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Copyright Board
Canada

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Commission du droit d’auteur
Canada

 

Date

2022-08-26

Référence

Tarif 8 de la SOCAN – Réceptions, congrès, assemblées et présentations de mode (2018-2022), 2022 CDA 9

Commissaire

Katherine Braun

 

Projets de tarif examinés

Tarif 8 de la SOCAN – Réceptions, congrès, assemblées et présentations de mode 2018

Tarif 8 de la SOCAN – Réceptions, congrès, assemblées et présentations de mode 2019-2020

Tarif 8 de la SOCAN – Réceptions, congrès, assemblées et présentations de mode 2021-2022

Homologation des projets de tarif

sous le titre

Tarif 8 de la SOCAN – Réceptions, congrès, assemblées et présentations de mode (2018-2022)

MOTIFS DE LA DÉCISION

I. INTRODUCTION

[1] La présente instance examine trois projets de tarif déposés auprès de la Commission du droit d’auteur du Canada (« la Commission ») par la Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SOCAN) eu égard aux redevances à être versées pour l’exécution en public d’œuvres musicales faisant partie du répertoire de la SOCAN lors d’une réception, d’un congrès, d’une assemblée ou d’une présentation de mode. Ces projets de tarif ont été déposés pour les années 2018, 2019-2020 et 2021-2022 (les « projets de tarif »).

[2] Restaurants Canada, l’Association des hôtels du Canada et le Conseil canadien du commerce de détail participent ensemble à cette instance (« les opposants »).

[3] La Loi sur le droit d’auteur (« la Loi ») prévoit que la Commission « fixe des redevances et des modalités afférentes en vertu de la présente loi qui sont justes et équitables » [1] . Les taux et les modalités afférentes prévues dans les projets de tarif sont identiques à ceux qui ont été approuvés dans le cadre du dernier tarif homologué. Après examen, nous concluons que le dernier tarif homologué peut servir de base pour l’établissement d’un tarif juste et équitable dans cette instance.

[4] Nous concluons que les redevances et les modalités afférentes établies dans les projets de tarif sont justes et équitables. Pour les raisons suivantes, les projets de tarif sont homologués, avec de légères modifications, comme un seul tarif sous le titre Tarif 8 de la SOCAN – Réceptions, congrès, assemblées et présentations de mode (2018-2022).

II. SURVOL

A. Dernier Tarif Homologué

[5] Le dernier Tarif 8 de la SOCAN (2013-2017) a été homologué par la Commission le 5 mai 2017 [2] . Pour les années 2013-2014, la SOCAN a proposé que les tarifs restent inchangés par rapport au dernier tarif homologué. Pour les années 2015-2017, la SOCAN a proposé un rajustement à l’inflation, qui a été approuvé par la Commission. Cela s’est traduit par une augmentation de 7,3 pour cent des taux de tarifs approuvés.

B. Projets de Tarif

[6] La SOCAN a déposé les projets de tarif pour 2018 le 31 mars 2017; pour 2019-2020 le 29 mars 2018 et pour 2021-2022 le 28 mars 2019. Les projets de tarif ont été publiés dans la Gazette du Canada le 29 avril 2017, le 5 mai 2018 et le 18 mai 2019, respectivement.

C. Historique procédural

[7] Dans son avis CB-CDA 2021-040, la Commission a informé les parties qu’elle était prête à examiner les projets de tarif et a invité les opposants à déposer des observations détaillées expliquant leurs oppositions aux projets de tarif. Une observation conjointe a été reçue le 15 septembre 2021 de la part des opposants [3] .

[8] En général, les opposants ne contestent pas les taux proposés. Cependant, ils affirment que, tout en paraissant s’autoajuster, le tarif n’est pas sensible à la baisse de la capacité autorisée en raison des mesures de santé publique lors d'une pandémie. Ils soulignent qu’un événement qui accueillait normalement 100 invités pourrait ne pas avoir dépassé 20 invités en raison des limites de capacité en cas de pandémie. Les opposants affirment que le volet 1-100 crée une surcharge, imposant des coûts plus élevés pour certains événements qui sont contraints de fonctionner avec une participation réduite. Pour régler la difficulté, les opposants proposent la création d’un nouveau volet moins élevé de 1 à 50 participants, avec un taux réduit correspondant. Aucun enjeu n’a été soulevé concernant les autres taux.

