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Copyright Board
Canada

Commission du droit d’auteur
Canada

 

[Traduction]

 

Date

2024-01-12

Référence

Tarif pour la retransmission de signaux de télévision, 2014-2018, 2024 CDA 1

Commissaires

Luc Martineau, Président

Nathalie Théberge, Vice-présidente

Katherine Braun

 

Projet de tarif examiné

Tarif pour la retransmission de signaux éloignés de télévision, 2014-2018

 

Nouvelle décision
sur le

Tarif pour la retransmission de signaux éloignés de télévision, 2014-2018

 

MOTIFS DE LA DÉCISION

I. SURVOL - 2 -

II. CONTEXTE - 3 -

III. ENJEUX - 5 -

IV. Analyse - 5 -

A. Utilisation de données exactes dans le calcul du prix du groupe de référence - 5 -

B. Ajustement des profits - 14 -

C. Prise d’une nouvelle décision sur le taux principal - 26 -

D. Prise d’une nouvelle décision sur les taux spéciaux - 30 -

V. Conclusion - 32 -

I. SURVOL

[1] Il s’agit d’une nouvelle décision de la Commission du droit d’auteur à la suite du contrôle judiciaire effectué par la Cour d’appel fédérale (la « CAF »)[1] de la décision de la Commission du droit d’auteur du 2 août 2019[2] (la « décision originale ») eu égard au Tarif pour la retransmission de signaux éloignés de télévision, 2014-2018[3]. Cette décision est rendue par une formation de commissaires différente.

[2] La CAF a ordonné à la Commission du droit d’auteur (la « Commission ») ce qui suit :

- réexaminer les données à utiliser dans le calcul du prix du groupe de référence;

- réexaminer l’ajustement des profits;

- prendre une nouvelle décision sur les taux de redevance en conséquence[4].

[3] Notre réexamen des données à utiliser pour faire le calcul du prix du groupe de référence nous amène à ajuster le calcul de la décision originale en incluant les paiements manquants pour trois services spécialisés canadiens et un paiement manquant pour un service spécialisé américain, et en retirant trois paiements doublement comptabilisés pour des services spécialisés offerts à la fois en haute définition et en définition standard.

[4] Notre réexamen de l’ajustement des profits nous amène à faire un ajustement des profits de 25 pour cent pour les services spécialisés américains et de 10 pour cent pour les services spécialisés canadiens.

[5] Notre réexamen de l’ajustement des profits et des données à utiliser dans le calcul du prix du groupe de référence nous amène à prendre une nouvelle décision sur les taux de redevance par abonné, par mois, pour les entreprises de distribution de radiodiffusion (EDR) qui ont plus de 6000 abonnés (le « taux principal ») comme suit :

- pour l’année 2014 : 1,06 $

- pour les années 2015-2018 : 1,12 $

[6] Nous prenons également une nouvelle décision sur les taux de redevance pour les utilisateurs suivants, du fait qu’ils sont fondés sur le taux principal :

- EDR ayant 6000 abonnés ou moins

- EDR dans les marchés francophones.

II. CONTEXTE

Le régime de retransmission

[7] Le « régime de retransmission » permet aux EDR, comme Rogers ou Bell, de retransmettre les signaux de radiodiffusion hertzienne sans le consentement des radiodiffuseurs ou des propriétaires de programmes de radiodiffusion[5]. Comme condition à cette exception, lorsque les signaux retransmis sont des signaux « éloignés », les EDR doivent verser les redevances fixées par la Commission[6].

[8] La Commission a fixé de tels taux pour les années 2014-2018 dans sa décision originale.

La décision originale de la Commission

[9] Dans sa décision originale, la Commission a fixé le taux principal comme suit :

- pour l’année 2014 : 1,06 $

- pour l’année 2015 : 1,14 $

- pour les années 2016-2018 : 1,17 $

[10] La Commission a déterminé ces taux de redevance en plusieurs étapes. Elle a d’abord établi un groupe de référence : un ensemble de services spécialisés américains et canadiens[7] qui correspondent aux contenus des signaux éloignés retransmis[8]. Ensuite, pour déterminer le prix du groupe de référence, la Commission a totalisé les paiements mensuels effectués par les EDR pour ce groupe de référence et a ensuite divisé ce total par le nombre d’abonnés[9].

[11] La Commission a ensuite effectué plusieurs ajustements au prix du groupe de référence. Un de ces ajustements visait à tenir compte de la marge de profit des services spécialisés[10].

Cour d’appel fédérale

[12] Les EDR[11] et les sociétés de gestion[12] ont respectivement demandé à la Cour d’appel fédérale (CAF) un contrôle judiciaire de la décision de la Commission. La CAF a rejeté la demande des EDR et accueilli en partie la demande des sociétés de gestion[13].

[13] Dans sa décision, la CAF a maintenu que :

  • -lorsque la Commission a calculé le prix du groupe de référence, elle a utilisé des renseignements qui ont été remplacés par la preuve déposée plus tard au dossier[14];

  • -la Commission a utilisé un ajustement de 25 pour cent de la marge de profit, indiquant qu’il n’y avait pas de preuve pour appuyer une réduction de 10 pour cent, malgré le fait que Mme Tasneem Chipty, témoin expert, ait indiqué qu’un ajustement de 10 pour cent serait approprié[15].

[14] Dans son jugement, la CAF a décidé ce qui suit :

[…] j’annulerais les parties de la décision de la Commission où cette dernière a utilisé les mauvaises données sur les prix pour calculer le prix du groupe de référence ainsi que la mauvaise marge de profit. L’affaire est donc renvoyée à la Commission pour un nouvel examen des taux conformément aux présents motifs[16].

Historique procédural de la nouvelle décision

[15] Quand le processus de cette nouvelle décision a été entrepris, la Commission a décidé que les parties ne seraient pas autorisées à déposer une nouvelle preuve, mais pouvaient faire des commentaires sur les calculs de la Commission[17]. De plus, les parties ont été autorisées à identifier les sections du dossier qu’elles souhaitaient porter à l’attention de la formation[18], et elles l’ont fait[19].

[16] Par la suite, la Commission a présenté aux parties un ensemble de calculs (les « calculs préliminaires »), ainsi qu’une explication des calculs[20]. Les calculs préliminaires portaient sur deux points de réexamen : l’utilisation de données correctes pour les prix du groupe de référence et la marge de profit. Les parties ont eu la possibilité de faire des commentaires sur les étapes des calculs, ainsi que sur toute hypothèse utilisée par la Commission dans la préparation de ses calculs.

III. ENJEUX

[17] Nous examinons les enjeux suivants à tour de rôle :

A. Utilisation de données exactes dans le calcul du prix du groupe de référence;

B. Ajustement approprié des profits à utiliser pour les services spécialisés pour le groupe de référence;

C. En fonction de nos conclusions sur les enjeux A et B, notre nouvelle décision sur le taux principal;

D. Nouvelle décision sur les taux spéciaux.

IV. Analyse

A. Utilisation de données exactes dans le calcul du prix du groupe de référence

i. Sommaire

[18] Dans le cadre de cette nouvelle décision, la Commission a présenté aux parties, pour leurs commentaires, les calculs préliminaires comprenant un calcul du prix du groupe de référence.

[19] En fonction des observations des parties, nous apportons deux modifications aux calculs préliminaires : nous retirons les paiements en double et nous supprimons un paiement imputé. À part ces modifications, nous utilisons les mêmes données de la même manière que dans les calculs préliminaires pour déterminer le prix du groupe de référence.

[20] Nous corrigeons ainsi le calcul du prix du groupe de référence dans la décision originale dans les secteurs non soulevés par les parties au contrôle judiciaire.

[21] Nous concluons que nous pouvons et devrions faire ces corrections dans le cadre de notre nouvelle décision sur le prix du groupe de référence puisque :

- la CAF n’a pas approuvé le reste du calcul du prix du groupe de référence;

- l’identification de la double comptabilisation était une conséquence pratique des étapes prises pour la nouvelle décision;

- ne pas apporter ces corrections serait contraire au mandat de la Commission de fixer des taux de redevance justes et équitables.

ii. Contexte

Décision originale

[22] Lors de l’instance menant à la décision originale, les sociétés de gestion ont adressé un certain nombre de demandes de renseignements aux EDR sur les paiements qu’elles avaient effectués pour des services spécialisés. Les réponses ont été utilisées par les témoins experts Mme Tasneem Chipty, le professeur Jeffrey Church et M. Gerry Wall dans leurs rapports respectifs.

