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Commission du droit d’auteur
Canada

Date

2024-09-20

Référence

Tarif 22.D.3 de la SOCAN (2014-2024), 2024 CDA 6

Commissaires

L’honorable Luc Martineau

Katherine Braun

Projets de tarif

examinés

Tarif 22.D de la SOCAN – Internet – Autres utilisations de la musique – Contenu audiovisuel (2014, 2015) [applicable aux services audiovisuels alliés]

Tarif 22.D.1 de la SOCAN – Internet – Autres utilisations de la musique – Contenu audiovisuel (2016, 2017, 2018) [applicable aux services audiovisuels alliés]

Tarif 22.D.3 de la SOCAN – Internet – Autres utilisations de la musique – Services audiovisuels alliés à des programmations et des entreprises de distribution (2019-2020, 2021-2023, 2024-2026)

Homologation des projets de tarif
sous le titre
Tarif 22.D.3 de la SOCAN – Services audiovisuels alliés en ligne (2014-2024)

MOTIFS DE LA DÉCISION

I. SURVOL

[1] La Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SOCAN) administre les droits d’exécution en public et de communication au public par télécommunication des œuvres musicales de son répertoire.

[2] La SOCAN a déposé auprès de la Commission les projets de tarif suivants :

  • Tarif 22.D de la SOCAN – Internet – Autres utilisations de la musique – Contenu audiovisuel (2014, 2015)
  • Tarif 22.D.1 de la SOCAN – Internet – Autres utilisations de la musique – Contenu audiovisuel (2016, 2017, 2018)
  • Tarif 22.D.3 de la SOCAN – Internet – Autres utilisations de la musique – Services audiovisuels alliés à des programmations et des entreprises de distribution (2019-2020, 2021-2023, 2024-2026)

[3] Les projets de tarif visent la communication par Internet d’œuvres musicales faisant partie du répertoire de la SOCAN dans le cadre de programmations audiovisuelles. Comme il sera décrit en détail ci-dessous, seules les sections des projets de tarif pour la période de 2014 à 2018 s’appliquant aux communications effectuées par les services audiovisuels alliés nous occupent. En outre, seule la période 2024 du projet de tarif pour les années 2024 à 2026 se trouve devant la Commission.

[4] Pour les raisons suivantes, nous homologuons les projets de tarif des fournisseurs de services audiovisuels alliés, tels qu’ils ont été modifiés dans le texte présenté conjointement et avec des modifications supplémentaires, analysées ci-après. Nous nous fondons sur les derniers tarifs homologués comme points de référence de ce qui est juste et homologuons les projets de tarif sous un seul titre, Tarif 22.D.3 de la SOCAN (2014-2024) (le « Tarif »).

[5] Le Tarif établit un taux de redevances principal de 1,9 % des recettes applicables et un taux de redevances de 0,8 % des recettes applicables pour faible utilisation. Si le fournisseur de service[1] impose des redevances par émission, il versera au moins 1,3 ¢ par émission communiquée. Si le fournisseur de service vend des abonnements aux utilisateurs finaux, il versera au moins 7,5 ¢ par abonné. Enfin, dans le cas où le fournisseur de service n’a perçu aucun revenu au cours d’une année particulière, les redevances sont de 15 $.

II. CONTEXTE

A. Historique procédural

[6] Bien que les projets de tarif pour 2014 à 2018 comprennent généralement tous les fournisseurs de services audiovisuels en ligne, la présente instance examine un tarif pour un ensemble plus restreint d’utilisateurs : les fournisseurs de service qui sont alliés avec des télédiffuseurs conventionnels et des entreprises de distribution.

[7] Le 4 juin 2018, la SOCAN, l’Association canadienne des radiodiffuseurs (l’« ACR ») et un groupe d’entreprises de distribution de radiodiffusion (se présentant comme les « EDR »)[2] ont déposé un texte sous forme de tarif (le « texte présenté conjointement »). Ensemble, ils ont demandé à la Commission d’homologuer un tarif pour les fournisseurs de services audiovisuels alliés, intitulé Tarif 22.D.3 de la SOCAN, qui portait sur les années 2007 à 2018 et fondé sur le texte présenté conjointement.

[8] En fonction de cette demande, la Commission a divisé les sections des projets de tarif visées dans le texte présenté conjointement en une instance distincte intitulée « Tarif 22.D.3 de la SOCAN – Services audiovisuels alliés (2007-2018) »[3]. Cette nouvelle instance ne comprenait que les sections des projets de tarif « en ce qui concerne les services audiovisuels alliés »[4].

[9] Le 24 février 2023, la Commission a homologué le Tarif 22.D.3 de la SOCAN (2007-2013)[5]. Cette homologation laissait subsister les projets de tarif pour les années 2014-2018.

