de musique.

E. L’ACR et Pandora

[60] L’ACR et Pandora ont déposé des pièces communes, et elles étaient représentées par le même avocat.

[61] L’ACR souligne que tout changement à l’obligation de produire des rapports contenant des renseignements sur l’utilisation de la musique devrait prévoir une période de transition pour permettre la mise à jour des systèmes et des données, des exigences claires en matière de notification en cas de défaut et une reconnaissance spéciale accordée aux stations qui ne sont pas en mesure de produire de tels renseignements conformément aux nouvelles exigences. L’ACR a fait valoir que les frais de retard sont une question d’application, et que l’établissement de ces pénalités échappe à la compétence de la Commission.

[62] Pandora soutient quant à elle qu’il ne saurait y avoir de rajustement pour des transmissions en continu autres qu’interactives. Le paragraphe 2.4(1.1) de la Loi dispose que « constitue notamment une communication au public par télécommunication le fait de mettre à la disposition du public par télécommunication une œuvre ou un autre objet du droit d’auteur de manière que chacun puisse y avoir accès de l’endroit et au moment qu’il choisit individuellement ». [Italique ajouté.] Pandora a expliqué que les transmissions en continu recommandées ne permettent pas aux usagers de choisir à quel moment jouera une chanson particulière, et que, par conséquent, lorsqu’elles sont mises à disposition, les chansons ne peuvent être assujetties à des redevances.

[63] Pour le tarif de la SOCAN à l’égard des transmissions en continu recommandées, l’ACR et Pandora ont proposé un taux de 5,3 pour cent des revenus, assorti d’une redevance minimale de 100 $ par année. Pour le tarif de CSI applicable aux transmissions en continu recommandées, elles ont proposé un taux de 1,7 pour cent des revenus, qui serait par ailleurs étagé selon les niveaux de revenus et rajusté en fonction du répertoire.

F. Les Réseaux

[64] Les Réseaux avancent que les arrêts ESA et Rogers rendus par la Cour suprême empêchent la SOCAN de percevoir des redevances pour les téléchargements permanents ou limités ou pour les téléchargements de vidéos de musique. À leur avis, la notion de « mise à disposition » s’applique aux communications, mais pas aux téléchargements, qui ne sont pas des communications selon les arrêts ESA et Rogers. [14] Ainsi donc, selon eux, le paragraphe 2.4(1.1) de la Loi n’a pas pour effet d’infirmer les décisions de la Cour suprême voulant que la SOCAN n’ait pas le droit d’exiger des redevances pour les téléchargements.

[65] En ce qui concerne la SOCAN, les Réseaux ont proposé les taux de redevances qui suivent. S’agissant des téléchargements permanents et limités, étant donné que la SOCAN n’a pas le droit de percevoir des redevances en ce qui les concerne, aucun taux ne devrait être homologué. Pour les transmissions en continu sur demande et les transmissions en continu recommandées, les Réseaux ont proposé des redevances représentant 5,3 pour cent des revenus. Enfin, pour les transmissions en continu sur demande de vidéos de musique, ils ont proposé des redevances correspondant à 3,02 pour cent des revenus.

[66] Les Réseaux ont proposé que les taux suivants soient accordés à CSI. Pour les téléchargements permanents et limités, ils ont proposé des redevances s’élevant à 9,9 pour cent des revenus. Et pour la webdiffusion, interactive ou non, ainsi que pour les transmissions en continu sur demande, ils ont proposé des redevances équivalant à 1,238 pour cent des revenus.

[67] Enfin, en ce qui a trait au tarif de la SODRAC pour les vidéos de musique, les Réseaux ont proposé des redevances correspondant à 5,6 pour cent des revenus.

IV. LA PREUVE

A. La SOCAN

[68] Marc Paquette, gestionnaire adjoint, Service des licences – Médias à la SOCAN, a témoigné au sujet de trois changements qui se sont produits dans le monde de la musique en ligne depuis la dernière audience, en 2010. Tout d’abord, il a mentionné l’arrêt ESA, qui a donné lieu à des remboursements aux services pour un montant de plus de 20 millions de dollars. Ensuite, il a évoqué le fait que la SOCAN ne perçoit plus de redevances pour les téléchargements. Et enfin, M. Paquette a souligné qu’il y avait eu une augmentation du nombre de services de diffusion en continu offerts au Canada. [15]

[69] Au moment de son témoignage, seulement quatre services de diffusion en continu détenaient une licence de la SOCAN. M. Paquette a discuté de façon assez détaillée de chacune des licences liées à ces services.

[70] M. Paquette a parlé de la difficulté que pose le « palier hybride » des services de musique en ligne. Les services hybrides sont des services de transmission en continu sur demande conjugués à des services de téléchargement limité. Étant donné qu’ils offrent des transmissions en continu sur demande, ils sont assujettis au tarif de la SOCAN représentant 7,6 pour cent des revenus. Et comme ils offrent également des téléchargements limités, ils sont aussi assujettis au tarif de 9,9 pour cent de CSI. [16] Le tarif total, qui s’élevait à 17,5 pour cent, était excessif selon les titulaires de licence de la SOCAN. [17] À la suite d’une entente intervenue entre la SOCAN et CSI, le montant total des redevances à payer pour les services hybrides a été abaissé. Qui plus est, la moitié de ce montant diminué devait être versé à la SOCAN, et l’autre moitié à CSI. Cette répartition moitié-moitié des redevances est conforme aux façons de faire d’autres sociétés de gestion ailleurs dans le monde en ce qui a trait au palier hybride.

[71] Pour terminer, M. Paquette a précisé qu’un service mixte comporte de multiples utilisations de musique, et une source de revenus. [18] En cela, il diffère d’un service hybride, qui suppose une seule utilisation de la musique, mais présente plusieurs fonctions telles que l’écoute en ligne et l’écoute hors ligne. [19]

[72] M. Stan Liebowitz, titulaire de la chaire Ashbel Smith en économie de l’Université du Texas, à Dallas, a témoigné en qualité d’expert économique de la SOCAN. M. Liebowitz a divisé la valeur du DMD en deux, la première partie correspondant aux chansons téléchargées, et la seconde, à la valeur d’option des chansons non téléchargées. [20] La valeur des chansons appartenant à la première partie est au moins aussi élevée que la valeur du droit de communication au public par télécommunication, tel qu’il existait avant la décision rendue par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt ESA (le « droit de communication antérieur à l’arrêt ESA »), dans la mesure où [TRADUCTION] « la mise à disposition d’une chanson est au moins aussi importante que la ‘communication’ d’un téléchargement ». [21] Si la valeur d’option des chansons non téléchargées est difficile à quantifier, elle est assurément supérieure à zéro. Donc, la valeur totale du DMD est quelque peu supérieure à 3,4 pour cent des revenus. Puisque les téléchargements permanents n’ont pas de valeur liée à la communication autre que le DMD, la valeur associée aux téléchargements permanents est plus élevée que 3,4 pour cent. Le taux projeté par la SOCAN pour les téléchargements permanents est de 3,4 pour cent, et non un taux supérieur à 3,4 pour cent des revenus.

[73] Aux dires de M. Liebowitz, la valeur des téléchargements limités est également supérieure à 3,4 pour cent, et ce, pour trois raisons. En premier lieu, dans le cas des téléchargements limités, le DMD s’applique à l’égard des chansons téléchargées. En second lieu, toujours dans le cas des téléchargements limités, les chansons qui ne sont pas téléchargées comportent une valeur d’option. Et, en dernier lieu, l’arrêt ESA de la Cour suprême n’a pas invalidé le droit de communication applicable aux téléchargements limités. Les trois montants correspondants sont cumulatifs, et le premier est établi à un taux de 3,4 pour cent : par conséquent, la valeur des téléchargements limités est supérieure à 3,4 pour cent. [22]

[74] M. Liebowitz a expliqué que les transmissions en continu recommandées différaient quelque peu des transmissions en continu sur demande, [23] mais que les deux étaient suffisamment semblables pour qu’on adopte la même approche de tarification à leur égard.

[75] M. Liebowitz a fixé un taux pour les transmissions en continu en recourant à deux méthodes différentes. D’abord, il a utilisé comme point de départ le taux en vigueur pour les transmissions en continu sur demande, soit 7,6 pour cent des revenus. Il a fait valoir qu’en y ajoutant le DMD, ce taux s’élèverait à entre 8 et 10 pour cent des revenus. Il n’a pas expliqué de quelle façon il en était arrivé à cette fourchette, qui suppose un taux de 0,4 à 2,4 pour cent pour le DMD.

[76] Ensuite, il a utilisé comme base le taux pondéré retenu pour les radios commerciales, soit 4,2 pour cent des revenus, puis a effectué trois rajustements. Pour le premier d’entre eux, il a tenu compte du fait que les services de transmission en continu utilisent davantage de musique que les stations de radio commerciale. En effet, les transmissions en continu sur demande ne contiennent que de la musique, alors que la radio commerciale diffuse également du contenu parlé, des bulletins météo, de la publicité, etc. Ce rajustement a amené M. Liebowitz à un taux de 5,3 pour cent. L’expert a ensuite tenu compte du fait que le contenu parlé présente une plus grande valeur que la musique. Comme M. Liebowitz l’a mentionné, la Commission a déjà souligné qu’à la radio, le caractère d’exclusivité rattaché aux animateurs faisait en sorte que la valeur du contenu parlé soit plus grande que celle de la musique. Le deuxième rajustement a porté le taux à 7,4 pour cent, selon l’hypothèse que le contenu parlé vaut le triple de la musique. M. Liebowitz a examiné d’autres hypothèses qui auraient eu pour effet d’élever ou d’abaisser ce taux, mais il a estimé que la sienne était la plus raisonnable. [24] Pour finir, il a ajouté une valeur associée au DMD, ce qui, encore une fois, a donné une valeur générale se situant entre 8 et 10 pour cent des revenus pour les transmissions en continu. Là encore, il n’a pas précisé comment il en était arrivé à cette fourchette.

B. CSI

[77] Caroline Rioux, présidente de la CMRRA, a déclaré dans son témoignage que CSI faisait affaire avec 23 services de musique en ligne. [25] Elle a expliqué que ces services avaient besoin des renseignements de CSI afin de pouvoir calculer les sommes dues par suite de la décision pour les années 2008-2010. Or un tel calcul n’est pas chose simple. CSI a notamment dû réexaminer ses dossiers financiers pour calculer de nouveau les montants exigibles. Le même problème lié au calcul se posait en ce qui a trait aux titulaires de licence de CSI offrant des téléchargements limités ou des transmissions en continu sur demande.

[78] Mme Rioux a parlé en détail des renseignements requis par CSI pour identifier une piste vendue. Au total, environ 97 pour cent des pistes vendues sont assorties d’un ISRC, alors que 41 pour cent d’entre elles ont un CUP et 12 pour cent, des renseignements sur les auteurs-compositeurs. [26] Le fait de rendre ces trois champs obligatoires améliorerait la capacité de CSI à identifier les pistes vendues. L’ISRC à lui seul ne suffit pas pour identifier une piste, en raison de la remise en marché des pièces musicales ainsi que des compilations.

[79] Mme Rioux a ensuite expliqué les difficultés qu’éprouve CSI à émettre des factures à mi cycle. [27] Les dates du cycle de paiement et de factures utilisé par CSI laissent peu de souplesse : si un rapport est en retard, CSI ne peut envoyer une facture qu’au trimestre suivant.

[80] Par exemple, en 2010, les rapports des ventes du deuxième trimestre devaient être communiqués à CSI le 20 juillet. Le 23 juillet, CSI a envoyé des factures à ses détenteurs de licence; les paiements étaient exigibles le 22 août. Puis, le 27 août, CSI a fait parvenir les données relatives aux paiements à la CMRRA et à la SODRAC. Enfin, le 15 septembre, la CMRRA et la SODRAC ont procédé à la distribution des redevances aux titulaires de droits. [28] S’il a soumis son rapport des ventes tardivement, le titulaire de licence n’a pu recevoir sa facture à temps, ce qui signifie qu’il réglera sa facture tardivement et que les redevances concernées ne seront pas distribuées au cours de la période de distribution trimestrielle prévue.

[81] Pour finir, Mme Rioux a clarifié la position de CSI au sujet des services hybrides. À l’instar de la SOCAN, CSI soutient que la Commission n’a jamais eu l’intention de faire en sorte que les services hybrides doivent payer un taux combiné de 17,5 pour cent des revenus aux deux sociétés de gestion.

[82] M. Marcel Boyer, professeur émérite d’économie de l’Université de Montréal, ainsi que M. Joël Blit, professeur adjoint d’économie à l’Université de Waterloo, ont témoigné en tant qu’experts économiques de CSI. [29] Ils ont suggéré des tarifs pour CSI relativement aux diverses utilisations d’œuvres musicales par les services de musique en ligne, comme en fait état le tableau à l’annexe B.

i. Téléchargements permanents

[83] MM. Boyer et Blit ont utilisé le modèle existant de CSI pour déterminer les taux applicables aux téléchargements permanents. Ce modèle comporte plusieurs étapes. Premièrement, la moyenne des redevances mécaniques est calculée. [30] Deuxièmement, on calcule également le prix moyen d’une piste téléchargée. Troisièmement, le ratio entre les deux est déterminé sous forme de pourcentage. Enfin, ce pourcentage est utilisé comme point de référence pour déterminer le taux de CSI pour les téléchargements permanents, sans autre ajustement.

[84] La moyenne des redevances mécaniques, pondérée en fonction de la part des activités d’octroi de licences de reproduction mécanique de trois groupes de titulaires de droits mécaniques (Music Canada, l’Association québécoise de l’industrie du disque, du spectacle et de la vidéo (ADISQ), et les titulaires de droits non affiliés à l’un de ces organismes), s’élève à 8,43 ¢ pour 2011 et à 8,36 ¢ pour 2012. Le prix moyen pondéré pour une piste téléchargée, en tenant compte des pistes téléchargées individuellement ou de celles téléchargées parmi un ensemble, est établi à 82,1 ¢ en 2011 et à 82,3 ¢ en 2012. Le ratio des redevances mécaniques moyennes par rapport à ces deux prix, exprimé en pourcentage, est de 10,3 pour cent pour 2011 et à 10,2 pour cent pour 2012. Dans le modèle en vigueur, ce ratio sert de point de référence pour déterminer le taux de CSI, sans autre ajustement.

[85] Le modèle existant fixe également les redevances minimales aux deux tiers du montant moyen des redevances. Pour les pistes individuelles, les prix moyens sont de 1,11 $ en 2011 et de 1,15 $ en 2012. En utilisant les taux de 10,3 pour cent et de 10,2 pour cent, les experts obtiennent des redevances minimales de 7,6 ¢ en 2011 et de 7,8 ¢ en 2012. Le prix moyen d’une piste faisant partie d’un ensemble se chiffre à 60,3 ¢ pour 2011 et à 59,8 ¢ pour 2012. Les redevances minimales obtenues sont donc de 4,1 ¢ pour 2011 et de 4,0 ¢ pour 2012.

ii. Téléchargements limités

[86] MM. Boyer et Blit ont ensuite examiné le taux pour les téléchargements limités. Ils soutiennent que ce taux devrait être le même que pour les téléchargements permanents, conformément aux trois principes suivants, tels qu’énoncés dans la décision Services de musique en ligne (2012). [31] Premièrement, il n’y a aucune différence dans l’importance relative des droits de reproduction et de communication entre les deux types de téléchargement. Deuxièmement, si l’on fixait un taux inférieur pour les téléchargements limités, étant donné que ceux-ci génèrent moins de revenus par piste, cela serait susceptible d’entraîner un double escompte. Troisièmement, l’élimination du droit de la SOCAN de percevoir des redevances pour les téléchargements permanents a eu pour effet de laisser davantage d’argent sur la table, argent qui, comme la Commission l’a estimé à juste titre, devrait être attribué à CSI. En conséquence, MM. Boyer et Blit font valoir qu’il conviendrait d’appliquer aux téléchargements limités le même taux que pour les téléchargements permanents, c’est-à-dire 10,3 pour cent en 2011 et 10,2 pour cent en 2012-2013.

[87] La redevance minimale proposée par les deux experts repose sur deux parties : un taux établi en fonction des abonnements, et un taux par écoute. Le premier se fonde sur les frais d’abonnement mensuel. La Commission fixe habituellement la redevance minimale aux deux tiers de la redevance moyenne. Dans sa décision de 2012, la Commission a conclu que le prix moyen des abonnements aux services de téléchargements limités était de 15 $ par mois pour les abonnements permettant les téléchargements portables, et de 10 $ par mois pour les autres. Aux dires de MM. Boyer et Blit, cette conclusion n’a pas été contredite par de nouveaux éléments de preuve. Dès lors, ils ne voient aucune raison de modifier les redevances minimales par abonné fixées à 99 ¢ par mois pour les téléchargements limités portables et à 66 ¢ par mois pour les téléchargements limités non portables.

[88] Le taux par écoute renvoie au taux applicable aux transmissions sur demande gratuites. MM. Boyer et Blit affirment qu’il devrait correspondre à la part des redevances qu’il convient d’attribuer à CSI sur le total des redevances minimales exigibles par la SOCAN et CSI pour les transmissions sur demande gratuites. Quoi qu’il en soit, afin de déterminer la part appropriée, ils ont formulé plusieurs hypothèses. Premièrement, ils supposent que si, dans sa décision de 2012, la Commission avait homologué un taux de redevances de la SOCAN pour les téléchargements, ce taux aurait été de 3,4 pour cent des revenus. Deuxièmement, ils supposent que la Commission homologuera un taux de 3,4 pour cent des revenus pour la SOCAN dans la présente instance. Troisièmement, ils supposent que la Commission reviendra sur son principe consistant à homologuer un même taux combiné pour CSI et la SOCAN pour les trois « activités essentielles » que sont les téléchargements permanents, les téléchargements limités et les transmissions en continu sur demande.

[89] À la suite de leurs arguments, MM. Boyer et Blit ont exposé les chiffres précis qui, selon eux, résulteraient de ces hypothèses. Les taux de redevances de CSI et de la SOCAN retenus en 2012 pour les transmissions en continu sur demande gratuites s’élevaient respectivement à 0,09 ¢ et à 0,13 ¢. Cela donnait au total, pour les transmissions en continu sur demande, une redevance minimale combinée de 0,22 ¢. Pour les transmissions en continu sur demande, le taux de CSI atteignait 5,18 pour cent, et celui de la SOCAN, 7,6 pour cent. Le taux combiné de CSI et de la SOCAN pour les transmissions en continu sur demande était donc de 12,78 pour cent. Néanmoins, si la Commission avait fixé le taux de la SOCAN à 3,4 pour cent pour les téléchargements, le taux combiné de CSI et de la SOCAN pour les téléchargements s’établirait comme suit : 3,4 + 9,9 = 13,3 pour cent.

[90] Dans la mesure où MM. Boyer et Blit soutiennent que la valeur combinée des transmissions en continu sur demande devrait être la même que celle des téléchargements, le taux applicable aux transmissions en continu sur demande gratuites doit être majoré afin de tenir compte de cette valeur combinée plus élevée pour les téléchargements. La nouvelle redevance minimale proposée pour les transmissions en continu sur demande gratuites s’élève donc à 0,23 ¢ (0,22 × (13,3/12,78)). Une partie de ce taux majoré doit ensuite être attribuée à CSI; ainsi, la part qui lui revient s’établit à 0,17 ¢ (0,23 × (9,9/13,3)). Par conséquent, la redevance minimale que les deux experts proposent équivaut à la plus élevée des valeurs entre 0,17 ¢ par fichier téléchargé à titre de téléchargement limité et 66 ¢ (pour les téléchargements non portables) ou 99 ¢ (pour les téléchargements portables) par abonné par mois.

iii. Transmissions en continu sur demande

[91] S’agissant des transmissions en continu sur demande, MM. Boyer et Blit ont proposé une majoration du taux en vigueur de 5,18 pour cent afin de tenir compte de la plus haute valeur combinée des taux de CSI et de la SOCAN pour les téléchargements. Ainsi, les experts ont avancé un taux de 5,39 (5,18 × (13,3/12,78)) pour cent des revenus.

[92] La redevance minimale proposée, encore une fois, est la plus élevée des deux taux suivants : le taux des redevances établi en fonction des abonnements et le taux par écoute. Le taux des redevances calculées en fonction des abonnements est la version majorée du taux précédemment homologué. Plus précisément, la redevance est de 35,93 ¢ (34,53 × (13,3/12,78)) par abonné par mois.

[93] De même, le taux par écoute proposé est la version majorée du dernier taux par écoute homologué. Il correspond à 0,094 ¢ (0,09 × (13.3/12,78)).

iv. Webdiffusion

[94] En ce qui a trait à la webdiffusion non interactive, MM. Boyer et Blit ont commencé par un élément extérieur au tarif pour les services de musique en ligne, à savoir le tarif applicable aux radios commerciales. Ils ont justifié cette approche en soutenant que le même ratio qui existe entre les paiements de droits d’auteur et les dépenses liées à la programmation musicale devrait s’appliquer à la radio commerciale et à la webdiffusion.

[95] La valeur du précédent tarif pour la radio commerciale (sans rajustements en fonction du répertoire) correspond à la valeur associée aux activités protégées par quatre droits : 4,2 pour cent pour la communication d’œuvres musicales; 4,2 pour cent pour la communication d’enregistrements sonores; 1,375 pour cent pour la reproduction d’œuvres musicales; 1,375 pour cent pour la reproduction d’enregistrements sonores. Le total s’élève à 11,15 pour cent des revenus.

[96] En ce qui concerne la radio commerciale, les droits d’auteur comptent pour 41,03 pour cent des dépenses engagées pour la programmation musicale. MM. Boyer et Blit posent l’hypothèse que, s’agissant de la webdiffusion, les droits d’auteur représentent 100 pour cent des dépenses au titre de la programmation musicale. Cela implique que le taux de 11,15 pour cent soit majoré à 27,18 pour cent. Sur ce pourcentage, la moitié se rapporte aux enregistrements sonores, ce qui laisse une proportion de 13,59 pour cent. Il en est ainsi puisque la Commission a affirmé à plusieurs reprises qu’une valeur égale devrait être accordée aux œuvres musicales et aux enregistrements sonores, avant rajustement en fonction du répertoire. Là-dessus, pour une (1) part qui se rapporte au droit de reproduction, 3,2 parts se rapportent au droit de communication. En effet, le Commission a constamment adopté un ratio de 1:3,2 entre le droit de reproduction et le droit de communication pour ce qui est de la radiodiffusion commerciale, et MM. Boyer et Blit ont transposé ce ratio à la webdiffusion. Ce calcul donne un taux de 3,24 pour cent pour CSI (et un taux correspondant de 10,35 pour cent pour la SOCAN).

[97] MM. Boyer et Blit recourent également à l’exemple de la radio commerciale pour calculer un taux par écoute pour la webdiffusion, afin de l’utiliser comme redevance minimale. En se basant sur le nombre de minutes par piste (3,92), sur la fraction du temps d’antenne consacré à la musique (65,6 pour cent) et sur les données concernant le nombre d’auditeurs, MM. Boyer et Blit ont déterminé que le taux par écoute associé au total des redevances payées par les stations de radio commerciale s’établissait à 0,077 ¢. Si l’on tient compte du ratio de 1:1 entre la valeur des œuvres musicales et celle des enregistrements sonores, et du ratio de 1:3,2 entre la valeur du droit de reproduction et celle du droit de communication, il s’ensuit, pour CSI, un taux par écoute de 0,009 ¢ applicable aux radios commerciales. Enfin, aux fins du calcul du taux par écoute pour la webdiffusion non interactive, le nombre d’écoutes doit être rajusté pour tenir compte du fait qu’en plus de représenter 100 pour cent des dépenses de programmation, la musique occupe également 100 pour cent du temps de programmation. Il résulte de ces rajustements un taux de 0,018 ¢ par écoute.

[98] Selon les calculs de MM. Boyer et Blit, le supplément pour l’interactivité [32] correspond au ratio net entre le prix d’une piste individuelle et le prix d’une piste faisant partie d’un ensemble. En tant que téléchargement numérique, une piste individuelle se vend 1,15 $, alors que le prix d’une piste faisant partie d’un ensemble est de 0,60 $. Le ratio entre ces deux prix s’établit à 192 pour cent. Ainsi, les deux experts font valoir que le supplément pour l’interactivité devrait atteindre 92 pour cent, et le taux applicable aux webdiffusions non interactives, 6,22 (3,24 × 1,92) pour cent des revenus. Quant au taux minimal par écoute, il devrait être de 0,035 ¢ (0,018 × 1,92).

v. Transmissions en continu sur demande hybrides

[99] En ce qui a trait aux services sur demande hybrides, qui consistent en des transmissions en continu sur demande et en des téléchargements limités, MM. Boyer et Blit ont émis plusieurs hypothèses. D’abord, ils ont estimé que les services hybrides étaient composés de transmissions en continu sur demande dans une proportion de 50 pour cent, et de téléchargements limités pour les 50 pour cent restants. Ensuite, ils ont posé l’hypothèse voulant que le montant des redevances payées pour cette moitié constituée de téléchargements limités devrait être partagé entre la SOCAN et CSI de la même façon que le montant total payé pour les téléchargements limités est divisé. Ils ont appliqué la même hypothèse aux transmissions en continu sur demande. Enfin, les deux experts ont présumé que la SOCAN se verrait accorder soit un taux de 3,4 pour cent, soit rien du tout pour les téléchargements limités, et ils ont examiné les deux cas séparément.

[100] À supposer que la SOCAN perçoive des redevances à un taux de 3,4 pour cent pour les téléchargements limités, MM. Boyer et Blit avancent que la moitié du taux de 9,9 pour cent applicable aux téléchargements limités, ainsi que la moitié du taux de 5,39 pour cent applicable aux transmissions en continu sur demande, devrait revenir à CSI, soit 7,65 pour cent au total. Si la SOCAN ne perçoit rien pour les téléchargements limités, les deux auteurs font valoir que CSI devrait se voir accorder la moitié du taux total combiné de 13,3 pour cent pour les téléchargements limités, de même que la moitié du taux de 5,39 pour cent pour les transmissions en continu sur demande. On arrive ainsi à un taux de 9,35 pour cent des revenus.

[101] MM. Boyer et Blit ont calculé le taux par écoute, encore une fois en se fondant sur le taux combiné de 0,23 ¢ pour les transmissions en continu gratuites sur demande, mais en utilisant la part de CSI pour les services hybrides. En admettant que la SOCAN ait droit à 3,4 pour cent des revenus pour les téléchargements limités, le taux par écoute de CSI serait de 0,13 ¢ (0,23 × (7,65/13,3)). Dans le cas contraire, le taux par écoute de CSI s’établirait à 0,16 ¢ (0,23 × (9,35/13,3)).