[23] Pour diverses raisons, y compris le manque de données disponibles, ces réponses des EDR ne comprenaient pas tous les paiements de tous les services spécialisés fournis par les EDR. Ainsi, au cours de l’audience, les EDR ont entrepris de fournir certaines données de paiements manquantes et de mettre à jour d'autres données relatives aux paiements. Chacune des EDR a fourni ces données après la fin de l’audience (« les données en réponse aux engagements »)[21].

[24] Certains tableaux du rapport d’expert de M. Church comprenant des données de paiements ont été mis à jour selon ces données des entreprises, y compris le tableau sommaire des paiements[22] sur lequel la Commission s’est fondée dans sa décision originale pour déterminer les paiements effectués par les EDR aux services spécialisés américains.

[25] Cependant, aucune mise à jour similaire n’a été fournie pour le tableau de paiements dans le rapport de Mme Chipty[23]. La Commission s’est fondée sur ce tableau pour prendre sa décision originale en vue de déterminer les paiements effectués par les EDR aux services spécialisés canadiens.

[26] Le fait que la Commission se soit fondée sur ces données non mises à jour pour les services spécialisés canadiens était l’un des motifs de demande de contrôle judiciaire de la décision originale de la part des sociétés de gestion.

Contrôle judiciaire

[27] Devant la CAF, les sociétés de gestion ont affirmé que lorsque la Commission avait calculé les paiements pour les services spécialisés canadiens du groupe de référence, elle s’était fondée sur une version incomplète et désuète de données sur les prix. La CAF était d’accord et a annulé « les parties de la décision de la Commission où cette dernière a utilisé les mauvaises données sur les prix pour calculer le prix du groupe de référence »[24].

Calculs préliminaires

[28] Dans le cadre de cette nouvelle décision, la Commission a présenté aux parties un ensemble de calculs préliminaires (voir paragraphe [18]). La présentation de ces calculs préliminaires visait à assurer que :

- toutes les informations utilisées dans le calcul de tous les paiements pour les services spécialisés du groupe de référence étaient les plus récentes disponibles au dossier;

- les calculs de la Commission étaient exacts;

- les hypothèses de la Commission dans l’utilisation des informations étaient appropriées.

[29] La méthode utilisée pour les calculs préliminaires a été la même que celle utilisée par la Commission dans sa décision originale.

[30] Afin de s’assurer que la Commission avait utilisé les informations les plus récentes pour tous les paiements, elle a combiné, pour les calculs préliminaires, les données du rapport d’expert de Mme Chipty (les « données du rapport de Mme Chipty »)[25] avec les données en réponse aux engagements. Ainsi, à la différence de la décision originale, les calculs préliminaires n’ont pas été effectués en fonction du tableau sommaire des paiements des sociétés de gestion pour les services spécialisés américains.

[31] Pour déterminer le prix du groupe de référence, tous les paiements pour les services spécialisés du groupe de référence de la Commission qui étaient contenus dans les données du rapport de Mme Chipty, ainsi que tous les paiements contenus dans les données en réponse aux engagements ont été additionnés dans les calculs préliminaires. Cette somme de paiements a été ensuite divisée par le nombre d’abonnés.

Double comptabilisation des paiements identifiée

[32] Dans leurs observations sur les calculs préliminaires, les EDR ont affirmé que certains paiements avaient été doublement comptabilisés. D’après elles, il y a eu trois cas où un seul paiement avait été effectué pour les versions à définition standard (DS) et à haute définition (HD) d’un service spécialisé, mais il avait paru deux fois dans les données utilisées pour les calculs préliminaires : une fois en relation à la version DS d’un service spécialisé (dans les données du rapport de Mme Chipty) et encore par rapport à la version HD (dans les données en réponse aux engagements).

[33] Les EDR soutiennent que l’inclusion des deux chiffres lors de l’addition de tous les paiements produit une double comptabilisation et que celle-ci devrait être retirée.

[34] Choisir de retirer ces cas de double comptabilisation aurait pour effet de réduire le prix du groupe de référence comparativement à ce qui avait été calculé dans les calculs préliminaires.

Données manquantes du paiement de Telus-Fox

[35] De plus, les calculs préliminaires comprenaient un paiement effectué par Telus pour le service spécialisé « Fox News » – un paiement qui ne paraissait pas au tableau sommaire des paiements sur lequel la Commission s’est fondée pour sa décision originale.

[36] Choisir d’inclure ce paiement pourrait être caractérisé comme une « correction » apportée au calcul du prix du groupe de référence, mais les parties ne l’ont pas mentionné dans leurs observations.

iii. Questions examinées

[37] Dans le réexamen du calcul du prix du groupe de référence, nous abordons les questions suivantes :

a. Pouvons-nous apporter des corrections aux calculs des prix du groupe de référence qui n’ont pas été soulevées par les parties lors du contrôle judiciaire?

b. Quelles données devrions-nous utiliser et comment?

a. Pouvons-nous apporter des corrections aux calculs du prix du groupe de référence?

Contexte

[38] L’identification des cas allégués de double comptabilisation était, pour des raisons pratiques, inévitable.

[39] La décision originale de la Commission ne comprenait pas une déclaration distincte des sous-totaux des paiements pour les services spécialisés américains et les services spécialisés canadiens, du fait qu’elle n’a donné qu’un seul total au paragraphe 425. Comme les calculs préliminaires étaient fondés sur l’opinion préliminaire qu’un ajustement différent des profits serait appliqué aux services spécialisés américains et canadiens (et c’est la conclusion à laquelle nous arrivons ici, voir paragraphe [131]), les sous-totaux devaient être calculés séparément dans les calculs préliminaires.

[40] Les étapes intermédiaires du calcul du prix du groupe de référence n’ont pas été fournies aux parties au cours de la procédure menant à la décision originale et n’ont pas paru dans la décision originale même. Lorsque les parties ont reçu ces étapes préliminaires pour la première fois au cours de cette nouvelle décision, cela a mis en lumière les cas allégués de double comptabilisation.

Position des parties

[41] Les sociétés de gestion ont indiqué que la Commission ne peut pas et ne devrait pas retirer les cas de double comptabilisation alléguée du fait que cela équivaudrait à une déviation de la manière dont le prix du groupe de référence a été calculé dans la décision originale et dépasserait la portée de la nouvelle décision permise dans le cadre du jugement de la CAF[26].

[42] Les sociétés de gestion caractérisent les conclusions de la CAF comme n’étant que « des données de paiements manquantes … pour les trois services canadiens inclus dans le groupe de référence de la Commission »[27] [TRADUCTION]. D’après elles, l’énoncé de la CAF selon laquelle « la Commission a commis une erreur et elle s’est fondée sur des renseignements obsolètes pour calculer les paiements totaux versés par les EDR » doit se rapporter à l’information concernant les trois services spécialisés canadiens[28].

[43] Les sociétés de gestion soutiennent donc que la Commission est contrainte par le jugement et les motifs de la décision de la CAF et qu’elle ne peut que corriger les données des paiements manquantes pour les trois services spécialisés canadiens inclus dans le groupe de référence de la Commission, et qu’elle ne peut pas apporter d’autres modifications à la décision originale eu égard à l’utilisation des données des paiements[29].

[44] Cependant, les EDR affirment que ces instances de double comptabilisation doivent être corrigées[30]. D’après elles, la Commission peut et doit utiliser correctement toutes les données dont elle est saisie[31].

[45] Les EDR caractérisent les conclusions de la CAF comme fondées sur le principe général que la décision originale n’était pas fondée sur la preuve dont la Commission disposait. Les EDR affirment donc que si des erreurs découvertes n’étaient pas corrigées, cela signifierait que i) le résultat auquel la Commission est parvenue resterait déraisonnable parce qu’il n’est pas fondé sur la preuve dont elle disposait; ii) cela équivaudrait à ne pas utiliser la même méthode que celle de la décision originale[32].

Jurisprudence

[46] La Commission ne peut pas effectuer unilatéralement un examen de sa propre décision, qu’il s’agisse d’une erreur évidente ou non, ou qu’elle soit importante ou non. La Commission a besoin de direction d’une cour de révision[33]. Dans la présente instance, une nouvelle décision a été ordonnée par la Cour d’appel fédérale et les erreurs alléguées ont été trouvées au cours du processus de cette nouvelle décision.

[47] Nous convenons avec les sociétés de gestion que l’autorité invoquée par les EDR, Burton c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 910, n’appuie pas la proposition selon laquelle, lors d’une nouvelle décision, un tribunal peut examiner automatiquement toute la preuve de nouveau : la Commission doit prendre en compte la décision et les conclusions de la Cour d’appel fédérale[34].