[10] L’ACR[6] et les EDR[7] se sont retirées comme participantes à l’instance conformément à leur entente avec la SOCAN. Malgré leur retrait, l’ACR et les EDR ont continué d’être actives dans l’instance en appuyant l’entente et le texte présenté conjointement.

[11] GoodLife Fitness, Stingray Digital Group, Apple et Apple Canada, ainsi que Sirius XM Canada ont déposé des oppositions au projet de tarif pour les années 2019-2020. Stingray Digital Group et la Société Radio-Canada ont déposé des oppositions au projet de tarif 2021-2023. Aucun ne reste en tant que participant à la présente instance, chacun s’étant retiré ou étant réputé s’être retiré[8].

[12] Les projets de tarif de 2019-2023 comprennent le même libellé que celui du texte présenté conjointement. Le 13 mars 2023, la Commission a ajouté les projets de tarif de 2019-2023 à l’instance et a ordonné à la SOCAN, l’ACR et les EDR de déposer des observations à l’appui du texte présenté conjointement[9]. La SOCAN a déposé des observations conjointes le 17 avril 2023[10]. Dans le cadre de ces observations, la SOCAN a demandé à la Commission d’émettre une ordonnance de confidentialité avant le dépôt du document contenant leur entente sous-jacent (l’« entente »). La Commission a émis l’ordonnance de confidentialité 2023-034[11] le 30 mai 2023 et la SOCAN a déposé l’entente le 31 mai 2023.

[13] Le 21 décembre 2023, nous avons exprimé des opinions préliminaires sur deux questions relatives au libellé du texte présenté conjointement et avons demandé à la SOCAN, à l'ACR et aux EDR de fournir des révisions relatives à ces questions[12]. La SOCAN a déposé un texte révisé le 31 janvier 2024.

[14] Le 16 mai 2024, nous avons demandé à la SOCAN, à l'ACR et aux EDR de commenter une ébauche du tarif, et plus particulièrement un libellé qui visait à clarifier une ambiguïté potentielle[13]. La SOCAN, l'ACR et les EDR ont déposé des commentaires distincts le 31 mai 2024[14].

[15] Le 28 juin 2024, la Commission a reçu une demande conjointe de la SOCAN, de l'ACR et des EDRs visant à étendre l’application du texte présenté conjointement jusqu'en 2024[15]. Le projet de tarif 2024-2026 contient des changements aux taux de redevances et à d'autres modalités, auxquels l'ACR et les EDRs sont les seules à s'opposer. Nous avons accordé cette demande le 11 juillet 2024[16], en joignant le projet de tarif pour 2024 à l’instance actuelle. Le projet de tarif pour 2025-2026 est séparé de celui de 2024 et sera examiné dans le cadre d'une instance ultérieure.

B. Le texte présenté conjointement

[16] Le texte présenté conjointement fixe les taux de redevances pour le droit de communiquer au public par télécommunication les œuvres du répertoire de la SOCAN « dans le cadre de l’exploitation d’un service audiovisuel qui est allié à un radiodiffuseur ou un service EDR licencié en vertu du tarif 2.A ou du tarif 17 de la SOCAN ».

[17] Dans le texte présenté conjointement, le « service audiovisuel allié » est défini comme :

un service audiovisuel analogue et exploité conjointement par ou en soutien aux opérations d’un service conventionnel ou d’une EDR et dont les contenus sont duplicatifs, complémentaires ou adjoints aux contenus offerts par le service conventionnel ou l’EDR.

[18] Ainsi, le service audiovisuel peut être fourni par un service conventionnel ou une EDR (ces deux expressions étant définies) ou par une entité étroitement associée. Dans ce dernier cas, le texte présenté conjointement permet explicitement à l'utilisateur d'autoriser la communication au public par télécommunication aux fins de l'exploitation d'un service allié.

[19] Le texte présenté conjointement fixe un taux de redevance principal de 1,9 % de l’assiette tarifaire, celle-ci étant fonction du modèle d'entreprise de l'utilisateur :

  1. pour un service qui perçoit des frais par émission des utilisateurs finaux, l’assiette tarifaire est constituée des montants versés par les utilisateurs finaux canadiens pour les écoutes;
  2. pour un service qui offre des abonnements à ses utilisateurs finaux, l’assiette tarifaire est constituée des montants payés par les abonnés canadiens;
  3. pour un service avec recettes d’Internet dans le cadre de ses communications d'œuvres audiovisuelles, l’assiette tarifaire est constituée des recettes canadiennes liées aux activités audiovisuelles par Internet.

