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Copyright Board
Canada

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Commission du droit d’auteur
Canada

 

Date

2023-11-03

Référence

Tarif 13.C de la SOCAN (2023-2025), 2023 CDA 9

Commissaire

René Côté

Projet de tarif examiné

Tarif 13.C de la SOCAN – Transports en commun - Trains, autobus et autres moyens de transport en commun, à l’exclusion des avions et des navires à passagers (2023-2025)

Homologation des projets de tarif

sous le titre

Tarif 13.C de la SOCAN – Transports en commun - Trains, autobus et autres moyens de transport en commun (2023-2025)

MOTIFS DE LA DÉCISION

I. survol

[1] La Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SOCAN) est une société de gestion qui administre les droits d’exécution en public d’œuvres musicales pour le compte d’auteurs, de compositeurs et d’éditeurs de musique canadiens et étrangers. La SOCAN a déposé auprès de la Commission du droit d’auteur un projet de tarif pour l’utilisation d’œuvres musicales ou dramatico-musicales enregistrées faisant partie de son répertoire dans un train, un autobus ou un autre mode de transport en commun à l’exclusion des avions et des navires à passagers, pour les années 2023-2025.

[2] Pour les motifs ci-dessous, la Commission conclut que le projet de tarif 13.C de la SOCAN (2023-2025) est juste et équitable, sous réserve de diverses modifications, notamment au chapitre d’un ajustement des redevances en fonction de l’inflation. La Commission apporte ces modifications au projet de tarif et l’homologue.

 

II. contexte

A. Le tarif homologué le plus récent

[3] La Commission a homologué le tarif 13.C le plus récent le 8 août 2020[1] (le « Tarif 13.C 2018-2022»).

[4] Le Tarif 13.C 201 8-2022 prévoit que la redevance exigible est de 1,13 $ par personne par année, en se fondant sur le nombre maximum de passagers autorisé par voiture, autobus ou autres moyens de transport en commun, sous réserve d’une redevance annuelle minimale de 67,32 $. En lien avec la pandémie de COVID-19, la Commission avait intégré au tarif une disposition semblable à celle que l’on retrouvait au tarif 13.B voulant que si les voitures, autobus ou autres moyens de transport en commun étaient exploités moins de 12 mois par année, la redevance exigible était alors réduite d’un douzième pour chaque mois complet de non-exploitation.

[5] Quant au paiement des redevances, le Tarif 13.C 2018-2022 énonce qu’au plus tard le 31 janvier de l’année visée par la licence, le titulaire de licence fournit un rapport indiquant le nombre maximum de passagers autorisé et verse à la SOCAN la redevance exigible conséquente.

B. Le projet de tarif

[6] La SOCAN a déposé le projet de tarif 13.C le 15 octobre 2021 qui fut publié sur le site de la Commission du droit d’auteur[2]. Le 10 novembre 2021, la Commission a émis une ordonnance[3] demandant à la SOCAN de présenter un avis des motifs pour le projet de tarif. La SOCAN a répondu avec son Avis des motifs du projet de tarif du 15 décembre 2021 qui fut publié sur le site de la Commission.[4] La Commission n’a reçu aucune opposition à ce projet de tarif. La Commission faisait savoir le 11 juillet 2023 qu’elle était prête à rendre sa décision sur la base des motifs fournis par la SOCAN.

Description du projet de tarif

[7] La structure relative au versement des redevances est identique à celle du Tarif 13.C 2018-2022, c’est-à-dire que les redevances versées pour l’année en cours sont fondées sur le nombre maximum de passagers autorisé par voiture, autobus ou autres moyens de transport en commun sous réserve d’une redevance annuelle minimale. Au plus tard le 31 janvier de l’année visée par la licence, le titulaire fournit un rapport du nombre maximum de passagers autorisé et verse à la SOCAN la redevance exigible.[5]

[8] En ce qui a trait aux redevances, elles ont été ajustées pour tenir compte de l’inflation. Elles passeraient de 1,13 $ à 1,34 $ par personne, alors que la redevance annuelle minimale passerait de 67,32 $ à 79,83 $. Dans les deux cas, il s’agit d’une hausse de 18,58 pour cent.

[9] La SOCAN propose également de supprimer la clause introduite dans le Tarif 13.C 2018-2022 qui permet de réduire la redevance lorsque les voitures ou autobus sont exploités moins de 12 mois par année, la redevance exigible étant réduite d’un douzième pour chaque mois complet de non-exploitation.