[102] Pour déterminer le taux établi en fonction des abonnements, MM. Boyer et Blit s’y sont pris de la manière qui suit. Pour la partie composée de transmissions en continu sur demande, ils ont avancé la proposition selon laquelle CSI devrait recevoir 17,96 ¢, soit la moitié des 35,93 ¢ proposés pour les transmissions en continu sur demande. Quant à la partie composée de téléchargements limités, les deux experts ont proposé que la moitié du montant correspondant au taux combiné des redevances par abonné de CSI et de la SOCAN, c’est-à-dire 44,35 ¢, soit répartie de la manière décrite ci-après. En supposant que la SOCAN ait droit à un taux de 3,4 pour cent pour les téléchargements limités, CSI devrait se voir accorder 33 ¢ (44,35 ¢ × 9,9/13,3). Dans le cas contraire, CSI devrait obtenir le plein montant de 44,35 ¢. En additionnant les deux parties en question, on parvient à des taux de 50,96 ¢ (17,96 ¢ + 33 ¢) ou 62,31 ¢ (17,96 ¢ + 44,35 ¢) pour CSI.

vi. Webdiffusion hybride

[103] Finalement, MM. Boyer et Blit ont proposé des taux pour la webdiffusion hybride. Celle-ci se compose en partie de webdiffusions, et en partie de téléchargements limités; les webdiffusions peuvent être interactives ou non. Ainsi, MM. Boyer et Blit ont proposé des taux aussi bien pour la webdiffusion non interactive hybride que pour la webdiffusion interactive hybride.

[104] La valeur proposée pour les webdiffusions hybrides est fondée sur plusieurs hypothèses. D’abord, la webdiffusion hybride serait composée à 50 pour cent de téléchargements limités, et à 50 pour cent de webdiffusions. Ensuite, pour répartir entre la SOCAN et CSI le montant des redevances à verser pour la moitié composée de téléchargements limités, il faudrait procéder de la même manière que pour les téléchargements limités dans leur ensemble. La même hypothèse vaut par ailleurs pour les transmissions en continu sur demande. Enfin, soit la SOCAN reçoit 3,4 pour cent pour les téléchargements limités, soit elle ne reçoit rien. MM. Boyer et Blit ont évalué séparément ces deux éventualités.

[105] Pour la partie constituée de webdiffusions, MM. Boyer et Blit ont suggéré des taux correspondant à 50 pour cent de ceux qu’ils ont proposés pour la webdiffusion. On obtient ainsi des taux de 1,62 pour cent pour la webdiffusion non interactive et de 3,11 pour cent pour la webdiffusion interactive.

[106] En ce qui concerne la partie des téléchargements limités, ils sont partis du principe que la valeur combinée du droit de reproduction et du droit de communication d’œuvres musicales s’élevait à 13,59 pour cent. En présumant que la SOCAN obtiendrait un taux de 3,4 pour cent pour les téléchargements limités, ils ont ensuite utilisé la proportion de 9,9/13,3 pour calculer le taux de CSI. Il en résulte un taux de 10,2 (13,59 × (9,9/13,3) pour cent. La moitié de ce taux, soit 5,06 pour cent, est attribué à la webdiffusion non interactive hybride. En ajoutant le supplément pour l’interactivité établi à 92 pour cent, on obtient un taux de 9,72 (5,06 × 1,92) pour cent. Les taux correspondants de CSI, si la SOCAN devait percevoir 3,4 pour cent pour les téléchargements limités, seraient donc de 6,68 (1,62 + 5,06) pour cent pour la webdiffusion non interactive hybride, et de 12,83 (3,11 + 9,72) pour cent pour la webdiffusion interactive hybride.

[107] En supposant que la SOCAN n’ait pas le droit de percevoir des redevances pour les téléchargements limités, les taux correspondants de CSI seraient de 6,80 pour cent en ce qui a trait à la partie composée de téléchargements pour la webdiffusion non interactive, et de 13,06 pour cent pour la webdiffusion interactive. Au total, les taux de CSI s’établiraient donc à 8,42 (1,62 + 6,80) pour cent pour les webdiffusions non interactives, et à 16,17 (3,11 + 13,06) pour cent pour les webdiffusions interactives.

[108] Les redevances par écoute applicables à la webdiffusion hybride sont calculées de la même façon.

C. La SODRAC

[109] Martin Lavallée, directeur des Licences et affaires juridiques à la SODRAC, a témoigné au sujet du tarif 6 de la SODRAC. Il a donné des explications sur les contrats d’adhésion qui sont actuellement en usage à la SODRAC, et dont il était question dans l’énoncé de cause de l’organisme. En vertu de ces contrats, les auteurs et compositeurs cèdent leur droit exclusif d’autoriser ou d’interdire toute reproduction d’une œuvre musicale, dans tous les médias connus ou présentement inconnus, à l’exception du papier, à l’égard de la totalité de leur catalogue passé, présent et à venir. Les éditeurs peuvent également faire cession de droits exclusifs, bien que leurs contrats diffèrent de ceux des auteurs et compositeurs, en raison de la chaîne de titres.

[110] M. Lavallée a expliqué que le taux principal de 5,64 pour cent appliqué aux vidéos de musique était tiré du taux de 9,9 pour cent de CSI pour les œuvres musicales. [33] Dans l’énoncé de cause de la SODRAC, deux redevances minimales ont été proposées pour les vidéos de musique: l’une pour les vidéos de musique faisant partie d’un ensemble de 20 ou plus, et l’autre pour les vidéos individuels. L’énoncé de cause ne renfermait aucun éclaircissement sur la provenance de cette définition d’un ensemble. M. Lavallée a expliqué que, par suite d’une entente entre la SODRAC et l’ADISQ, à partir de la 20e œuvre musicale, les œuvres seraient traitées comme faisant partie d’un ensemble et la redevance minimale correspondante s’appliquerait.

D. Les sociétés de gestion

[111] M. Michael Murphy, professeur à la School of Radio and Television Arts de l’Université Ryerson, a témoigné sur la pertinence accrue des transmissions en continu en ce qui a trait aux appareils mobiles. En 2006, à l’époque où la Commission s’est penchée pour la première fois sur les tarifs pour les services de musique en ligne, la diffusion en continu vers des appareils mobiles était pratiquement impossible à cause du coût élevé des données et de la lenteur des transferts de données. [34] Aujourd’hui, les appareils mobiles se taillent la part du lion dans les statistiques sur la webdiffusion.

[112] Selon M. Murphy, près de 24 000 applications de musique sont disponibles au Canada au moment de l’audience. [35] Certaines de ces applications permettent un accès hors ligne, ce qui équivaut à un téléchargement limité.

[113] Reprenant le témoignage qu’il avait rendu dans la procédure relative au Tarif 8 de Ré:Sonne (2014), [36] Webdiffusions non interactives et semi interactives, M. Murphy a indiqué que les consultations de pages ne pouvaient constituer un indicateur valable pour mesurer l’utilisation de la musique. En revanche, la plupart des services américains ont mis en place des technologies qui leur permettent de compter le nombre d’écoutes, ce que leur impose de faire le Copyright Royalty Board des États-Unis. [37]

[114] M. Murphy a décrit la technologie connue sous le nom de téléchargement progressif. Semblable à la diffusion en continu, en ce que l’enregistrement fait l’objet d’une lecture au moment de sa transmission du serveur, elle permet aussi de stocker une copie dans l’appareil local de l’utilisateur afin d’en faciliter le rembobinage et la relecture. [38] Au cours de son témoignage, M. Murphy a aussi expliqué le fonctionnement de plusieurs services, dont les services non interactifs et interactifs. Enfin, M. Murphy a dit des services infonuagiques qu’ils pouvaient être décrits comme des casiers ou des entrepôts numériques. [39] Les casiers numériques ne servent qu’au stockage hors ligne, alors que les entrepôts numériques servent en quelque sorte à mettre en correspondance la bibliothèque de l’utilisateur et celle du service.

E. Apple

[115] Jennifer Walsh, directrice nationale d’iTunes au Canada, a témoigné pour le compte d’Apple. Mme Walsh a expliqué qu’iTunes offre seulement des téléchargements permanents, sauf pour les transmissions en continu préalables et les extraits en écoute préalable d’une durée maximale de 90 secondes. [40] Les vidéos de musique sont des téléchargements permanents, alors que les films de concert sont offerts en location, c’est-à-dire qu’ils peuvent faire l’objet d’un téléchargement limité.

[116] Le service iTunes dans le nuage offre de nombreuses fonctions. Les utilisateurs peuvent stocker la musique qu’ils ont achetée par l’entremise de la boutique iTunes « dans le nuage » et y accéder au moyen de divers appareils. Ils peuvent diriger un téléchargement de la boutique iTunes vers plus d’un appareil. Ils peuvent également télécharger de nouveau la pièce musicale achetée dans un appareil, et plus tard dans un autre. Cela évite de devoir synchroniser les appareils; de plus, il est possible d’accéder de nouveau, sans frais, à la copie permanente d’un téléchargement payé. [41]

[117] Le service iTunes Match coûte à ses utilisateurs 27,99 $ par année. En échange, le service offre une mise en correspondance des chansons entre la bibliothèque de l’utilisateur et celle de Match. Les chansons qui ne sont pas jumelées sont téléversées dans la bibliothèque Match. Les utilisateurs ont accès en tout temps à leur bibliothèque Match avec l’appareil de leur choix. [42]

[118] Mme Walsh a aussi expliqué ce qu’étaient les transmissions en continu préalables sans frais. Ces transmissions en continu préalables ne sont offertes que dans la semaine précédant la sortie d’un album; il s’agit de transmissions en continu d’albums complets. Elles ont pour effet de stimuler les ventes, elles ne les remplacent pas. [43]

[119] Mme Walsh a ensuite décrit le service iTunes Radio, qui est disponible aux États-Unis, mais pas au Canada. Ce service offre un accès à des stations de genre et de sous-genre dont la programmation est établie par l’équipe de musique d’iTunes. [44]

[120] Enfin, Mme Walsh a abordé la question du tarif vidéo de la SODRAC. Comme très peu de vidéos d’iTunes contiennent de la musique SODRAC, Mme Walsh craint que les exigences en matière de rapports soient onéreuses. [45]

[121] M. Hal Singer, directeur général, Navigant Economics, a témoigné à titre d’expert en économie pour le compte d’Apple. Il a critiqué l’analyse de la valeur du DMD à laquelle M. Liebowitz s’est livré. M. Singer a d’abord dit que la Commission n’avait pas recouru à une approche fondée sur la négociation pour arriver à la valeur de 3,4 pour cent attribuée au droit de communication antérieur à l’arrêt ESA. Ensuite, même s’il convenait de recourir à une approche fondée sur la négociation pour déterminer la valeur du DMD, M. Liebowitz ne comprend pas en quoi le pouvoir de négociation de la SOCAN a changé. [46]

[122] La valeur du DMD proposée par M. Singer pour les chansons téléchargées se situe entre 0,31 et 0,85 pour cent du prix d’un téléchargement. M. Singer a soutenu que la valeur associée au DMD pour les chansons non téléchargées était de minimis et qu’elle ne nécessite pas d’ajustement, ce qui donne pour l’ensemble des chansons un DMD dont la valeur totale se situe entre 0,31 et 0,85 pour cent. Lorsqu’on lui a demandé durant son témoignage si 0,31 pour cent était une valeur de minimis, M. Singer a expliqué que ce n’était pas le cas. [47]

[123] M. Singer a convenu avec MM. Liebowitz, Boyer et Blit que le point de départ approprié pour la webdiffusion était la radio commerciale. M. Liebowitz a procédé à trois ajustements – concernant l’utilisation de la musique, la productivité de la musique et le DMD – alors que MM. Boyer et Blit en ont fait deux – concernant les dépenses de programmation et l’interactivité. M. Singer s’est dit d’accord avec l’idée d’un rajustement concernant l’utilisation de la musique, mais il a critiqué les autres estimant qu’ils n’étaient pas justifiés. [48]

[124] Premièrement, M. Singer a expliqué que, si la musique génère moins de recettes par heure que le contenu parlé, c’est que sa productivité marginale est inférieure. Il a ensuite souligné que M. Liebowitz a intégré une hypothèse à son analyse – celle d’une productivité marginale constante du contenu musical et du contenu parlé. Or, il ne peut y avoir de productivité marginale constante de la musique et du contenu parlé, parce que si c’était le cas, la productivité marginale de la musique serait inférieure à celle du contenu parlé, quelle que soit la façon dont le contenu parlé et le contenu musical sont répartis. Ainsi, la façon de maximiser la productivité serait de ne jamais faire jouer de musique et de faire en sorte que la radio commerciale se compose à 100 pour cent de contenu parlé. [49] Comme ce n’est pas ce que l’on observe en réalité, l’hypothèse d’une productivité marginale constante est donc fausse.

[125] Deuxièmement, M. Singer a fait valoir que le DMD ne devrait pas s’appliquer à la webdiffusion. La valeur du DMD est essentiellement une valeur d’option; les utilisateurs ont l’option d’écouter une chanson à un moment donné parce qu’elle a été mise à leur disposition. Toutefois, la radio commerciale intègre déjà un nombre considérable de valeurs d’option en raison de la diversité des options offertes. Certaines stations font jouer du rock, d’autres du jazz et d’autres encore de la musique country. Si le DMD s’applique à la radio commerciale, la valeur d’option est déjà intégrée dans ses taux. Ainsi, un taux visant la webdiffusion qui est fondé sur celui de la radio commerciale ne nécessite pas d’ajustement pour le DMD. De plus, la valeur du DMD est imprécise et n’est pas connue. [50]

[126] Troisièmement, M. Singer a critiqué le rajustement apporté par MM. Boyer et Blit à la valeur de référence associée à la radio commerciale afin de tenir compte des dépenses liées à la musique, estimant qu’il met à mal cette valeur, car il outrepasse le rajustement déjà établi par la Commission selon un ratio de cinq pour un. On peut soutenir que, plus il est nécessaire d’apporter des rajustements à un point de référence, plus on l’affaiblit et moins il peut servir. De l’avis de M. Singer, le rajustement proposé par MM. Boyer et Blit est considérable.

[127] En outre, le rajustement proposé par MM. Boyer et Blit repose sur l’hypothèse que les droits d’auteur sur la musique représentent 100 pour cent des dépenses de programmation des webdiffuseurs. [51] Cette hypothèse n’a pas été vérifiée et, selon M. Singer, elle est probablement fausse.

[128] Quatrièmement, M. Singer critique le rajustement proposé par MM. Boyer et Blit quant à l’interactivité. Soit ce rajustement n’est pas nécessaire parce que l’interactivité générera des revenus additionnels pour les webdiffuseurs, soit il est inapproprié, parce qu’il équivaut à imposer une sanction pécuniaire aux webdiffuseurs qu’ils ne pourront pas compenser. [52]

[129] Enfin, M. Singer a critiqué le taux par écoute proposé par CSI pour les webdiffuseurs. Ce taux est à sens unique en ce qu’il protège CSI des risques, mais lui permet de participer aux profits. De plus, il est excessif puisqu’il en résulte qu’Apple se trouverait à payer 20 pour cent de ses revenus sous l’égide de ce taux par écoute. [53]

F. L’ACR et Pandora

[130] M. Joseph Kennedy, directeur général et président émérite de Pandora Media, a commencé son témoignage en décrivant le Music Genome Project. Chaque chanson retenue pour faire partie du répertoire de Pandora est analysée par un membre de l’équipe d’analyse musicale de Pandora, qui lui attribue une cote en fonction de 100 à 500 (selon le genre) caractéristiques musicales. Les pistes analysées sont versées dans la base de données de Pandora et chaque chanson est convertie en un vecteur de dimension n, où le « n » représente le nombre de caractéristiques attribuées à cette chanson en particulier. Le Music Genome Project, qui est protégé par brevet, ainsi que d’autres algorithmes complexes apparient les chansons qui ont des caractéristiques communes. [54]

[131] M. Kennedy a ensuite donné quelques mesures du succès que Pandora a connu au cours des deux dernières années. Le nombre d’utilisateurs inscrits a plus que doublé et celui des utilisateurs actifs, presque doublé. Le nombre de pouces (levés ou baissés) a plus que triplé et la part de Pandora de l’écoute totale de radio est passée de 3,4 à 8,1 pour cent. [55]

[132] M. Kennedy a témoigné au sujet des taux de redevances payés par Pandora aux États-Unis. Pour les œuvres musicales, Pandora verse 4,3 pour cent des revenus. Pour les enregistrements sonores, Pandora verse 55,9 pour cent des revenus. [56] M. Kennedy a aussi témoigné au sujet des taux de redevances que Pandora verse en Australie et en Nouvelle-Zélande; ces données sont hautement confidentielles.

[133] Enfin, M. Kennedy a souligné que Pandora ne pouvait fournir certains renseignements concernant l’utilisation de la musique, notamment l’ISRC, le code international normalisé pour les œuvres musicales (ISWC), le Global Release Identifier Standard (GRid), ainsi que l’auteur, le compositeur et l’éditeur de l’œuvre musicale. [57]

[134] M. David Reitman, vice-président, Charles River Associates, a témoigné à titre d’expert en économie pour le compte de l’ACR et de Pandora. Il a convenu avec MM. Liebowitz, Boyer, Blit et Singer que le point de départ approprié quant aux tarifs applicables à la webdiffusion est la radio commerciale, ainsi qu’avec MM. Liebowitz et Singer que le tarif de la radio commerciale devait être rajusté en fonction de l’utilisation de la musique. M. Reitman n’était cependant pas d’accord avec les autres rajustements.

[135] M. Reitman a précisé que la valeur devrait être associée aux profits, et non aux recettes. À la limite, la valeur d’une minute de musique doit être égale à celle d’une minute de contenu parlé. Naturellement, les recettes découlant d’une minute de programmation parlée ne doivent pas nécessairement être égales à celles d’une minute de programmation musicale. [58] Selon M. Reitman, M. Liebowitz confond valeur et recettes, alors que MM. Boyer et Blit confondent valeur et coûts.

[136] M. Reitman a convenu avec M. Singer qu’il n’était pas nécessaire de prévoir un supplément pour l’interactivité, étant donné que l’interactivité générera des recettes additionnelles et qu’une partie de ces recettes sera versée aux créateurs sous forme de redevances. [59]

[137] M. Reitman a qualifié d’excessif le taux par écoute proposé par MM. Boyer et Blit; à son avis, il empêcherait un webdiffuseur comme Pandora de s’établir au Canada.

[138] Enfin, M. Reitman a proposé que le tarif de CSI pour la webdiffusion soit étagé, et ce, pour la même raison que celle pour laquelle le tarif pour la radio commerciale est étagé; les stations à revenus modestes ont tendance à être moins rentables. [60]

G. Les Réseaux

[139] M. Christian Breton, vice-président du Secteur musique pour le Groupe Archambault, a témoigné pour le compte des Réseaux.

[140] M. Breton a décrit l’offre de service Zik : 9,99 $ par mois pour le service Internet seulement, et 14,99 $ par mois pour le service Internet et la téléphonie mobile, en plus d’une période d’essai gratuit de 14 jours pour tous les abonnés. Il s’agit d’un service de diffusion en continu en ligne. Le reste du témoignage de M. Breton était confidentiel ou hautement confidentiel, car il portait sur les aspects financiers du service ainsi que sur les particularités techniques de sa mise en œuvre.

V. QUESTIONS JURIDIQUES

A. Le taux de redevances de la mise à disposition et la transmission subséquente

[141] Dans la décision connexe, Services de musique en ligne (CSI: 2011-2013; SOCAN (2011-2013); SODRAC (2010-2013) – Droit de mise à disposition, [61] rendue en même temps que la présente, la Commission a déterminé que :

  • le fait de mettre une œuvre ou tout autre objet du droit d’auteur sur un serveur d’un réseau de télécommunication de manière que chacun puisse, sur demande, déclencher la transmission de cette œuvre ou de cet objet du droit d’auteur, que ce soit sous la forme d’une diffusion en continu ou d’un téléchargement – qu’une telle demande se concrétise ou non – est réputé constituer une communication au public par télécommunication;
  • le paragraphe 2.4(1.1) de la Loi s’applique à la mise à disposition qui peut donner lieu à des diffusions en continu, des téléchargements, ou les deux;
  • l’introduction du paragraphe 2.4(1.1) de la Loi n’a pas eu pour effet d’écarter l’arrêt ESA de la Cour suprême du Canada;
  • le fait de mettre une œuvre à la disposition du public demeure une communication au public par télécommunication, peu importe que la transmission subséquente soit un téléchargement ou une diffusion en continu; la mise à disposition demeure distincte de la transmission subséquente. La mise à disposition et la transmission ne deviennent pas un seul et unique acte plus large.

[142] Conformément au Décret fixant plusieurs dates d’entrée en vigueur de diverses dispositions de la loi [62] (le Décret EEV), le paragraphe 2.4(1.1) de la Loi est entré en vigueur le 7 novembre 2012. [63]

[143] La SOCAN n’est pas autorisée à percevoir des redevances relativement à la mise à disposition d’œuvres musicales pour la période précédant le 7 novembre 2012.

[144] De plus, pour la période s’étalant du 7 novembre 2012 au 31 décembre 2013, nous ne sommes pas en mesure d’établir et d’homologuer un tarif distinct pour la portion de la communication au public par télécommunication qui correspond à la mise à disposition, pour les raisons suivantes.

[145] Dans SOCAN 22.B-G (2008), [64] la Commission a refusé d’établir un taux pour les « autres sites » examinés dans cette affaire. Dans cette décision, elle a fait valoir plusieurs motifs qui sont pertinents en l’espèce. Premièrement, il aurait été inéquitable de fixer un taux à l’aveuglette. Deuxièmement, la Commission ne disposait pas de points de repère fiables sur lesquels fonder la fixation d’un taux. Troisièmement, la Commission ne pouvait pas, faute de preuve, remplir ses obligations, telles que prescrites par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt ACR c. SOCAN et SCGDV, [65] de justifier adéquatement dans ses motifs la façon dont elle s’y est prise pour arriver au taux du tarif.

[146] Dans le cadre d’un contrôle judiciaire, la Cour d’appel fédérale a convenu avec la Commission que :

il aurait été déraisonnable pour la Commission d’homologuer cette catégorie contestée du projet de tarif 22 en l’absence de la preuve probante nécessaire, sur le fondement de simples conjectures et approximations, surtout compte tenu de la longue période rétroactive visée […]

[R]endre une décision du genre de celle que demande la SOCAN, en l’absence de cette preuve, serait un acte arbitraire et déraisonnable […] [66]

[147] De la même façon, dans le cas qui nous occupe, la preuve présentée par la SOCAN et les opposantes quant à la valeur de la mise à disposition est nettement insuffisante. Nous commencerons par la preuve présentée par la SOCAN.

[148] La SOCAN décrit une situation hypothétique de négociations entre les titulaires de l’élément « mise à la disposition » de la communication au public et les titulaires du droit de communication antérieur à l’arrêt ESA. S’exprimant au nom de la SOCAN, M. Liebowitz souligne que :

[TRADUCTION] [d]’un point de vue économique, il est par conséquent difficile d’imaginer qu’un négociateur agissant au nom des titulaires du DMD (même en excluant l’élément « option » de la valeur), assis dans une pièce en présence des titulaires d’autres droits et des utilisateurs de ces droits, serait dans une position de négociation plus faible que ne le serait un négociateur comparable, à une époque antérieure à l’arrêt ESA, représentant les titulaires du droit de communication. Cela signifierait que la valeur marchande de l’élément autre que l’élément « option » du DMD serait égale ou supérieure à celle qu’avait le droit de communication antérieur à l’arrêt ESA (c.-à-d., 3,4 pour cent). [67]

[149] L’argument de la SOCAN, qui à la base est un exercice de réflexion, doit être rejeté pour deux motifs.

[150] Premièrement, la protection accordée à la mise à disposition d’une œuvre de la manière envisagée par le paragraphe 2.4(1.1) de la Loi n’existait pas pendant la période précédant l’arrêt ESA. La question du pouvoir de négociation relatif des titulaires du « droit de mise à disposition » et du « droit de communication antérieur à l’arrêt ESA » ne saurait être considérée comme un simple problème de « prise en otage. » [68]

[151] Deuxièmement, même si la question du pouvoir de négociation relatif était réglée, il n’est pas évident que la valeur exacte du droit de communication antérieur à l’arrêt ESA est de 3,4 pour cent. Dans Services de musique en ligne (2012), la Commission a déclaré que « nous aurions conclu que l’utilisation du modèle 22.A en général, et l’approche combinée en particulier, n’auraient pas été appropriées. » [69] Si le droit de communication antérieur à l’arrêt ESA avait existé en 2012, on ne sait pas quel taux la Commission aurait établi. Ce que l’on sait, c’est que la Commission n’aurait pas eu recours au modèle proposé par la SOCAN pour l’établir. Si la Commission avait homologué un taux de 3,4 pour cent, cela aurait été à peine plus qu’une simple coïncidence.

[152] La preuve présentée par les opposantes présente les mêmes lacunes. Comme M. Singer l’a écrit pour le compte d’Apple :

[TRADUCTION] Par conséquent, pour le téléchargement de chansons, il serait inapproprié d’attribuer ne serait-ce que la moitié de la valeur établie avant l’arrêt ESA aux « droits d’affichage »; les titulaires de droits d’affichage auraient droit tout au plus au tiers de la valeur qui revient au titulaire des droits de transmission. Par exemple, si ces droits de transmission représentent 10 pour cent, les droits d’affichage vaudraient approximativement 0,31 pour cent du prix d’un téléchargement; s’ils représentent 33,3 pour cent (la limite supérieure de la fourchette raisonnable), les droits d’affichage vaudraient approximativement 0,85 pour cent. [70]

[153] L’argument de M. Singer présente le même problème que celui de M. Liebowitz. Il présuppose l’existence à la fois d’un modèle fondé sur la négociation et d’un pouvoir de négociation relatif (en l’espèce, entre un dixième et un tiers). Il repose également sur le taux hypothétique de 3,4 pour cent attribué au droit de communication antérieur à l’arrêt ESA.

[154] Comme il n’y a pas suffisamment d’éléments de preuve de nature économique permettant d’établir le prix de la mise à disposition de manière distincte de celle de la communication par télécommunication, ou l’ajustement nécessaire au prix de la communication par télécommunication pour tenir compte de sa portée plus large, nous sommes incapables de le faire en l’instance.

[155] Nous espérons que la Commission disposera d’une preuve plus abondante et plus convaincante la prochaine fois qu’elle sera appelée à fixer ce taux. Au nombre des éléments de preuve qui pourraient à l’avenir s’avérer utiles à cet égard, mentionnons ceux qui permettraient de déterminer s’il faut établir un lien entre la valeur de la mise à disposition et la valeur de la transmission subséquente qui en découle; si le prix de la mise à disposition devrait varier selon le type de transmission subséquente qui en découle; comment établir la valeur de la mise à disposition d’une œuvre (ou d’un autre objet du droit d’auteur) lorsque aucune transmission subséquente n’en découle dans une période donnée; et si le prix de la mise à disposition devrait avoir un effet sur le prix d’autres activités ou sur la répartition des redevances entre les titulaires dont les droits sont touchés par l’exploitation d’un service de musique en ligne.