[20] Les services dont les transmissions d’œuvres audiovisuelles sont composées de moins de 20 % d'œuvres musicales du répertoire de la SOCAN versent un taux de redevance de 0,8 %, appliqué aux mêmes assiettes tarifaires que celles mentionnées ci-dessus. Lorsque des redevances minimales s'appliquent,

  1. les services qui perçoivent des frais par émission sont assujettis à un minimum de 1,3 ¢ par émission communiquée;
  2. les services qui offrent des abonnements aux utilisateurs finaux sont assujettis à un minimum de 7,5 ¢ par abonné;
  3. les services sans recettes sont assujettis à une redevance annuelle de 15 $.

C. Les derniers tarifs homologués

[21] Dans la présente instance, deux tarifs peuvent être considérés comme les derniers à être homologués. Pour les membres de l'ACR, il s’agit du Tarif 22.D.3 de la SOCAN (2007-2013)[17]. Pour tous les autres fournisseurs de services alliés, le dernier tarif homologué est le Tarif 22.D.1 de la SOCAN (2007-2013)[18].

[22] Les deux tarifs prévoient un taux de redevance principal de 1,9 % des recettes pertinentes provenant des redevances par émission, des abonnements et d'autres sources liées à Internet. Pour le Tarif 22.D.1 de la SOCAN (2007-2013), ce taux a été appliqué pour la première fois en 2011. Pour le Tarif 22.D.3 de la SOCAN (2007-2013), le taux s'appliquait à l'ensemble de la période. Le texte présenté conjointement reflète le taux de redevance et l’assiette tarifaire des deux derniers tarifs homologués.

III. QUESTIONS

[23] Nous relevons les cinq questions suivantes :

  1. Les références à d'autres tarifs dans le texte présenté conjointement sont-elles suffisamment claires pour que les fournisseurs de service puissent facilement déterminer s'ils se qualifient en tant qu'utilisateurs?
  2. Le texte présenté conjointement fournit-il des indications claires sur les situations dans lesquelles les fournisseurs de service ne peuvent pas faire la distinction entre les utilisations du Tarif 22.D.3 et celles pour lesquelles d'autres tarifs s'appliquent?
  3. Les derniers tarifs homologués sont-ils des points de référence utilisables de ce qui pourrait être juste?
  4. Le tarif devrait-il préciser quand le « service » se rapporte à une entité ou aux actions que l'entité entreprend?
  5. D'autres modifications devraient-elles être apportées au libellé du tarif?

IV. ANALYSE

A. Question 1 : Les références à d’autres tarifs dans le texte présenté conjointement sont-elles suffisamment claires pour que les fournisseurs de service puissent facilement déterminer s’ils se qualifient en tant qu’utilisateurs?

[24] Une plus grande clarté concernant les références à d'autres tarifs dans le texte présenté conjointement est nécessaire et nous modifions donc ces références pour améliorer la clarté, la précision et la finalité.

[25] Le texte présenté conjointement fait référence à d'autres tarifs de deux manières. Premièrement, il fait référence à deux reprises aux Tarifs 2.A et 17 de la SOCAN lorsqu'il définit le champ d’application du tarif. Cela se produit dans la section sur l’Application (au paragraphe 2.1) et à nouveau dans la définition de « Services conventionnels » (qui fait partie de la définition de « Service audiovisuel allié » dans les paragraphes 3.1(2) et 3.1(11)). Il en résulte une accumulation de références où le tarif s'applique aux services conventionnels qui sont « assujettis aux [Tarifs 2.A et 17] » et qui sont également alliés à un « service de radiodiffusion ou d'EDR autorisé conformément aux [Tarifs 2.A et 17] ». Ces références accumulées rendent l'interprétation du champ d’application difficile.

[26] Deuxièmement, le texte présenté conjointement exclut des activités en faisant référence à des groupes de tarifs (dans le paragraphe 2.2) : Tarifs 2.A, 17, 22.A, 22.D.1, 22.D.2, 22.G. Nous estimons que ces références manquent de finalité, car elles se réfèrent à des groupes de tarifs dont le contenu pourrait changer à l'avenir[19].

[27] À notre demande[20], la SOCAN, l'ACR et les EDR ont proposé un nouveau libellé dans la section sur l’Application, les définitions de service audiovisuel allié et de service conventionnel, et les références à d'autres tarifs.

[28] Nous estimons que ces descriptions sont appropriées et apportons donc les modifications suivantes. Premièrement, les références aux Tarifs 2.A et 17 sont supprimées de l'article 2.1 dans la section sur l’Application. Les définitions de « service audiovisuel allié » et de « service conventionnel » sont également modifiées. Désormais, les Tarifs 2.A et 17 ne sont référencés que dans la définition d'un service conventionnel. Deuxièmement, toutes les références aux tarifs sont remplacées par des descriptions. Par exemple, les références au Tarif 2.A ont été remplacées par : « les communications au public par télécommunication par une station de télédiffusion, telles que celles visées par le Tarif 2.A de la SOCAN (2009-2013) ». Finalement, pour éviter de faire référence aux autres tarifs - y compris ceux qui ne couvrent pas des activités similaires, ainsi que pour éviter les références circulaires et ambulatoires, nous supprimons la phrase « d'autres tarifs applicables de la SOCAN, homologués ou proposés, y compris “ dans l’article 2.2[21].