[10] Une autre modification est proposée dans le projet de tarif qui couvrirait désormais la communication au public par télécommunication en plus de l’exécution en public, cet ajout ne comporte aucune hausse des redevances devant être versées par les utilisateurs du tarif.

III. questions

[11] Nous avons déterminé cinq enjeux relatifs au projet de tarif que la Commission doit examiner dans le cadre de la présente instance. Ces questions sont les suivantes :

  1. Le dernier tarif homologué par la Commission constitue-t-il un point de référence suffisant pour homologuer le projet de tarif présenté par la SOCAN?
  2. L’ajout de la communication au public par télécommunication est-elle justifiée?
  3. Quel devrait être l’ajustement pour tenir compte de l’inflation?
  4. Le retrait de la clause visant à diminuer la redevance exigible pour les mois où une voiture ou un autobus n’est pas utilisé est-elle justifiée?
  5. Des modifications au libellé du projet de tarif sont-elles nécessaires?

IV. analyse

A. Question 1 : Le dernier tarif homologué peut-il servir comme point de référence?

[12] Lorsqu’un projet de tarif ne diffère pas substantiellement du tarif précédemment homologué, la Commission peut se fonder sur le dernier tarif homologué comme une indication que le projet de tarif est juste et équitable, particulièrement si aucun changement n’a eu lieu dans le marché visé. Nous ne sommes pas au courant de changements dans le marché du transport par trains et par autobus et autres moyens de transport en commun à l’exclusion des avions et des navires à passagers, en partie parce qu’aucune opposition n’a été déposée.

[13] Le projet de tarif ne diffère pas de manière substantielle du Tarif 13.C 2018-2022. De plus, les modalités de ce dernier sont semblables à celles du projet de tarif 2023-2025. Il en va de même de la structure tarifaire et de la structure relative au versement des redevances sauf en ce qui a trait à la non-exploitation d’un moyen de transport pendant un mois consécutif. Quant aux redevances, elles n’ont été augmentées qu’afin de refléter l’inflation, mais les calculs des ajustements pour inflations seront corrigés.

[14] En tant que tel, nous concluons que le projet de tarif peut servir comme point de référence.

B. Question 2 : L’ajout de la communication au public par télécommunication est-elle justifiée?

[15] En raison des changements dans la façon dont la musique est utilisée à bord des trains, autobus et autres moyens de transport en commun, nous croyons qu’il est justifié d’ajouter, de façon explicite, la communication au public par télécommunication.

[16] Puisque la SOCAN n’a pas expliqué ce changement dans son Avis des motifs du projet de tarif, la Commission lui a demandé de le faire dans son ordonnance du 7 novembre 2022.[6] La SOCAN a expliqué que cet ajout reflète des changements dans la manière dont la musique est utilisée à bord des avions, des navires à passagers, des trains et des autobus, notamment la façon dont le contenu sur demande est acheminé sur les appareils personnels des clients via les systèmes de divertissement utilisés à bord. La SOCAN affirme qu’aucune augmentation des redevances n’est liée à cet ajout.

[17] À notre avis, la manière dont le contenu musical est livré a évolué au cours des dernières années et cette utilisation peut impliquer la communication au public par télécommunication. Cette modification au texte du tarif nous paraît donc juste et équitable et nous la retenons.

C. Question 3 : Quel devrait être l’ajustement pour l’inflation?

Résumé

[18] Le projet de tarif recherche une augmentation des redevances pour tenir compte de l’inflation de 18,58 pour cent.

[19] Afin de ne pas dépasser les montants demandés dans le tarif proposé, tout en conservant sa méthode habituelle de calcul de l'inflation, la Commission fixe l’ajustement pour l’inflation à 16,98 pour cent. Ce montant correspond à l'inflation réelle pour la période commençant le 1er janvier 2014 et se terminant le 31 décembre 2021.

L'approche de la Commission en matière d'inflation

[20] La Commission considère depuis fort longtemps que des ajustements des redevances fixes doivent être faits en fonction de l’inflation. En effet, nous sommes d’avis que les ajustements inflationnistes sont justifiés du fait qu’ils préservent le pouvoir d’achat des titulaires de droits et que l’absence de tels ajustements entraînerait l’érosion de la valeur des redevances que perçoivent les sociétés de gestion par le biais des tarifs.

[21] L'approche récente de la Commission pour déterminer l’ajustement pour l’inflation consiste à calculer la variation en pourcentage de l’IPC entre janvier de la première année qui nécessite un ajustement et décembre de la dernière année complète de données disponibles. En général, le début de la période de calcul commence le jour après la fin de la période utilisée par la Commission pour son dernier calcul d’inflation.