B. L’arrêt ESA et les téléchargements limités

[156] Dans l’arrêt ESA, la Cour suprême a conclu que l’autorisation donnée à une personne de télécharger une œuvre musicale n’emporte pas l’application du droit de communication au public par télécommunication. La Cour a insisté sur la différence entre les diffusions en continu et les téléchargements, et sur le fait que le téléchargement s’apparente davantage à la distribution d’une copie, [71] alors que la diffusion en continu s’apparente davantage à une exécution, en ce qu’elle « est de nature passagère et ne laisse pas le téléspectateur ou l’auditeur en possession d’une copie durable de l’œuvre. » [72]

[157] À notre avis, les conclusions tirées par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt ESA s’appliquent tout autant aux téléchargements limités qu’aux téléchargements permanents. La différence essentielle entre ces deux types de téléchargements est liée avant tout aux modalités de conservation des reproductions qui en découlent ou d’accès à ces reproductions plutôt que par la façon dont elles sont transmises ou la question de savoir si l’œuvre ainsi transmise peut être perçue ou non durant la transmission, ce qui était un facteur important dans l’arrêt ESA. Les téléchargements limités et permanents sont tous deux censés permettre la livraison d’une copie durable de l’œuvre au client. Les restrictions subséquentes à l’utilisation de cette copie, qu’elles soient de nature technique ou juridique, ne sont pas draconiennes – dans le scénario factuel qui nous a été soumis – au point de modifier complètement la nature de l’activité.

[158] Dans la mesure où la Cour suprême emploie le mot « permanent », [73] nous estimons qu’il est synonyme du mot « durable », [74] et qu’il ne se compare pas directement aux différents termes employés par les parties en l’espèce. L’emploi du terme « permanent » dans l’arrêt ESA visait à établir une distinction entre les copies permanentes et celles qui sont éphémères, transitoires ou temporaires. Compte tenu de ces différents termes, les téléchargements qualifiés de « limités » en l’espèce sont quand même permanents, conformément au sens donné à ce terme dans l’arrêt ESA.

[159] Par conséquent, les téléchargements dont il est question en l’espèce, qu’ils soient limités ou permanents, impliquent le même droit : le droit de reproduction.

C. Stockage sur nuage

[160] CSI affirme que ses projets de tarif visent des services de transmission en continu sur demande, de téléchargement limité, de téléchargement permanent ou de webdiffusion à des consommateurs, y compris un service de transmission de fichiers téléversés par des consommateurs de même que des services hybrides, lesquels [TRADUCTION] « permettent la sauvegarde des fichiers en tant que téléchargements limités au-delà de l’offre de transmission en continu sur demande et/ou de webdiffusion. » [75]

[161] Les projets de tarif de la SOCAN visent des services « qui livre des transmissions en continu (recommandées ou sur demande) et des téléchargements (limités ou permanents) à des abonnés ». Ils précisent qu’

[i]l est entendu que « service de musique en ligne » inclut les services de musique « cloud » (ou « en nuage ») et les autres services qui utilisent une technologie semblable, à l’exception des services offrant uniquement des transmissions en continu (autres que recommandées) pour lesquelles le fichier est choisi par le service, qui ne peut être écouté qu’au moment déterminé par le service et pour lequel aucune liste de diffusion n’est publiée à l’avance.

[162] Les projets de tarif de la SODRAC visent des services qui [TRADUCTION] « [offrent] et [transmettent] des téléchargements permanents aux consommateurs ».

[163] Avec l’entrée en vigueur de la LMDA, les nouvelles dispositions adoptées pourraient être pertinentes pour la question du stockage en nuage. Les paragraphes 31.1(4) à (6) de la Loi sont ainsi libellés :

(4) Sous réserve du paragraphe (5), quiconque fournit à une personne une mémoire numérique pour qu’elle y stocke une œuvre ou tout autre objet du droit d’auteur en vue de permettre leur télécommunication par l’intermédiaire d’Internet ou d’un autre réseau numérique ne viole pas le droit d’auteur sur l’œuvre ou l’autre objet du seul fait qu’il fournit cette mémoire.

(5) Le paragraphe (4) ne s’applique pas à l’égard d’une œuvre ou de tout autre objet du droit d’auteur si la personne qui fournit la mémoire numérique sait qu’un tribunal compétent a rendu une décision portant que la personne qui y a stocké l’œuvre ou l’autre objet viole le droit d’auteur du fait de leur reproduction ou en raison de la manière dont elle les utilise.

(6) Les paragraphes (1), (2) et (4) ne s’appliquent pas à l’égard des actes qui constituent une violation du droit d’auteur prévue au paragraphe 27(2.3).

[164] Comme il est possible que certaines des activités visées par les projets de tarif soient régies par ces dispositions, la Commission a émis l’avis suivant, le 28 mars 2014 :

[TRADUCTION] Les parties sont invitées à présenter leurs observations sur la question de savoir si le paragraphe 31.1(4) de la Loi sur le droit d’auteur, traitant de stockage, s’applique, et pourquoi, à l’une quelconque des activités visées par les projets de tarif dans le dossier mentionné ci-dessus […]

[165] En réponse à l’avis de la Commission, CSI a fait valoir que le paragraphe 31.1(4) de la Loi ne s’applique pas aux activités visées par ses tarifs. Elle a ajouté qu’elle ne présentait aucune observation sur l’application possible du paragraphe 31.1(4) aux services infonuagiques de musique car de tels services n’étaient pas visés par ses projets de tarif. La SODRAC a déclaré souscrire à la position exprimée par CSI, ajoutant que le paragraphe ne s’applique à aucune des activités visées par ses projets de tarif.

[166] La SOCAN n’a présenté aucune observation en réponse à l’avis de la Commission.

[167] Les Réseaux ont répondu que, même si les projets de tarif déposés par la SOCAN et CSI visent clairement des services infonuagiques, la proposition présentée par la SODRAC pourrait également englober de tels services. [76]

[168] Les Réseaux se sont fondés sur les déclarations du gouvernement concernant la LMDA, pour faire valoir que la Loi sur le droit d’auteur autorise maintenant la prestation de services qui permettent aux utilisateurs de télécharger des documents qu’ils ont stockés dans des espaces personnels de stockage en ligne sur lesquels ils exercent un contrôle, dans des enregistreurs personnels de vidéo sur réseau, dans des espaces de stockage personnels servant à la conversion de formats, ainsi qu’à l’aide de services de sauvegarde en ligne. [77]

[169] Les Réseaux ont soutenu que les fournisseurs de services en cause

[TRADUCTION] permettent à leurs utilisateurs de stocker leur musique sur un support numérique sans avoir à acheter et à conserver eux-mêmes des disques durs. Le fait pour un utilisateur de stocker sa musique et d’y avoir accès en ligne n’a pas pour résultat pratique de créer un nouveau type de service de musique en ligne. Ce service permet simplement à l’utilisateur d’économiser de l’espace chez lui et de stocker sa musique sur un support sécuritaire. [78]

[170] Les Réseaux citent l’arrêt ESA de la Cour suprême à l’appui de la proposition voulant que :

[TRADUCTION] les membres de la SOCAN et de CSI n’ont jamais touché de redevances pour l’insertion d’un disque compact dans un plateau de chargement ou pour la pression du bouton « lecture » d’un lecteur de cassette. L’utilisation des services de stockage en ligne par les consommateurs ne devrait pas créer un régime de responsabilité différent. [79]

[171] En réponse, CSI a soutenu :

[TRADUCTION] qu’il est encore tôt dans le cycle de vie des produits associés aux services infonuagiques de musique, et que les caractéristiques diffèrent énormément d’un service à l’autre. Bien qu’il soit possible que certains services infonuagiques de musique ou services de stockage en ligne respectent le paragraphe 31.1(4), d’autres ne le respectent peut-être pas.

Par conséquent, il serait inapproprié pour la Commission d’exclure explicitement les fournisseurs de stockage en ligne de l’application des projets de tarif, comme les Réseaux le proposent […] [U]n fournisseur de services qui voudrait se prévaloir de cette exception devrait prouver qu’il offre le type de service de stockage visé par le paragraphe 31.1(4), et que s’il offre d’autres caractéristiques, celles-ci ne l’empêchent pas de se prévaloir de l’exception. Toutefois, comme les projets de tarif déposés par CSI en l’espèce ne visent pas les « fournisseurs de stockage en ligne » ou les services infonuagiques de musique, la question est théorique pour ce qui est de la période de tarification examinée. [80]

[172] Même si nous sommes d’accord avec CSI pour dire que ce n’est pas seulement dans les cas prévus aux paragraphes 31.1(5) et (6) de la Loi que le paragraphe 31.1(4) ne s’applique plus, nous ne sommes pas convaincus que le simple fait d’offrir d’autres caractéristiques crée véritablement un risque que la disposition ne s’applique plus. Bien que les termes précis « du seul fait » soient nouveaux dans cette disposition, cette dernière ressemble à l’alinéa 2.4(1)b), lequel prévoit que :

n’effectue pas une communication au public la personne qui ne fait que fournir à un tiers les moyens de télécommunication nécessaires pour que celui-ci l’effectue;

[173] S’agissant de cette disposition, la Commission a déjà conclu que, pour autant que le fournisseur de services Internet offre des services « accessoires » à un fournisseur de contenu ou à un utilisateur final, il peut toujours invoquer le sous-alinéa 2.4(1)b) de la Loi comme moyen de défense à une allégation de violation de droit d’auteur, dans la mesure où ces « services accessoires » ne vont pas jusqu’à la participation à la communication de l’œuvre ou à l’autorisation de sa communication. [81] Cette approche a par la suite été approuvée par la Cour suprême du Canada. [82]

[174] Mentionnons également que, même dans les cas où le paragraphe 31.1(4) de la Loi pourrait ne pas s’appliquer, on peut se demander qui est effectivement l’auteur d’une communication lorsqu’un utilisateur stocke de la musique sur le serveur d’un fournisseur de services ou accède de nouveau à de la musique ainsi stockée.

[175] Nous concluons que, lorsque de la musique a été stockée à la demande de l’utilisateur et que c’est ce dernier qui contrôle ce qui est stocké dans l’espace qui lui a été attribué, il est impossible d’affirmer que le retrait éventuel de cette musique par l’utilisateur constitue une communication par le fournisseur de services. En outre, même s’il était possible d’affirmer que le fournisseur de services autorise la transmission, la communication en serait une d’« utilisateur à utilisateur »; il ne s’agirait pas d’un cas où la communication est faite au public. Par conséquent, le fournisseur de services n’autoriserait pas une activité visée par le paragraphe 3(1) de la Loi.

[176] Il en est ainsi, peu importe que la musique soit stockée telle quelle, qu’elle soit compressée, qu’elle soit stockée sur un support différent ou que la copie soit virtuelle (et qu’elle ne renvoie simplement qu’à une copie « maîtresse »). Les moyens technologiques utilisés pour le stockage d’œuvres, comme la déduplication de données, ne devraient changer en rien la responsabilité de la personne qui stocke l’œuvre. L’interprétation selon laquelle un fournisseur de services aurait à adopter des méthodes de stockage moins efficaces et plus coûteuses uniquement pour échapper à sa responsabilité en matière de droit d’auteur et, de toute évidence transmettre ces coûts additionnels à l’utilisateur final, serait fort probablement contraire à l’intention du législateur. Le principe de la neutralité technologique énoncé par la Cour suprême du Canada dans les arrêts ESA, Rogers, et plus récemment dans l’arrêt SRC c. SODRAC milite aussi fortement en faveur de l’approche que nous adoptons en l’espèce.

[177] Quoi qu’il en soit, comme l’a souligné CSI, les caractéristiques diffèrent nettement d’un service à l’autre. Ainsi, il nous est pratiquement impossible de statuer sur la fréquence d’application du paragraphe 31.1(4) de la Loi, ou sur la fréquence à laquelle il y a effectivement communication au public par télécommunication. Nous estimons qu’il n’est ni raisonnable ni pratique, à ce stade, d’homologuer un tarif qui vise quelques utilisateurs épars et qui laisse à ceux-ci le fardeau de prouver à CSI ou à d’autres sociétés de gestion collective qu’ils ne sont pas assujettis aux tarifs (ou qu’ils n’exigent pas d’en bénéficier).

[178] Étant donné que :

  • CSI affirme que son tarif ne vise pas les fournisseurs de services de stockage en ligne (ou services infonuagiques) (et que la SODRAC a affirmé qu’elle souscrit à la position de CSI);
  • la preuve indique qu’il existe une variation importante dans la manière dont les services sont offerts;
  • il existe une probabilité réelle que plusieurs de ces fournisseurs de services puissent bénéficier des dispositions du paragraphe 31.1(4) de la Loi ou ne transmettent pas d’œuvres au public par télécommunication,

nous concluons qu’il serait prématuré et inapproprié à ce stade d’homologuer un tarif qui vise des services, ou certaines composantes de ceux-ci, qui permettent aux utilisateurs de stocker et de récupérer de la musique.

[179] Nous excluons donc de l’application du présent tarif les services qui permettent à un utilisateur de stocker ou de récupérer (ou de demander au fournisseur de services de stocker ou de récupérer) un enregistrement sonore, une œuvre musicale ou une prestation contenue dans un tel enregistrement sonore. Que l’œuvre soit récupérée sous forme de transmission en continu ou de téléchargement n’a aucune incidence sur notre conclusion, car le paragraphe 31.1(4) de la Loi n’est pas une exception qui s’applique uniquement aux communications au public, mais une exception à la violation du droit d’auteur.

D. Portée des projets de tarif de la SOCAN

[180] Dans ses projets de tarif publiés dans la Gazette, la SOCAN a proposé une redevance ou un taux « additionnel » pour les webdiffusions gratuites. Le libellé des projets de tarif prévoit qu’un montant additionnel de 4,6 ¢ par transmission serait payable lorsqu’il y a une offre de transmissions en continu sur demande, de téléchargements limités, de téléchargements permanents ou (pour 2012-2013) de transmissions recommandées – incluant de transmissions gratuites.

[181] La SOCAN n’a pas présenté cette structure dans son énoncé de cause. La structure des projets de tarif soulève toutefois plusieurs questions. Premièrement, les projets de tarif visent-ils des webdiffusions non interactives et, le cas échéant, dans quelle mesure? Deuxièmement, les projets de tarif visent-ils des webdiffusions semi-interactives et, le cas échéant, dans quelle mesure? Nous examinerons tour à tour ces questions.

i. Les webdiffusions non interactives

[182] Les projets de tarif de la SOCAN proposaient des redevances pour la communication au public par télécommunication dans le cadre de l’exploitation d’un « service de musique en ligne ». Les projets de tarif définissaient « service de musique en ligne » comme incluant un service qui livre « des transmissions (recommandées ou sur demande) », mais excluant les « services offrant uniquement des transmissions (autres que recommandées) pour lesquelles le fichier est choisi par le service, qui ne peut être écouté qu’au moment déterminé par le service et pour lequel aucune liste de diffusion n’est publiée à l’avance ».

[183] Autrement dit, le tarif s’appliquerait aux télécommunications dans le cadre d’un service qui offre des webdiffusions interactives ou semi-interactives, mais pas d’un service qui offre uniquement des transmissions non interactives. En fait, dans les projets de tarif, la SOCAN ne proposait pas de taux indépendant pour les webdiffusions non interactives.

[184] Une question subsiste quant à savoir si le tarif que nous homologuons devrait prévoir un taux additionnel pour les webdiffusions non interactives gratuites. Il existe une ambiguïté sur la question de savoir si par le taux additionnel proposé on avait réellement l’intention de viser les webdiffusions non interactives gratuites. La définition proposée de « diffusion en continu » est suffisamment large pour viser les webdiffusions non interactives, mais les dispositions sur-le-champ d’application prévoient que le tarif établit les redevances devant être payées pour la communication d’œuvres dans le cadre de l’exploitation d’un « service de musique en ligne », ce qui comprend « un service qui offre » des webdiffusions interactives et semi-interactives, mais pas de webdiffusion non interactive.

[185] Deuxièmement, les projets de tarif indiquent qu’ils ne s’appliquent pas aux utilisations couvertes par d’autres tarifs, ce qui inclurait le Tarif no 22 – Internet – Autres utilisations de musique (Partie F – Sites web audio) [83] pour les années 1996-2006 qui s’applique aux sites web auxquels on accède normalement pour leur contenu audio uniquement, autres que des webdiffusions interactives ou téléchargements. La SOCAN a aussi proposé des tarifs distincts (comme le Tarif no 22 – Internet – Autres utilisations de musique (Partie B – Diffusions web sonores)) pour les années examinées en l’instance qui semblent s’appliquer à des webdiffusions non interactives.

[186] Étant donné que le libellé proposé est ambigu, que les projets de tarif et les tarifs existants de la SOCAN viseraient les webdiffusions non interactives et qu’il est important d’éviter l’homologation de tarifs dont les champs d’application pourraient se chevaucher, nous tranchons cette ambiguïté en concluant que les webdiffusions non interactives ne doivent pas être visées par le présent tarif.

ii. Webdiffusions semi-interactives

[187] Nous notons que dans ses projets de tarif, la SOCAN a proposé des taux de redevances pour les webdiffusions semi-interactives pour 2012 et 2013. Elle n’a pas proposé de taux distinct pour les webdiffusions semi-interactives pour 2011 malgré le fait que celles-ci sont visées par le projet de tarif. Par conséquent, nous établissons un taux indépendant pour les webdiffusions semi-interactives, uniquement pour 2012 et 2013.

VI. ANALYSE ÉCONOMIQUE

A. Méthode d’établissement des redevances

[188] Toutes les parties ont présenté des observations sur les taux de redevances en se fondant sur les taux déjà homologués par la Commission. Ainsi, la méthodologie que la Commission doit utiliser n’a pas vraiment été contestée : elle doit examiner les redevances prévues par les tarifs antérieurs pour des activités identiques ou similaires, et les rajuster au besoin. Bien que certains éléments de preuve aient été présentés quant aux taux de redevances versés par certains services de musique en ligne pour certains droits aux États-Unis, ces éléments n’ont pas été considérés comme étant des points de référence fiables.

[189] L’ACR et Pandora ont proposé que les taux applicables aux webdiffuseurs de contenu semi-interactif soient étagés comme suit : 1,66 pour cent des revenus pertinents excédant 1,25 million de dollars; 1,11 pour cent des revenus se situant entre 625 000 $ et 1,25 million de dollars; et 0,55 pour cent des revenus inférieurs à 625 000 $, le tout assujetti à un ajustement approprié en fonction du répertoire. [84] M. Reitman n’a toutefois pas justifié l’étagement de ces taux dans son rapport d’expert.

[190] CSI s’est opposée à une structure de tarif étagée pour deux raisons. Premièrement, la proposition d’étagement ne repose sur aucune justification économique. Deuxièmement, la Commission a déjà refusé un tarif étagé pour la webdiffusion dans la décision SOCAN 22.B-G (2008). [85]

[191] De façon générale, nous souscrivons au premier argument avancé par CSI. L’ACR et Pandora n’ont soumis aucun élément de preuve quant à la structure du marché de la webdiffusion. Nous ne savons pas si le montant de 1,25 million de dollars constitue une ligne de démarcation significative entre les webdiffuseurs de taille moyenne et ceux de grande taille, et nous ne savons pas si 625 000 $ constitue une ligne de démarcation significative entre les webdiffuseurs de petite taille et ceux de taille moyenne.

[192] Le tarif de la SOCAN pour la radio commerciale a été étagé en 2005 après que la Commission ait entendu la preuve et pris connaissance des états financiers de certaines stations de radio de petite taille. [86] Le tarif CSI pour la radio commerciale a été étagé en 2003 avec le consentement de toutes les parties. [87] En l’espèce, nous ne disposons d’aucune preuve tendant à indiquer qu’il serait nécessaire de recourir à l’étagement, ni que les parties ont convenu qu’un étagement s’impose. Ainsi, aucune raison économique ne justifie un tarif étagé.

B. Redevances pour la mise à disposition

[193] Nous n’établissons pas de redevances pour l’acte de mise à disposition dans la présente décision. Comme nous l’avons expliqué, la SOCAN n’a pas droit à un tarif pour la mise à disposition d’œuvres musicales puisque c’est seulement en 2014 qu’elle a proposé un tel tarif. Même si la SOCAN avait proposé un tarif pour la mise à disposition d’œuvres musicales pour l’année 2013, nous aurions néanmoins conclu qu’elle n’a pas présenté d’éléments de preuve suffisamment fiables pour que nous puissions attribuer une valeur à l’acte de mise à la disposition du public d’œuvres musicales.

C. Le répertoire de CSI

[194] Le dernier tarif homologué de CSI pour les services de musique en ligne prévoit, pour les transmissions en continu sur demande et les téléchargements limités, un taux exprimé selon une formule. Le taux homologué par la Commission pour une catégorie donnée de services devait être multiplié par le pourcentage des fichiers utilisés qui faisaient partie du répertoire de CSI. Ce mode d’établissement des redevances différait de celui que la Commission avait utilisé dans d’autres cas. La Commission avait alors rajusté le taux en fonction du répertoire, et ce taux était ensuite applicable à toutes les œuvres ou autres objets du droit d’auteur.

[195] Toutefois, le 21 février 2014, en réponse à une question de la Commission, CSI a proposé d’abandonner la méthode fondée sur le « pourcentage des fichiers » en faveur d’une approche fondée sur le taux rajusté en fonction du répertoire.

[196] CSI estime que cette approche pourrait être plus facile et plus efficace, à la fois pour CSI et ses détenteurs de licences, et qu’elle faciliterait certainement une distribution plus rapide et plus efficiente aux titulaires de droits. CSI prévoit, entre autres choses, qu’avec l’augmentation du volume d’activités de webdiffusion au Canada, les coûts transactionnels associés à l’analyse de l’utilisation du répertoire écoute par écoute, part par part, pour chaque service en exploitation, grimperont à un niveau inacceptable d’autant plus que ces analyses impliquent la présentation et la validation de rapports, de factures et de paiements trimestriels lorsque de nouvelles parts s’ajoutent au répertoire de CSI.

[197] CSI fait valoir que, bien qu’elle ne s’oppose pas en principe à l’application d’un taux rajusté en fonction du répertoire au regard du tarif qui sera homologué pour 2011 à 2013, elle n’a pas effectué une analyse de répertoire pour cette période, et pour les motifs déjà exprimés, elle n’a pas proposé de rajustement fondé sur le répertoire exprimé en pourcentage. Si la Commission le jugeait approprié, CSI ne s’opposerait pas à l’abandon de la formule A × B / C en faveur d’un modèle fondé sur un taux fixe rajusté en fonction du répertoire et à l’application du même rajustement de 90 pour cent qui a été appliqué à l’égard du tarif pour la radio commerciale pour la période de tarification de la présente instance. Il n’y a toutefois aucune preuve au dossier sur laquelle fonder un tel rajustement ou tout autre rajustement fondé sur le répertoire. [88]

[198] Aucune autre partie n’a formulé d’observations sur cette question. Compte tenu des renseignements dont nous disposons, nous sommes d’accord avec CSI pour dire que l’adoption d’un taux rajusté en fonction du répertoire se traduira vraisemblablement par une gestion plus efficace du tarif. CSI propose d’utiliser le taux de 90 pour cent pour le rajustement du répertoire que la Commission a appliqué dans d’autres situations. Nous sommes d’accord, et l’utiliserons au besoin.

D. Téléchargements permanents

i. Taux de la SOCAN

[199] Tout comme la Commission l’a fait dans Services de musique en ligne (2012), nous n’établissons pas de taux pour les téléchargements permanents en ce qui concerne la SOCAN, et ce parce que la SOCAN n’a pas le droit de percevoir des redevances pour la mise à disposition d’œuvres musicales en vertu du présent tarif et que nous avons conclu que l’offre de téléchargement permanent ne met pas par ailleurs en jeu le droit de communication.

ii. Taux de CSI

[200] CSI a proposé un taux de 9,9 pour cent des revenus pour les téléchargements permanents. Personne ne s’est opposé à cette proposition. Toutefois, MM. Boyer et Blit appliquent le modèle des redevances mécaniques, ce qui donne des taux de 10,2 et de 10,3 pour cent des revenus. Tout comme la Commission l’a affirmé en 2007, nous sommes d’avis que CSI devrait percevoir pour les téléchargements permanents des redevances équivalentes à celles qu’elle perçoit pour le pressage mécanique d’un CD. Nous aurions donc été enclins à homologuer ces taux. Toutefois, comme CSI n’a demandé qu’un taux de 9,9 pour cent, nous acceptons ce taux comme point de départ. En appliquant un rajustement en fonction du répertoire de 90 pour cent, nous obtenons un taux de redevances de 8,91 pour cent pour les téléchargements permanents.

iii. Écoute préalable d’extraits de chansons

[201] Certaines entités offrent gratuitement des extraits d’œuvres musicales en écoute préalable qu’elles vendent sous forme de téléchargements. La preuve ne suggère pas que, sur le plan qualitatif, ces extraits sont différents de ceux qui ont été examinés par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Bell, sauf en ce qui a trait à la durée de certains extraits.

[202] Dans l’arrêt Bell, la Cour suprême a examiné des extraits de 30 secondes; dans le cas présent, la preuve démontre que certains extraits sont d’une durée de 90 secondes. En ce qui a trait à ces extraits de plus longue durée, le facteur de l’ampleur de l’utilisation pourrait tendre davantage vers une utilisation inéquitable (ou tendre moins vers une utilisation équitable) que dans les cas où l’extrait est d’une durée de seulement 30 secondes. L’arrêt CCH établit qu’il y a des situations où il peut être possible de conclure à une utilisation équitable même lorsqu’une œuvre complète est utilisée; [89] ainsi, même quand le facteur de l’ampleur de l’utilisation tend de façon marquée vers une utilisation inéquitable, la conclusion générale, fondée sur tous les facteurs énumérés dans l’arrêt CCH, [90] peut tout de même en être une d’utilisation équitable.

[203] Nous concluons qu’en l’instance, sur l’ensemble, l’offre d’extraits en écoute préalable demeure équitable aux fins de recherche. Conséquemment, nous ne modifions pas les redevances pour CSI ni n’homologuons de redevances pour la SOCAN à l’égard de cette activité.

iv. Webdiffusions préalables d’albums

[204] Comme Mme Walsh l’a indiqué, Apple offre gratuitement des webdiffusions préalables d’albums. Ces webdiffusions ne sont disponibles qu’au cours de la semaine précédant la mise en marché de l’album. Il s’agit de transmissions de l’album en entier, et il est impossible de faire jouer une chanson en particulier.