[48] Cependant, bien que les EDR et les sociétés de gestion conviennent que la décision relative à Canada (Commissaire de la concurrence) c Supérieur Propane inc., 2003 CAF 53, établit un cadre pour déterminer si un tribunal a agi dans les limites de sa compétence dans le cadre d’une nouvelle décision, elles sont fondamentalement en désaccord sur la façon de caractériser les conclusions de la CAF dans son contrôle judiciaire de la décision originale et sur les directives qu’elle a données à la Commission.

Analyse

[49] Dans la présente instance, le juge de la CAF a indiqué qu’il annulerait « les parties de la décision de la Commission où cette dernière a utilisé les mauvaises données sur les prix pour calculer le prix du groupe de référence ».

[50] Les sociétés de gestion affirment que « les mauvaises données sur les prix » ne peuvent se rapporter qu’aux mauvaises données portées à l’attention de la CAF : les paiements manquants aux trois services spécialisés canadiens. Les EDR rétorquent que la Cour n’a pas demandé à la Commission d’en arriver à aucune conclusion particulière dans le cadre de sa nouvelle décision, mais plutôt d’utiliser les données de prix correctes dans son calcul du prix du groupe de référence.

[51] Donc, d’après les parties, la Commission peut soit corriger toutes les erreurs nouvellement identifiées dans le calcul (c.-à-d. inclure les données omises précédemment et ne pas faire une double comptabilisation de certains paiements), soit n’en corriger aucune.

[52] La Commission doit décider si elle devrait volontairement ignorer des erreurs apparentes – par une simple mise en garde des parties et de toute cour de révision de leur existence – ou si elle devrait corriger le calcul du prix du groupe de référence dans la décision originale pour des domaines qui n’ont pas été soulevés par les parties lors du contrôle judiciaire.

[53] Bien que nous convenions avec les sociétés de gestion que la CAF n’aurait pas été au courant que des erreurs possibles par rapport aux trois services spécialisés canadiens, les raisons données par la CAF ne semblent pas approuver le reste de la totalisation des paiements, laissant la mise en application particulière du calcul à la Commission.

[54] Par ailleurs, la Commission a un mandat statutaire de fixer des taux de redevance justes et équitables[35]. À notre avis, l’adoption de l’interprétation rigide du jugement de la CAF préconisée par les sociétés de gestion aurait pour effet que la Commission ne respecterait pas cette exigence fondamentale.

[55] Enfin, la correction des erreurs de calcul n’est pas, à notre avis, en contradiction avec la directive de la CAF selon laquelle ces erreurs « n’exigent pas le réexamen de l’approche globale mise en œuvre par la Commission »[36].

[56] Nous concluons donc que nous pouvons prendre une nouvelle décision sur le prix du groupe de référence en utilisant correctement toutes les données.

b. Quelles données devrions-nous utiliser et comment?

[57] Seules quelques difficultés ont été cernées relativement à la manière dont les calculs préliminaires ont mené au prix du groupe de référence. Nous en traitons ci-dessous. À part ces points, nous devrions déterminer le prix du groupe de référence de la même manière que pour les calculs préliminaires.

Paiement imputé

[58] Les données en réponse aux engagements comprenaient une entrée vide pour l’un des paiements effectués par une EDR pour un service spécialisé canadien. Dans les calculs préliminaires, nous avons cru qu’il s’agissait d’une omission ou d’une erreur et nous l’avons remplacé par un paiement imputé.

[59] Dans leurs observations sur les calculs préliminaires, les EDR ont informé la Commission que l’entrée vide signifiait, en fait, 0 $[37].

[60] Nous acceptons cette observation et utilisons ce chiffre de 0 $ dans nos calculs du prix du groupe de référence.

Données de paiements mises à jour pour les services spécialisés canadiens

[61] Les données sur les services spécialisés canadiens provenaient du rapport de Mme Chipty, complétées par les données en réponse aux engagements. La totalité des paiements pour les services spécialisés canadiens dans les calculs préliminaires était de 1 237 925 $[38].

[62] Sauf pour l’observation des EDR sur un paiement imputé (voir le paragraphe [35]), les parties n’ont pas fait d’observations sur les données et les calculs pour les services spécialisés canadiens.

[63] Compte tenu de notre conclusion de ne pas faire de paiement imputé lorsqu’un paiement est indiqué comme nul (voir le paragraphe [60]), nous déterminons que la somme des paiements pour les trois services spécialisés canadiens est 678 216 $. Cela se compare à la somme de 403 950 $ qui aurait été obtenue en utilisant seulement les données canadiennes du rapport de Mme Chipty, qui est la source pertinente de données pour les services spécialisés canadiens dont la Commission s’est servie pour sa décision originale.

Doubles paiements pour services spécialisés offerts à la fois en haute définition et en définition standard

[64] Les sociétés de gestion soutiennent que les réclamations des EDR sur les données représentant la double comptabilisation sont sans fondement[39].

[65] Nous ne sommes pas d’accord. D’abord, les EDR sont dans une bonne position pour comprendre la signification des données qu’elles ont fournies. Ensuite, dans les instances prétendues de la double comptabilisation, les EDR ont rapporté des nombres d’abonnés et des montants de paiement presqu’identiques pour les versions haute définition et standard des services spécialisés qu’elles offraient. Cela appuie l’affirmation selon laquelle ces données font double emploi.

[66] Nous concluons que les trois groupes de paiements identifiés par les EDR dans les calculs préliminaires représentent des instances de double comptabilisation. Donc, nous choisissons de calculer la totalité des paiements effectués pour les services spécialisés du groupe de référence en ignorant les entrées en double.

Paiements par Telus pour Fox News

[67] Le tableau sommaire de paiements des sociétés de gestion utilisé par la Commission dans le cadre de sa décision originale ne comportait pas d’entrée pour les paiements effectués par Telus pour le service spécialisé Fox News. Les calculs préliminaires, n’étant pas fondés sur le tableau sommaire, incluaient ces paiements.

[68] Les parties n’ont mentionné cette différence dans aucune de leurs observations.

[69] Comme nous le faisons eu égard à l’analyse de la double comptabilisation, nous préférons les données sous-jacentes sur lesquelles le tableau sommaire a été fondé et incluons donc ces données dans notre calcul du prix du groupe de référence.

Conclusion

[70] Ni les parties ni nous-mêmes n’avons identifié d’autres difficultés par rapport aux calculs préliminaires. Ainsi, après avoir retiré les paiements comptabilisés deux fois et sans avoir accordé un prix dans un cas où aucun prix n’avait été indiqué, nous utilisons les données de la même manière que pour les calculs préliminaires. Nos calculs paraissent ci-dessous dans notre nouvelle décision sur le taux principal, aux paragraphes [136]-[153].

B. Ajustement des profits

i. Sommaire

[71] Ayant examiné la preuve dans sa totalité, nous concluons que :

- une réduction de 25 pour cent pour les services spécialisés américains est appropriée, ce qui est davantage étayé par la preuve que par l’utilisation d’une réduction de 10 pour cent;

- l’utilisation d’une réduction de 10 pour cent pour les services spécialisés canadiens est appropriée, comme elle est appuyée par le résumé des données du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) par Mme Chipty.

ii. Contexte

La décision originale

[72] L’un des ajustements apportés par la Commission dans sa détermination du taux de redevance dans sa décision originale portait sur les profits des services spécialisés. La Commission jugeait devoir faire un ajustement à la baisse de 25 pour cent à la fois pour les services spécialisés américains et canadiens.

[73] La portion pertinente de la décision originale se lit comme suit :

[429] Dans sa formule, Mme Chipty suggère d’apporter un ajustement de 25 pour cent aux paiements des services spécialisés canadiens de catégorie B. Il s’agit de la marge de profit moyenne que génèrent ces services. À défaut de pouvoir procéder à une meilleure estimation, elle a appliqué un ajustement de l’ordre de 10 pour cent à l’égard des paiements des services spécialisés américains.

[430] À notre avis, un ajustement de 10 pour cent aux paiements des services spécialisés américains est trop faible, car rien ne nous permet de croire que la marge de profit des services spécialisés américains est inférieure à celle des services spécialisés canadiens de catégorie B; d’ailleurs, aucune partie n’a présenté d’éléments de preuve à cet effet. Par conséquent, nous appliquons une réduction de 25 pour cent à tous les services du groupe de référence pour exclure la part des paiements attribuable au profit[40].