[22] Nous sommes d’avis que cette approche continue d’être la façon la plus simple et la plus directe de calculer le taux d’inflation. Par ailleurs, il s’agit d’une approche connue des parties. Elle est également conforme au principe qui consiste à utiliser des valeurs connues plutôt que des valeurs à venir.

[23] De plus, c'est ce que la SOCAN demande à la Commission de faire dans ses observations finales : l’ajustement pour l’inflation devrait être basé sur les données les plus récentes.

[24] Utilisant la façon de calcul habituelle, la période de calcul commencerait le 1er janvier 2104 et se terminerait le 31 décembre 2022. La Commission a ajusté le tarif 13.C de la SOCAN pour 2015 en augmentant la redevance afin de refléter le niveau d’inflation pour la période entre 2005 et 2013. Aucun ajustement inflationniste n’a été appliqué depuis. Le 31 décembre 2022 est la fin de la dernière année complète pour laquelle des données sont disponibles.

[25] Cette approche mènerait à un ajustement de 24,37 pour cent, ce qui est plus que l’ajustement demandé par la SOCAN.

Équité procédurale

[26] Dans le cas présent, cette approche doit être tempérée par le fait que la Commission s'abstient généralement d'homologuer des tarifs plus élevés que ceux proposés, au motif que cela pourrait constituer une violation de l'équité procédurale pour les personnes concernées par un tarif proposé[7].

[27] Pour faciliter l'administration et le calcul, l'augmentation que nous fixons pour tenir compte de l'inflation utilise les données de l'année complète la plus récente qui ne dépassent pas les montants du tarif proposé.

Conclusion relative à l'ajustement inflationniste

[28] Par conséquent, la période de calcul utilisée par la commission commence le 1er janvier 2014 et se termine le 31 décembre 2021. Ceci se traduit par un ajustement inflationniste de 16,98 pour cent. La Commission fixe donc le taux par personne, en se fondant sur le nombre maximum de passagers autorisé par voiture, autobus ou autres moyens de transport en commun à 1,32 $ avec une redevance annuelle minimale de 78,75 $.

D. Question 4 : Le retrait de la clause visant à diminuer la redevance exigible pour les mois où une voiture ou un autobus n’est pas utilisé est-elle justifiée?

[29] Nous décidons de retirer la clause visant à diminuer la redevance exigible pour les mois complets où une voiture ou un autobus n’est pas utilisé.

[30] Le Tarif 13.C 2018-2022 comporte la clause suivante :

Pour les trains, autobus et autres moyens de transport en commun, à l’exclusion des avions et des navires à passagers, exploités moins de 12 mois par année, la redevance exigible est réduite d’un douzième pour chaque mois complet de non-exploitation.

[31] Cette clause avait été ajoutée par la Commission en réponse aux perturbations occasionnées par la pandémie de COVID-19. Voici comment nous avions justifié cette modification :

La Commission est consciente que la pandémie de COVID‑19 a eu des conséquences inattendues pour l’industrie du transport et que l’activité économique a été gravement perturbée en 2020. Afin d’assurer que les redevances tarifaires demeurent justes et équitables, nous suivons la pratique du tarif 13.B et ajoutons la condition que les redevances exigibles soient calculées au prorata de l’activité économique – donc, si un utilisateur exerce ses activités pendant moins de 12 mois chaque année, les redevances exigibles seront réduites d’un douzième pour chaque mois complet d’inactivité. L’ajout d’une telle clause dans un tarif pluriannuel n’influe pas sur le montant total des redevances à payer au cours d’une année pendant laquelle l’activité économique est présente pendant tous les mois de l’année. L’utilisation d’un mois complet d’inactivité comme point de référence permet en outre de tenir compte des titulaires de droit dont les droits sont également touchés par la pandémie.[8]

[32] Dans son Avis des motifs du projet de tarif du 15 décembre 2021, la SOCAN soutient que cette clause doit être retirée du tarif 13.C (2023-2025) dans les termes suivants:

[Traduction] Le libellé du tarif a été modifié pour supprimer l'ajustement COVID-19 mis en œuvre dans le tarif précédemment approuvé, ce qui signifie que la redevance exigible n'est plus réduite d'un douzième pour chaque mois complet de l'année au cours de laquelle il n'y a pas d'opérations. Pour les années 2023-2025, cet ajustement COVID-19 n'est plus nécessaire et l'inclure pour ces années ne serait pas juste et équitable.[9]

[33] Contrairement au transport en commun par navires à passagers qui est soumis aux aléas de l’hiver qui forcent l’arrêt des activités de transport de passagers pendant plusieurs mois de l’année quand les cours d’eau sont recouverts de glace, le transport par rail et les services de transport par autobus ne sont pas des activités saisonnières. Si la clause qu’a ajoutée la Commission pour la durée de la pandémie était tout à fait adéquate à la situation particulière, la fin de la pandémie nous permet de retourner au texte original du tarif 13.C qui ne comportait pas de réduction pour des périodes d’inactivités. Le texte du tarif 13.C sera donc modifié de façon à revenir au texte antérieur.