[29] Ces modifications favorisent la clarté et assurent la précision et la finalité dans le champ d’application du tarif. Le retrait des références accumulées aidera les fournisseurs de services à interpréter le tarif de manière à déterminer s’ils sont considérés comme des utilisateurs. Comme les descriptions fournies comprennent toujours des références à des groupes de tarifs, nous avons modifié ces références de manière qu’elles ne s’appliquent qu’à des tarifs homologués particuliers, conformément à l’Avis de pratique sur le dépôt de projets de tarif.

B. Question 2 : Le texte présenté conjointement fournit-il des indications claires sur les situations dans lesquelles les fournisseurs de service ne peuvent pas faire la distinction entre les utilisations du tarif 22.d.3 et celles pour lesquelles d’autres tarifs s’appliquent?

[30] Nous ajoutons un article au tarif pour préciser comment les fournisseurs de service devraient verser les redevances et déposer leurs rapports lorsqu’ils ne surveillent pas les activités en ligne séparément des activités de radiodiffusion conventionnelles.

[31] Notre analyse nous permet d’identifier la possibilité de situations où il est difficile de savoir si les Tarifs 2.A, 17 ou 22.D.3 s’appliquent à une utilisation particulière. Nous avons demandé à la SOCAN, à l’ACR et aux EDR de présenter des observations sur ce chevauchement potentiel. Elles ont présenté ce qui suit :

Les radiodiffuseurs et les EDR regroupent souvent l’accès à leurs services « par contournement » et « sur demande » avec leurs offres de services traditionnels. Le « chevauchement » entre les tarifs 2A, 17 et 22D3 [sic] reconnaît que – d’un point de vue comptable – les radiodiffuseurs et les EDR ne surveillent pas séparément les abonnés de leurs services par contournement et de télévision sur demande lorsqu’ils sont ainsi vendus. Les seuls abonnés recensés séparément sont ceux qui achètent leurs services par contournement et de télévision sur demande séparément d’un forfait traditionnel par câble. Les dispositions dans l’entente avec les services alliés AV permettent aux radiodiffuseurs et aux EDR de faire rapport de leurs abonnés regroupés sous un seul tarif de leur choix (17 ou 2A) [sic], à condition qu'ils englobent tous les utilisateurs et tous les revenus, et qu’ils rapportent avec précision les ratios d’utilisation en ligne[22] [traduction].

[32] Nous n’avons pas de raison de remettre en question l’explication fournie, qui concorde avec notre compréhension des complexités du secteur. Toutefois, le texte présenté conjointement n’aborde pas cette possibilité. Si un tarif était homologué sans que le texte présenté conjointement soit modifié, les utilisateurs ne seraient pas au courant de la possibilité de chevauchement ou de dispositions de l’entente permettant de faire rapport sous un seul tarif.

[33] Les utilisateurs ne devraient payer et déposer des rapports que dans le cadre d'un seul tarif pour une utilisation donnée et le texte du tarif devrait comprendre toutes les informations nécessaires pour qu’un utilisateur puisse déterminer quelles utilisations devraient être comptabilisées et communiquées dans le cadre de ce tarif.

[34] Ainsi, nous avons demandé à la SOCAN, à l’ACR et aux EDR de fournir un nouveau libellé qui résout ce problème. Ils ont déposé le texte suivant :

2.3 Les redevances pour les utilisations visées par ce tarif devront être versées par le service audiovisuel allié selon les modalités de ce tarif ou par son service conventionnel allié selon les modalités du tarif de la SOCAN applicable à ce service conventionnel à condition qu’en ce faisant :

(1) toutes les utilisations et les revenus référencés dans ce tarif soient comptabilisés et versés,

(2) l’assiette tarifaire, le cas échéant, soit déterminée et communiquée à la SOCAN de manière appropriée,

(3) toutes les redevances exigibles de la part des services audiovisuels alliés et les services conventionnels dans le cadre du présent tarif et les autres tarifs applicables soient versées [traduction].