[74] La Cour d’appel fédérale a maintenu que la section de la décision originale de la Commission qui portait sur l’ajustement des profits n’était pas raisonnable. Elle a déclaré que la Commission n’avait pas fait la distinction entre les services spécialisés intégrés verticalement et non intégrés verticalement et

en utilisant la marge de profit que génèrent les services intégrés verticalement, indirectement réintroduit des services qu’elle avait précédemment exclus. Cela a également amené la Commission à commettre une autre erreur en appliquant le même taux de 25 % aux services spécialisés américains sur le fondement que « rien ne nous permet de croire que la marge de profit des services spécialisés américains est inférieure à celle des services spécialisés canadiens de catégorie B » (motifs, para 430). Cette appréciation est fondée sur une fausse prémisse et fait abstraction des éléments de preuve de Mme Chipty, selon lesquels les services spécialisés américains du groupe de référence génèrent une marge de profit moindre, car ils ne sont pas intégrés verticalement avec les EDR[41].

iii. Position des parties

[75] Les sociétés de gestion affirment que la seule possibilité pour la Commission est d’utiliser un ajustement de 10 pour cent à la marge de profit pour les services spécialisés canadiens et américains.

[76] Les EDR soutiennent que la seule possibilité pour la Commission est d’utiliser un ajustement de 25 pour cent à la marge de profit pour les services spécialisés canadiens et américains.

iv. Questions examinées

[77] Nous examinons la preuve relative à la question de la marge de profit, notamment :

a. Le rapport d’expert et le témoignage de Mme Chipty;

b. Les données financières des entreprises médiatiques américaines (Avis 2016-088);

c. Les paiements effectués par les EDR pour des services spécialisés dans le groupe de référence.

[78] Comme la CAF a retourné la question de l’ajustement des profits à la Commission en raison de son évaluation de la preuve et comme la description de la preuve dans la décision originale était peut-être succincte, nous décrivons ici cette preuve en plus amples détails.

a. Rapport d’expert et témoignage de Mme Chipty

Rapport d’expert

[79] Dans son rapport d’expert, dans le cadre de son calcul d’un taux de référence, Mme Chipty indique ce qui suit :

il serait inapproprié de porter au crédit des signaux éloignés les paiements totaux effectués par les EDR aux services de référence. Pour régler cette question, je limite la totalité des paiements mensuels à des paiements suffisants pour couvrir tous les coûts des services. Ces coûts comprennent, de manière prudente, les coûts de programmation encourus par les services (et versés aux titulaires de droits), les coûts de compilation et d’autres coûts auxquels les titulaires de droits de signaux éloignés ne sont pas autorisés[42] [TRADUCTION].

[80] Autrement dit, à son avis, la totalité des paiements effectués par les EDR aux services de référence exagérerait la « valeur » mesurée. Les paiements compris dans le prix du groupe de référence devraient plutôt être limités aux coûts des services.

[81] Mme Chipty a évalué les coûts des services pour les groupes de services spécialisés suivants comme suit :

1. tous les services spécialisés canadiens de « Catégorie B » (à savoir à la fois intégrés verticalement et non intégrés verticalement);

2. les services canadiens de « Catégorie B » non intégrés verticalement;

3. les services spécialisés américains.

[82] Pour ce faire, Mme Chipty a analysé les données du CRTC sur les services canadiens de « Catégorie B ». Elle a conclu qu’ « environ 75 pour cent de tous les revenus des services de Catégorie B et environ 90 pour cent de tous les revenus des services de « Catégorie B » non intégrés verticalement sont affectés aux coûts des services »[43] [TRADUCTION].

[83] Cela signifierait un ajustement à la baisse de 25 pour cent aux paiements pour les services spécialisés de Catégorie B dans leur ensemble (tant intégrés verticalement que non intégrés verticalement), mais seulement un ajustement de 10 pour cent aux paiements pour le sous-ensemble de services spécialisés de Catégorie B non intégrés verticalement[44].

[84] Dans sa décision originale, la Commission a caractérisé l’objet de ces ajustements à la baisse comme excluant les profits du prix du groupe de référence[45]. Autrement dit, ces chiffres de 25 pour cent et de 10 pour cent représentent une marge de profit qui doit être exclue des paiements du groupe de référence.

[85] Cependant, comme l’a fait remarquer Mme Chipty, « le CRTC ne fournit pas d’information comparable pour les services spécialisés américains »[46] [TRADUCTION]. Ainsi, elle a utilisé le raisonnement suivant pour émettre une hypothèse sur les coûts des services spécialisés américains :

Comme les services spécialisés américains ne sont pas intégrés verticalement aux EDR, je présume qu’ils ont une structure de coûts plus élevés (et moins de « profits avant les revenus et les taxes ») comme les services canadiens de Catégorie B non intégrés verticalement. Ainsi, je calcule un taux de référence de base utilisant 75 pour cent de la totalité des paiements mensuels versés par les EDR pour les services de Catégorie B et 90 pour cent de la totalité des paiements mensuels versés par les EDR pour les services spécialisés américains[47] [TRADUCTION].

[86] Si elle est acceptée, cette hypothèse laisserait supposer un ajustement à la baisse de 10 pour cent des paiements pour les services spécialisés américains.

Notre évaluation de la preuve

[87] À la différence d’une cour, la Commission n'est pas liée par – et ne suit pas – des règles strictes en matière de preuve[48]. En particulier, la Commission ne qualifie pas les experts. Une conséquence qui en découle est que la Commission évalue le poids à accorder à tout élément de preuve, y compris la preuve d’experts, en fonction des caractéristiques de la preuve et du contexte dans lequel la preuve est présentée.

[88] Pour les services canadiens de Catégorie B, la réduction de 10 pour cent utilisée par Mme Chipty est fondée sur des données du CRTC. Comme nous sommes d’avis que les données du CRTC sont exactes et comme le résumé de ces données par Mme Chipty n’est pas remis en question, nous accordons à ce chiffre un poids considérable.

[89] Cependant, nous ne sommes pas persuadés par l’hypothèse selon laquelle les services spécialisés américains ne méritent qu’une réduction de 10 pour cent.

[90] Premièrement, l’hypothèse n’est pas fondée sur une preuve particulière à propos des services spécialisés américains, au-delà du fait que ces services ne sont pas intégrés verticalement aux EDR canadiennes.

[91] Toutefois, le seul fait que ces services ne sont pas intégrés verticalement aux EDR canadiennes ne signifie pas qu’ils ne sont pas intégrés verticalement aux entreprises de câblodistribution américaines[49]. En fait, au moins certains des services spécialisés américains du groupe de référence (MSNBC, MSNBC HD et le Golf Channel) sont intégrés verticalement aux entreprises de câblodistribution américaines[50]. D’autres pourraient l’être aussi.

[92] Au Canada, d’après Mme Chipty, les services spécialisés canadiens de Catégorie B, dans l’ensemble, ont une marge de profit globale de 25 pour cent. Dans la mesure où le profit des services spécialisés canadiens (tant intégrés verticalement que non intégrés verticalement) peut être utilisé comme référence pour les services spécialisés américains (également intégrés verticalement et non intégrés verticalement), une telle référence appuierait le chiffre de 25 pour cent davantage que celui de 10 pour cent.

[93] Deuxièmement, à l’examen, Mme Chipty a déclaré que les données accessibles au public montrent des marges plus élevées que 10 pour cent pour les services américains et elle a affirmé que l’utilisation d’un chiffre de 10 pour cent risque de surévaluer le groupe de référence[51]. Ainsi, elle a remis en question elle-même la validité du chiffre de 10 pour cent pour les services américains.

[94] Enfin, nous remarquons que Mme Chipty n’a pas précisé que cette hypothèse était fondée sur ses connaissances spécialisées eu égard au marché des services spécialisés américains ni sur un domaine dont elle dit avoir des connaissances spécialisées : « microéconomie, méthodes empiriques et organisation industrielle – l’étude du fonctionnement des marchés, notamment les interactions concurrentielles entre les entreprises et la demande des consommateurs »[52] [TRADUCTION].

[95] Ainsi, nous n’accordons pas un grand poids à l’hypothèse voulant que les services spécialisés américains aient une marge de profit de 10 pour cent.

b. Données financières sur les entreprises médiatiques américaines

Avis 2016-088

[96] Dans sa décision 2022-038, la Commission a invité les parties « à identifier les sections du dossier existant qu’elles souhaitent porter à l’attention de la formation » pour cette nouvelle décision. Une telle section identifiée par les EDR était les Avis 2016-088 et 2016-094, et les réponses des parties à ces avis.