[205] Ces webdiffusions d’albums font difficilement concurrence aux téléchargements d’œuvres musicales individuelles, aux ventes d’albums sur CD – et même aux webdiffusions interactives, étant donné que l’album doit être transmis directement (le client ne peut pas sélectionner une piste particulière ou encore sauter, rembobiner ou recommencer une chanson). [91]

[206] La preuve dont nous disposons à l’égard de ces activités montre que la pratique consiste à obtenir l’autorisation directement des titulaires de droits visés. [92] Les personnes qui ont obtenu cette autorisation n’ont pas besoin d’un tarif pour ces activités. Cela rend non nécessaire l’établissement de clauses cherchant spécifiquement à inclure les webdiffusions préalables d’album, même si ces clauses étaient appropriées.

[207] Si de telles webdiffusions sont non interactives, il n’est pas approprié, comme nous le concluons plus bas (voir les paragraphes 242-243), que nous établissions un taux à l’égard de la SOCAN pour les webdiffusions gratuites qui serait additionnel à d’autres services.

[208] Quoi qu’il en soit, même si nous tentions d’établir une redevance minimale non fixe pour les webdiffusions, soit pour la SOCAN soit pour CSI ou pour les deux, il serait très difficile de le faire.

[209] CSI a déposé la preuve à l’appui de la fixation d’un tel minimum. Elle a produit les témoignages de nature économique rendus par MM. Boyer et Blit, qui ont analysé une série de dix ententes confidentielles conclues entre Astral et diverses maisons de disques. Cette analyse était toutefois circonscrite aux frais de contenu et conditions connexes.

[210] Premièrement, les ententes conclues par Astral contiennent d’autres clauses qui, si on les analyse correctement, constituent un transfert de valeur d’Astral vers les maisons de disques. Même si le montant de la valeur transférée devait être pris en compte, le fait que les ententes d’Astral couvrent des activités autres que les webdiffusions interactives gratuites complique ce calcul; les revenus qui ne sont pas directement liés aux webdiffusions interactives gratuites devraient être pris en compte.

[211] Deuxièmement, on peut remettre en cause qu’un payeur unique, même si plusieurs transactions sont visées, puisse être représentatif. Nous ne savons pas si le pouvoir de négociation d’Astral a donné lieu à des prix plus élevés, plus bas, ou à des prix correspondant à ceux auxquels auraient pu arriver deux négociateurs se trouvant tous deux dans une position comparable. De plus, les dispositions comme celle de la « nation la plus favorisée » peuvent mener à une surestimation de la pertinence d’un taux « artificiellement » commun pour un certain nombre d’ententes.

[212] Troisièmement, et particulièrement pour la SOCAN, une telle analyse est plus adéquate pour l’examen d’un taux indépendant; des renseignements additionnels seraient requis pour déterminer le prix d’une webdiffusion gratuite comme activité additionnelle, comme le prévoit le projet de tarif de la SOCAN. Comme il est décrit plus haut au paragraphe 34, l’établissement d’un tel prix conjoint n’est pas une mince affaire.

[213] Comme cette analyse constituait l’essentiel de la preuve sur cette question, et que l’analyse de MM. Boyer et Blit ne serait pas un fondement suffisant pour établir une redevance minimale non fixe pour les webdiffusions pour CSI, ou un taux de webdiffusion gratuite pour la SOCAN, nous ne le ferons pas.

E. Téléchargements limités

i. Taux de la SOCAN

[214] Comme nous l’avons déjà expliqué, par suite de l’arrêt ESA, le droit de communication ne s’applique pas à la transmission de téléchargements limités, tout comme il ne s’applique pas aux téléchargements permanents. Encore une fois, à cause de notre conclusion selon laquelle la SOCAN n’a pas le droit de percevoir des redevances pour la mise à disposition d’œuvres musicales, nous ne fixons aucun taux pour les téléchargements limités en ce qui concerne la SOCAN.

ii. Taux de CSI

[215] Dans Services de musique en ligne (2012), la Commission a énoncé le principe que les taux de CSI pour les téléchargements permanents et les téléchargements limités devraient être identiques. En l’espèce, CSI a proposé que l’on continue à appliquer ce principe, ce à quoi personne ne s’est opposé.

[216] Si, comme la Commission s’y attend, un téléchargement limité a moins de valeur pour les consommateurs qu’un téléchargement permanent, alors cela devrait se refléter dans les revenus tirés de ces services. Compte tenu du peu d’éléments de preuve dont nous disposons quant à l’état du marché pour les services de téléchargement limité, [93] nous concluons qu’il est approprié d’homologuer le même taux de 9,9 pour cent déjà homologué dans Services de musique en ligne (2012), en le rajustant toutefois pour le répertoire (90 pour cent). Par conséquent, nous fixons à 8,91 pour cent des revenus le taux pour les téléchargements limités en ce qui concerne CSI, soit le même que pour les téléchargements permanents.

F. Webdiffusions non interactives, semi-interactives et interactives – Questions communes

[217] Avant d’examiner les taux applicables aux webdiffusions non interactives, semi-interactives et interactives, nous aborderons quatre points : la définition des termes utilisés par les parties pour décrire ces services, le recours à l’approche combinée utilisée par la Commission dans des décisions antérieures, le taux par écoute, et le supplément pour l’interactivité.

i. Définitions

[218] En mai 2014, la Commission a homologué le tarif initial de Ré:Sonne pour la webdiffusion, Tarif 8 de Ré:Sonne (2014). Voici trois des définitions qu’il contenait :

« webdiffusion interactive » Webdiffusion dans le cadre de laquelle un fichier donné peut être communiqué à un membre du public à l’emplacement et au moment de son choix;

« webdiffusion non interactive » Webdiffusion – autre que la diffusion simultanée de programmation à laquelle s’appliquent le Tarif de la radio de la SRC (SOCAN, Ré:Sonne), le Tarif pour la radio commerciale (SOCAN, Ré:Sonne, CSI, AVLA/SOPROQ, ArtistI), le Tarif pour les services sonores payants (SOCAN, SCGDV) ou le Tarif pour les services de radio par satellite (SOCAN, SCGDV, CSI) – dans le cadre de laquelle le destinataire ne peut aucunement déterminer le contenu ou le moment de la webdiffusion;

« webdiffusion semi-interactive » Webdiffusion – autre que la diffusion simultanée de programmation à laquelle s’appliquent le Tarif de la radio de la SRC (SOCAN, Ré:Sonne), le Tarif pour la radio commerciale (SOCAN, Ré:Sonne, CSI, AVLA/SOPROQ, ArtistI), le Tarif pour les services sonores payants (SOCAN, SCGDV) ou le Tarif pour les services de radio par satellite (SOCAN, SCGDV, CSI), la webdiffusion interactive ou la webdiffusion non interactive – dans le cadre de laquelle le destinataire peut déterminer dans une certaine mesure le contenu ou le moment de la webdiffusion.

[219] Par souci de cohérence, nous adoptons les mêmes définitions dans le présent dossier et établissons les correspondances qui suivent pour les termes utilisés par les parties.

[220] La SOCAN et CSI ont déposé des projets de tarif pour les « transmissions en continu sur demande ». Les définitions de « transmissions en continu sur demande » fournies par la SOCAN et par CSI correspondent toutes les deux à la définition de webdiffusion interactive utilisée par la Commission dans Tarif 8 de Ré:Sonne (2014). Nous utiliserons donc le terme « webdiffusion interactive » pour désigner les transmissions en continu sur demande.

[221] La SOCAN a aussi présenté un projet de tarif pour les « transmissions en continu recommandées » alors que CSI a déposé un projet de tarif pour les « webdiffusions interactives ». Dans les deux cas, les définitions de ces termes correspondent à ce que la Commission a appelé « webdiffusions semi-interactives » dans Tarif 8 de Ré:Sonne (2014). Nous utiliserons donc le terme « webdiffusions semi-interactives ».

[222] Enfin, CSI a présenté un projet de tarif pour les « webdiffusion non interactives ». Nous utiliserons le terme ainsi proposé. Le présent exercice de correspondance des définitions est résumé dans le tableau suivant :

Proposed by SOCAN / Proposé par la SOCAN

Proposed by CSI / Proposé par CSI

Board terminology / Terminologie de la Commission

 

Non-Interactive Webcasts / Webdiffusions non interactives

Non-Interactive Webcasts / Webdiffusions non interactives

Recommended Streams / Transmissions en continu recommandées

Interactive Webcasts / Webdiffusions interactives

Semi-Interactive Webcasts / Webdiffusions semi-interactives

On-demand Streams / Transmissions en continu sur demande

On-demand Streams / Transmissions en continu sur demande

Interactive Webcasts / Webdiffusions interactives

ii. Approche combinée

[223] Dans la décision CSI – Services de musique en ligne (2007), la Commission a établi le taux de CSI pour les transmissions en continu sur demande (maintenant appelées « webdiffusions interactives ») à 4,6 pour cent des revenus. Dans cette affaire, la Commission s’est penchée sur ce qu’elle a appelé l’« ensemble » de droits afin d’établir le taux applicable aux transmissions en continu sur demande. Plus précisément, la Commission a déterminé le montant total des redevances payables pour tous les droits touchés par une activité donnée (d’où le terme « combiné ») pour ensuite le distribuer entre les sociétés de gestion représentant les titulaires de ces droits. (Il convient de souligner que le terme « ensemble » renvoie dans cette affaire à un ensemble de droits et non à un ensemble de fichiers, comme c’est le cas dans le tarif homologué.)

[224] Dans la décision Services de musique en ligne (2012), la Commission n’a pas eu recours à cette approche. Elle a déclaré que l’approche combinée donne de meilleurs résultats lorsque tous les titulaires de droits participent à la même audience, de sorte que tous leurs droits puissent être examinés en même temps. Lorsque certains d’entre eux sont absents, il peut être difficile – voire impossible – de décider du montant qui devrait leur être réservé.

[225] Étant donné que tous les titulaires de droits ne sont pas représentés dans l’affaire qui nous occupe, cette difficulté demeure, et nous ne pouvons donc pas recourir à l’approche combinée.

iii. Taux par écoute

[226] Après avoir attentivement examiné les questions soulevées, nous avons décidé d’établir les taux de redevances pour la webdiffusion (interactive, semi-interactive et non interactive) selon un pourcentage des revenus, comme dans le Tarif 22.F de la SOCAN [94] pour les webdiffusions non interactives. Nous sommes bien conscients que cette décision risque d’être perçue comme une entorse à l’approche retenue par la Commission dans la décision relative au Tarif 8 de Ré:Sonne (2014), [95] où il était question de webdiffusion non interactive et semi-interactive, et où la Commission a privilégié un tarif par écoute. Bien que dans cette affaire les raisons justifiant un taux par écoute plutôt qu’un taux fondé sur un pourcentage des revenus puissent encore être valables, d’autres considérations dans l’affaire qui nous intéresse nous mènent à une conclusion différente.

[227] En tout premier lieu, il nous faut traiter de la question de la valeur de l’interactivité associée aux services de webdiffusion semi-interactive. Comme nous le concluons plus loin, même s’il est à peu près certain que cette caractéristique, liée à l’utilisation de la musique, représente une certaine valeur pour le consommateur, il nous est impossible d’établir cette valeur compte tenu de l’absence de preuve en l’espèce. Les éléments preuve présentés à cet égard sont rares et ne nous permettent pas d’attribuer une valeur à l’interactivité (distincte des autres caractéristiques à valeur ajoutée). De plus, le niveau et les caractéristiques de l’interactivité varient grandement d’un service à l’autre et, en principe, il devrait en être de même de leur valeur respective. À l’extrême, cela pourrait mener à l’établissement d’un taux par écoute différent pour chaque type d’interactivité.

[228] L’avantage d’un taux établi en fonction d’un pourcentage des revenus réside dans le fait que le montant des redevances s’ajuste de lui-même en fonction des différents attributs générateurs de revenus propres à chaque service. Cela étant, il est raisonnable et logique d’appliquer le même pourcentage aux différents services. Cette pratique assure, en fait, une certaine cohérence interne entre les divers types de services.

[229] Le second point, découlant du premier, est que la question de la répartition des revenus est moins préoccupante lorsqu’un seul taux s’applique aux divers types de services offerts par le même fournisseur. Lorsqu’un taux – ou une assiette tarifaire – différent est établi pour les divers types de services offerts par un seul fournisseur, plusieurs méthodes de répartition des revenus pourraient sembler raisonnables ou appropriées, mais le montant des redevances exigibles serait différent pour chacune, ce qui pourrait créer divers problèmes d’application et devrait être évité dans la mesure du possible.

[230] En troisième lieu, les parties n’ont pas proposé de méthode de tarification par écoute si ce n’est des propositions de CSI consistant à établir des redevances minimales. [96]

[231] En quatrième lieu, le tarif issu de la présente instance englobe plusieurs nouveaux types de services et des regroupements de services existants, ce qui ajoute sans doute à la complexité de son administration. Un taux fondé sur un pourcentage des revenus allège la tâche des parties sur le plan administratif. Bien qu’à lui seul il ne s’agisse pas d’un facteur déterminant, le fait de faciliter l’administration d’un tarif de manière à faire en sorte que la décision de la Commission soit correctement appliquée n’est pas dépourvu d’importance.

[232] Enfin, nous ne disposons d’aucun renseignement sur la façon dont l’approche adoptée dans la décision Tarif 8 de Ré:Sonne (2014) a fonctionné en pratique, plus particulièrement en ce qui a trait à ses lacunes et aux défis et problèmes que les parties ont rencontrés. Ces renseignements seront peut-être mis à la disposition de la Commission dans des instances à venir portant sur les activités visées par la présente instance.

iv. Supplément pour l’interactivité

[233] Le terme « interactivité » est utilisé pour décrire diverses fonctions offertes par les webdiffuseurs pour permettre aux consommateurs d’exercer un contrôle sur la musique qu’ils écoutent, notamment en choisissant de la musique et des genres musicaux spécifiques qui correspondent à leurs goûts. Les différentes fonctions propres à la webdiffusion semi-interactive ou interactive, comme la possibilité de sauter une chanson ou d’indiquer si on l’a aimée ou non, ont une valeur, sans doute importante, pour le consommateur. De telles fonctions peuvent rendre la séquence des enregistrements sonores transmis plus attrayante pour le consommateur qu’une séquence d’enregistrements sonores à l’égard de laquelle il n’aurait exercé aucun contrôle par ses interactions, comme c’est le cas avec la webdiffusion non interactive. Cela pourrait justifier un « supplément pour l’interactivité ».

[234] Nous pensons que la valeur supplémentaire que représentent ces fonctions est, à tout le moins en partie, attribuable au droit d’auteur sur les œuvres musicales. Cela étant, les usages interactifs de cette nature devraient générer pour les titulaires de droits des redevances plus importantes que les usages passifs, comme les webdiffusions non interactives. La différence représente le montant du « supplément pour l’interactivité ».

[235] CSI a proposé un supplément pour l’interactivité équivalent au ratio entre le prix d’une piste individuelle et le prix d’une piste faisant partie d’un ensemble. Cela représenterait un supplément de 92 pour cent.

[236] Le supplément proposé par CSI pourrait en partie représenter le supplément pour l’interactivité, mais il pourrait aussi refléter un escompte de volume sur les albums, dont on ne peut évaluer l’importance en fonction du supplément global de 92 pour cent. De plus, un ensemble inclut souvent des pistes que le consommateur n’achèterait pas autrement, de sorte que le fait de répartir également le prix entre des pistes individuelles achetées comme faisant partie d’un ensemble pourrait entraîner des erreurs d’évaluation. Enfin, le niveau d’interactivité de divers services semi-interactifs peut varier considérablement, ce qui donne fortement à penser que tout supplément pour l’interactivité peut aussi grandement varier. La justification fournie par CSI de même que le supplément de 92 pour cent qu’elle propose ne règlent pas ces points et beaucoup de données seraient nécessaires afin de fixer un supplément pour l’interactivité appropriée sous la forme d’un pourcentage ou d’un montant à ajouter à un taux de redevances pour service non interactif.

[237] Nous croyons que les revenus d’un webdiffuseur seraient plus élevés pour des services semi-interactifs et des services interactifs que pour des services non interactifs. Dans son rapport, M. Reitman fait valoir ce qui suit :

[TRADUCTION] Étant donné que le contenu audio a une plus grande valeur pour l’auditeur, les webdiffuseurs semi-interactifs s’approprieraient une partie de cette valeur accrue en raison d’un usage plus important et du prix plus élevé des abonnements et de la publicité, ces facteurs étant tous de nature à augmenter les revenus. Ainsi, un taux de redevances fondé sur un pourcentage constant des revenus applicables tant aux services semi-interactifs que non interactifs entraînerait le versement d’une somme plus élevée aux titulaires de droits d’auteur à l’égard de la musique utilisée dans un contexte semi-interactif. Autrement dit, un taux de redevances fondé sur un pourcentage des revenus fait automatiquement en sorte que les titulaires de droits d’auteur touchent des sommes plus élevées pour des webdiffusions semi-interactives dans la mesure où ces services génèrent des revenus plus élevés que les services non interactifs. [97]

[238] Nous sommes d’accord avec M. Reitman. Dans la mesure où les revenus générés par ces services augmentent en raison de la valeur de l’interactivité, une certaine proportion de ceux-ci retournera au titulaire du droit d’auteur sous forme de redevances. En présumant, aux fins de l’établissement du taux de redevances, que la valeur additionnelle provenant de l’interactivité est attribuable au droit d’auteur sur l’œuvre musicale au même taux que la valeur provenant de l’écoute non interactive, nous sommes d’avis que le supplément pour l’interactivité sera adéquatement pris en compte en appliquant le taux des webdiffusions non interactives aux webdiffusions interactives ainsi qu’aux webdiffusions semi-interactives.

v. Webdiffusion « additionnelle » gratuite

[239] Dans ses projets de tarif, la SOCAN a proposé un taux par écoute pour les « transmissions gratuites », devant être payé par les détenteurs de licence qui sont déjà tenus de payer des redevances en vertu du tarif.

[240] Nous n’homologuons pas de taux particuliers additionnels pour les webdiffusions gratuites dans la présente affaire – peu importe qu’elles soient interactives, semi-interactives ou non interactives – puisque nous incluons dans l’assiette tarifaire de la webdiffusion la publicité et les revenus d’abonnement (voir la section sur l’« assiette tarifaire » ci-après). On peut offrir gratuitement aux auditeurs une webdiffusion, mais celle-ci n’est pas gratuite pour les publicitaires. Dans un marché qui fonctionne bien, les revenus publicitaires monétisent la webdiffusion d’œuvres musicales.

[241] Enfin, même si nous concluions qu’il était approprié d’établir un taux additionnel pour les webdiffusions gratuites, l’analyse de la preuve présentée par les parties ne nous fournit pas un fondement fiable pour le faire, comme nous l’avons conclu aux paragraphes 209-213.

G. Webdiffusions non interactives

i. Taux de la SOCAN

[242] Comme il est décrit ci-dessus, la SOCAN n’a pas proposé un taux distinct pour les webdiffusions non interactives dans le cadre de la présente affaire. Dans ses projets de tarif, la SOCAN a plutôt proposé un taux par écoute pour les « transmissions gratuites », devant être payé par les détenteurs de licence qui sont déjà tenus de payer des redevances en vertu du tarif. Nous concluons que les tarifs proposés ne couvrent pas les webdiffusions non interactives même si elles sont offertes sous une forme additionnelle.

[243] Si notre conclusion est erronée, et que les projets de tarif couvrent en fait les webdiffusions non interactives offertes sous une forme additionnelle, il n’en demeure pas moins que la Commission ne dispose pas d’assez d’éléments de preuve pour établir valablement un taux « additionnel » pour les webdiffusions gratuites. La SOCAN a modifié son taux demandé pour les webdiffusions à 0,13 ¢ par fichier pour respecter la décision de la Commission dans Services de musique en ligne (2012), mais elle n’a pas justifié le taux demandé dans ses observations et sa preuve. Comme nous l’avons conclu précédemment, même la preuve présentée par les parties autres que la SOCAN que la Commission pourrait peut-être utiliser pour essayer d’établir un taux ne fournit pas un fondement suffisant.

ii. Taux de CSI

[244] Comme il a été expliqué ci-dessus, CSI a proposé, en ce qui concerne les webdiffusions non interactives, un taux établi en fonction du tarif pour la radio commerciale, et elle se fonde sur le principe que le ratio entre les paiements de droits d’auteur et la programmation musicale est le même pour la radio commerciale et la webdiffusion. Les dépenses de droits d’auteur représentent 41,03 pour cent des dépenses de programmation. Au total, le taux non rajusté en fonction du répertoire s’élève à 11,15 pour cent (incluant les œuvres musicales et les enregistrements sonores – communication et reproduction). En appliquant au taux de 11,15 pour cent l’ajustement pour la portion des dépenses de droits d’auteur, on obtient un taux de 27,18 pour cent. CSI attribue d’abord la moitié de ce taux aux œuvres musicales, étant donné que la Commission a, de façon constante, attribué une valeur égale aux œuvres musicales et aux enregistrements sonores, avant ajustement de répertoire. En second lieu, CSI attribue une proportion de 1:3,2 du taux obtenu à la reproduction d’œuvres musicales pour refléter le ratio établi de façon constante par la Commission entre le droit de reproduction et le droit de communication. On obtient ainsi le taux de 3,24 pour cent proposé par CSI.

[245] M. Reitman, l’expert de l’ACR, a fait observer que cette approche pose au moins trois problèmes. Plus précisément, il a mentionné que pour utiliser à bon escient une mesure de référence des coûts comme le propose CSI, il faudrait connaître le montant de toutes les dépenses de programmation des webdiffuseurs, en plus du montant des dépenses de droits d’auteur. Citant l’expert des sociétés de gestion, M. Michael Murphy, il a fait remarquer que [TRADUCTION] « les sites web réalisent une gamme d’activités en vue de fournir des services de webdiffusion attrayants pour les clients, dont la création de listes de lecture, la création de logiciels, ainsi que le catalogage des caractéristiques des chansons ». [98] Toutefois, aucune de ces activités n’est prise en compte par les experts de CSI en tant que coûts de programmation. Nous convenons avec l’ACR qu’ils devraient être pris en compte. Nous n’utiliserons donc pas une mesure de référence des coûts comme le propose CSI.

[246] Il s’agit maintenant de déterminer la mesure de référence appropriée. Une webdiffusion non interactive, au sens où nous l’entendons, est une webdiffusion dans le cadre de laquelle le destinataire ne peut aucunement déterminer le contenu ou le moment de la webdiffusion. Il s’agit de toute évidence d’une caractéristique importante commune aux webdiffuseurs et aux radios commerciales lorsque ces dernières transmettent des signaux conventionnels en direct. Ainsi, une fois les rajustements faits pour tenir compte des différences dans l’utilisation de la musique, nous concluons que le taux de la SOCAN applicable aux stations de radio commerciale pourrait être une mesure de référence appropriée pour établir le taux applicable aux webdiffusions non interactives. Toutefois, à notre avis, le Tarif 22.F de la SOCAN est une mesure de référence plus appropriée puisqu’elle vise la même activité que celle sous examen : la webdiffusion non interactive. Le choix de l’une ou l’autre des mesures de référence mènerait bien sûr au même résultat.

[247] Le taux homologué pour le Tarif 22.F de la SOCAN est de 5,3 pour cent des revenus. Ce taux a été calculé à partir du taux de la SOCAN pour la radio commerciale de 4,2 pour cent qui a été rajusté de 25 pour cent pour tenir compte du plus grand usage qui est fait de la musique. Il constitue notre point de départ en ce qui a trait au taux de CSI.

[248] Dans la décision Radio commerciale (2010), [99] la Commission a appliqué le ratio de 1:3,2 au taux de la SOCAN pour déterminer le taux de CSI. À l’époque, la Commission avait dans un premier temps augmenté le taux de la SOCAN pour trois raisons, qui s’appliquaient tout autant à CSI. La Commission avait par la suite décidé de continuer à utiliser le même ratio et maintenir la valeur relative des droits gérés respectivement par CSI et la SOCAN pour l’utilisation du répertoire pour la radio commerciale.

[249] Dans une décision plus récente, Radio commerciale (2016), [100] le ratio entre le taux de la SOCAN et celui de CSI a été modifié. Bien que la Commission n’ait pas expressément utilisé ce ratio pour calculer les taux, elle a réduit les taux pour la reproduction tant des œuvres musicales que des enregistrements sonores, en particulier pour tenir compte de nouvelles exceptions introduites dans la Loi en novembre 2012. Ces exceptions visaient certains types de reproduction à l’égard desquels la Commission était en mesure d’attribuer une valeur précise et de la déduire du taux de CSI (ainsi que des taux de Connect/SOPROQ et Artisti applicables à la radio commerciale). Une réduction générale d’environ 22 pour cent a été appliquée au taux de CSI pour tenir compte des exceptions visant les copies d’évaluation de la musique, les copies pour diffusion en continu et les copies de sauvegarde. Pour CSI, le taux non rajusté en fonction du répertoire a été fixé à 1,053 pour cent. Étant donné que le taux de la SOCAN n’a pas été changé, et le taux de CSI a été réduit, le nouveau ratio était moins que 1:3,2 (0,3125).

[250] Toutefois, ce nouveau ratio de valeur relative moins élevé ne devrait pas être utilisé en l’espèce. Les taux de CSI ont été réduits en raison de l’application d’exceptions spécifiques visant des types de reproduction spécifiques et il ressortait de la preuve que les radios commerciales avaient procédé à ces reproductions conformément auxdites exceptions. Des éléments de preuve permettaient en outre de déterminer la valeur relative de chaque type de reproduction.

[251] En l’espèce nous ne disposons d’aucun élément de preuve quant aux types de reproductions faites par les webdiffuseurs. Il ne serait donc pas raisonnable de tenir pour acquis que les réductions appliquées aux taux de reproduction des radios commerciales s’appliquent tout autant aux webdiffuseurs. Plusieurs parties ont fait valoir que la Commission devrait utiliser un ratio de 1:3,2. [101] En l’absence de preuve convaincante à l’effet contraire, nous retenons la thèse des parties, et nous fixons le ratio initial à 0,3125 (1:3,2), ce qui reflète la valeur relative générale du droit de reproduction par rapport au droit de communication.

[252] Comme il a été mentionné ci-dessus, notre point de départ en ce qui a trait au taux de CSI est le taux de 5,3 pour cent du Tarif 22.F de la SOCAN. En appliquant le ratio de 0,3125 à ce taux, on obtient pour CSI un taux de 1,66 pour cent, non rajusté en fonction du répertoire.