[9] Les opposants ont aussi demandé que les projets de tarif soient modifiés pour préciser que la « capacité » ne se rapporte pas seulement à la capacité physique en fonction de la taille de la salle ou du nombre de places disponibles, mais aussi à la « capacité réelle », qui refléterait les limitations de présence découlant des ordres de santé publique ou d’autres ordonnances imposées pendant une pandémie.

[10] La SOCAN conteste la nécessité d’un nouveau volet 1-50, affirmant que le volet 1-100 ne surtaxe pas les événements à faible fréquentation. Elle remarque que le volet 1-100 existe depuis 2002 et que les redevances sont calculés par événement [4] – lorsqu’il n’y a pas d’événement, aucune redevance n’est versée. La SOCAN note que la Commission a précédemment certifié le volet 1-100 comme volet « minimum », en reconnaissant le fait que la SOCAN subit des coûts pour administrer ses tarifs, comme pour l’octroi d’une licence, et que la redevance minimale devrait être établie à un niveau permettant de justifier sa perception [5] .

[11] La SOCAN indique que l’ajout de « capacité réelle » n’est pas nécessaire et qu’elle facture déjà les utilisateurs selon une capacité réduite découlant d’ordonnances de santé publique liées à la pandémie. La SOCAN affirme que cela est conforme au libellé actuel du tarif, qui prévoit que la capacité d’une salle, tant pour les places assises que debout, doit être établie par référence au « permis d’alcool de l’établissement ou à tout autre document délivré par une autorité compétente pour ce genre d’établissement » [traduction].

III. questions

[12] L’analyse des observations nous a permis de cerner trois questions pour examen :

  1. Les taux fixés dans les projets de tarif sont-ils justes et équitables?
  2. Faut-il établir un nouveau volet de fréquentation pour tenir compte des effets de la période de pandémie?
  3. La définition de « capacité » devrait-elle être modifiée?

IV. analyse

A. Les taux fixés dans les projets de tarif sont-ils justes et équitables?

[13] Nous considérons que le dernier tarif homologué peut servir de base pour un tarif juste et équitable dans le cadre de la présente instance. Les tarifs homologués sont présumés être justes pour la période et l’objet pour lesquels ils ont été approuvés, particulièrement s’il n’y a pas eu de changement dans le marché visé. Les projets de tarif ont la même portée et prévoient les mêmes redevances et modalités afférentes que celles établies pour le dernier tarif homologué, ce qui n’a pas suscité de changement. Nous ne sommes pas au courant de changements survenus dans le marché depuis la dernière homologation des tarifs qui remettraient en question l'homologation des tarifs proposés comme justes et équitables. Par ailleurs, aucune modification aux projets de tarif n’a été identifiée. Ainsi, nous concluons que les taux fixés dans les projets de tarif sont justes et équitables pour les années visées.

B. Faut-il établir un nouveau volet de fréquentation pour tenir compte des effets de la période de pandémie?

[14] Selon les renseignements fournis par les opposants, les dépenses touristiques en matière d'hébergement national et international ont considérablement diminué pendant la période de la pandémie, et les taux d’occupation des hôtels ont considérablement baissé à une moyenne nationale de moins de 10 pour cent. Plusieurs hôtels ont dû réduire leurs effectifs de 50 à 80 pour cent, éliminant ainsi des dizaines de milliers d’emplois. Les opposants affirment que, bien que les hôtels n’aient pas été forcés de fermer en raison d’ordonnances de santé publique, de nombreuses restrictions en matière de déplacement et de capacité ont eu le même effet. Ils suggèrent que les annulations d’événements au début de 2021 continueront en 2022, estimant qu'il est peu probable que le secteur retrouve son niveau d'avant la pandémie avant 2025 [6] .