[35] Nous modifions ce texte de manière qu’il décrive le problème, clarifie que les utilisateurs qui s’en prévalent sont exemptés et précise ce qui est exempté avec des références aux autres articles du tarif. Enfin, nous supprimons le libellé du paragraphe 2.3(3) selon lequel l’exemption dépendrait de la conformité de l’utilisateur aux autres tarifs. Le texte révisé se lit comme suit :

2.3 Si un service audiovisuel allié ou son service conventionnel allié ne surveillent pas les abonnés à ses diffusions d’œuvres audiovisuelles sur Internet séparément des abonnés à ses diffusions de contenu audiovisuel par télédiffusion ou par d’autres moyens de transmission, le service est exempté de versement de redevances en vertu de l’alinéa 4.1(1)b) ou de l’alinéa 4.2(2)b), à condition que :

a) toutes les utilisations et tous les montants versés par les abonnés canadiens, mentionnés à l’alinéa 4.1(1)b) ou à l’alinéa 4.2(2)b) soient comptabilisés et versés dans le cadre du tarif approprié pour les services conventionnels, soit le Tarif 2.A de la SOCAN (2009-2013) ou le Tarif 17 de la SOCAN (2009-2013);

b) l’assiette tarifaire, le cas échéant, est déterminée et communiquée à la SOCAN de manière appropriée;

c) toutes les redevances qui seraient autrement exigibles par le service audiovisuel allié ou le service conventionnel en fonction des alinéas 4.1(1)a), 4.1(1)c), 4.2(2)a) et 4.2(2)c) sont versées.

[36] Avec ces modifications, nous concluons que cet article traite de manière appropriée le scénario où les fournisseurs de service ne peuvent pas faire la distinction entre les utilisations et nous modifions donc le tarif en conséquence. Le nouveau libellé offre une orientation sur la manière dont les utilisateurs peuvent communiquer leurs utilisations et régler les redevances. Il précise que les utilisateurs n’ont à payer que sous un seul tarif. Cette modification reflète les réalités du marché et assure une orientation claire pour les utilisateurs.

C. Question 3 : Les derniers tarifs homologués sont-ils des points de référence utilisables de ce qui pourrait être juste?

[37] Nous concluons que les derniers tarifs homologués sont des points de référence utilisables de ce qui pourrait être juste.

[38] Souvent, le dernier tarif homologué est un point de départ pour les analyses de la Commission, car il constitue un point de référence de ce qui pourrait être juste et équitable[23]. En partant de l’hypothèse que le dernier tarif homologué est juste pour la période pour lequel il a été approuvé, une raison de se demander si le dernier tarif homologué constitue un point de référence approprié pour la période suivante est de savoir si des changements ont eu lieu dans le marché visé[24]. Lorsque les sociétés de gestion et les utilisateurs conviennent de maintenir le statu quo, leur entente peut servir de preuve qu’ils ne pensent pas que le marché a changé de manière à avoir un effet sur les taux[25].

[39] Dans la présente instance, les modalités comprises dans le texte présenté conjointement reflètent les derniers tarifs homologués. Comme il a été décrit précédemment, deux tarifs peuvent être considérés comme les derniers homologués : le Tarif 22.D.3 de la SOCAN (2007-2013)[26] [pour les membres de l’ACR] et le Tarif 22.D.1 de la SOCAN (2007-2013) [27] [pour les autres utilisateurs]. Ces tarifs comprennent la même structure de redevances et les mêmes taux que celle du texte présenté conjointement. Dans le cas du Tarif 22.D.3 de la SOCAN (2007-2013), cette similarité est attribuable au fait que la décision avait aussi été fondée sur le texte présenté conjointement qui vise la période de 2007 à 2018. Du fait que l’ACR et les EDR ont convenu de taux de redevances maintenant le statu quo pour cette période, nous déduisons qu’ils ne pensent pas que le marché a changé de manière à avoir un effet sur les taux.

[40] Par ailleurs, les autres tarifs de la SOCAN liés à la télévision, le Tarif 2.A de la SOCAN (2009-2013) et le Tarif 17 de la SOCAN (2009-2013) comprennent aussi le même taux principal de redevances que le texte présenté conjointement. La similitude entre le texte présenté conjointement et ces autres tarifs liés à la télévision découle aussi de l’entente, où la SOCAN, l’ACR et les EDR conviennent de maintenir le statu quo pour les Tarifs 2.A et 17, y compris les taux de redevances. Le taux principal de 1,9 % dans ces tarifs a été appliqué pour la première fois en 2002[28]. Le fait que ces taux sont stables pour l’ensemble des tarifs liés à la télévision de la SOCAN sur une période de plus de 20 ans appuie encore davantage notre conclusion que le marché n’a pas changé.

[41] Ce statu quo est appuyé par la majorité du secteur de la télévision. L’ACR affirme qu’elle représente la grande majorité des télédiffuseurs commerciaux et des fournisseurs de services discrétionnaires actifs au Canada[29]. Les EDR soutiennent en plus qu’elles représentent plus de 95 % de tous les abonnés du Canada[30]. Bien que nous ne tirons pas de conclusion à savoir si l’ACR et les EDR peuvent représenter les intérêts de tous les utilisateurs, nous acceptons leurs observations selon lesquelles elles représentent la majorité du secteur de la télévision.