[253] Nous avons établi précédemment que les exigences en matière de rapports prévues au Tarif CSI pour les services de musique en ligne, 2008-2010 seraient remplacées par une approche plus simple, selon laquelle un rajustement moyen de répertoire de 0,9 serait appliqué, lorsque pertinent. Le taux de CSI de 1,66 pour cent que nous venons d’établir pour les webdiffusions non interactives doit être rajusté en fonction du répertoire de CSI, ce qui porte le taux final à 1,49 pour cent. C’est là le taux que nous homologuons.

[254] Nous estimons que l’analyse à laquelle nous avons procédé pour établir ce taux est conforme à l’énoncé de la Cour suprême de Canada selon lequel la Loi doit être interprétée de façon à reconnaître la neutralité technologique et l’équilibre entre les intérêts des utilisateurs et ceux des titulaires du droit d’auteur. [102] Les technologies utilisées par les radiodiffuseurs commerciaux et celles utilisées par les webdiffuseurs non interactifs et semi-interactifs pour communiquer de la musique à leurs auditeurs respectifs sont similaires et leurs fonctions, bien qu’exécutées différemment, s’équivalent. Nous ne voyons aucune raison en l’espèce d’accorder un traitement différent, du point de vue de l’évaluation du droit d’auteur, à la diffusion radiophonique et aux technologies de webdiffusion équivalentes.

H. Webdiffusions interactives

i. Taux de la SOCAN

[255] Dans la présente instance, la SOCAN a proposé un nouveau modèle pour les webdiffusions interactives (aussi appliqué aux webdiffusions non interactives) utilisant la radio commerciale comme référence; les opposantes l’ont en partie appuyé. Il est utile de diviser, comme les opposantes l’ont fait, la nouvelle méthode de tarification proposée par la SOCAN en trois parties.

[256] Premièrement, la SOCAN a proposé d’augmenter de 25 pour cent le taux pondéré de la radio commerciale de 4,2 pour cent pour tenir compte du fait que les webdiffuseurs utilisent plus de musique que les diffuseurs de radio commerciale. Deuxièmement, la SOCAN a proposé d’augmenter ce taux d’un pourcentage additionnel représentant 50 pour cent pour tenir compte de la capacité de la programmation musicale de produire des revenus plus élevés que la programmation parlée. Enfin, la SOCAN a proposé une augmentation additionnelle de 0,6 à 2,6 points de pourcentage pour refléter le fait que des œuvres musicales sont mises à la disposition du public. Au final, la SOCAN propose un taux de 8,6 pour cent.

[257] Les opposantes n’ont vu aucune raison de s’opposer à la première augmentation. Nous non plus. Si nous devions adopter cette méthode, cet ajustement nous paraîtrait approprié et raisonnable. Les webdiffuseurs utilisent, en moyenne, 25 pour cent plus de musique que les diffuseurs de radio commerciale; il est logique que cela se traduise par une augmentation correspondante des redevances. La Commission a déjà accepté cet argument quand elle a homologué le Tarif 22.F de la SOCAN. Cet ajustement fait en sorte que le taux passe de 4,2 pour cent à 5,3 pour cent des revenus.

[258] La deuxième augmentation est plus discutable. Nous tenons pour acquis, comme le font les experts en l’espèce, que les stations de radio répartissent leur temps de diffusion de façon optimale entre le contenu musical et le contenu verbal, sur une base marginale continue. Cela signifie que le dernier dollar dépensé pour le contenu musical est aussi productif que le dernier dollar dépensé pour le contenu verbal; si tel n’était pas le cas, les stations de radio pourraient améliorer leur productivité en répartissant autrement leur temps de diffusion. Ce principe économique a été souligné dans le témoignage de M. Reitman. [103] M. Singer, pour sa part, a fait valoir plusieurs points connexes, voire identiques. [104] Par conséquent, étant donné que pour les stations de radio commerciale la productivité marginale du contenu musical et du contenu verbal est la même, nous ne pensons pas qu’un ajustement visant à tenir compte de l’utilisation accrue de la musique dans les webdiffusions s’impose.

[259] La troisième partie de la méthode de la SOCAN concerne la valeur que représente la mise à la disposition du public d’œuvres musicales. Or, nous avons déjà décidé qu’elle ne serait pas prise en compte pour la période en cause dans la présente procédure pour les motifs exposés précédemment.

[260] Par conséquent, l’application de la méthode proposée par la SOCAN nous amènerait à homologuer pour cette dernière des redevances représentant 5,3 pour cent des revenus en ce qui concerne les webdiffusions interactives. Cela serait conforme au taux établi ci-dessus pour les webdiffusions non interactives de pistes audio pour CSI.

[261] L’approche que nous adoptons est différente, mais mène au même taux. Nous estimons que le Tarif 22.F de la SOCAN constitue le point de référence le plus approprié pour établir les redevances quant aux webdiffusions interactives. Les webdiffuseurs de pistes audio interactifs et non interactifs utilisent des modèles d’affaires similaires, et opèrent dans la même industrie. La seule différence importante entre les deux est l’interactivité. Comme nous l’avons conclu au paragraphe 238, le taux pour les services interactifs devrait équivaloir à celui pour les services non interactifs. Nous homologuons donc pour la SOCAN un taux de 5,3 pour cent pour les webdiffusions interactives.

ii. Taux de CSI

[262] CSI a proposé un taux de 5,39 pour cent sur la base du taux de 5,18 pour cent que la Commission a homologué la dernière fois. Le point de départ de 5,18 pour cent provient de l’approche combinée que la Commission a utilisée dans une décision antérieure. Toutefois, pour les motifs exposés ci-dessus, nous ne pensons pas qu’il serait approprié d’utiliser comme point de départ un taux établi au moyen de cette approche. Pour CSI, les Réseaux ont proposé un taux de 1,238 pour cent, soit un taux équivalant au taux de CSI pour la radio commerciale. Nous sommes d’avis que ce taux est trop bas. Nous estimons qu’il devrait à tout le moins être rajusté pour prendre en compte le fait que la webdiffusion utilise, de manière générale, de la musique de façon continue alors que la radio commerciale utilise de la musique 80 pour cent du temps, en moyenne. Nous rejetons donc la proposition des Réseaux.

[263] Pour la SOCAN, nous avons établi pour les webdiffusions interactives, le même taux que celui homologué pour les webdiffusions non interactives dans le Tarif 22.F de la SOCAN. Pour CSI, nous établissons également pour les webdiffusions interactives, le même taux que celui pour les webdiffusions non interactives, homologué en l’instance. Les motifs pour établir le même taux pour CSI sont les mêmes que ceux pour la SOCAN. Nous établissons donc le taux de CSI pour les webdiffusions interactives à 1,49 pour cent.

I. Webdiffusions semi-interactives

i. Taux de la SOCAN

[264] Pour les webdiffusions semi-interactives, la SOCAN propose qu’on utilise le taux de la webdiffusion interactive. Nous sommes d’accord, mais pour des motifs différents.

[265] Nous estimons que le Tarif 22.F de la SOCAN est une bonne mesure de référence pour la webdiffusion semi-interactive pour les mêmes motifs que ceux pour lesquels nous estimons qu’elle est une bonne mesure de référence pour la webdiffusion interactive. C’est le degré d’interactivité qui différencie avant tout les trois types de webdiffusion. Pour les motifs mentionnés plus haut, nous n’ajustons pas cette mesure de référence pour tenir compte de l’interactivité.

[266] Ainsi, le taux de la SOCAN que nous établissons pour les webdiffusions semi-interactives est de 5,3 pour cent.

ii. Taux de CSI

[267] CSI a proposé un modèle comportant trois éléments. Premièrement, ce modèle utilise la radio commerciale comme point de départ. Deuxièmement, il utilise les ratios que la Commission a homologués dans ses tarifs précédents. Troisièmement, le modèle prévoit un ajustement en fonction de l’interactivité. Si nous devions utiliser ce modèle, il conviendrait de retenir les deux premiers éléments pour les raisons exposées ci-dessous et de rejeter le troisième pour les motifs déjà énoncés dans la partie portant sur le supplément pour l’interactivité.

[268] Comme nous l’avons conclu pour la SOCAN, bien que le tarif de radio commerciale puisse être une mesure de référence appropriée, nous préférons utiliser le Tarif 22.F de la SOCAN, qui amène de toute façon au même résultat.

[269] Voici les deux ratios que CSI propose : un ratio de 1:1 entre la valeur des œuvres musicales et des enregistrements sonores incorporant des œuvres musicales et un ratio de 1:3,2 entre la valeur du droit de reproduction et du droit de communication. Le ratio de 1:1 entre la valeur des œuvres musicales et celle des enregistrements sonores est issu de la première décision à l’égard de Ré:Sonne pour la radio commerciale, en 1999. [105] Le ratio de 1:3,2 a été utilisé dans des décisions antérieures et, plus récemment dans la décision Tarif pour la radio commerciale (2010). [106] Le ratio de 1:3,2 est le ratio approprié dans une décision qui concerne CSI et la SOCAN étant donné que l’importance et le rôle relatifs, et donc la valeur relative, du droit de reproduction par rapport au droit de communication sont similaires qu’il s’agisse de webdiffusion semi-interactive ou de radiodiffusion commerciale. Comme il a été expliqué précédemment, l’utilisation de ce ratio en l’espèce a été acceptée par plusieurs parties.

[270] Toutefois, pour les motifs exposés ci-dessus, nous n’utilisons pas la radio commerciale comme mesure de référence. Nous utilisons plutôt le taux de la webdiffusion non interactive comme point de référence pour établir le taux de la webdiffusion semi-interactive. Comme c’est le cas pour le taux de la webdiffusion semi-interactive de la SOCAN, nous n’ajustons pas le point de référence en fonction de l’interactivité. Le taux de la webdiffusion semi-interactive de CSI que nous établissons est donc identique à celui que nous établissons pour les autres types de webdiffusion, à savoir 1,49 pour cent. Il importe de souligner que nous serions arrivés au même taux si nous avions utilisé les deux premiers éléments du modèle proposé par CSI pour l’établir directement.

J. Webdiffusions hybrides

i. Description

[271] Certains services de musique en ligne ajoutent une fonctionnalité à leur service de diffusion en créant des copies (ou en permettant que des copies soient créées) d’enregistrements sonores sur l’appareil de l’abonné – habituellement un appareil mobile. Ces copies font office d’antémémoire lorsque l’abonné n’a pas accès à une connexion Internet ou lorsque la connexion est intermittente. Dans ces situations, l’abonné ferait jouer les enregistrements sonores à partir de l’antémémoire. [107]

[272] Sur le plan de la fonctionnalité, ces copies mises en antémémoire s’apparentent à des téléchargements limités. [108] Toutefois, elles ne visent pas les mêmes fins : alors que les copies en antémémoire sont faites pour compléter un service de webdiffusion, les téléchargements limités sont des sources indépendantes d’enregistrements sonores. De plus, dans certains cas, les copies en antémémoire peuvent être produites automatiquement en vue d’éviter une interruption en mode lecture lors de l’interruption d’une connexion Internet.

[273] Dans le cadre de la présente affaire, un service de webdiffusion permettant la création de copies en antémémoire pour écoute hors ligne a été qualifié de service « hybride ». Bien qu’il ait été question dans la plupart des observations portant sur les services de webdiffusion hybrides de la webdiffusion semi-interactive, de tels services pourraient également être offerts sous forme non interactive et totalement interactive.

[274] Les services de webdiffusion hybrides sont souvent offerts moyennant un supplément par rapport aux services de webdiffusion équivalents (qui ne créent pas de copies mises en antémémoire) fournis par le même service de musique en ligne. À titre d’exemple, un service donné de musique en ligne peut exiger, par mois, 10 $ pour un service de webdiffusion et 15 $ pour un service hybride. Ces abonnements à valeur ajoutée donnent souvent accès à des fonctions autres que la simple possibilité de faire des copies mises en antémémoire. [109] Par exemple, un abonné pourrait être en mesure d’utiliser une application sur son appareil mobile lui permettant de recevoir la webdiffusion.

[275] Dans sa comparaison de certains services de musique en ligne, M. Paquette a relevé que quatre d’entre eux offraient des services de webdiffusion hybrides. Dans les quatre cas, les services hybrides étaient offerts dans le cadre d’un abonnement à valeur ajoutée ou pour le palier mobile. [110]

ii. Tarifs proposés

[276] Les tarifs proposés par CSI pour 2011 et 2012 établissent les redevances payables par un « service de musique en ligne offrant des téléchargements limités, avec ou sans transmissions en continu sur demande ou webdiffusion ». Les sociétés de gestion ont conclu que cela signifiait que les services hybrides, qu’elles considèrent comme des services offrant de la webdiffusion avec téléchargements limités, verseraient des redevances à l’égard des téléchargements limités en plus de toutes les redevances payables à l’égard de la webdiffusion. Toutes les parties ont convenu qu’il s’agissait d’une conséquence imprévue découlant du libellé du tarif. Les parties ont par la suite proposé des taux pour les transmissions en continu hybrides sur demande, consistant en des transmissions en continu sur demande et des téléchargements limités, ce qui règle ce point.

iii. Exceptions à la reproduction

[277] Dans leur énoncé de cause, les Réseaux ont fait valoir que les exceptions prévues aux articles 29.22 (reproduction à des fins privées), 29.23 (fixation ou reproduction pour écoute ou visionnement en différé), et 30.71 (reproductions temporaires) de la Loi peuvent s’appliquer en l’espèce. Toutefois, ce n’est qu’en ce qui concerne l’applicabilité de l’art. 29.22 à la création de listes de lecture mises en antémémoire à des fins de webdiffusion que les Réseaux ont présenté des arguments juridiques. Ils ont soutenu qu’étant donné que l’art. 29.22 fait en sorte que ces copies peuvent être faites sans contrevenir à la Loi, le taux pour ces services ne devrait pas être plus élevé que le taux des services qui n’offrent pas cette fonctionnalité.

[278] Les sociétés de gestion étaient quant à elles d’avis que l’art. 29.22 de la Loi ne s’applique pas à de telles situations, [111] mais la SOCAN a convenu avec les Réseaux que le taux total des redevances peut être le même pour ces services; seule la répartition des redevances entre les sociétés de gestion serait en cause. [112]

[279] Comme nous concluons ci-dessous que le taux (en pourcentage) des services de webdiffusion hybrides est le même que le taux des services de webdiffusion sans création de copies en antémémoire – et que par conséquent nous arrivons à la même conclusion en ce qui concerne les taux proposés par les Réseaux et la SOCAN – il n’est pas nécessaire que nous nous prononcions sur l’applicabilité de l’art. 29.22 de la Loi en l’espèce.

iv. Établissement d’un taux de redevances

[280] Au vu de la preuve relatée ci-dessus, nous concluons que les services de webdiffusion hybrides sont, pour l’essentiel, des services de webdiffusion avec une fonctionnalité supplémentaire.

[281] De plus, il ressort de la preuve que cette fonctionnalité supplémentaire, incluant la capacité de faire des copies temporaires pour écoute hors ligne, a une valeur sur le marché. Les services de musique en ligne offrent habituellement leurs services de webdiffusion hybrides à un prix représentant de une (lorsqu’un escompte est donné pour un abonnement annuel) à deux fois le montant exigé pour leurs services de webdiffusion non hybrides. [113]

[282] Nous concluons donc, comme nous l’avons fait en ce qui concerne l’interactivité, qu’il est approprié d’utiliser cette augmentation des revenus pour déterminer l’augmentation des redevances payables aux titulaires de droits. En établissant un taux de redevances total pour CSI et la SOCAN (sous forme de pourcentage) pour les services de webdiffusion hybrides équivalant à celui des services de webdiffusion, nous permettons au marché d’établir l’éventuelle augmentation des redevances payables par les services de musique pour tenir compte de la fonctionnalité supplémentaire, étant donné que toute augmentation des revenus générera une augmentation des redevances.

[283] Si nous devions établir un taux de redevances pour les services de webdiffusion hybrides plus élevé que celui des services de webdiffusion, l’augmentation du taux et de l’assiette tarifaire (c’est-à-dire l’augmentation des revenus), équivaudrait à un « double supplément ». Nous ne sommes pas convaincus que la fonctionnalité supplémentaire qu’offrent les services de webdiffusion hybrides puisse être davantage attribuée à des œuvres protégées par le droit d’auteur que la fonctionnalité offerte par les services de webdiffusion qui ne sont pas hybrides. Nous ne sommes donc pas convaincus qu’un double supplément soit justifié en ce qui concerne les services de webdiffusion hybrides.

[284] Cela dit, nous sommes conscients que les droits gérés par CSI et la SOCAN – le droit de reproduction et le droit de communication au public par télécommunication, respectivement, n’ont pas nécessairement la même importance relative selon qu’il s’agit de services de webdiffusion hybrides ou non hybrides. Une telle différence pourrait donner lieu à une répartition différente des redevances. La question de la répartition des redevances entre CSI et la SOCAN sera examinée ci-dessous.

[285] Enfin, comme nous l’avons vu précédemment, compte tenu des observations des parties – ou du fait qu’elles n’en ont pas présenté – concernant l’effet de l’arrêt rendu par la Cour suprême dans SRC c. SODRAC, nous ne sommes pas en mesure de faire des ajustements éclairés pour tenir compte des facteurs énoncés dans cette décision, et nous nous abstenons de nous livrer à un tel exercice.

v. Répartition des redevances entre CSI et SOCAN

[286] CSI propose de manière implicite qu’aux fins de la répartition des redevances entre elle et la SOCAN on tienne pour acquis qu’un service hybride de webdiffusion est constitué, en parts égales, d’un service de webdiffusion et d’un service de téléchargement limité. Si l’on utilise les taux homologués par la Commission pour ces services dans la présente instance, le taux de redevances pour CSI serait de 5,695 pour cent et celui de la SOCAN de 2,65 pour cent, pour un ratio entre les redevances de CSI et de la SOCAN d’environ 68,2 pour cent à 31,8 pour cent. [114]

[287] La SOCAN propose que 50 pour cent des redevances soient payables à CSI et que 50 pour cent lui soit payable. Si l’on utilise les taux homologués par la Commission dans la présente instance, cela suppose qu’un service hybride de webdiffusion offre des services de webdiffusion à hauteur de 72 pour cent et des services de téléchargement limité à hauteur de 28 pour cent.

[288] Nous sommes d’avis que peu d’éléments de preuve étayent la répartition proposée par CSI. Bien qu’on puisse aisément tenir pour acquis qu’un service hybride est, à parts égales, un service de webdiffusion et un service de téléchargement, la preuve donne à penser qu’une telle répartition n’est pas appropriée.

[289] Suivant l’examen des services de musique en ligne effectué par M. Paquette, le prix du palier hybride est souvent deux fois plus élevé que celui du palier non hybride et il se situe d’ordinaire entre une fois (dans le cas d’un abonnement annuel) et deux fois le prix du palier non hybride.

[290] Au vu de la preuve, y compris le témoignage de M. Paquette, nous convenons avec la SOCAN que :

[TRADUCTION] [l]a fonctionnalité supplémentaire permettant à un utilisateur de télécharger des chansons pour une durée limitée pour écoute hors ligne à partir d’un appareil mobile est habituellement incluse parmi les options ayant une valeur ajoutée offertes à un palier de tarif supérieur avec, à titre d’exemple, l’écoute sans interruption publicitaire et la possibilité pour l’usager d’exercer plus de contrôle. Par conséquent, la valeur à attribuer à la portabilité est difficile à séparer de la valeur des usages de transmission en continu auxquels l’utilisateur a également accès. [115]

[291] Étant donné que la création de copies en antémémoire hors ligne n’est habituellement qu’une des fonctions additionnelles associées à un abonnement à un service hybride, nous sommes d’avis que seulement une partie de l’augmentation du prix est attribuable à cette fonction de mise en antémémoire. Par conséquent, nous ne pouvons simplement utiliser la différence entre les services de webdiffusion hybrides et non hybrides pour estimer l’importance relative des composantes webdiffusion et téléchargement d’un service hybride de webdiffusion.

[292] M. Breton a témoigné au sujet des téléchargements et de la transmission en continu sur Zik.ca, le service de webdiffusion interactif dont il était responsable au sein du Groupe Archambault. [116] Selon les données présentées, il y aurait un téléchargement limité pour quatre transmissions en continu. Toutefois, le nombre de téléchargements a été répertorié sur une période de 9 mois alors que le nombre de transmissions en continu l’a été sur une période de 12 mois. Comme l’avocat de CSI l’a expliqué dans sa plaidoirie, ces données ne peuvent être comparées [117] et nous n’avons pu en tenir compte pour rendre notre décision. Néanmoins, compte tenu de la description que le témoin a faite des services hybrides, nous concluons que selon toute vraisemblance les utilisateurs ne téléchargent pas une chanson à chaque fois qu’ils en écoutent une en continu, contrairement à ce que laisse entendre la proposition de CSI. Selon la proposition de la SOCAN, environ 2,7 chansons sont écoutées en continu pour chaque chanson téléchargée; cette hypothèse est selon nous plus raisonnable.

[293] Compte tenu de ce qui précède, nous sommes d’avis que la proposition de la SOCAN est plus raisonnable que celle de CSI. De plus, étant donné que nous ne disposons pas de suffisamment de données détaillées et fiables pour estimer avec plus de rigueur l’importance relative de la fonctionnalité « webdiffusion » par rapport à la fonctionnalité « téléchargement limité » d’un service hybride, nous estimons que la répartition des redevances proposée par la SOCAN est raisonnable [118] et acceptons sa proposition à cet égard.

vi. Le taux de la SOCAN

[294] Comme le taux total de CSI et de la SOCAN, non rajusté en fonction du répertoire, est de 6,96 pour cent (1,66 + 5,3) des revenus, et comme nous avons accepté d’en attribuer 50 pour cent à la SOCAN, le taux de la SOCAN pour les services de webdiffusion hybrides est de 3,48 pour cent des revenus.

[295] Avec cette répartition, proposée par la SOCAN, on obtient, sous forme de pourcentage, un taux moins élevé pour la webdiffusion hybride que pour la webdiffusion non hybride. Toutefois, étant donné qu’il a été établi que les services de webdiffusion hybrides coûtent plus cher, nous nous attendons à ce que dans plusieurs situations, sinon dans la plupart des cas, la SOCAN perçoive des redevances (en dollars) plus élevées pour les services de webdiffusion hybrides que pour les services non hybrides équivalents.

vii. Taux de CSI

[296] De même, comme le taux total de CSI et de la SOCAN est de 6,96 pour cent des revenus, et comme nous avons accepté d’en attribuer 50 pour cent à CSI, le taux de CSI non rajusté pour les services de webdiffusion hybrides est de 3,48 pour cent. Après rajustement pour tenir compte de la part du répertoire de CSI de 90 pour cent, le taux obtenu est de 3,13 pour cent des revenus.

K. Vidéos de musique

i. Taux de la SOCAN

[297] Comme pour les téléchargements de fichiers audio, la SOCAN n’a droit à aucune redevance pour les téléchargements de fichiers vidéo. Nous n’établissons donc pas de taux de la SOCAN pour les téléchargements permanents ou limités de fichiers vidéo.

[298] Dans son énoncé de cause, la SOCAN a proposé un taux de 5,67 pour cent des revenus pour la webdiffusion interactive et semi-interactive de vidéos de musique. Les Réseaux ont proposé un taux de 3,02 pour cent pour la webdiffusion interactive; ils n’ont fait aucune proposition en ce qui a trait à la webdiffusion semi-interactive de vidéos de musique.

[299] Pour ce qui est des webdiffusions de vidéos, et comme la Commission l’a fait en 2012, nous tenons pour acquis que la différence entre une piste audio et une vidéo de musique est attribuable au contenu non audio. Nous pouvons donc appliquer le ratio entre le prix médian des pistes audio et celui des vidéos de musique pour extraire le contenu audio de la vidéo.

[300] La décision de la Commission de 2012 a peut-être semé une certaine confusion. En 2012, la Commission a écrit ce qui suit dans la version anglaise : « [Apple and Cable/Telcos] propose that the price of a video-clip be set at the ratio of the mid-price audio track to the mid-price video-clip. » [119] La version française de la même phrase se lit comme suit : « Ils proposent de fixer le taux pour les vidéoclips en fonction du ratio entre le prix médian des pistes audio et celui des vidéoclips ».

[301] Il y a une différence entre un prix dit du milieu et un prix médian. Plus précisément, le prix dit du milieu n’est pas fonction du volume des ventes alors que le prix médian l’est. À titre d’exemple, supposons qu’un service de musique en ligne a vendu 10 pistes 1 $, 1 piste 2 $, et 100 pistes 3 $. Le prix dit du milieu est de 2 $ étant donné que ce prix se situe au milieu des trois prix auxquels les pistes sont vendues. Toutefois, le prix médian est de 3 $, étant donné que la 56e piste est vendue 3 $ (un total de 111 pistes sont vendues). Selon nous, le prix médian est plus pertinent que le prix dit du milieu parce qu’il tient compte du volume des ventes.

[302] Dans son énoncé de cause, Apple a présenté de nouveaux éléments de preuve concernant le prix dit du milieu des pistes audio et des vidéoclips (vidéos de musique contenant chacun une œuvre musicale); le premier est de 0,99 $ alors que le second est de 1,74 $. Le ratio entre les deux est de 0,5690. [120] Apple a fourni des données sur les ventes pour chacun des niveaux de prix des pistes audio et des vidéoclips dans le cadre des demandes de renseignement menées par la SODRAC. [121] Bien que les chiffres de vente soient hautement confidentiels, les niveaux de prix ne le sont pas. La Commission a calculé que le prix médian d’une piste audio est de 1,29 $ et celui d’un vidéoclip de 2,29 $. Le ratio entre ces deux valeurs médianes est de 0,5633. Bien qu’il n’y ait pas un grand écart entre ces deux ratios, nous utiliserons le deuxième dans nos calculs. Même si ce ratio provient des ventes de vidéoclips et non de vidéos de concert (vidéos de musique contenant plus d’une œuvre musicale), étant donné que la vaste majorité des ventes de vidéos de musique par Apple sont des vidéoclips, nous utiliserons ce ratio à la fois pour les vidéoclips et les vidéos de concert.

[303] Le taux de la SOCAN pour les webdiffusions interactives de pistes audio est de 5,3 pour cent des revenus. Cela mène à un taux de 2,99 (5,3 × 0,5633) pour cent des revenus pour les webdiffusions interactives de vidéos de musique.

[304] Pour les webdiffusions de pistes sonores semi-interactives, nous avons établi le même taux pour les webdiffusions semi-interactives que pour celles interactives. Nous faisons de même pour les vidéos de musique.

ii. Taux de la SODRAC

[305] Dans son énoncé de cause, la SODRAC a proposé un taux de 6,5 pour cent des revenus pour les téléchargements permanents. Apple et les Réseaux ont proposé pour leur part un taux de 5,6 pour cent. La SODRAC n’a pas proposé de redevances pour la webdiffusion ou pour les téléchargements limités de vidéos de musique.