[15] Dans leurs observations, les opposants ont soulevé des inquiétudes relatives à l’incidence des fermetures forcées et de la capacité réduite en raison de la pandémie. Ils affirment qu’un volet de 1 à 50, avec un taux correspondant plus faible allégerait la charge liée aux restrictions imposées par la pandémie. Bien qu’il soit compréhensible que les informations relatives aux années de pandémie ne soient pas complètes, les opposants n’offrent pas de preuves particulières aux événements visés par le tarif qui pourraient offrir une compréhension éclairée des incidences auxquelles ils se réfèrent. Par ailleurs, les opposants ne suggèrent pas de taux moins élevés pour le volet 1-50 proposé. Bien que certains renseignements aient été fournis sur l’industrie hôtelière, ils n’ont été que peu utiles, puisque les événements visés par le tarif peuvent avoir lieu dans des hôtels aussi bien que dans divers autres lieux, qui n’ont pas été mentionnés dans les renseignements présentés.

[16] La SOCAN affirme qu’un nouveau volet 1-50 n’est pas justifié et que les taux sont calculés par événement, de sorte que si aucun événement n’a lieu, aucune redevance n’est exigible. La SOCAN conteste aussi l’affirmation selon laquelle le volet 1-100 surtaxe les utilisateurs, en remarquant qu’il s’agit d’un volet minimum qui a été approuvé lors des décisions passées de la Commission.

[17] Ayant examiné toutes les observations, nous sommes d’avis qu’un nouveau volet 1-50 n’est pas justifié. Bien que la période de pandémie puisse avoir eu une incidence sur les activités visées par le tarif, notamment les réceptions, les assemblées, les congrès et les présentations de mode, le tarif est fondé sur une redevance par événement selon la capacité de la salle. S’il n’y a pas d’événement, aucune redevance n’est exigée et les utilisateurs n’ont rien à payer. Deuxièmement, dans leur demande pour un volet plus restreint et un taux correspondant moins élevé, les opposants n’ont pas fourni de preuves sur la réduction de la participation aux événements en raison de limites de capacité liées à la pandémie. Ils mentionnent l’exemple d’un rassemblement qui comporterait normalement 100 invités, mais qui aurait été réduit à 20 en raison de mesures de santé publique. Cependant, avant la pandémie, en vertu du volet 1-100, un événement comportant 20 invités aurait engendré la même redevance qu'un événement ayant 99 invités. Enfin, les taux liés au volet 1-100 des projets de tarif sont identiques à ceux du dernier tarif homologué; ainsi, le volet minimum devrait être fixé à un niveau qui permet de reconnaître que la SOCAN encourt des coûts pour administrer ses tarifs.

C. La définition de « capacité » devrait-elle être modifiée?

[18] À notre avis, il n’est pas nécessaire de modifier la définition de « capacité ». Les projets de tarif tiennent compte de la capacité des salles (places assises et debout) telle qu'elle est autorisée par le permis d'alcool de l'établissement ou tout autre document délivré par une autorité compétente pour ce type d'établissement. Nous convenons avec la SOCAN que les avis et les ordonnances de santé publique (ou des documents similaires limitant la capacité d’une salle en raison de la pandémie) peuvent être considérés comme un « document délivré par une autorité compétente » [traduction] dans le cadre du tarif. La SOCAN indique qu’elle facture les utilisateurs en fonction de la réduction de la capacité attribuable à la pandémie. La SOCAN note qu’un événement qui aurait fait partie, en temps normal, du volet 101-300, mais qui aurait été réduit au volet moins élevé de 1-100 en raison des limites de capacité, aurait été facturé au taux moins élevé.

V. Libellé du tarif

[19] Deux modifications aux projets de tarif ont été effectuées.

[20] En premier lieu, la référence au mot « licence » est supprimée pour faire la distinction entre les mots « tarif » et « licence », comme cela a été fait dans des décisions récentes de la Commission.