[42] Compte tenu de ces preuves solides selon lesquelles le marché n’a pas changé, nous adoptons les derniers tarifs homologués comme des points de référence. En appliquant ces points de référence, nous concluons que les taux de redevances et les modalités connexes dans le texte présenté conjointement sont justes et équitables.

D. Question 4 : Le tarif devrait-il préciser quand le « service » se rapporte à une entité ou aux actions que l'entité entreprend?

[43] Le terme « service » revient fréquemment dans l’ensemble du texte présenté conjointement. Lu dans ce contexte, ce terme est ambigu, puisqu’il se rapporte à une entité (c.-à-d. les utilisateurs) ou les mesures prises par une entité (c.-à-d. les utilisations). Nous homologuons le tarif sans modifier le mot parce que nous ne savons pas si l’ambiguïté est source de confusion pour les utilisateurs. À l’inverse, la SOCAN, l’ACR et les EDR indiquent qu’un changement au texte présenté conjointement susciterait de la confusion dans leurs transactions.

[44] Dans le contexte de la radio et de la télévision, le terme « service » peut être utilisé de plusieurs façons. Il peut faire référence aux offres de contenu, comme les « services de télévision » auxquels on peut s’abonner. Toutefois, le terme peut aussi faire référence à l’entité offrant le contenu, c’est-à-dire le « fournisseur de service ».

[45] Le texte présenté conjointement semble utiliser les deux sens du terme. Par exemple, les deux sens semblent paraître dans la définition du mot « Utilisation » — le premier se rapportant à l’offre de contenu et le second se rapportant à l’entité offrant le service. Il n'est pas clair, par exemple, comment l'utilisation d'une entité permettrait à une personne d’entendre une œuvre audiovisuelle (selon la définition d’« utilisation AV ») :

« utilisation » désigne l’utilisation d’un service mesurable à l’aide de mesures d’utilisation raisonnables communément ou habituellement utilisées par le service; (“Usage”)

« utilisation AV » désigne l’utilisation qui permet à une personne d’entendre une œuvre audiovisuelle; (“AV Usage”).

[46] La Commission a soulevé des inquiétudes à propos d’ambiguïtés similaires avec le terme « service » dans Services de musique en ligne (2010-2013)[31]. Comme il a été souligné dans cette décision, un « fournisseur de service » pourrait offrir de multiples « services », ce qui rend la distinction particulièrement importante pour identifier clairement les obligations et empêcher le chevauchement ou la duplication[32].

[47] Nous avons demandé à la SOCAN, à l’ACR et aux EDR de commenter un libellé qui permettrait de résoudre cette ambiguïté. D’après eux, le changement est inutile et introduirait de l’incertitude et plus de confusion. Par ailleurs, et sans préjudice pour ses observations opposant tout changement, la SOCAN a présenté des révisions additionnelles au texte du tarif qui imposaient des redevances minimales et des obligations en matière de présentation de rapports par service. L’ACR et les EDR s’opposent à ces révisions en indiquant que de tels changements pourraient augmenter les redevances minimales et les obligations d’établissement de rapports (en imposant des obligations par service plutôt que par fournisseur de service).

[48] Bien que, d’après nous, le texte du tarif soit réellement ambigu, nous retenons tout de même le libellé du texte présenté conjointement parce qu’il est possible que l’ambiguïté ne suscite pas de confusion dans le secteur et nous ne savons pas si les utilisateurs du tarif trouveraient que le terme prête à confusion.

[49] L’ACR et les EDR soulignent qu’elles fonctionnent depuis plus de six ans sans problème et qu’elles comprennent que l’expression « services audiovisuels alliés » vise l’entité plutôt que l’activité. Nous reconnaissons que la SOCAN, l’ACR et les EDR ont négocié cette entente en fonction d’une compréhension commune de l’expression. Bien que l’opposition exprimée par l’ACR et les EDR puisse souligner les limites de cette entente et la nécessité de plus de clarté, les parties semblent avoir pu fonctionner sans que cette question ne soit un enjeu.

[50] Par ailleurs, nous ne savons pas si les utilisateurs de ce tarif trouveraient que l’expression prête à confusion. Compte tenu de l’entente entre la SOCAN, l’ACR et les EDR, il est possible que les membres signataires de l’ACR et des EDR ne seraient pas des utilisateurs de ce tarif en fonction de l’article 74 de la Loi sur le droit d’auteur. Si les membres de l’ACR et des EDR ne le sont pas, le dossier contient peu d’information sur d’autres utilisateurs du tarif. Bien que ces utilisateurs puissent être moins sophistiqués et puissent ne pas pouvoir profiter de la compréhension des expressions utilisées par la SOCAN, l’ACR et les EDR, nous ne disposons pas de suffisamment d’information qui pourrait soutenir toute hypothèse sur ces points.