E. Question 5 : Des modifications au libellé du projet de tarif sont-elles nécessaires?

[34] Deux modifications mineures doivent également être apportées au projet de tarif, l’une éliminant les références à la notion de licence et l’autre relative aux dispositions générales. Ces deux changements n’ont aucune portée pratique sur le fonctionnement du tarif.

[35] D’abord, en vertu de la Loi, la Commission a pour mandat de fixer les taux de redevances et les modalités connexes. Le mandat de la Commission en matière d’homologation des tarifs ne comprend pas l’octroi de licences. L’octroi des licences pour les droits gérés collectivement relève des sociétés de gestion, comme l’a souligné la Cour suprême du Canada dans l’affaire Access Copyright c York University.[10] Par conséquent, nous retirons du projet de tarif les références aux mots « licence » et « titulaire» de licence », y compris le paragraphe que l’on retrouvait dans les dispositions générales énonçant que la SOCAN puisse en tout temps mettre fin à toute licence sur préavis de 30 jours. Ce changement ne change en rien la portée du tarif.

[36] Puisque les projets de tarif doivent être déposés dans un document distinct et autonome contenant toutes les modalités applicables, la section intitulée « Dispositions générales », qui coiffait les projets de tarif déposés en bloc, n’a plus sa raison d’être.[11] Les paragraphes de cette rubrique qui sont toujours pertinents se retrouvent à la fin du tarif tandis que ceux qui font référence au concept de licence sont supprimés pour les raisons mentionnées au paragraphe précédent.

V. DÉCISION

[37] Pour les motifs susmentionnés, nous homologuons le projet de tarif avec des modifications. Le taux de la redevance est ajusté pour tenir compte de l’inflation et passe de 1,13 $ à 1,32 $ par personne par nombre maximum de passagers autorisé avec une redevance annuelle minimale qui passe de 67,32$ à 78,75 $. Au chapitre des modalités du tarif, nous acceptons d’ajouter au mode de diffusion de la musique la communication au public par télécommunication et nous éliminons la clause permettant de réduire la redevance annuelle pour les mois complets d’inactivité des voitures et des autobus. Nous intégrons ce qui constituait auparavant les « Dispositions générales » communes à plusieurs projets de tarif alors que nous éliminons les références aux licences et à leurs titulaires.

 

 

 



[1] Tarifs 13.A, 13.B et 13.C de la SOCAN (2018-2022) 2020 CDA 011-T (8 août 2020), Gaz C Supplément, Vol 154 no 32.

[2] Tarif 13.C de la SOCAN – Transports en commun - Trains, autobus et autres moyens de transport en commun à l’exclusion des avions et des navires à passagers (2023-2025) (projet de tarif) (10 janvier 2022).

[3] Ordonnance de la Commission CB-CDA 2021-053, 10 novembre 2021.

[4] SOCAN, Avis des motifs du projet de tarif pour le Tarif 13.C de la SOCAN – Transports en commun - Trains, autobus et autres moyens de transport en commun, à l’exclusion des avions et des navires à passagers (2023-2025), 15 décembre 2021.

[5] Ibid.

[6] Ordonnance de la Commission CB-CDA 2022-064, 7 novembre 2022.

[7] Voir Bell Canada c Société de perception de droit d’auteur du Canada, 2021 CAF 148.

 

[8] Tarifs 13.A, 13.B et 13.C de la SOCAN Transports en commun (2018-2022) 2020 CDA 011 (8 août 2020).

[9] SOCAN, Avis des motifs du projet de tarif pour le Tarif 13.C de la SOCAN – Transports en commun - Trains, autobus et autres moyens de transport en commun, à l’exclusion des avions et des navires à passagers (2023-2025), 15 décembre 2021.

[10] Université York c Canadian Copyright Licensing Agency, 2021 CSC 32.

[11] Voir Avis de pratique concernant le dépôt de projets de tarifs AP 2019-004 rév. 3 (1 mars 2023).

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