[306] Dans sa plaidoirie, la SODRAC a traité séparément les taux pour les vidéos de musique contenant seulement une œuvre musicale (ce que la SODRAC appelle des vidéoclips) et les taux pour les vidéos de musique contenant plus d’une œuvre musicale (ce que la SODRAC appelle des vidéos de concert). La SODRAC a fait valoir que le terme « vidéos de concert » devrait être utilisé plutôt que « ensemble », parce qu’il reflète davantage les réalités commerciales, et a construit ses observations selon le nombre d’œuvres dans une vidéo de musique, plutôt que le nombre de fichiers vendus ensemble.

[307] Pour les vidéoclips, la SODRAC a proposé un taux de 5,64 pour cent, ce taux étant celui calculé par Apple qui a utilisé le concept du prix dit du milieu. Bien que nous aurions préféré utiliser le concept du prix médian (qui aurait généré un taux de 5,58 pour cent (9,9 × 0,5633)), nous homologuons un taux de 5,64 pour cent pour les téléchargements permanents, ce taux ayant été proposé par les deux parties.

[308] SODRAC a également proposé que le taux de 5,64 pour cent s’applique aux vidéos de concert, soutenant qu’Apple était également d’accord avec ce taux. Dans sa réplique à CSI, Apple a soutenu que la SODRAC avait présenté de façon erronée sa position et qu’en fait [TRADUCTION] « les films de concert devraient générer un taux de redevances moins élevé que les vidéoclips, parce qu’ils utilisent moins de musique. » [122] Apple a fait valoir que suivant une analyse des films de concert menée par la SODRAC, en moyenne 10 pour cent de leur durée d’exécution ne comportent pas d’éléments musicaux. Le taux pour les films de concert devrait donc équivaloir au taux de redevances pour les vidéoclips moins 10 pour cent.

[309] La SODRAC conteste cet argument au motif que la méthodologie utilisée pour calculer le taux pertinent pour les vidéoclips ou les vidéos de concert tient déjà compte du contenu non musical et le retire. Nous sommes d’accord avec la SODRAC que le taux pour les vidéos de concert devrait être le même que celui pour les vidéoclips, soit 5,64 pour cent. Nous établissons donc un taux unique de 5,64 pour cent pour toutes les vidéos de musique, qu’elles contiennent une ou plusieurs œuvres musicales.

[310] Nous notons que ce taux ne s’applique qu’aux œuvres qui font entièrement partie du répertoire de la SODRAC. Cette redevance ne s’applique pas aux œuvres qui ne font pas partie du répertoire de la SODRAC; dans le cas d’une œuvre qui ne fait que partiellement partie du répertoire de la SODRAC, seule une proportion qui correspond à sa part de cette redevance est payable.

L. Assiette tarifaire

[311] Dans sa dernière décision portant sur les services de musique en ligne, la Commission s’est dite d’avis qu’ :

[à] plus long terme, tous les revenus liés à l’offre de musique devraient être inclus dans l’assiette tarifaire des services. L’existence d’une corrélation entre les revenus provenant de non-utilisateurs et la jouissance que les utilisateurs dérivent de la musique est presque certaine. Autrement dit, les modèles d’affaires en ligne sont suffisamment variés pour que les revenus provenant des utilisateurs ne rendent pas toujours compte de la pleine valeur de la musique utilisée. [123]

[312] La SOCAN et CSI font maintenant valoir que tant les revenus d’abonnement que les recettes publicitaires devraient faire partie de l’assiette tarifaire. La SOCAN soutient que s’il en était autrement on sous-estimerait la valeur de la musique. CSI affirme qu’il existe une corrélation entre les revenus non liés aux utilisateurs et la jouissance que les utilisateurs dérivent de la musique, ce qui justifie d’intégrer toutes les sources de revenus dans l’assiette tarifaire. CSI fait aussi valoir qu’il existe maintenant des modèles d’affaires suffisamment variés pour que les revenus liés aux utilisateurs ne rendent pas toujours compte de la pleine valeur de la musique utilisée.

[313] Apple soutient que l’assiette tarifaire pour les téléchargements devrait demeurer inchangée. Apple verse séparément aux titulaires de droits les redevances de téléchargement et celles qui sont exigibles pour iTunes Radio, compte tenu de différentes sources de revenus (frais de téléchargement et recettes publicitaires, respectivement). Une assiette tarifaire comprenant les deux sources de revenus entraînerait un double comptage, selon Apple.

[314] Nous convenons que la preuve montre qu’il existe une vaste gamme de modèles d’affaires dans l’industrie et que le fait d’inclure seulement les revenus liés aux utilisateurs dans l’assiette tarifaire – par suite d’un abonnement ou d’une transaction individuelle – pourrait, dans certains cas, sous-estimer le juste montant des redevances à verser. La preuve montre également que les recettes publicitaires sont devenues une importante source de revenus pour certains services, particulièrement dans le cas des services dont les revenus proviennent des abonnements. Pour ces motifs, à l’égard de tous les services de webdiffusion, y compris les services de webdiffusion hybrides, nous établissons à titre d’assiette tarifaire, l’ensemble des revenus attribuables aux opérations d’un service, incluant les revenus d’abonnement et les recettes publicitaires.

[315] Dans le cas des téléchargements permanents, nous convenons avec Apple que le fait de combiner les deux sources de revenus pourrait entraîner un certain degré de double rémunération. De plus, notre principe d’équivalence entre les redevances pour la reproduction mécanique payées pour les CD tangibles et pour les téléchargements permanents serait enfreint si nous devions inclure les recettes publicitaires dans l’assiette tarifaire. Ainsi, pour les téléchargements permanents, l’assiette tarifaire demeurera le montant payé par le consommateur.

[316] Dans le cas des téléchargements limités, l’assiette tarifaire du dernier tarif homologué utilisait les sommes payées par les abonnés. Pour les raisons qui suivent, il n’est pas nécessaire, dans la présente affaire, d’augmenter l’assiette tarifaire des téléchargements limités par rapport aux téléchargements permanents.

[317] D’abord, il ressort de la preuve que pendant la période visée par le tarif, les offres de téléchargement limité ne comportaient pas de publicité. De plus, nous ne disposons pas de preuve ou d’arguments pour appuyer un changement de l’assiette tarifaire; MM. Boyer et Blit n’ont traité de la question de l’assiette tarifaire qu’à l’égard des téléchargements permanents.

M. Redevances minimales

i. Téléchargements permanents

[318] Dans CSI – Services de musique en ligne (2007), les parties ont convenu d’une formule que la Commission a acceptée suivant laquelle la redevance minimale correspondrait aux deux tiers du montant payé par l’utilisateur moyen. [124]

[319] Cette formule fait en sorte que l’utilisateur moyen ne paie pas la redevance minimale, mais que les petits utilisateurs la paient. L’avantage de cette formule est que dans des situations raisonnables environ un tiers des utilisateurs paient la redevance minimale. Dans la décision de 2004 relative à des tarifs divers de la SOCAN, la Commission a conclu que moins de la moitié des utilisateurs d’un tarif devrait payer la redevance minimale. [125]

[320] Bien que cette façon d’établir une redevance minimale puisse avoir des désavantages, dont potentiellement celui de restreindre l’éventail des prix demandés par les concurrents tout en demeurant rentables, CSI a utilisé cette approche en l’espèce [126] et Apple semble, du moins indirectement, l’appuyer. [127] Les autres parties n’ont pas présenté d’observations sur ce sujet. En ce qui concerne les téléchargements, nous utilisons donc en l’espèce la règle des deux tiers.

[321] Pour CSI, nous homologuons comme taux principal pour les téléchargements permanents de pistes audio, un taux de 8,91 pour cent des revenus. Nous n’utilisons pas les prix de 2012 pour calculer sa redevance minimale. Nous utilisons plutôt la moyenne des prix de 2011 et 2012, à savoir 0,60 $ par piste faisant partie d’un ensemble et 1,13 $ pour les autres. Il en est ainsi parce que, dans la présente affaire, nous estimons qu’il est préférable d’établir un taux constant plutôt que de gagner marginalement en précision en établissant des taux légèrement différents d’année en année. Au final, nous cherchons à assurer la certitude que peut offrir un niveau constant de redevances. La redevance minimale pour les pistes faisant partie d’un ensemble est de 0,036 $ ((2/3) × 0,0891 × 0,60 $). La redevance minimale pour les pistes ne faisant pas partie d’un ensemble serait de 0,067 $ ((2/3) × 0,0891 × 1,13 $). Toutefois, dans ce dernier cas, comme CSI a seulement demandé 0,066 $, c’est le taux que nous homologuons.

[322] S’agissant de l’argument d’Apple selon lequel la demande de redevances minimales est ultra petita, puisque Apple semble avoir accepté une certaine forme de redevances minimales après le dépôt de son énoncé de cause, il n’est pas nécessaire pour nous d’examiner la question de savoir s’il y a eu manquement à l’équité procédurale.

[323] Enfin, pour ce qui est du nombre de pistes qui constitue un « ensemble », il n’est pas tout à fait clair si CSI demande toujours qu’il se chiffre à 15. MM. Boyer et Blit ont écrit ce qui suit : [TRADUCTION] « Nous croyons comprendre que, aux fins de la présente instance, CSI entend modifier le seuil proposé de 15 pistes à 13. » [128] Bien que le tarif de CSI pour 2014 fixe le seuil à 15 pistes, les tarifs déposés par la suite reviennent à 13 pistes pour un ensemble.

[324] Quoi qu’il en soit, même si CSI modifiait sa demande, et cette demande est légitime, nous la rejetterions pour les mêmes motifs que la Commission a donnés dans Services de musique en ligne (2012). Dans cette décision, la Commission a rejeté la demande de CSI visant à faire passer le nombre de pistes minimales dans un ensemble de 13 à 15 aux fins du calcul de la redevance minimale pour les téléchargements permanents. [129] Tout comme dans cette décision, aucune preuve ne montre en l’espèce pourquoi ce changement est souhaitable ou nécessaire, et il n’y a aucune preuve quant à l’incidence du changement proposé.

ii. Webdiffusions, webdiffusions hybrides et services de téléchargement limité

[325] Nous établissons une redevance minimale par service. Dans Tarif 22.F de la SOCAN, la Commission a fixé cette redevance à 100 $ par année par site de webdiffusion audio qui utilise le répertoire de la SOCAN 80 pour cent du temps, ou plus. Cette redevance se fondait sur une comparaison entre les redevances minimales fixées dans divers tarifs homologués. Dans Tarif 8 de Ré:Sonne (2014), la Commission a aussi homologué une redevance minimale de 100 $ par année. Nous ferons de même en l’espèce : nous établissons pour les tarifs de la SOCAN et de CSI une redevance minimale de 100 $ par année pour chacun des types de webdiffusion visé par ce tarif, incluant la webdiffusion hybride. Une redevance minimale de ce montant n’a pas à être ajustée pour tenir compte de la différence entre les principaux taux des deux sociétés de gestion.

[326] Vu les similarités importantes que présentent les modèles d’affaires des services de téléchargement limité, de webdiffusion et de webdiffusion hybride – plus particulièrement, le fait qu’ils reposent sur des abonnements – nous établissons la même redevance minimale de 100 $ par année pour les téléchargements limités de pistes audio pour CSI.

iii. Vidéos de musique

[327] Puisque la webdiffusion de vidéos de musique, tout comme la webdiffusion de pistes audio, opère selon un modèle basé sur les abonnements, et puisque nous établissons pour les deux une base tarifaire en fonction de tous les revenus attribuables aux opérations du service, nous établissons également une redevance minimale de 100 $ par année pour la webdiffusion de vidéos de musique.

[328] Pour les téléchargements permanents de vidéos de musique, la SODRAC a proposé dans ses observations des redevances minimales de 8,09 ¢ pour un vidéoclip et de 2,6 ¢ par œuvre dans une vidéo de concert. Le chiffre de 2,6 ¢ par œuvre est dérivé de l’application de la formule des « deux tiers » utilisée par certaines parties, formule selon laquelle la redevance minimale est établie au deux tiers de la redevance moyenne. Subsidiairement, la SODRAC a proposé un taux de 49,61 ¢ par vidéo de concert. Cela tient pour acquis qu’une vidéo de concert contient en moyenne 19 œuvres musicales. Cette option a été proposée par la SODRAC pour répondre à la préoccupation d’Apple selon laquelle des redevances minimales pour chaque œuvre musicale comme le propose la SODRAC poseraient problème sur le plan administratif. La proposition originale de la SODRAC reflétait le tarif de CSI pour les téléchargements permanents de musique : une redevance minimale pour les vidéos vendues séparément ou dans un petit ensemble, accompagnée d’un escompte pour les vidéos vendues dans un ensemble de 20 vidéos ou plus. [130]

[329] Bien que la redevance minimale proposée par la SODRAC dans ses observations en ce qui a trait aux téléchargements permanents de vidéos de musique contenant une seule œuvre musicale soit conforme à l’approche de la Commission à l’égard des redevances minimales quant aux téléchargements permanents d’œuvres musicales dans des pistes audio dans cette affaire, elle est plus élevée que la redevance minimale correspondante proposée dans ses projets de tarif, soit 6,6 ¢ par œuvre. Nous établissons donc la redevance minimale à ce montant, qui doit être rajusté pour tenir compte de la part du répertoire de la SODRAC dans cette œuvre.

[330] À l’égard des vidéos de concert, Apple a soulevé des préoccupations concernant l’application de redevances minimales pour chacune des œuvres musicales faisant partie d’une vidéo de concert. Plus particulièrement, Mme Walsh a déclaré dans son témoignage que :

[TRADUCTION] pour les films de concert, Apple ne devrait pas avoir à identifier chacune des œuvres musicales ou à payer pour chacune d’elles. Comme on ne reçoit pas les feuilles de minutage sur une base régulière, on ne devrait pas être en mesure d’identifier chaque œuvre musicale ou de payer pour chacune d’entre elles. [131]

[331] À la fin de ses observations écrites, la SODRAC a écrit ce qui suit : « l’opposant[e] Apple semble trouver que l’établissement d’une redevance minimale par œuvre contenue dans une vidéo concert est trop complexe ». [132] Elle a ensuite proposé, comme solution de rechange, une redevance minimale de 49,61 ¢ par fichier contenant des œuvres musicales multiples. Cette solution se fonde sur la prémisse qu’une vidéo de concert contient en moyenne 19 œuvres musicales.

[332] La SODRAC a ensuite expliqué pourquoi elle préfère sa proposition initiale :

Il devient donc plus difficile d’établir le pourcentage de représentation dans un produit complet puisque chaque œuvre à l’intérieur d’une vidéo de concert peut avoir des pourcentages de représentation différents. [133]

[333] Dans sa plaidoirie, Apple a clarifié sa thèse :

[TRADUCTION] Maintenant, la SODRAC explique que l’un des problèmes que posent pour elle les films de concert tient au fait que si un film de concert inclut, par exemple, 20 pistes, la titularité ou les droits pour chaque piste peuvent varier. Mais cela n’est pas un problème propre à la détermination d’une redevance minimale appropriée. En vérité, il s’agit d’une difficulté à laquelle les deux parties se heurtent dans le contexte des films de concert.

La preuve montre qu’Apple n’obtient pas toujours les feuilles de minutage, de sorte que ce problème existerait de toute manière. De plus, selon nous, on ne règle pas le problème en créant une structure de redevance minimale très complexe applicable en deçà du niveau du fichier. [134]

[334] De fait, la SODRAC et Apple conviennent qu’Apple devrait uniquement faire des versements (et la SODRAC en recevoir) à l’égard des œuvres musicales contenues dans une vidéo de concert qui font partie du répertoire de la SODRAC et, dans une proportion qui correspond à sa part, lorsqu’elle n’en possède pas l’entière propriété.

[335] Nous convenons avec Apple qu’une redevance minimale par œuvre crée de lourdes obligations quant à l’établissement de rapports, surtout en tenant compte de la proportion relativement faible des œuvres qui font vraisemblablement partie du répertoire de la SODRAC. Toutefois, comme Apple le fait remarquer, le problème ne concerne pas seulement le calcul d’une redevance minimale; il se pose aussi lorsqu’il s’agit d’identifier des chansons en vue d’établir des rapports. Malheureusement, les parties n’ont proposé aucune solution raisonnable susceptible de pallier cette difficulté. De façon à tenter de répondre aux préoccupations d’Apple, la SODRAC a proposé un minimum de 49,61 ¢ par vidéo de musique contenant plus d’une œuvre musicale. Bien que l’intention de la SODRAC soit louable, sa proposition ne nous semble pas corriger le problème, puisque les œuvres individuelles devraient toujours être identifiées de façon à ce que les redevances dues puissent être rajustées pour tenir compte de la part de répertoire de la SODRAC.

[336] Dans un monde idéal, il existerait une étude portant sur le pourcentage d’œuvres incluses dans les vidéos de concert vendues par Apple et faisant partie du répertoire de la SODRAC. Nous pourrions alors établir une redevance minimale unique par vidéo de concert, et ne pas exiger de rapport quant à l’utilisation du répertoire. Cela allégerait considérablement la tâche en ce qui a trait aux exigences de rapports. Étant donné l’affirmation d’Apple selon laquelle une faible proportion des œuvres proviendrait du répertoire de la SODRAC, une autre possibilité aurait été de mettre en place une licence transactionnelle. Les exigences de rapports seraient également significativement plus faibles dans ce scénario. Toutefois, les parties n’ont pas proposé une telle option, et nous n’avons probablement pas suffisamment de preuve pour établir de manière fiable tous les paramètres d’une telle licence.

[337] Nous n’avons d’autre choix que d’homologuer une redevance minimale par œuvre ou par fichier, ajustée en fonction de la proportion dans laquelle la SODRAC gère le droit de reproduction. Comme l’avocat d’Apple l’a fait remarquer, les deux structures nécessitent un ajustement permettant de tenir compte de cette question. L’une n’est pas meilleure que l’autre. Toutefois, étant donné qu’Apple s’oppose fortement à une redevance minimale par œuvre, et que la SODRAC accepte que la Commission homologue une redevance minimale par fichier, nous optons pour la redevance minimale par fichier. Nous soulignons que les préoccupations d’Apple sont en partie prises en compte puisque le tarif que nous homologuons spécifie que les renseignements requis, notamment le titre et l’auteur de chaque œuvre, ne doivent faire l’objet d’un rapport que s’ils sont « en la possession ou sous le contrôle du titulaire de licence qui exploite le service musical en ligne en question. » Le titulaire de la licence n’aura pas à faire d’enquête ou de recherche supplémentaires.

[338] Nous homologuons donc une redevance minimale de 6,6 ¢ par téléchargement d’une vidéo de musique contenant une seule œuvre musicale et 2,6 ¢ par œuvre dans une vidéo de musique contenant plusieurs œuvres musicales, ces deux montants devant être ajustés en fonction de la proportion du droit que gère la SODRAC relativement à ces œuvres musicales.

VII. TAUX HOMOLOGUÉS ET REDEVANCES

[339] Les taux que nous homologuons dans cette décision figurent à l’annexe C. Le présent tarif vise plusieurs activités nouvelles qui n’étaient pas visées par les tarifs précédents. Le présent tarif comporte également une base tarifaire plus large pour les services de webdiffusion, laquelle inclut maintenant les revenus de publicité associés à chacune des activités spécifiques; la base tarifaire des tarifs homologués précédemment ne comprenait que les revenus d’abonnement. La Commission est habituellement en mesure d’évaluer le montant total des redevances générées par un tarif. Toutefois, en l’instance, nous ne disposons pas de renseignements détaillés suffisants quant aux revenus spécifiques associés aux diverses activités visées par le tarif pour ce faire.

VIII. LIBELLÉ DU TARIF

A. Contexte

[340] Les définitions et les exigences en matière de rapports n’étaient pas uniformes dans les projets de tarif déposés auprès de la Commission par les trois sociétés de gestion (la SOCAN, CSI et la SODRAC). Il était très difficile de comprendre comment les divers projets de tarif traitaient chaque service de musique en ligne, notamment en ce qui a trait aux redevances exigibles et aux exigences en matière de rapports. Pour cette raison, dans son avis du 6 juin 2016, la Commission a invité les sociétés de gestion à proposer conjointement un texte pour remplacer les dispositions administratives des divers projets de tarif.

[341] Le 11 juillet 2016, les sociétés de gestion ont proposé un texte pour remplacer les définitions et les dispositions administratives de leurs projets de tarif respectifs, ainsi que des dispositions transitoires qu’il convenait, selon elles, d’inclure dans le tarif homologué (le « projet de tarif conjoint »). Les sociétés de gestion ont noté que le projet de tarif conjoint pourrait nécessiter une révision, selon les conclusions tirées par la Commission à l’égard de certaines questions de fond. Apple, Pandora et les Réseaux étaient d’accord. En outre, Pandora a présenté des observations sur les changements apportés à la définition du terme « abonné » par les sociétés de gestion dans leur texte proposé.

[342] Le projet de tarif conjoint des sociétés de gestion a été très utile, car il a permis à la Commission de préparer l’ébauche d’un tarif unique (l’« ébauche de tarif ») qui tient compte de ses décisions préliminaires dans la présente affaire. Dans son avis du 9 décembre 2016, la Commission a remis l’ébauche de tarif aux parties et les a invitées à la commenter. La Commission leur a demandé d’aborder certaines questions précises et leur a expliqué les présomptions qu’elles pouvaient faire à l’égard du calcul des redevances, y compris les redevances minimales, dans le contexte de l’exploitation de services particuliers.

[343] Toutes les parties ont présenté des observations conformément à l’avis. Toutes les parties, sauf la SODRAC, ont répondu à ces observations. Nous avons examiné l’ensemble des observations et des réponses. Dans les paragraphes qui suivent, nous n’abordons que certaines des questions soulevées, notamment celles qui ont fait l’objet d’un désaccord.

B. Service / exploitant d’un service

[344] Avant d’examiner les questions précises soulevées par les parties, il est important de noter que le point de référence de l’ébauche de tarif était quelque peu différent de celui des projets de tarif et du projet de tarif conjoint. L’ébauche de tarif impose des obligations à l’exploitant d’un service, alors que dans les projets de tarif et le projet de tarif conjoint le service désignait l’entité assujettie aux obligations.

[345] Par contre, pendant l’instance, les parties ont parfois utilisé le terme « service de musique en ligne » pour désigner la personne offrant un ou plusieurs services; parfois ce terme décrivait une opération commerciale offrant divers moyens de donner accès aux œuvres musicales et d’en fournir des copies, et parfois il désignait un moyen particulier de donner accès aux œuvres musicales et d’en fournir des copies.

[346] Selon les modalités du tarif, toute personne qui exploite un des services désignés est assujettie aux obligations qui y sont liées. Lorsqu’une personne exploite plus d’un service désigné, les obligations qui lui sont imposées dans le contexte de l’exploitation du deuxième service sont séparées et distinctes des obligations qui lui sont imposées relativement à l’exploitation du premier service. Lorsque les dispositions sont bien appliquées, il n’y a aucun chevauchement ni dédoublement.

[347] Nous sommes conscients qu’une personne peut exploiter plus d’un type de services identifiés dans le tarif. Nous sommes également conscients que différents types de services (parfois appelés « volets » par les parties) peuvent être offerts par le même exploitant ou la même entreprise, ou encore offerts dans le cadre d’un même produit. Cependant, compte tenu de la preuve présentée par les parties, toute transmission particulière d’un fichier de musique ne se fera que par un type de services, tel qu’il est défini dans le tarif homologué. Ainsi, une seule série d’obligations ne s’appliquera à cette transmission.

[348] De façon similaire, la transmission d’un fichier entraînera le versement de redevances en vertu d’une seule catégorie de service de musique en ligne.

C. Termes et définitions

i. Piste audio – Définition

[349] L’ébauche de tarif définit ainsi le terme « piste audio » :

[TRADUCTION] Enregistrement sonore d’une œuvre musicale, à l’exclusion d’un enregistrement synchronisé dans une œuvre cinématographique (au sens de la Loi sur le droit d’auteur, L.R.C. 1985, ch. C-42).

[350] CSI, Apple et Pandora ont fait valoir que l’exclusion relative aux enregistrements synchronisés dans des œuvres cinématographiques devrait être supprimée. Les Réseaux ont souscrit aux observations d’Apple et de Pandora.

[351] CSI a présenté les définitions suivantes pour les termes « piste audio » et « enregistrement sonore » :

[TRADUCTION] « piste audio » Enregistrement sonore d’une seule œuvre musicale et qui, pour plus de certitude, exclut une vidéo de musique.

« enregistrement sonore » S’entend au sens de la Loi sur le droit d’auteur, L.R.C. 1985, ch. C-42.

Apple et Pandora ont convenu des définitions proposées par CSI.

[352] CSI justifie l’emploi du qualificatif « seule » en affirmant que son tarif n’a jamais été appliqué à des fichiers comportant des œuvres multiples, comme les pots-pourris ou les fichiers créés par collage, à l’égard desquels, dans bien des cas, CSI n’est pas autorisée à délivrer une licence. Nous prenons note du fait que le projet de tarif de CSI prévoyait que [TRADUCTION] « la reproduction d’une œuvre dans un pot-pourri ou pour créer un collage n’est pas autorisée ». Ainsi, cette restriction additionnelle ne semble pas être nécessaire.

[353] Par contre, si elle est nécessaire et que l’expression « une seule œuvre musicale » impose une limite plus importante que celle que CSI cherche déjà à imposer, le qualificatif restreint la portée du tarif. Il est impossible pour nous d’évaluer quelle proportion des œuvres serait exclue en raison de l’application de ce changement proposé.

[354] Par conséquent, nous n’apportons pas ce changement.

ii. Piste audio / enregistrement sonore

[355] CSI a également fait valoir que toutes les occurrences du terme « enregistrement sonore » au paragraphe 6(1) de l’ébauche de tarif devraient être remplacées par le terme « piste audio » : [TRADUCTION] « si le paragraphe 6(1) renvoie à ces termes séparément, cela pourrait faire croire à tort qu’il existe une distinction entre eux et entraînerait probablement une certaine confusion et des conséquences non voulues ». Apple et Pandora semblent être d’accord. La SOCAN, la SODRAC et les Réseaux n’ont pas présenté d’observations sur ce point. Nous procédons au remplacement proposé par CSI.

iii. Utilisateur final / abonné / destinataire

[356] La Commission a demandé expressément aux parties d’aborder la question de savoir si les termes « utilisateur final » et « abonné » sont bien utilisés dans l’ébauche de tarif. La SOCAN et CSI ont fait valoir que ces termes étaient bien employés dans l’ébauche de tarif. Par contre, CSI a fait valoir que le terme « destinataire », qui n’est pas défini, a nécessairement le même sens que le terme « utilisateur final » et que toutes les occurrences de « destinataire » devraient être remplacées par « utilisateur final » afin d’éviter tout risque d’ambiguïté. Nous sommes d’accord; le remplacement est effectué.

iv. Service de webdiffusion hybride

[357] En général, les parties se sont entendues pour dire que le terme « service de webdiffusion hybride », tel qu’il est défini dans l’ébauche de tarif, pouvait s’entendre de tout service offrant des webdiffusions, ainsi que de tout service offrant des transmissions semblables aux téléchargements limités. Certaines parties ont proposé des solutions pour régler le problème. Nous acceptons la structure de la définition proposée par CSI, selon laquelle la définition de « service de webdiffusion hybride » est fondée sur le concept de « service de webdiffusion », qui permet également à l’utilisateur final de mettre en antémémoire les fichiers transmis de façon à pouvoir les écouter à une date ultérieure.