E. Question 5 : D'autres modifications devraient-elles être apportées au libellé du tarif?

[51] Nous modifions le texte présenté conjointement pour refléter le libellé du Tarif 22.D.3 de la SOCAN (2007-2013). Quand la Commission a homologué ce tarif, elle a modifié le libellé du texte présenté conjointement pour clarifier trois points : le champ d’application du tarif (article 2.1), les dispositions sur la faible utilisation (articles 4.2 et 5.2) et les références au terme « licence », notamment pour éviter que le Tarif ne soit considéré comme une licence.

[52] Bien que la Commission ait retiré certaines références au terme « licence » dans le Tarif 22.D.3 de la SOCAN (2007-2013), elle a décidé de ne pas modifier d’autres références au terme[33]. Plus particulièrement, la Commission a retenu le terme « licence » lorsqu’il décrit l’utilisation d’œuvres protégées par droit d’auteur pour laquelle une autorisation de la SOCAN serait nécessaire pour éviter une violation.

[53] En retenant ces termes, la Commission a accepté l’argument de la SOCAN selon lequel l’utilisation d’un terme différent pourrait entraîner des conséquences imprévues. La Commission a aussi accepté les observations de la SOCAN selon lesquelles elle est le propriétaire ou titulaire exclusif des droits pour des œuvres en cause, qu’une licence est nécessaire pour utiliser ces œuvres et que le terme « licence » comporte un sens juridique bien compris.

[54] Nous effectuons ces modifications pour traiter des trois mêmes points dans le cadre de la présente instance, compte tenu du fait que nous utilisons le Tarif 22.D.3 de la SOCAN (2007-2013) comme point de référence de ce qui est juste. Nous retenons aussi les mêmes références au terme « licence » que celles contenues dans le dernier tarif homologué pour éviter des conséquences imprévues et en reconnaissant le rôle de la SOCAN dans l’attribution de licences d’œuvres musicales.

[55] Nous concluons aussi que la SOCAN, l’ACR et les EDR appuient ces modifications du fait qu’elles étaient incluses dans la version révisée du texte présenté conjointement et déposé le 31 janvier 2024[34].

V. DÉCISION

[56] Pour les raisons susmentionnées, nous homologuons les projets de tarif pour les fournisseurs de services audiovisuels alliés, tels qu’ils ont été modifiés dans le texte présenté conjointement et avec des modifications supplémentaires.

[57] Nous approuvons un taux de redevances principal de 1,9 % des revenus pertinents et un taux de redevances pour faible utilisation de 0,8 % des revenus correspondants. Si le fournisseur de service impose des frais par émission, il versera au moins 1,3 ¢ par émission communiquée. Si le fournisseur de service vend des abonnements à des utilisateurs finaux, il versera au moins 7,5 ¢ par abonné. Enfin, si le fournisseur de service n’a réalisé aucun revenu au cours d’une année, les redevances sont de 15 $.

[58] Dans les sections sur l’Application et la Définition, nous avons remplacé les références à d’autres tarifs par des descriptions des tarifs auxquels il est fait référence. Nous avons aussi retiré les références « accumulées » aux Tarifs 2.A et 17 dans la section sur l’Application. Nous ajoutons une clause dans la section sur l’Application qui précise comment les utilisateurs ne faisant pas la distinction entre les utilisations de la télévision en ligne et conventionnelles devraient verser les redevances et faire rapport de ces utilisations.

[59] Nous homologuons les projets de tarif sous le titre Tarif 22.D.3 de la SOCAN – Services alliés audiovisuels en ligne (2014-2024).



[1] La question 4, ci-après, présente une analyse de l’ambiguïté du terme « service », tel qu’il est utilisé dans le tarif. Compte tenu de cette ambiguïté et afin d’assurer le plus de précision possible, nous utilisons « fournisseur de service » dans ces raisons lorsque nous faisons référence aux entités. Notre seule exception à cette pratique a lieu lorsque nous citons les dépôts de la SOCAN, de l’ACR et des EDR.

[2] Le groupe des EDR est composé de Bell Canada, Bragg Communications Inc. (faisant affaire sous le nom d’Eastlink), Rogers Communications Canada Inc., Cogeco Communications Inc., Quebecor Media Inc., Telus Communications Company et l’Alliance canadienne des systèmes de communications.

[3]Ordonnance de la Commission CB-CDA 2021-047, 22 septembre 2021.

[4] Ibid à la p 2.