[97] Dans l’Avis 2016-088, la Commission a identifié des rapports « 10-K » de quatre entreprises médiatiques américaines et deux commentaires sur les finances d’entreprises médiatiques américaines et a permis aux parties de commenter sur ceux-ci[53]. L’Avis 2016-088 indiquait que :

le personnel de la Commission a fait des recherches sur les marges de profit de certains fournisseurs de services de télévision américains. Ces fournisseurs sont propriétaires de services spécialisés américains et certains de ces services spécialisés ont été utilisés pour les services comparés utilisés par M. Church et Mme Chipty pour fixer les redevances liées à la retransmission. Cette information laisse entendre que les fournisseurs peuvent faire un profit moyen de 25 à 35 pour cent par année en offrant des services spécialisés[54] [TRADUCTION].

[98] L’Avis 2016-094 reproduit ou résume des sections de l’information mentionnée dans l’Avis 2016-088 et explique comment certains calculs ont été effectués dans le dernier avis.

[99] Dans sa décision originale, la Commission a déclaré qu’elle ne s’est pas appuyée sur l’information contenue dans l’Avis 2016-088 pour prendre une décision sur l’ajustement approprié des profits, mais que « ces informations nous permettent d’affirmer avec assurance qu’il s’agit d’un ajustement raisonnable »[55].

La Commission peut-elle s’appuyer sur l’information mentionnée dans l’Avis 2016-088?

[100] Au cours des travaux menant à la décision originale, les sociétés de gestion avaient soulevé une question d’équité procédurale : elles affirmaient qu’elles ne disposaient pas d’un contexte suffisant pour être en mesure de commenter de manière significative sur les données contenues dans l’Avis 2016-088.

[101] La décision originale n’a pas abordé la question procédurale soulevée par les sociétés de gestion. Puisque nous tenons compte de l’information mentionnée dans l’Avis 2016-088, nous abordons la question procédurale ici.

[102] Dans leur réponse initiale à l’Avis 2016-088, les sociétés de gestion ont soutenu qu’elles ne connaissaient pas la nature, le contexte ou la portée des demandes de renseignements factuels de la part du personnel de la Commission ou l’utilisation qu’elle ferait de ces nouvelles informations et analyses. Ainsi, elles ont demandé plus de détails de la part de la Commission[56].

[103] En réponse, la Commission a publié l’Avis 2016-094 où elle a fourni plus de détails sur les données qu’elle avait utilisées, en plus d’explications sur la pertinence des données et l’objet de leur utilisation.

[104] En particulier, l’Avis 2016-094 indiquait ce qui suit :

Comme il est décrit à la Question 1 de l’Avis [CB-CDA 2016-088], la question des marges de profit a été abordée par Mme Chipty et M. Church dans leurs observations. Cette question reste d’actualité dans cette affaire. De plus, puisque Mme Chipty et M. Church utilisent les services spécialisés des États-Unis dans la construction de leur groupe de référence, ce sont les marges de profit de ces services spécialisés qui sont en cause. [TRADUCTION]

La Question 1 visait à offrir aux parties une possibilité de présenter des observations sur la pertinence et la fiabilité des documents identifiés, ainsi que sur la proposition voulant que l’information des Documents 1-6, pris ensemble, « laisse entendre que les fournisseurs pourraient avoir un profit moyen de 25 à 35 pour cent par année en offrant des services spécialisés »[57]. [TRADUCTION]

[105] Malgré cela, les sociétés de gestion continuent d’affirmer que la façon dont la Commission entend utiliser l’information contenue dans l’Avis 2016-088 est imprécise et inconnue[58].

[106] Le 9 décembre 2016, les parties ont répondu aux questions de la Commission sur ces nouvelles données; le 22 décembre 2016, les parties ont répliqué à leurs réponses respectives. Ces réponses et répliques ont constitué la possibilité pour les parties de présenter leurs observations sur l’information contenue dans les Avis 2016-088 et 2016-094.

[107] Dans la mesure où il y avait de l’incertitude relativement à tout vice de procédure survenu à un stade antérieur de la procédure, elle a été abordée lors des étapes procédurales accomplies le ou avant le 22 décembre 2016. Les deux parties, y compris les sociétés de gestion, ont été informées de la façon dont la Commission comptait utiliser l’information, et elles ont eu la possibilité de présenter leurs commentaires sur la pertinence et la fiabilité de l’information relative à la question de la marge de profits.

[108] Nous concluons donc qu’il n’y a pas eu de vice de procédure en nous fondant sur l’information contenue dans l’Avis 2016-088.

La Commission devrait-elle se fonder sur l’information mentionnée dans l’Avis 2016-088?

[109] Compte tenu de notre conclusion que nous pouvons nous fonder sur l’information mentionnée dans l’Avis 2016-088 (qui était partiellement reproduite dans l’Avis 2016-094), nous devons déterminer le poids à lui accorder.

[110] Dans leurs observations dans le cadre de la décision originale, les sociétés de gestion, tout en ne contestant pas l'exactitude des données financières divulguées dans les rapports 10-K[59], ont soulevé trois questions de base sur leur utilisation dans la décision de la Commission :

1. Les données mentionnées dans l’Avis sont-elles cohérentes sur le plan interne?

2. Les secteurs d’activités identifiés par la Commission reflètent-ils raisonnablement les activités des services spécialisés au sein de ces grandes entreprises américaines?

3. Les profits d’exploitation sont-ils une bonne mesure des profits pour la vente de services spécialisés américains aux EDR canadiennes?

[111] Nous abordons ces questions tour à tour.

1. Les données présentées par la Commission sont-elles cohérentes sur le plan interne?

[112] Les sources du Tableau 1 de l’Avis 2016-088 étaient quatre dépôts distincts du Formulaire 10-K[60] relativement à quatre grandes entreprises : Comcast, Fox, TimeWarner et Viacom. La source du Tableau 2 était un billet de blogue paru dans TVweek.com, qui s’est décrit comme le « guide de l’initié pour les affaires qui se passent derrière les écrans. » [TRADUCTION]

[113] Les sociétés de gestion ont allégué que les données des Tableaux 1 et 2 n’étaient pas cohérentes entre elles, parfois comportant des différences de milliards de dollars[61].

[114] Toutefois, comme le remarquent les EDR, la source du Tableau 2 n’examinait que les trois premiers trimestres de 2013, alors que les données des Formulaires 10-K portent sur toute l’année. L’ajustement des données élimine l’incohérence[62].

2. Les sections identifiées par la Commission reflètent-elles raisonnablement les activités des services spécialisés au sein de ces grandes entreprises américaines?

[115] Le blogue de TVweek.com, mentionné ci-dessus et cité dans l’Avis 2016-088, qualifie ces entreprises de « sociétés médiatiques géantes ». Ces sociétés possèdent des services spécialisés (dénommés aux É.-U. comme des « cable channels » ou chaînes par câble) et d’autres entreprises. Les sociétés de gestion se demandent comment être certaines que les profits mesurés par la Commission se rapportent aux services spécialisés[63].

[116] L’Avis 2016-094 nomme les sections utilisées comme suit[64] :

Société

Secteur utilisé

Comcast

Réseaux de câbles

Fox

Programmation du réseau de câbles

Time Warner Inc.

HBO plus Turner

Viacom Inc.

Réseaux de médias

[117] Nous reconnaissons la possibilité que ces secteurs comprennent des éléments n’ayant pas de rapport avec les services spécialisés. Si c’est le cas, ces éléments sont négligeables – autrement ils auraient été identifiés et discutés dans les rapports du Formulaire 10-K.

[118] Ainsi, tout élément non identifié aurait un faible effet sur les marges de profit globales indiquées pour ces secteurs; les chiffres globaux sont des indices fiables des profits.

3. Les profits d’exploitation sont-ils une bonne mesure des profits pour la vente de services spécialisés américains aux EDR canadiennes?

[119] Les sociétés de gestion ont soulevé la question de savoir si les profits d’exploitation sont une indication du pouvoir de marché[65]. Comme elles le font remarquer, les profits d’exploitation sont une mesure à court terme; ils n’indiquent pas dans quelle mesure les propriétaires des services spécialisés américains peuvent faire des profits à long terme.

[120] De plus, les sociétés de gestion affirment que les profits d'exploitation ne sont pas équivalents au complément du « partage des coûts », comme cette expression est définie par Mme Chipty[66]. Cela s’explique par le fait que rien n’indique que les profits d’exploitation sur le marché américain sont pertinents pour les profits enregistrés relativement aux transactions entre les services spécialisés américains et les EDR canadiennes.