[358] Certaines parties ont fait valoir que l’élément de la définition de services hybrides qui porte sur la mise en antémémoire devrait être entièrement harmonisé avec la définition qui se rapporte aux services de téléchargement limité. Cependant, les fins pour lesquelles les copies sont créées ne sont pas les mêmes. Dans le cas d’un service de téléchargement limité, les copies d’œuvres musicales sont stockées indéfiniment tant que la personne est un abonné, alors que dans le cas d’un service de webdiffusion hybride, les copies des œuvres musicales sont stockées temporairement (même si la période de stockage peut varier significativement) dans le but d’être écoutées à une date ultérieure. Par conséquent, nous concluons qu’un libellé distinct est indiqué.

D. Rapports sur l’utilisation de la musique

i. Rapports mensuels

[359] Dans leurs projets de tarif respectifs et dans le projet de tarif conjoint, les sociétés de gestion ont cherché à obtenir divers renseignements des exploitants de services de musique en ligne, notamment sur l’utilisation de la musique. Les renseignements demandés à l’égard d’un service particulier diffèrent d’une société de gestion à l’autre. Dans le but d’obtenir des commentaires et de faciliter la rédaction d’une ébauche de tarif, la Commission a cerné les divers types de renseignements demandés par les sociétés de gestion à l’égard des divers services, et elle les a appliqués à chaque service visé par l’article énonçant les exigences en matière de rapports sur l’utilisation de la musique (article 6 de l’ébauche de tarif).

[360] Toutefois, puisqu’on ne savait pas exactement dans quelle mesure ces renseignements étaient réellement nécessaires au fonctionnement du tarif, la Commission a cerné les exigences en matière de rapports qui ne semblaient pas à première vue être liées au calcul du tarif, et elle a demandé aux parties, dans son avis du 9 décembre 2016, d’indiquer [TRADUCTION] « quels renseignements parmi les renseignements énoncés à l’article 6, le cas échéant, sont nécessaires aux fins du calcul ou du versement des redevances, et de quelle façon (s’ils sont nécessaires aux fins du versement des redevances, veuillez indiquer la formule dans laquelle les renseignements seront utilisés) ».

[361] En réponse, la SOCAN a fait valoir qu’elle a besoin des renseignements sur le nombre d’écoutes, le nombre d’utilisateurs finaux et les montants payés par les utilisateurs finaux (répartis par type d’abonné) pour fixer la redevance par écoute.

[362] CSI a fait valoir que, sans en savoir plus, il était difficile de déterminer quels renseignements parmi ceux qui sont énoncés à l’article 6 sont nécessaires aux fins du versement des redevances. Par contre, elle a indiqué que même si certains renseignements ne sont pas requis à l’heure actuelle pour le versement des redevances, ils pourraient devenir utiles si CSI modifiait sa méthode de versement, après avoir obtenu des renseignements additionnels.

[363] La SODRAC a simplement affirmé que tous les renseignements demandés au paragraphe 6(8) de l’ébauche de tarif sont essentiels aux fins du calcul et du versement des redevances.

[364] Apple et Pandora se sont opposées à la proposition selon laquelle les renseignements devraient être communiqués aux fins de tarifs futurs. Ils font valoir que :

[TRADUCTION] [l]es dispositions du tarif relatives à la présentation de rapports se rapportent uniquement à ce tarif et ne devraient pas être utilisées à des fins liées à des tarifs futurs, encore moins à des fins de recherche des faits ou de recherche à l’aveuglette par une société de gestion à l’égard des modèles d’affaires adoptés par les utilisateurs. De fait, si ces renseignements sont nécessaires, ils devraient être obtenus par la voie d’une demande de renseignements présentée en bonne et due forme, dans le cadre du processus d’homologation du tarif. [135]

[365] Les Réseaux ont fait valoir que le simple fait que les renseignements pourraient être utiles à l’avenir ne justifie pas le fardeau associé à la cueillette et à la présentation de ces renseignements.

[366] Ayant examiné les observations des parties à cet égard, nous concluons qu’aucun des renseignements indiqués par la Commission dans l’ébauche de tarif n’est nécessaire au calcul des redevances, sauf le nombre de fichiers dans un ensemble (prévu au sous-alinéa 6(5)a)(ii) de l’ébauche de tarif et à l’alinéa 6(5)b) du tarif homologué).

[367] Bien que les sociétés de gestion aient présenté des observations sur les renseignements nécessaires au versement des redevances, seule la SOCAN a présenté une certaine forme d’explication sur la façon dont ces renseignements pourraient être utilisés dans ce contexte.

[368] Malgré les instructions claires qui ont été données dans l’avis de la Commission du 9 décembre 2016, aucune des sociétés de gestion n’a présenté de formule de versement pour démontrer clairement la façon dont les renseignements demandés seraient utilisés pour déterminer les montants à verser aux titulaires des droits d’auteur sur les œuvres utilisées. Il est donc difficile de déterminer quels renseignements sont réellement nécessaires aux fins du versement des redevances.

[369] Malgré cette lacune, nous incluons dans le tarif homologué des exigences en matière de rapports qui permettront aux sociétés de gestion de déterminer le montant payé pour chaque fichier, dans le cas de services sans abonnement (p. ex. les téléchargements), ainsi que le montant théorique pour chaque fichier, dans le cas de services d’abonnement. À notre avis, ces statistiques fourniront une base raisonnable pour le versement des redevances, et leur collecte et leur présentation n’imposeront pas de fardeau déraisonnable aux titulaires de licence.

[370] Enfin, certaines parties, dont la SOCAN, craignent que le défaut de communiquer certains renseignements à la SOCAN permette à [TRADUCTION] « certains titulaires de licence de faire la moyenne des revenus d’abonnement provenant de tous les abonnés, y compris les abonnés aux services gratuits, ce qui masquerait les données exactes relatives aux revenus par abonné et réduirait la redevance globale à payer ». [136] Étant donné la structure tarifaire prévue dans le tarif homologué, qui prévoit que, dans le cadre des services d’abonnement, le taux exigible est le même pour les abonnés aux services gratuits et pour les abonnés aux services payants, le risque de répartition inappropriée des revenus est significativement réduit, voire éliminé.

ii. Renseignements sur l’écoute pour les services de téléchargement limité et les services hybrides

[371] Les parties ne s’entendaient pas sur les renseignements que les exploitants de services de webdiffusion hybrides devraient être tenus de communiquer. En particulier, l’ébauche de tarif indique que la personne qui exploite un service de webdiffusion de musique hybride doit déclarer [TRADUCTION] « le nombre d’écoutes par fichier », ainsi que [TRADUCTION] « le nombre de fois que chaque fichier est copié sur le dispositif de stockage d’un utilisateur final ».

[372] Pandora, Apple et les Réseaux ont fait valoir que le projet de tarif conjoint des sociétés de gestion ne proposait pas d’exigences de rapports distinctes pour les services hybrides. Elles ont également fait valoir qu’il était impossible de communiquer ces renseignements. Pandora a indiqué ce qui suit :

[TRADUCTION] [P]uisque les parties ne disposaient pas de la proposition lorsque la preuve sur la production de rapports a été présentée, et puisque Pandora n’a commencé à offrir la mise en antémémoire qu’au cours des années subséquentes, Pandora n’a pas eu l’occasion de se pencher sur cette question. Personne d’autre n’a présenté à la Commission des éléments de preuve sur les rapports relatifs aux copies mises en antémémoire. Les téléchargements limités fonctionnent de façon substantiellement différente, et les dispositions relatives aux rapports sur les téléchargements limités ne fournissent aucun fondement pour les propositions actuelles concernant les services hybrides. [137]

[373] En fait, Pandora ne fait pas le suivi des copies en antémémoire sur les appareils des utilisateurs finaux et ne communique ces renseignements à aucune société de gestion au monde. C’est en partie parce que ces renseignements ne se rapportent pas à la monétisation, ou à la valeur relative, de la musique. C’est aussi en raison de la façon dont les copies en antémémoire sont créées. La fonction de mise en antémémoire de Pandora permet aux abonnés du service Plus de profiter d’une expérience d’écoute hors ligne dynamique et automatiquement mise à jour. Les auditeurs peuvent se déconnecter souvent, parfois ou jamais. La mise en antémémoire d’un certain nombre de chansons et de compilations de chansons se fait automatiquement, tout comme la mise à jour, en fonction des habitudes d’écoute des abonnés et de la fréquence de leur connexion en ligne. Cela arrive peu importe si les chansons en antémémoire sont écoutées ou non. Chaque fois que l’antémémoire d’un abonné est créée ou mise à jour, des centaines de chansons peuvent être copiées ou recopiées sur l’appareil de l’abonné. Les renseignements sur l’incidence de la copie d’une chanson particulière ou de la copie en général, qu’ils soient répartis selon le statut de l’abonné ou non, ne sont tout simplement pas des renseignements importants dans les circonstances. C’est pourquoi Pandora n’en fait pas le suivi et ne produit pas de rapports à cet égard.

[374] Bien que le projet de tarif conjoint ne contienne pas d’exigences particulières en matière de rapports pour les services de webdiffusion hybrides, il indique clairement que celles-ci pourraient être nécessaires : [TRADUCTION] « Des dispositions relatives à la production de rapports pourraient être nécessaires pour les services hybrides. » Cela ne peut donc, en soi, être déterminant.

[375] Cela étant dit, comme il a déjà été mentionné, le nombre d’écoutes des fichiers mis en antémémoire n’est pas nécessaire pour calculer le taux de redevances. En outre, bien qu’il soit concevable de se servir du nombre d’écoutes des fichiers mis en antémémoire en tant que fondement du versement des redevances, nous n’avons pas reçu suffisamment d’éléments de preuve établissant que ces renseignements sont, de fait, nécessaires au versement des redevances. Les parties auraient pu, par exemple, fournir une formule de distribution qui utilise ces renseignements. Ainsi, pour les mêmes motifs que ceux qui sont énoncés ci-dessus, les exigences en matière de rapports n’incluent pas le nombre d’écoutes d’un fichier et le nombre de fois qu’un fichier a été mis en antémémoire.

iii. Communication du prix payé pour le téléchargement d’un fichier dans un ensemble

[376] CSI a proposé d’ajouter l’obligation pour les exploitants d’un service de téléchargement de décrire la façon dont ils attribuent une partie du montant payé pour un ensemble à chaque fichier qui constitue cet ensemble.

[377] Étant donné la façon dont les redevances exigibles pour l’exploitation d’un service de ce genre sont calculées, ces renseignements ne sont pas nécessaires lorsque l’ensemble contient uniquement des pistes audio.

[378] Par contre, lorsque l’ensemble contient uniquement des vidéos de musique ou à la fois des pistes audio et des vidéos de musique, la répartition devient importante. La preuve montre que des ensembles de ce genre, c’est-à-dire qui contiennent des pistes audio et des vidéos de musique, sont réellement vendus. C’est ce que nous appelons les « ensembles mixtes ». Ils sont définis dans le tarif. Dans le cas de ces ensembles mixtes, une transaction entraîne l’application des taux relatifs à deux services différents : un service de téléchargement permanent de musique et un service de téléchargement permanent de vidéos de musique. Les revenus découlant de la transaction doivent être répartis correctement pour déterminer le montant dû pour chaque service.

[379] Guidés par des éléments de preuve confidentiels déposés auprès de la Commission, nous établissons deux méthodes de répartition. La première méthode – qui doit être utilisée lorsque les renseignements nécessaires au calcul sont disponibles – attribue à chaque fichier le prix de l’ensemble, multiplié par la proportion entre le prix du fichier individuel et la somme des prix de tous les fichiers individuels de l’ensemble. D’après la preuve déposée, il s’agit de la méthode principale utilisée dans le marché pertinent.

[380] La deuxième méthode – qui doit être utilisée lorsque les renseignements nécessaires à l’application de la première méthode ne sont pas disponibles – accorde à chaque fichier de vidéo de musique deux fois le poids d’un fichier contenant une piste audio, et attribue à chaque fichier le prix de l’ensemble multiplié par la proportion entre le poids du fichier et la somme du poids de tous les fichiers de l’ensemble. La preuve suggère que la moyenne pondérée du prix d’une vidéo de musique est presque le double de la moyenne pondérée du prix d’une piste audio. [138]

[381] Cette méthode de répartition est prévue aux paragraphes 4(3) et 4(4) du tarif que nous homologuons.

iv. Renseignements nécessaires sur le fichier

[382] La Commission a demandé aux parties quels renseignements parmi les renseignements énoncés au paragraphe 6(1) de l’ébauche de tarif conviennent aux pistes audio, quels renseignements conviennent aux vidéos de musique et quels renseignements conviennent aux deux.

[383] CSI a indiqué que tous les renseignements énumérés conviennent aux pistes audio, tandis que la SOCAN et la SODRAC ont indiqué que tous les renseignements s’appliquent aux pistes audio et aux vidéos de musique, sauf l’alinéa 6(1)i), qui exige la communication de renseignements liés aux albums de musique en format physique. Nous modifions l’alinéa 6(1)i) en conséquence.

v. Renseignements disponibles

[384] L’ébauche de tarif prévoit que tous les renseignements énumérés au paragraphe 6(1) qui sont disponibles doivent être communiqués. L’ébauche de tarif précise que les renseignements sont considérés être disponibles s’ils sont [TRADUCTION] « en la possession ou sous le contrôle du titulaire de licence qui exploite le service de musique en ligne pertinent, peu importe la forme des renseignements ou la façon dont ils ont été obtenus ».

[385] CSI a proposé d’élargir cette obligation et d’y inclure également les renseignements qui sont en la possession ou sous le contrôle [TRADUCTION] « d’un distributeur autorisé ou de toute autre personne ou entité qui participe directement à l’exploitation du service de musique en ligne pertinent ».

[386] Apple et Pandora se sont opposées à cet ajout, au motif qu’il s’appliquerait aux entreprises de services sans fil qui pourraient revendre le service, et qu’il serait déraisonnable de s’attendre que le titulaire de licence puisse obtenir des renseignements de leur part.

[387] Nous convenons que la personne qui exploite un service ne devrait pas avoir à demander des renseignements à des tiers. Nous n’élargissons donc pas la portée de cette disposition.

[388] S’il existe des éléments de preuve établissant que la portée de l’obligation nuit au respect des exigences en matière de rapports (c.-à-d. que les titulaires d’une licence n’ont habituellement pas la plupart des renseignements, alors que des personnes liées les ont) – aucune preuve n’a été présentée pour montrer que c’est le cas en l’espèce – les parties sont invitées à les présenter dans une instance ultérieure.

E. Revenus bruts et répartition des revenus

i. Répartition des revenus

[389] Comme il a déjà été mentionné, une personne peut exploiter plus d’un service. Bien que dans la plupart des cas la répartition est un exercice facile, par exemple la répartition des revenus d’abonnement, dans certains cas (p. ex. la publicité sur une page web ou une application qui offre divers services), la répartition est plus difficile. Dans ces circonstances, de quelle façon les revenus sont-ils répartis entre des services donnés?

[390] Par l’ajout des alinéas 5h) et 5i) à son projet de tarif, CSI a proposé, dans son courriel du 13 janvier 2017, que les titulaires d’une licence qui exploitent plus d’une catégorie de service décrivent comment ils attribuent les revenus bruts à chaque service. Dans son courriel du 15 février 2017, la SOCAN propose plutôt que les titulaires d’une licence qui exploitent un service qui vend un accès à différents types de transmissions en tant que produit unique paient des redevances en fonction de [TRADUCTION] « l’utilisation optimale » du produit.

[391] En l’espèce, il n’y a que peu ou pas d’éléments de preuve établissant que les personnes qui exploitent des services multiples répartissent incorrectement les revenus de façon à réduire au minimum les redevances exigibles. En outre, compte tenu des taux fixés dans le tarif (les taux applicables à de nombreux types de services correspondent au même pourcentage des revenus), nous nous attendons à ce que les incitatifs à la répartition incorrecte des revenus soient minimes, voire inexistants. Par conséquent, nous n’ajoutons pas les diverses dispositions proposées par CSI ou la SOCAN à cet égard.

ii. Définition de revenu brut

[392] Dans son avis du 9 décembre 2016, la Commission a demandé aux parties de présumer que les redevances payables par le titulaire d’une licence pour l’exploitation [TRADUCTION] « d’un service de webdiffusion non interactive, semi-interactive ou interactive pour les pistes audio, d’un service de webdiffusion de musique hybride pour les pistes audio ou d’un service de webdiffusion semi-interactive pour les vidéos de musique correspondent à un pourcentage des revenus bruts attribuables à l’exploitation de ce service ».

[393] C’est ce que fait le tarif homologué. Par contre, comme la SOCAN l’a fait remarquer dans ses observations, la définition de « revenus bruts » dans l’ébauche de tarif exclut les revenus provenant de sources autres que les utilisateurs finaux, par exemple les publicitaires, les commanditaires, etc. – ou, du moins, elle est ambiguë à cet égard. Ainsi, la définition de « revenus bruts » dans l’ébauche de tarif ne cadrait pas avec les présomptions que la Commission demandait aux parties de faire.

[394] La proposition de CSI, qui a abordé cette question, incluait également les montants reçus des distributeurs autorisés. Sur ce point, Apple et Pandora ont fait valoir que les titulaires d’une licence ne devraient être tenus de payer des redevances que sur les revenus qu’ils reçoivent et non, par exemple, sur les montants que pourraient exiger les fournisseurs qui revendent le service, montants qui ne sont pas visibles pour le titulaire de licence et à l’égard desquels ils n’ont aucun contrôle.

[395] Nous convenons que, puisque nous voulons que les revenus bruts s’entendent des revenus directement attribuables à l’exploitation d’un service, la définition de « revenus bruts », qui ne s’applique qu’au calcul des redevances payables par les services de webdiffusion et les services de webdiffusion hybrides, ne doit pas être ambiguë en ce qui a trait à l’inclusion des revenus provenant de sources comme les publicitaires et les commanditaires. Nous souscrivons également à l’avis d’Apple et de Pandora selon lequel les revenus bruts n’incluent pas les revenus perçus par des tiers.

[396] Ainsi, nous modifions la définition comme suit :

« revenus bruts » S’entend, relativement à un service de musique en ligne, de tout revenu gagné par un titulaire de licence, qu’il s’agisse d’un paiement en espèces, d’un paiement en nature, de troc ou de publicité réciproque, y compris les revenus tirés par l’utilisation du service et ceux reçus pour des activités promotionnelles, comme la publicité, qui sont attribuables à l’exploitation du service.

[397] Certaines parties ont affirmé craindre qu’il y ait un risque de double comptabilisation dans le cas où une personne exploite plusieurs types de services. Par souci de clarté, voici un exemple : Lorsqu’une entité exploite un service qui offre des téléchargements de pistes audio et qu’elle exploite aussi un service qui offre des webdiffusions de pistes audio, le calcul des redevances exigibles relativement à l’exploitation du service de téléchargement tient uniquement compte des montants payés par les utilisateurs finaux pour les téléchargements, et le calcul des redevances exigibles relativement à l’exploitation du service de webdiffusion tient uniquement compte des revenus attribuables à l’exploitation du service de webdiffusion, à l’exclusion des revenus attribuables à l’exploitation du service de téléchargement. Ce principe s’applique même si les deux services sont offerts à partir de la même page Web, de la même application ou de la même interface, et même s’ils utilisent la même image de marque. Aux fins du tarif homologué, il s’agit de deux services distincts, qui comportent des obligations distinctes et génèrent des revenus distincts.

[398] Le tarif homologué énonce clairement les sources de revenus qui entrent en ligne de compte dans le calcul des redevances exigibles relativement à un service donné. Une entité peut fournir des services qui ne sont pas visés par le présent tarif. Les revenus attribuables à l’exploitation de ces services ne font pas partie de l’assiette des redevances visée par le présent tarif.

F. Dispositions en matière de confidentialité

[399] Dans son avis du 9 décembre 2016, la Commission a demandé aux parties d’aborder la question de savoir si le paragraphe 13(4) et l’alinéa 13(2)e) de l’ébauche de tarif étaient tous deux nécessaires.

[400] CSI et la SOCAN ont soutenu que les deux dispositions visaient des situations différentes et qu’elles étaient donc toutes deux nécessaires.

[401] Cependant, Apple, Pandora et les Réseaux ont affirmé ce qui suit :

[TRADUCTION] [L]’alinéa 13(2)e), qui autorise la communication unilatérale de renseignements confidentiels à « toute personne [...] censée les connaître », est trop large et trop vague; il n’est pas nécessaire et devrait être supprimé. La société de gestion qui souhaite communiquer des renseignements à une personne qui, selon elle, les connaît déjà peut toujours demander le consentement du fournisseur de renseignements conformément au paragraphe 13(1). [139]

[402] Apple, Pandora et les Réseaux ont fait valoir que la simple présomption de connaissance ne devrait pas être suffisante pour permettre la communication de renseignements confidentiels.

[403] Les observations présentées par les parties à cet égard montrent que leurs présomptions quant à savoir qui connaît les renseignements en question seraient probablement significativement différentes. Ainsi, nous convenons que le fait de transmettre les renseignements confidentiels d’une personne à un tiers sur la base d’une simple présomption de connaissance pose problème. L’alinéa 13(2)e) est modifié en conséquence.

G. Conformité et résiliation

[404] Dans leur projet de tarif conjoint, les sociétés de gestion ont ajouté des dispositions sur le défaut et la résiliation, qui prévoient les circonstances dans lesquelles une personne cesse de bénéficier du tarif, en tout ou en partie. En résumé, ces dispositions prévoient qu’une personne qui omet de payer ou de déposer un rapport plus de cinq jours après la date où elle doit le faire ne bénéficie plus du tarif. De plus, le non-respect de toute autre disposition du tarif empêcherait dès lors la personne concernée de bénéficier du tarif. Enfin, les personnes qui sont insolvables ou qui ont déclaré faillite perdraient le droit de bénéficier du tarif à compter du jour précédant leur insolvabilité ou déclaration de faillite. La Commission n’a pas inclus ces dispositions dans l’ébauche de tarif.

[405] Dans ses observations, CSI a proposé que ces dispositions soient rétablies, quoique avec des modifications. Elle reconnaît que, dans des décisions antérieures, la Commission a conclu que les questions d’application ne relèvent pas de la Commission. Par exemple, dans la décision Radio commerciale, 2016, la Commission a refusé d’imposer une pénalité pour la présentation tardive des renseignements sur l’utilisation de la musique et des données financières par les titulaires d’une licence. [140] Cependant, CSI a rajouté que les dispositions proposées dans le projet de tarif conjoint ne sont pas une pénalité pour la présentation tardive. Elles ne pénalisent pas les titulaires de licence qui ne respectent pas le tarif et ne créent pas non plus de recours contre eux. En réalité, elles prévoient simplement que le titulaire d’une licence qui omet de se conformer aux modalités de l’ébauche de tarif, comme il est précisé, ou le titulaire d’une licence visé au paragraphe 13(3) proposé, n’a pas le droit de se livrer aux actes autorisés par l’ébauche de tarif. Ainsi, les dispositions proposées ne visent pas l’application d’un droit; elles servent plutôt de limite raisonnable à la licence accordée par l’ébauche de tarif.

[406] Apple, Pandora et les Réseaux se sont opposées à cet ajout. Apple et Pandora ont fait valoir que ces mesures n’ont pas leur place dans le tarif. Les parties peuvent avoir recours aux tribunaux, et y ont toujours eu recours, pour régler les questions de présentation de rapports et de versements tardifs. Les tribunaux demeurent le forum approprié à cet égard. Les Réseaux ont souligné que ces mesures [TRADUCTION] « pourraient mener à l’imposition d’une pénalité inutile et onéreuse aux services qui commettent des erreurs administratives [...] [U]ne disposition comme celle-là, en vertu de laquelle les titulaires d’une licence sont réputés être en défaut pour une violation mineure de leurs obligations en matière de présentation de rapports, est susceptible d’entraîner des litiges coûteux. » [141]

[407] Nous sommes d’accord que la personne, par exemple, qui verse les redevances fixées par le tarif, mais qui omet de respecter quelque autre exigence administrative en temps opportun, ne devrait pas automatiquement être empêchée de bénéficier du tarif. Cela signifierait, comme les Réseaux le soulignent, que des activités auparavant visées par une licence deviendraient des violations de droit d’auteur – même si un versement a été fait. Les tribunaux sont mieux placés pour évaluer les circonstances pertinentes en vertu desquelles une personne serait privée des bénéfices d’un tarif et déterminer un redressement approprié.

[408] Nous sommes conscients, toutefois, que la preuve démontre que la question des paiements en retard était problématique pendant la période du tarif. Le témoignage de Mme Rioux a fait état d’un total de 17 paiements trimestriels qui étaient en retard en 2011 et 2012, desquels 13 ont occasionné un délai dans la distribution des redevances. [142] Mme Rioux a également indiqué que CSI faisait affaire avec 23 services de musique en ligne. [143] Cela veut dire qu’il y aurait eu 184 paiements trimestriels, dont 9 pour cent était en retard. Cependant, puisque nous simplifions le fonctionnement du tarif CSI pour les téléchargements permanents en incluant un ajustement de répertoire, nous ne sommes pas convaincus que le problème des paiements tardifs aura autant d’importance. Dans la mesure où le problème perdurerait, nous pourrons réexaminer la question d’inclure une clause de résiliation – y compris la compétence de la Commission à cet égard – en temps opportun.

[409] Pour des raisons similaires, nous n’incluons pas les dispositions du projet de tarif conjoint qui privent le détenteur de licence du bénéfice du tarif si ce dernier est insolvable ou a déclaré faillite. La Commission n’a pas d’expertise dans le domaine de la faillite et n’a pas reçu d’observations ni de preuve sur l’interaction entre ces dispositions et les mesures législatives applicables. En l’absence de telles observations ou d’une telle preuve, la Commission ne peut conclure si de telles dispositions sont en fait équitables et dans quelle mesure elles respectent les objectifs législatifs applicables ou vont à l’encontre de ceux-ci.