[21] Dans la décision York [7] , la Cour suprême a analysé l'interrelation entre les concepts de tarif et de licence. Ce faisant, elle a conclu que le paragraphe 68.2(1) de la Loi, tel qu’il se lisait avant les modifications de 2019, n’habilitait pas Access Copyright à percevoir des redevances fixées par un tarif homologué par la Commission en vertu de l’article 70.15 d'un utilisateur qui choisit de ne pas être lié par une licence aux modalités prévues par le tarif homologué.

[22] Bien que le présent dossier ne soulève pas la question au cœur de la décision York, qui portait sur le « tarif obligatoire », l’analyse des concepts de tarif et de licence effectuée par la Cour est utile pour souligner les rôles distincts de la Commission et des sociétés de gestion. Alors que la Commission homologue les tarifs, les sociétés de gestion octroient des licences. Même si une société de gestion doit octroyer des licences selon les modalités établies dans un tarif homologué si un utilisateur le demande, le fait demeure qu’un tarif et une licence sont des concepts distincts. Pour cette raison, un tarif homologué par la Commission ne peut se référer au concept de licence.

[23] En deuxième lieu, le paragraphe prévoyant que la SOCAN peut, en tout temps, mettre fin à toute licence pour violation des termes ou conditions sur préavis écrit de 30 jours est supprimé, conformément à la décision sur le Tarif 21 de la SOCAN – Installations récréatives (2013-2020) [8] .

[24] Nous radions complètement ce paragraphe, du fait qu’il touche au domaine de responsabilité et aux dispositions de la Loi applicables aux recours contre les utilisateurs régis par un tarif. Il s’agit donc d’une question de conformité et d’application du tarif, plutôt que d’une question d’homologation. La portée ou l’application du tarif ne change pas par suite de ces modifications.

VI. décision

[25] En prenant notre décision, nous avons examiné les observations déposées par les parties eu égard aux projets de tarif. Nous concluons que le dernier tarif homologué peut service de fondement pour l’établissement d’un tarif juste et équitable dans le cadre de la présente instance, du fait que les taux et les modalités afférentes sont inchangés dans les projets de tarif. Aucune modification aux taux n’est indiquée pour tenir compte de la pandémie.

[26] Nous sommes satisfaits que les redevances et les modalités afférentes établies dans les projets de tarif soient justes et équitables. Nous homologuons donc les projets de tarif avec des modifications mineures, sous un seul titre, Tarif 8 de la SOCAN – Réceptions, congrès, assemblées et présentations de mode (2018-2022).

 



[1] Loi sur le droit d’auteur, LRC 1985, c C-42, [la Loi], art 66.501.

[2] Tarifs divers de la SOCAN 2007-2017 (6 mai 2017), (motifs), en ligne : CDA <https://decisions.cb-cda.gc.ca/cb-cda/certified-homologues/fr/item/366481/index.do?q=SOCAN+3A+2015>.

[3] Lettre de Gabriel Van Loon en réponse à l’Avis CB-CDA 2021-040 (15 septembre 2021).

[4] Lettre de la SOCAN en réponse à l’Avis CB-CDA 2021-040 (1 octobre 2021).

[5] Ibid, à la p 9.

[6] Lettre de Gabriel Van Loon (15 septembre 2021), à la p 9.

[7] Université York c Canadian Copyright Licensing Agency (30 juillet 2021), 2021 CSC 32, en ligne : CSC <https://scc-csc.lexum.com/scc-csc/scc-csc/fr/item/18972/index.do>.

[8] Tarif 21 de la SOCAN – Installations récréatives exploitées par une municipalité, une école, un collège, une université, une société agricole ou autres organisations communautaires du même genre 2013-2020 (7 décembre 2018), CB-CDA 2018-222 (motifs), en ligne : CDA <https://decisions.cb-cda.gc.ca/cb-cda/decisions/fr/item/367464/index.do>, au para 18.

 

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