[121] Les EDR répondent que, dans la mesure où ces coûts sont inclus dans l’estimation de Mme Chipty, son estimation est prudente. Comme elle l’explique dans son rapport, seul le coût de la programmation est vraiment pertinent pour l’analyse et tout autre coût devrait être retiré. Elle ne disposait pas de suffisamment d’information pour isoler les coûts de programmation et elle a donc seulement retiré les profits des services spécialisés; ainsi, son estimation était prudente au départ, du fait qu’elle attribuait plus de revenus aux coûts de programmation qu’au coût seul de la programmation[67].

[122] Quant aux marchés canadien et américain, les EDR ont répondu en faisant remarquer que « les services achètent les droits canadiens pour la programmation réalisée aux É.-U. des entreprises médiatiques américaines aux É.-U. »[68] [TRADUCTION]

[123] À notre avis, les profits d’exploitation représentent une bonne mesure des profits. Bien que les sociétés de gestion soulignent qu'il peut y avoir de meilleures mesures, y compris celles qui prennent en compte le long terme, cela ne nous convainc pas que cette mesure ne peut pas être utilisée ici.

Conclusion

[124] Ayant examiné les questions soulevées par les sociétés de gestion, nous concluons néanmoins que ces données sont un indicateur utile des marges de profit des services spécialisés américains, indiquant qu’un chiffre de 25 pour cent serait une estimation prudente.

c. Paiements par les EDR pour des services spécialisés du groupe de référence

[125] Par souci d'exhaustivité, nous notons que les calculs préliminaires incluaient les calculs relatifs à la marge de profit des services spécialisés américains. Compte tenu des commentaires des parties sur ces calculs, nous n’en tenons pas compte dans le cadre de la présente décision.

[126] Les calculs préliminaires partaient du principe que le prix le plus bas observé pour un service spécialisé américain particulier serait un indicateur approximatif du prix auquel il n'y aurait pas de profit. À partir de là, il serait possible d'estimer le profit moyen réalisé par un service spécialisé lorsqu’il a été vendu aux quatre EDR dans nos calculs du groupe de référence. Ces profits moyens pourraient, à leur tour, fournir un indicateur des marges de profit globales approximatives contenues dans les données de tarification relatives au groupe de référence.

[127] Toutefois, dans leurs commentaires sur les calculs préliminaires, tant les EDR que les sociétés de gestion ont affirmé que la Commission ne devrait pas s’appuyer sur les calculs préliminaires pour évaluer la marge de profit des services spécialisés américains[69]. Leurs observations ont soulevé des questions à la fois de procédure et de fond.

[128] En particulier, les EDR ont soulevé les questions de fond suivantes :

- l’attribution des prix, par la Commission, entre les versions haute définition et définition standard d’un service spécialisé, est difficile à vérifier, compte tenu de l’âge des données[70];

- comme la plupart des coûts d’un service spécialisé sont fixés, la tarification ne sera pas significativement liée à un prix au seuil de rentabilité[71].

[129] Nous acceptons ces critiques de l’approche adoptée dans les calculs préliminaires et concluons que nous ne devrions pas utiliser les calculs comme un indicateur de la marge de profit.

[130] Puisque nous n’utilisons pas ou ne nous appuyons pas sur cette section des calculs préliminaires, il n’est pas nécessaire d’aborder toute question de procédure soulevée par les parties eu égard à la section des calculs préliminaires portant sur la marge de profit.

v. Conclusion sur l’ajustement des profits

Services canadiens de Catégorie B

[131] Pour les services canadiens de Catégorie B non intégrés verticalement, la preuve appuie fortement l’utilisation d’une réduction de 10 pour cent pour ajuster les profits. Ce chiffre est fondé directement sur les données du CRTC.

Services spécialisés américains

[132] Pour les services spécialisés américains, l’utilisation d’un chiffre de 25 pour cent est davantage étayée par la preuve qu’un chiffre de 10 pour cent.

[133] Premièrement, l’information mentionnée dans l’Avis 2016-088 montre que des profits moyens entre 25 et 35 pour cent sont habituels pour les services spécialisés américains.

[134] Deuxièmement, les services spécialisés américains sont à la fois intégrés verticalement et non verticalement. D’après Mme Chipty et à partir des données du CRTC, tous les services canadiens de Catégorie B – dont chacun peut être soit intégré verticalement ou non intégré verticalement – ont, ensemble, une marge de profit de 25 pour cent.

[135] Enfin, l’hypothèse initiale de Mme Chipty pour les services spécialisés américains, en appui au chiffre de 10 pour cent, a été tempérée par ses énoncés subséquents affirmant que les données accessibles publiquement appuient un chiffre plus élevé comme il est décrit au paragraphe [93]).

C. Prise d’une nouvelle décision sur le taux principal

i. Calcul du prix par abonné

Le prix non ajusté par abonné

[136] Dans sa décision originale, la Commission a d’abord déterminé la totalité des paiements effectués par les quatre EDR (Bell, Rogers, Shaw et Telus) pour les services spécialisés du groupe de référence, et ensuite divisé le prix par le nombre d’abonnés. C’est ce que nous faisons ici aussi.

[137] Nous utilisons le même ensemble de services spécialisés que celui utilisé par la Commission dans sa décision originale (Tableau 1)[72].

Tableau 1 : Services spécialisés du groupe de référence

Service spécialisé

Type

A&E

Service spécialisé américain

A&E HD

Service spécialisé américain

AMC

Service spécialisé américain

BET

Service spécialisé américain

Bloomberg

Service spécialisé américain

CNBC

Service spécialisé américain

CNN – Cable News

Service spécialisé américain

FOX News Channel

Service spécialisé américain

Golf Channel

Service spécialisé américain

Game Show Network

Service spécialisé américain

HLN

Service spécialisé américain

Military Channel

Service spécialisé américain

MSNBC

Service spécialisé américain

MSNBC HD

Service spécialisé américain

NFL Network

Service spécialisé américain

Speed

Service spécialisé américain

Spike TV

Service spécialisé américain

TLC

Service spécialisé américain

TLC HD

Service spécialisé américain

Turner Classic Movies

Service spécialisé américain

Bite TV

Service spécialisé canadien de Catégorie B

AUX TV

Service spécialisé canadien de Catégorie B

BBC Kids

Service spécialisé canadien de Catégorie B

[138] Nous avons ensuite additionné séparément les paiements pour les services spécialisés américains et pour les services spécialisés canadiens. Comme la Commission l’a fait dans les calculs préliminaires (voir para [28]), nous utilisons les données du rapport d’expert de Mme Chipty et les données des entreprises.

[139] En additionnant les paiements pour les services spécialisés américains, nous le faisons en harmonie avec nos décisions eu égard à la double comptabilisation (voir le paragraphe [32]) en omettant les paiements doubles et en incluant les données des paiements de Telus-Fox News qui manquaient précédemment (voir le paragraphe [35]).

[140] En additionnant les paiements pour les services spécialisés canadiens, nous avons inclus les paiements à jour pour ces services contenus dans les données en réponse aux engagements qui avaient été omis dans la décision originale.

[141] Ainsi, la totalité des paiements effectués par les quatre EDR pour les services spécialisés américains et canadiens dans le groupe de référence est de 19 427 422 $ et 678 213 $ respectivement.

[142] Tout comme dans la décision originale, pour obtenir un prix non ajusté par abonné, nous divisons par le nombre total d’abonnés aux quatre EDR, soit 8 078 000 abonnés. Le résultat est un prix non ajusté par abonné de 2,405 $ pour les services spécialisés américains et 0,084 $ pour les services spécialisés canadiens.

[143] Aux fins de comparaison, nous remarquons que si la Commission choisissait de ne pas apporter de corrections aux paiements américains, le montant total pour les services spécialisés américains serait de 20 796 783 $, pour un prix non ajusté par abonné de 2,58 $ pour ces services.

Dégager le coût de la programmation

[144] Dans la décision originale, la Commission a appliqué une réduction de 35 pour cent au prix du groupe de référence pour dégager le coût de la programmation. La Commission a indiqué que ce 35 pour cent comprenait « 25 pour cent pour exclure le profit et 10 pour cent pour exclure les coûts d’exploitation et les coûts indirects ». L’ajustement de 10 pour cent pour les coûts d’exploitation et les coûts indirects n’est pas en cause ici et nous l’utilisons aussi dans nos calculs.