H. Rapports tardifs

[410] Dans le projet de tarif conjoint, les sociétés de gestion ont également proposé que la personne qui omet de fournir en temps opportun les renseignements demandés en vertu du tarif soit tenue de payer une pénalité de 50 $ par jour à chaque société de gestion à qui elle doit fournir des renseignements.

[411] Nous n’incluons pas la clause de pénalité pour production tardive de rapport pour deux raisons. Premièrement, la pénalité de 50 $ par jour pourrait être de nature punitive dans la plupart des cas; ainsi, l’inclusion de cette pénalité serait inappropriée. Cette clause est différente des clauses habituelles prévoyant un intérêt à être payé pour les paiements tardifs, qui sont de nature compensatoire et qui visent à maintenir au fil des ans la valeur monétaire. Deuxièmement, la Commission a refusé d’inclure une telle clause dans plusieurs de ses tarifs, notamment parce qu’elle a jugé ne pas avoir compétence pour y inclure une telle clause de mise à exécution. [144]

[412] Pour des raisons similaires, nous n’incluons pas une disposition qui ferait en sorte qu’un paiement est réputé ne pas avoir été effectué tant que le rapport y afférent n’a pas été déposé. Nous comprenons que les sociétés de gestion ne peuvent pas distribuer d’emblée de l’argent sans détenir des renseignements suffisants, mais elles ont l’argent et peuvent percevoir des intérêts en attendant de recevoir les rapports. Ainsi, la valeur temporelle de l’argent sera respectée.

I. Dispositions transitoires

[413] Le tarif que nous homologuons contient certaines dispositions transitoires rendues nécessaires du fait qu’il prend effet dans le passé, et que la structure tarifaire ne reflète pas nécessairement les pratiques antérieures des utilisateurs assujettis au tarif. Le tarif établit deux dates. Premièrement, vingt jours après la fin du troisième trimestre de 2017, les rapports sont dus à CSI, à la SOCAN et à la SODRAC, détaillant l’utilisation faite par les services de musique en ligne du répertoire de chacune des sociétés de gestion. Deuxièmement, la première journée ouvrable après le quatrième trimestre de 2017, les paiements sont dus à ces sociétés de gestion en ce qui concerne la période tarifaire.

[414] L’utilisation de facteurs d’intérêts est maintenant généralisée. [145] Contrairement aux décisions précédentes à l’égard de la musique en ligne, nous incluons deux tableaux des facteurs d’intérêts – un s’appliquant aux paiements à la SOCAN et à CSI, et un autre s’appliquant aux paiements à la SODRAC. Deux tableaux sont nécessaires étant donné les échéanciers différents pour fournir les rapports et les paiements. Les paiements à la SODRAC seront exigibles beaucoup plus tard après la fin du trimestre pertinent que ceux à la SOCAN et à CSI. Les titulaires de licences de la SODRAC ne devraient pas être pénalisés pour ce « retard structurel ». À l’avenir, il serait souhaitable d’homologuer la même structure de rapport pour la SODRAC que pour CSI et la SOCAN; une analyse de répertoire en ce qui concerne les tarifs vidéos de la SODRAC serait un pas dans la bonne direction pour atteindre ce but.

Le secrétaire e général,

Signature

Gilles McDougall

ANNEXE A

Les taux proposés par les sociétés de gestion dans la Gazette du Canada et dans leurs énoncés de cause sont reproduits ci-dessous :

SOCAN

 

 

Activité

Gazette du Canada, pour 2013

(lorsque le titulaire de la licence effectue une seule activité)

Énoncé de cause

Téléchargements permanents

6,8 % (sans écoute préalable)

9,8 % (avec écoute préalable)

 

Redevance minimale :

3,4 ¢ par fichier faisant partie d’un

ensemble contenant 13 fichiers ou plus

4,6 ¢ dans les autres cas

3,4 %

 

 

Redevance minimale :

1,7 ¢ par fichier faisant partie d’un

ensemble contenant 13 fichiers ou plus

2,3 ¢ dans les autres cas

Téléchargements limités

12,6 % (sans écoute préalable)

15,6 % (avec écoute préalable)

 

Redevance minimale :

1,22 $ par abonné pour les

téléchargements portables

79,8 ¢ dans les autres cas

3,4 %

 

 

Redevance minimale :

60,9 ¢ par abonné pour les

téléchargements portables

39,9 ¢ dans les autres cas

Transmissions sur demande (y compris les transmissions recommandées)

15,2 %

 

Redevance minimale :

96,2 ¢ par abonné

 

Téléchargements gratuits : 4,6 ¢ par fichier

8,6 %

 

Redevance minimale :

50,67 ¢ par abonné

 

Téléchargements gratuits : le plus bas de 50,67 ¢ par visiteur ou 0,13 ¢ par fichier

Transmissions sur demande hybrides

Pas de proposition

8,6 % plus 50 % du palier des services hybrides

Téléchargements de fichiers vidéo

6,8 %

2,24 %

Transmissions de vidéos

15,2 %

5,67 %

CSI

 

 

Activité

Gazette du Canada, pour 2013

(lorsque le titulaire de la licence effectue une seule activité)

Énoncé de cause

Téléchargements permanents

Plus élevé de 9,9 % ou du double du taux de la SOCAN

 

Redevance minimale :

Plus élevé de 4,4 ¢ dans un ensemble (6,6 ¢ dans les autres cas) ou deux fois le taux de la SOCAN

9,9 %

 

 

Redevance minimale :

4,0 ¢ (2011), 3,9 ¢ (2012-13) par fichier faisant partie d’un ensemble 7,33 ¢ (2011), 7,6 ¢ (2012-13) par fichier dans les autres cas

Téléchargements limités

Plus élevé de 9,9 % ou deux fois le taux de la SOCAN

 

Redevance minimale :

Plus élevé de 96 ¢ par abonné (portable) (63 ¢ si non portable) ou 0,20 ¢ par écoute ou le double du taux de la SOCAN

9,9 %

 

 

Redevance minimale :

Plus élevé de 99 ¢ par abonné par mois (portable) (66 ¢ si non portable) ou 0,17 ¢ par écoute

Transmissions sur demande

Plus élevé de 6,8 % ou du taux de la

SOCAN

 

Redevance minimale :

Plus élevé de 43 ¢ par abonné ou 0,15 ¢ par écoute ou le taux de la SOCAN

 

Transmissions gratuites : pas de proposition

5,39 %

 

 

Redevance minimale :

Plus élevé de 35,93 ¢ par abonné par mois ou 0,094 ¢ par écoute

 

Téléchargements gratuits : le moins élevé de 35,93 ¢ par visiteur ou 0,094 ¢ par transmission

Transmissions sur demande hybrides

Pas de proposition

7,65 % (si la SOCAN a prévu un taux pour les téléchargements limités)

9,35 % dans les autres cas

 

Redevance minimale :

Plus élevé de 50,96 ¢ par abonné ou 0,13 ¢ par écoute si la SOCAN a prévu un taux

Plus élevé de 62,31 ¢ par abonné ou 0,16 ¢ par écoute dans les autres cas

Webdiffusions non interactives

3,5 %

 

Redevance minimale :

0,05 ¢ par écoute

3,24 %

 

Redevance minimale :

0,022 ¢ par écoute

Webdiffusions interactives

4,5 %

 

Redevance minimale :

0,065 ¢ par écoute

6,22 %

 

Redevance minimale :

0,042 ¢ par écoute

Webdiffusions hybrides non interactives

Pas de proposition

6,68 %, redevance minimale de 0,045 ¢ par écoute (si la SOCAN a prévu un taux pour les téléchargements limités)

 

8,42 %, redevance minimale de 0,057 ¢ par écoute dans les autres cas

Webdiffusions interactives hybrides

Pas de proposition

12,83 %, redevance minimale de 0,088 ¢ par écoute (si la SOCAN a prévu un taux pour les téléchargements limités)

 

16,17 %, redevance minimale de 0,110 ¢ par écoute dans les autres cas

SODRAC

 

 

Activité

Gazette du Canada, pour 2013

Énoncé de cause

Téléchargements permanents de vidéos de musique

Plus élevé de 9,9 % ou deux fois le taux de la SOCAN

 

Redevance minimale :

Plus élevé de 4,4 ¢ pour ceux qui font partie d’un ensemble de 15 fichiers ou plus (6,6 ¢ dans les autres cas) ou de deux fois le taux de la SOCAN

6,5 %

 

 

Redevance minimale :

2,7 ¢ par fichier faisant partie d’un ensemble contenant 20 fichiers ou plus

9,9 ¢ par fichier dans les autres cas

ANNEXE B

Taux proposés par les experts de CSI

Activité

Taux

Redevance minimale

Téléchargements permanents

10,3% (2011)

10,2% (2012-2013)

7,6 ¢ (2011) par fichier

7,8 ¢ (2012-2013) par fichier

 

4,1 ¢ (2011) par fichier faisant partie d’un ensemble

4,0 ¢ (2012-2013) par fichier faisant partie d’un ensemble

Téléchargements limités

10,3% (2011)

10,2% (2012-2013)

Plus élevé des montants entre 0,17 ¢/fichier et 99 ¢/abonné par mois si téléchargements portables

 

Plus élevé des montants entre 0,17 ¢/fichier et 66 ¢/abonné par mois dans les autres cas

Transmissions sur demande

5,39 %

Plus élevé des montants entre 35,93 ¢/abonné par mois et 0,094 ¢/écoute

Webdiffusion

 

Non interactive

Interactive

 

 

3,24 %

6,22 %

 

 

0,018 ¢/écoute

0,035 ¢/écoute

Transmissions sur demande hybrides

7,65 % (si la SOCAN applique un taux pour les téléchargements limités)

 

 

9,35 % dans les autres cas

Plus élevé des montants entre 50,96 ¢/abonné par mois et 0,13 ¢/écoute (si la SOCAN applique un taux pour les téléchargements limités)

 

Plus élevé des montants entre 62,31 ¢/abonné par mois et 0,16 ¢/écoute dans le cas contraire

Webdiffusion hybride

 

Non interactive

 

 

 

Interactive

 

 

6,68 % (si la SOCAN applique un taux pour les téléchargements limités)

 

8,42 % dans les autres cas

 

12,83 % (si la SOCAN applique un taux pour les téléchargements limités)

 

16,17 % dans les autres cas

 

 

0,037 ¢/écoute (si la SOCAN applique un taux pour les téléchargements limités)

 

 

0,047 ¢/écoute dans les autres cas

 

0,072 ¢/écoute (si la SOCAN applique un

taux pour les téléchargements limités)

 

 

0,09 ¢/écoute dans les autres cas

ANNEXE C – TAUX HOMOLOGUÉS

Pistes sonores

 

 

Activité

Redevances de la SOCAN

Redevances de CSI

Téléchargements permanents

8,91 pour cent des revenus

 

Redevance minimale

3,6 ¢ par piste pour un ensemble de 13 pistes ou plus

6,6 ¢ par piste dans les autres cas

Téléchargements limités

8,91 pour cent des revenus

 

Redevance minimale

100 $ par année

Webdiffusions non interactives

1,49 pour cent des revenus

 

Redevance minimale

100 $ par année

Webdiffusions semi-interactives ou interactives

5,3 pour cent des revenus

 

Redevance minimale

100 $ par année

1,49 pour cent des revenus

 

Redevance minimale

100 $ par année

Webdiffusions hybrides

3,48 pour cent des revenus

 

Redevance minimale

100 $ par année

3,13 pour cent des revenus

 

Redevance minimale

100 $ par année

Vidéos de musique

 

 

Activité

Redevances de la SOCAN

Redevances de la SODRAC

Téléchargements permanents

5,64 pour cent des revenus

 

Redevance minimale

6,6 ¢ par vidéo de musique contenant une seule œuvre musicale

2,6 ¢ par œuvre musicale dans une vidéo de musique contenant deux œuvres musicales ou plus

Webdiffusions semi-interactives ou interactives

2,99 pour cent des revenus

 

Redevance minimale

100 $ par année

 



[1] Tarif 22.A de la SOCAN – Internet – Services de musique en ligne, 1996-2006 (18 octobre 2007) décision de la Commission du droit d’auteur. [SOCANServices de musique en ligne (2007)]; CMRRA/SODRAC Inc. – Services de musique en ligne, 2005-2007 (16 mars 2007) décision de la Commission du droit d’auteur. [CSIServices de musique en ligne (2007)]

[2] Loi sur le droit d’auteur, L.R.C. 1985, ch. C-42.

[3] Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique c. Bell Canada, 2012 CSC 36, [2012] 2 RCS 326. [Bell]

[4] Entertainment Software Association c. Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, 2012 CSC 34, [2012] 2 RCS 231. [ESA]

[5] Rogers Communications Inc. c. Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, 2012 CSC 35, [2012] 2 RCS 283. [Rogers]

[6] Tarif 22.A de la SOCAN – Internet – Services de musique en ligne, 2007-2010 et Tarif CSI pour les services de musique en ligne, 2008-2010 (5 octobre 2012) décision de la Commission du droit d’auteur. [Services de musique en ligne (2012)]

[7] Société Radio-Canada c. SODRAC 2003 Inc., 2015 CSC 57, [2015] 3 RCS 615. [SRC c. SODRAC]

[8] Ibid au para 66.

[9] Loi sur la modernisation du droit d’auteur, L.C. 2012, ch. 20 (sanctionnée le 29 juin 2012). [LMDA]

[11] Dans leurs énoncés de cause, chacune des sociétés de gestion a proposé des taux différents de ceux publiés dans la Gazette du Canada. Par souci de concision, à moins que des questions liées au principe d’ultra petita ne soient soulevées, les taux publiés dans la Gazette ne sont pas intégrés à la description de la position des parties. Voir, à l’annexe A, un tableau des divers taux parus dans la Gazette du Canada ainsi que les énoncés de cause respectifs des sociétés de gestion.

[12] Pièce Apple-1 au para 4.

[13] Pièce Apple-2 (confidentielle), annexe A au para 29.

[14] Observations présentées par les Réseaux sur la modification de la mise à disposition, 14 juin 2013, aux para 16 et s.

[15] Transcriptions, vol. 7 à la p 1859.

[16] Le tarif de CSI prévoit un taux de 9,9 pour cent des revenus pour les services de téléchargement limité, qu'ils offrent ou non des transmissions en continu.

[17] Supra note 15 à la p 1876.

[18] Transcriptions, vol. 8 à la p 1892.

[19] Transcriptions, vol. 7 à la p 1872; vol. 8 à la p 1892.

[20] Transcriptions, vol. 4 à la p 864.

[21] Pièce SOCAN-10 à la fiche 8.

[22] Pièce SOCAN-7 aux para 11-12.

[23] Transcriptions, vol. 4 à la p 892.

[24] Pièce SOCAN-10 aux fiches 18-A et s.

[25] Transcriptions, vol. 2 à la p 405.

[26] Transcriptions, vol. 2 à la p 415.

[27] Transcriptions, vol. 2 aux pp 458-459.

[28] Pièce CSI-12 à la fiche 16.

[29] M. Paul Audley est également coauteur du rapport (pièce CSI-03) de MM. Boyer et Blit.

[30] Dans la présente décision, « redevances mécaniques » renvoie au taux en cents des redevances payées par les maisons de disques pour la reproduction d’œuvres musicales sur des CD préenregistrés, taux converti en pourcentage du prix de détail d’un téléchargement.

[31] Supra note 6 aux para 90-96.

[32] Voir la discussion aux para 233 et s. sur la question du « supplément pour l’interactivité ».

[33] Transcriptions, vol. 2 à la p 353.

[34] Transcriptions, vol. 1 à la p 73.

[35] Transcriptions, vol. 1 à la p 83.

[36] Tarif 8 de Ré:Sonne – Webdiffusions non interactives et semi-interactives, 2009-2012 (14 mai 2014) décision de la Commission du droit d’auteur. [Tarif 8 de Ré:Sonne (2014)]

[37] Transcriptions, vol. 1 à la p 87.

[38] Transcriptions, vol. 1 à la p 101.

[39] Transcriptions, vol. 1 aux pp 196-197.

[40] Transcriptions, vol. 5 à la p 1094.

[41] Pièce Apple-4 à la fiche 6.

[42] Transcriptions, vol. 5 à la p 1104.

[43] Pièce Apple-4 aux fiches 16-17.

[44] Transcriptions, vol. 5 aux pp 1128-1129.

[45] Transcriptions, vol. 5 à la p 1137.

[46] Pièce Apple-7 à la fiche 8.

[47] Transcriptions, vol. 5 aux pp 1307-1308.

[48] Transcriptions, vol. 5 à la p 1320.

[49] Transcriptions, vol. 5 à la p 1323.

[50] Pièce Apple-7 aux fiches 9, 14.

[51] Pièce Apple-7 à la fiche 15.

[52] Pièce Apple-7 à la fiche 16.

[53] Pièce Apple-7 à la fiche 17.

[54] Pièce Pandora-3 à la fiche 8.

[55] Ibid à la fiche 12.

[56] Ibid à la fiche 25.

[57] Ibid à la p 28.

[58] Pièce CAB-3 à la fiche 8.

[59] Transcriptions, vol. 7 à la p 1667.

[60] Pièce CAB-3 à la fiche 20.

[61] Services de musique en ligne (CSI: 2011-2013; SOCAN (2011-2013); SODRAC (2010-2013) – Portée de l’article 2.4(1.1) de la Loi sur le droit d’auteur – Mise à la disposition (25 août 2017) décision de la Commission du droit d’auteur.

[62] Décret fixant plusieurs dates d’entrée en vigueur de diverses dispositions de la Loi (C.P. 2012-1392, 25 octobre 2012; TR/2012-85, 7 novembre 2012).

[63] Les enregistrements sonores et les prestations d’artiste-interprète admissibles bénéficient d’un droit autonome de « mise à disposition », en vertu des alinéas 15(1.1)d) et 18(1.1)a).

[64] SOCAN – Tarifs 22.B à 22.G (Internet – Autres utilisations de la musique) 1996-2006 (24 octobre 2008) décision de la Commission du droit d’auteur aux para 113-116. [SOCAN 22.B-G (2008)]

[65] Association canadienne des radiodiffuseurs c. Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique et Société canadienne de gestion des droits voisins, 2006 CAF 337.

[66] SOCAN c. Bell, 2010 CAF 139 aux para 26-27.

[67] Pièce SOCAN-7 au para 30.

[69] Supra note 6 au para 83.

[70] Pièce Apple-3 au para 31.

[71] Supra note 4 aux para 5, 12, 19, 32 et 43.

[72] Ibid au para 35.

[73] Ibid aux para 12, 19, 23, 32 et 43.

[74] Ibid aux para 5, 10, 31 et 35.

[75] Pièce CSI-1 (hautement confidentiel) au para 7.

[76] Lettre des Réseaux (23 avril 2014) en réponse à l’avis de la Commission du 28 mars 2014 aux para 16 à 20.

[77] Ibid aux para 8 et 9.

[78] Ibid au para 13.

[79] Ibid au para 14.

[80] Lettre de Ré:Sonne (2 mai 2014) en réponse à l’avis de la Commission du 28 mars 2014 à la p 2.

[81] Tarif 22 – Transmission d’œuvres musicales à des abonnés d’un service de télécommunications (Phase I : questions juridiques) (27 octobre 1999) décision de la Commission du droit d’auteur à la p 39 (« L’exemption ne cesse pas non plus de s’appliquer pour l’unique raison que l’intermédiaire a peut-être conclu un contrat avec ses abonnés. Tant que son rôle relativement à une transmission donnée est limité à la fourniture des moyens nécessaires à la transmission de données provenant d’autrui et destinées à être transmises sur l’Internet, et tant que les services accessoires qu’il fournit ne vont pas jusqu’à la participation à la communication de l’œuvre ou à l’autorisation de sa communication, il convient de lui accorder le bénéfice de l’exemption »).

[82] Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique c. Association canadienne des fournisseurs Internet, 2004 CSC 45, [2004] 2 RCS 427 aux para 95 à 103.

[83] SOCAN – Tarifs 22.B à 22.G (Internet – Autres utilisations de la musique) 1996-2006 – partie 22.F – Sites web audio (24 octobre 2008) décision de la Commission du droit d’auteur au para 122. [Tarif 22.F de la SOCAN]

[84] Pièce Pandora-5 au para 9; pièce CAB-4 au para 17.

[85] Pièce CSI-19 au para 71.

[86] SOCAN-SCGDV – Tarif 1.A – Stations de radio commerciales, 2003-2007 (14 octobre 2005) décision de la Commission du droit d’auteur à la p 32.

[87] CMRRA/SODRAC Inc. – Stations de radio commerciales, 2001-2004 (28 mars 2003) décision de la Commission du droit d’auteur à la p 16.

[88] Lettre de CSI à la Commission (21 février 2014) aux pp 1-2.

[89] CCH Canadienne Ltée c. Barreau du Haut-Canada, 2004 CSC 13, [2004] 1 RCS 339 au para 56.

[90] Ibid au para 53 (« (1) le but de l’utilisation; (2) la nature de l’utilisation; (3) l’ampleur de l’utilisation; (4) les solutions de rechange à l’utilisation; (5) la nature de l’œuvre; (6) l’effet de l’utilisation sur l’œuvre. »)

[91] Pièce Apple-8 au para 45.

[92] Ibid.

[93] Pièce SOCAN-1 au para 69 ([TRADUCTION] « on ignore pour le moment s’il existe toujours un marché indépendant pour les téléchargements limités »). Voir aussi transcriptions, vol. 5 à la p 1098 (Apple affirme présenter en location des films de concert sous forme de téléchargements limités, mais elle n’a versé aucune information concernant les prix).

[94] Supra note 83 au para 122.

[95] Supra note 36 au para 115.

[96] Pièce CSI-3, voir p. ex. para 66.

[97] Pièce CAB-2 au para 41.

[98] Pièce CAB-2 au para 36.

[99] Tarif pour la radio commerciale (SOCAN : 2008-2010; Ré:Sonne : 2008-2011; CSI: 2008-2012; AVLA/SOPROQ : 2008-2011; ArtistI : 2009-2011) (9 juillet 2010) décision de la Commission du droit d’auteur au para 223. [Radio commerciale (2010)]

[100] Tarif pour la radio commerciale (SOCAN : 2011-2013); (Ré:Sonne : 2012-2014); (CSI : 2012-2013); (Connect/SOPROQ : 2012-2017); (Artisti 2012-2014) (21 avril 2016) décision de la Commission du droit d’auteur. [Radio commerciale (2016)]

[101] Voir p. ex. pièce CSI-3 aux para 121, 122, 140, 153 et 172; pièce CAB-2 au para 52; transcriptions, vol. 1 à la p 9 (CSI), à la p 62 (Pandora); transcriptions, vol. 2 aux pp 546-548 (M. Boyer, témoin expert de CSI); transcriptions, vol. 3 à la p 608 (M. Blit, témoin expert de CSI); transcriptions, vol. 3 aux pp 714-716 (M. Boyer, témoin expert de CSI); transcriptions, vol. 7 aux pp 1699-1702 (M. Reitman, témoin expert de l’ACR); transcriptions, vol. 10 à la p 2260 (ACR, Pandora), à la p 2300 (Pandora).

[102] SRC c. SODRAC, ESA, Rogers, Bell.

[103] Transcriptions, vol. 7 aux pp 1790-1796.

[104] Transcriptions, vol. 5 aux pp 1320-1326.

[105] Tarif 1.A de la SCGDV – Radio commerciale, 1998-2002 (13 août 1999) décision de la Commission du droit d’auteur à la p 32.

[106] Supra note 98 au para 223.

[107] Voir p. ex. pièce SOCAN-6 au para 17.

[108] Ibid.

[109] Pièce SOCAN-6 au para 19.

[110] Pièce SOCAN-5 à la p 1.

[111] Transcriptions, vol. 9 aux pp 2181:12-2185:23

[112] Transcriptions, vol. 10 aux pp 2419:6-2420:23.

[113] Pièce SOCAN-6 aux para 5-6.

[114] Le total du taux de webdiffusion de la SOCAN et de son taux de téléchargement limité représente 5,3 % (5,3 % + 0 %). Le total du taux de webdiffusion de CSI et de son taux de téléchargement limité représente 11,39 % (1,49 % + 9,9 %). Le total des taux de la SOCAN et de CSI représente 16,69 %, la part de la SOCAN étant de 31,8 % (5,3 % ÷ 16,69 %) et celle de CSI de 68,2 % (11,39 % ÷ 16,69 %).

[115] Pièce SOCAN-1 au para 69.

[116] Pièce Networks-2.

[117] Transcriptions, vol. 9 à la p 2180.

[118] Cette répartition suppose une importance relative de 2,5 (webdiffusion) à 1 (téléchargements limités).

[119] Supra note 6 au para 108.

[120] Pièce Apple-1 au para 30 et note de bas de page 9 y figurant.

[121] Pièce SODRAC-3 (réponse de Apple à la demande de renseignement 46) à la p 20.

[122] Pièce Apple-9 au para 22.

[123] Supra note 6 au para 112.

[124] CSIServices de musique en ligne (2007), supra note 1 au para 94.

[125] Tarifs divers de la SOCAN (19 mars 2004) décision de la Commission du droit d’auteur à la p 14.

[126] Pièce CSI-3 aux para 28-29.

[127] Pièce Apple-3 au para 57.

[128] Pièce CSI-3 au para 29.

[129] Supra note 6 au para 127.

[130] Pièce SODRAC-1 au para 21.

[131] Transcriptions, vol. 5 à la p 1137.

[132] Pièce SODRAC-8 au para 10.

[133] Ibid au para 12.

[134] Transcriptions, vol. 10 à la p 2253.

[135] Lettre de Apple à la Commission (15 février 2017) à la p 2; lettre de Pandora à la Commission (15 février 2017) à la p 1.

[136] Lettre de la SOCAN à la Commission (13 janvier 2017) à la p 4.

[137] Lettre de Pandora à la Commission (13 janvier 2017) à la p 2; lettre de Apple à la Commission (13 janvier 2017) à la p 1; lettre des Réseaux à la Commission (13 janvier 2017) à la p 1.

[138] Pièce SOCRAC-3 aux pp 20-21 (calculs de la Commission).

[139] Lettre d’Apple à la Commission (13 janvier 2017) à la p 5; lettre des Réseaux à la Commission (13 janvier 2017) à la p 6; lettre de Pandora à la Commission (13 janvier 2017) à la p 3.

[140] Supra note 100 au para 405.

[141] Lettre des Réseaux à la Commission (15 janvier 2017) à la p 4.

[142] Pièce CSI-2 (hautement confidentielle) au para 12(a).

[143] Pièce CSI-12 à la fiche 2.

[144] Radio commerciale (2016) au para 405; Tarif 8 de Ré:Sonne (2014) au para 227; Services de musique en ligne (2012) aux para 159-161.

[145] Tarif SOCAN-Ré:Sonne à l’égard de la radio de la SRC, 2006-2011 (8 juillet 2011) décision de la Commission du droit d’auteur au para 131.

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