[5] Tarif 22.D.3 de la SOCAN – Services audiovisuels alliés à des programmations et des entreprises de distribution (2007-2013) 2023 CB-CDA 1 (24 février 2024) (où la Commission a homologué ces autres projets de tarif pour 2007-2013 en fonction du texte présenté conjointement). [Tarif 22.D.3 de la SOCAN (2007-2013)]

[6] Courriel de Kathleen Simmons, avocate de l’ACR « L’ACR retire son opposition à divers tarifs de la SOCAN », 18 juillet 2018.

[7] Courriel de Jay Kerr-Wilson, avocat du groupe des EDR, « En ce qui concerne le projet de courriel à la Commission demandant l’homologation de 22D3 (2007-2018) » (19 juillet 2018).

[8] Voir Décision interlocutoire de la Commission CB-CDA 2023-013, 13 mars 2023, et Ordonnance de la Commission CB-CDA 2023-015, 28 mars 2023 (sur la situation des opposants et des opposants n’ayant pas répondu et qui étaient réputés ne plus participer à l’instance).

[9] Ibid.

[10] Observations conjointes de la SOCAN, de l’ACR et des EDR « En ce qui concerne la demande liée à l’ordonnance de confidentialité et observations à l’appui du texte présenté conjointement », 17 avril 2023, » [« observations conjointes sur le TPC »]

[11]Ordonnance de la Commission CB-CDA 2023-034, 30 mai 2023.

[12]Ordonnance de la Commission CB-CDA 2023-067, 21 décembre 2023.[CB-CDA 2023-067]

[13]Avis de la Commission CB-CDA 2024-035, 16 mai 2024.

[14]Réponse de la SOCAN à l’avis CB-CDA 2024-35, 31 mai 2024; Réponse de l’ACR et des EDR à l’Avis CB-CDA 2024-035, 31 mai 2024.

[15] Réponse de la SOCAN à l’ordonnance CB-CDA 2024-042, 28 juin 2024.

[16] Décision interlocutoire de la Commission CB-CDA 2024-057, 11 juillet 2024.

[17] Voir Tarif 22.D.3 de la SOCAN (2007-2013) [Ordonnance sur la compétence], 2020 CB-CDA 003 (9 juillet 2024). (limitant le Tarif 22.D.3 de la SOCAN (2007-2013) aux membres de l`ACR); voir aussi le Tarif 22.D.3 de la SOCAN (2007-2013), supra note 5 (motifs à l'appui du tarif homologué).

[18] SOCAN – Tarif 22.D.1 – Internet - Services audiovisuels en ligne (2007-2013) CB-CDA 2017-008, (motifs) (27 janvier 2017). [SOCAN Tarif 22.D.1 (2007-2013)].

[19] Voir l’Avis de pratique sur le dépôt d’un projet de tarif, AP 2019-004 rev.4 aux pp 2-3 (24 juillet 2024) [AP 2019-004.rev 4]

[20] CB-CDA 2023-067, supra note 12.

[21] Voir AP 2019-004 rev. 4, supra note 19 « Références à d’autres tarifs proposés ou homologués ».

[22] Réponse de la SOCAN à l’Ordonnance CB-CDA 2023-067, 31 janvier 2024. [Réponse de la SOCAN 31 janvier 2024]

[23] Voir SOCAN – Tarif 21 – Installations récréatives exploitées par une municipalité, une école, un collège, une université, une société agricole ou autres organisations communautaires du même genre (2013-2020), CB-CDA 2018-222 (motifs) (7 décembre 2018) au para 18.

[24] Voir Tarif 9 de la SOCAN – Événements sportifs (2024-2026) 2023 CB-CDA 4 (7 juillet 2023) aux para 11-12.

[25] Voir Tarif 22.G SOCAN – Sites de jeux (2007-2019) 2022 CB-CDA 7 (5 août 2022) au para 14.

[26] Voir Tarif 22.D.3 de la SOCAN (2007-2013), supra note 5.

[27] Tarif 22.D.1 de la SOCAN (2007-2013), supra note 18.

[28] Le taux de redevances de 1,9 % des revenus bruts d’une station (SOCAN 2.A) et des paiements d’affiliation d’une EDR à une entreprise de programmation (SOCAN 17) a été instauré en 2002 dans SOCAN – Tarif 2.A (Stations de télévision commerciales) (1998-2004); Tarif 17 – Services de télévision spécialisés et de télévision payante (2001-2004) (tarifs homologués (20 mars 2004) Gaz C Supplément vol 138 No 12),.

[29] Observations conjointes sur le TPC, supra note 10 à la p 4.

[30] Ibid.

[31] Services de musique en ligne (CSI : 2011-2013; SOCAN : 2011-2013; SODRAC : 2010-2013), CB-CDA 2017-086 (motifs) (25 août 2017).

[32] Ibid aux para 346-347.

[33] Tarif 22.D.3 de la SOCAN (2007-2013), supra note 5 aux para 64-68.

[34] Réponse de la SOCAN 31 janvier 2024, supra note 22.

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