[145] Nous avons conclu qu’il est approprié d’utiliser le chiffre de 25 pour cent pour exclure le profit des services spécialisés américains, mais seulement 10 pour cent pour les services spécialisés canadiens (voir les paragraphes [131]-[132]). En combinant cet ajustement pour les coûts indirects et les coûts d’exploitation, qui restent inchangés depuis la décision originale, il en résulte un ajustement de 35 pour cent pour les services spécialisés américains et de 20 pour cent pour les services spécialisés canadiens.

[146] Cet ajustement réduit le prix par abonné à 1,563 $ pour les services spécialisés américains et à 0,067 $ pour les services spécialisés canadiens.

Autres ajustements

[147] Dans sa décision originale, la Commission avait apporté les ajustements additionnels suivants :

- pouvoir du marché pour les services spécialisés : réduction de 25 pour cent;

- substituabilité de la programmation : réduction de 8,25 pour cent.

[148] Ces ajustements n’ont pas été annulés par la Cour d’appel fédérale et ne sont donc pas remis en cause. Nous utilisons donc exactement les mêmes chiffres dans nos calculs ici et de la même manière que dans la décision originale de la Commission.

[149] Il en découle un prix par abonné de 1,076 $ pour les services spécialisés américains et de 0,046 $ pour les services spécialisés canadiens, pour un prix total de 1,12 $ par abonné.

[150] Encore une fois, aux fins de comparaison, nous remarquons que sans corrections apportées dans le cadre de la décision sur les paiements américains, le prix par abonné pour les services spécialisés américains serait de 1,153 $, pour un prix total de 1,20 $ par abonné.

Conclusion

[151] Nos calculs ci-dessus sont résumés dans le Tableau 2.

 

Tableau 2 : Résumé du calcul des prix ($) par abonné

Paiements des EDR

Prix non ajusté par abonné

Coût de la programmation

Pouvoir du marché des services spécialisés

Substituabilité de la programmation

Total partiel
É.-U.

19 427 422

2,405

1,563

1,172

1,076

Total partiel Canada

678 213

0,084

0,067

0,050

0,046

Total

20 105 636

2,489

1,630

1,223

1,122

[152] Dans sa décision originale, la Commission a soutenu que les effets de l’inflation et la diminution du nombre de téléspectateurs s’annuleraient mutuellement de manière approximative au cours de la période tarifaire (2014-2018). Elle a donc calculé le même paiement par abonné pour chaque année d’application du tarif[73].

[153] Nous le faisons également et notre paiement calculé par mois par abonné est de 1,12 $.

ii. Considérations d’équité procédurale

[154] Les taux de redevance proposés, tels qu’ils ont été publiés dans la Gazette du Canada, se présentent comme suit :

Tableau 3 : Taux de redevance proposés ($)

Année

2014

2015

2016

2017

2018

Taux de redevance proposés

1,06

1,14

1,22

1,30

1,38

[155] Pour assurer l’équité procédurale, la Commission, dans sa décision originale, a plafonné les taux approuvés pour 2014 et 2015 comme ceux proposés par les sociétés de gestion et publiés dans la Gazette du Canada, le 1er juin 2013[74]. Les taux de redevance proposés étaient de 1,06 $ pour 2014 et 1,14 $ pour 2015.

[156] Au contrôle judiciaire, la CAF a conclu que la Commission n’a pas commis d’erreur ce faisant[75].

[157] Nous plafonnons donc aussi les taux de redevance à ceux proposés par les sociétés de gestion. Toutefois, étant donné que nous avons décidé que le paiement calculé par abonné serait de 1,12 $ (voir le paragraphe [153]), ce plafonnement n’a un effet que pour l’année 2014.

[158] Nous fixons le taux principal, qui est le taux de redevance par abonné pour les EDR ayant plus de 6000 abonnés, comme suit :

Tableau 4 : Taux principal pour 2014-2018 ($)

 

2014

2015

2016

2017

2018

Taux de redevance par abonné

1,06

1,12

1,12

1,12

1,12

 

D. Prise d’une nouvelle décision sur les taux spéciaux

[159] Dans la décision originale, certains taux de redevances dans le Tarif pour la retransmission de signaux éloignés de télévision, 2014-2018 ont été fixés pour de plus petites EDR et des marchés spéciaux (les « taux spéciaux »). Certains d’entre eux découlent du taux principal.

[160] La décision de la CAF n’a pas modifié les taux spéciaux fixés dans la décision originale. Toutefois, comme certains découlent du taux principal et que celui-ci a été modifié, nous devons aussi prendre une nouvelle décision sur ces taux spéciaux.

i. Taux de redevance pour les retransmetteurs ayant 6000 abonnés ou moins

[161] Nous utilisons le taux principal pour obtenir un tableau des redevances pour les retransmetteurs ayant 6000 abonnés ou moins, de la même manière que nous l’avons fait dans la décision originale.

[162] Dans la décision originale, chaque rangée subséquente est de 5 ou 6 cents de plus que la rangée précédente. Nous utilisons les mêmes incréments que dans la décision originale.

Tableau 5 : Taux de redevance pour les retransmetteurs par le nombre de locaux ($)

Locaux

Taux de redevance
pour

2014

Taux de redevance
pour

2015-2018

Jusqu’à 1500

0,49

0,55

1501 – 2000

0,54

0,60

2001–2500

0,60

0,66

2501–3000

0,66

0,72

3001–3500

0,71

0,77

3501–4000

0,77

0,83

4001–4500

0,83

0,89

4501–5000

0,89

0,95

5001–5500

0,94

1,00

5501–6000

1,00

1,06

6001 et plus

1,06

1,12

ii. Marchés francophones

[163] Comme la Commission l’a fait remarquer dans sa décision originale, les sociétés de gestion ont proposé de maintenir une réduction de 50 pour cent pour les marchés francophones[76]. La Commission a approuvé cette réduction[77].

[164] Nous faisons de même. Bien que nous conservons la réduction de 50 pour cent, elle sera appliquée à un taux de redevance différent, ce qui produira un montant exigible différent que dans la décision originale.

iii. Systèmes à faible puissance en clair, systèmes de distribution multipoints et petits systèmes de retransmission

[165] Par souci d’exhaustivité, nous remarquons que, dans la décision originale, le taux de redevance pour les systèmes à faible puissance en clair, les systèmes de distribution multipoint et les petits systèmes de retransmission a été fixé à 100 $ par année[78].

[166] Ces taux ne sont pas influencés par toute section de la décision originale qui a été annulée par la CAF. Ainsi, ils restent inchangés.

V. Conclusion

[167] Dans notre réexamen des questions que la CAF nous a retournées, nous concluons ce qui suit :

- il serait contraire au mandat de la Commission de ne pas apporter les corrections nécessaires en vue de fixer des taux de redevance justes et équitables;

- nous devrions utiliser toutes les données correctement, en nous écartant des calculs de la décision originale;

- un ajustement des profits de 10 pour cent est approprié pour les services spécialisés canadiens;

- un ajustement des profits de 25 pour cent est approprié pour les services spécialisés américains.

[168] Ainsi, nous avons pris une nouvelle décision sur les taux de redevance par mois et par abonné dans le Tarif pour la retransmission de signaux éloignés de télévision (2014–2018), comme suit :

Tableau 4 : Taux de redevance approuvés ($)

Locaux

Taux de redevance
pour

2014

Taux de redevance
pour

2015-2018

Jusqu’à 1500

0,49

0,55

1501–2000

0,54

0,60

2001–2500

0,60

0,66

2501–3000

0,66

0,72

3001–3500

0,71

0,77

3501–4000

0,77

0,83

4001–4500

0,83

0,89

4501–5000

0,89

0,95

5001–5500

0,94

1,00

5501–6000

1,00

1,06

6001 et plus

1,06

1.12

[169] Une réduction de 50 pour cent s’applique aux EDR pour les marchés francophones.

[170] Tous les autres taux de redevance et les modalités afférentes du Tarif pour la retransmission de signaux éloignés de télévision (2014–2018) homologué précédemment sont inchangés.

[171] La date à laquelle les paiements sont exigibles sera le 31 mars 2024.

[172] Le nouveau tarif homologué comprend un tableau des taux d’intérêt mis à jour.



[1] Bell Canada c Société de perception des droits d'auteur du Canada, 2021 CAF 148 [« décision de la CAF »].

[2] Tarif pour la retransmission de signaux éloignés de télévision, 2014-2018, CB-CDA 2019-056 [« décision originale »].

[3] Tarif pour la retransmission de signaux éloignés de télévision, 2014-2018 (tarif homologué) (3 août 2019), C Gaz Supplément Vol 153, No 31 [« tarif original »].

[4] Société de perception des droits d'auteur du Canada et al c Bell Canada et al, Cour d’appel fédérale (2021-07-22) (Jugement) [« jugement de la CAF »].

[5] Loi sur le droit d’auteur, LRC 1985, ch C-42, au para 31(2).

[6] Ibid à l’alinéa 31(2)d).

[7] Dans la décision originale supra note 1, et la décision de la CAF, supra note 4, les services spécialisés canadiens sont parfois nommés en fonction de leur désignation au CRTC comme des services de « Catégorie B ».

[8] Décision originale, supra note 1, aux para 419-424; Décision de la CAF, supra note 4, au para 24.

[9] Décision originale, supra note 1, au para 426; Décision de la CAF, supra note 4, aux para 25-26.

[10] Décision originale, supra note 1, aux para 428-431; Décision de la CAF, supra note 4, au para 27.

[11] À la date de la décision originale, les EDR étaient Bell Canada, Cogeco Cable inc., Rogers Communications inc, TELUS Communications inc. et Vidéotron G.P. Les données de Cogeco et de Videotron n’ont pas été utilisées dans le cadre de la décision originale.

[12] Les sociétés de gestion de la retransmission des signaux de télévision sont la Border Broadcasters, inc. (BBI), l’Association des droits des radiodiffuseurs canadiens (ARDC), la Société collective de retransmission du Canada (SCRC), l’Association du droit de retransmission canadien (ADRC), la Société de perception de droit d’auteur du Canada (SPDC), la Société de gestion collective de publicité directe télévisuelle inc. (SCPDT), la FWS Joint Sports Claimants inc. (FWS), la Société de perception de la ligue de baseball majeure du Canada inc. (LBM), la Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SOCAN).

[13] Décision de la CAF, supra note 4, au para 96.

[14] Décision de la CAF, supra note 4, au para 64.

[15] Décision de la CAF, supra note 4, aux para 71-72.

[16] Jugement de la CAF, supra note 4.

[17] Décision interlocutoire de la Commission CB-CDA 2022-038, 29 juin 2022.

[18] Ibid.

[19] Réponse des sociétés de gestion à la décision CB-CDA 2022-038, 29 juillet 2022; réponse des EDR à la décision CB-CDA 2022-038, 29 juillet 2022.

[20] Avis de la Commission CB-CDA 2023-006, 6 février 2023.

[21] Pièces EDR-22 (Bell), 28 (Shaw), 29 (Telus), 31 (Rogers).

[22] Pièce Sociétés de gestion-57, Annexe 3 (qui est une mise à jour des sociétés de gestion-3, Annexe B, Tableau 7).

[23] Pièce EDR-2A, Annexe C.

[24] Décision de la CAF, supra note 4, au para 96.

[25] Pièce EDR -2, Annexe C (Chipty).

[26] Réplique des sociétés de gestion à la réponse des EDR à l’Avis CB-CDA 2023-006, 26 mai 2023 au para 11.

[27] Décision de la CAF, supra note 4, au para 62, tel qu’il est cité par les sociétés de gestion dans leur réplique à la réponse des EDR à l’Avis CB-CDA 2023-006, 26 mai 2023, au para 16.

[28] Décision de la CAF, supra note 4, au para 64, tel qu’il est cité par les sociétés de gestion dans leur 2e réplique sur la compétence de la Commission, 26 juin 2023, aux para 15-19.

[29] 2e réplique supplémentaire des sociétés de gestion sur la compétence de la Commission, 26 juin 2023, au para 3.

[30] 2e réplique des EDR sur la compétence de la Commission de corriger les erreurs des données de paiements (13 juin 2023).

[31] 2e réplique des EDR sur la compétence de la Commission, 13 juin 2023, à la p 1.

[32] 2e réplique des EDR sur la compétence de la Commission, 13 juin 2023, à la p 4.

[33] Association canadienne des distributeurs et exportateurs de films c Société du droit de reproduction des auteurs, compositeurs et éditeurs au Canada (SODRAC) inc., 2014 CAF 235.

[34] Canada (Citoyenneté et Immigration) c Yansane, 2017 CAF 48.

[35] Loi sur le droit d’auteur, LRC 1985, ch C-42, article 66.501.

[36] Décision de la CAF, supra note 4, au para 82.

[37] Réponse des EDR à l’Avis CB-CDA 2023-006 (20 avril 2023), Annexe A au para 3.

[38] Avis de la Commission CB-CDA 2023-016, 3 avril 2023, Annexe C, onglet vi.

[39] Réplique des sociétés de gestion à la réponse des EDR concernant l’Avis CB-CDA 2023-006 (le 26 mai 2023) aux para 21-25.

[40] Décision originale, supra note 1, aux para 429-430.

[41] Décision de la CAF, supra note 4, au para 71.

[42] Pièce EDR-2 au para 24.

[43] Pièce EDR-2 au para 25.

[44] Pièce EDR-2A, Table 1.

[45] Décision originale, supra note 1, aux para 428-430.

[46] Pièce EDR-2 au para 25.

[47] Pièce EDR-2 au para 25.

[48] Voir par ex. Association de l'industrie canadienne de l'enregistrement c. Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, 2010 CAF 322 aux para 28-31.

[49] Contre-interrogatoire de Mme Chipty, Transcriptions de la Commission du droit d’auteur vol 11 (Très confidentiel), aux pp 1051-1052. L’énoncé dans la décision originale, supra note 1, au para 307 (« aucun des services spécialisés américains et des signaux éloignés américains n’est intégré verticalement ») se rapportait à l’intégration verticale à une EDR canadienne.

[50] Ils ont été mentionnés dans la réplique de l’EDR à la réponse des sociétés de gestions concernant l’Avis CB-CDA 2016-088 (pages jointes de Comcast 2013 10K.pdf).

[51] Transcriptions de la Commission du droit d’auteur, vol 10 (Public), p 1331, lignes 9-24.

[52] Pièce EDR-2 au para 1.

[53] Avis de la Commission CB-CDA 2016-088, 27 octobre 2016.

[54] Ibid p 1.

[55] Décision originale, supra note 1, au para 436.

[56] Lettre des sociétés de gestion à la Commission, 3 novembre 2016, à la p 1.

[57] Avis de la Commission CB-CDA 2016-094, 18 novembre 2016, à la p 3.

[58] Réponse des sociétés de gestion aux Avis 2016-094 et 2016-088 (9 décembre 2016).

[59] Réponse des sociétés de gestion à l’Avis CB-CDA 2016-088, 9 décembre 2016, au para 15.

[60] Un formulaire 10-K est un document dont la Securities and Exchange Commission (É.-U.) exige toutes les entreprises publiques le dépôt chaque année. Entre autres, il donne des détails sur les revenus, l’actif et le passif d’une entreprise pour l’année précédente.

[61] Réponse des sociétés de gestion à l’Avis CB-CDA 2016-088, 9 décembre 2016, aux para 19-20.

[62] Réplique des EDR à la réponse des sociétés de gestion concernant l’Avis CB-CDA 2016-088, 22 décembre 2016, aux para 21-28.

[63] Réponse des sociétés de gestion à l’Avis CB-CDA 2016-088, 9 décembre 2016, au para 16.

[64] Extrait de l’Avis CB-CDA 2016-094, Tableau 2.

[65] Réponse des sociétés de gestion à l’Avis CB-CDA 2016-088, 9 décembre 2016, au para 27.

[66] Réponse des sociétés de gestion à l’Avis CB-CDA 2016-088, 9 décembre 2016, au para 35.

[67] Réplique des EDR à la réponse des sociétés de gestion à l’Avis CB-CDA 2016-088, 22 décembre 2016, au para 33.

[68] Réplique des EDR à la réponse des sociétés de gestion concernant l’Avis CB-CDA 2016-088, 22 décembre 2016, au para 31.

[69] Commentaires des EDR sur l’Avis CB-CDA 2023-006; Commentaires des sociétés de gestion sur l’Avis CB-CDA 2023-006.

[70] Commentaires des EDR sur l’Avis CB-CDA 2023-006, 20 avril 2023, à la p 1.

[71] Commentaires des EDR sur l’Avis CB-CDA 2023-006, 20 avril 2023, à la p 8.

[72] Décision originale, supra note 1, aux para 420-424.

[73] Décision originale, supra note 1, au para 452.

[74] Décision originale, supra note 1, aux para 451-453; Décision de la CAF, supra note 4, au para 30.

[75] Décision de la CAF, supra note 4, aux para 85-95.

[76] Décision originale, supra note 1, au para 34.

[77] Décision originale, supra note 1, au para 459.

[78] Tarif original, supra note 1, arts 4 et 5.

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