Licences

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Copyright Board
Canada

Canada Coat of Arms/Armoiries du Canada

Commission du droit d’auteur
Canada

 

Date

2012-11-02

Référence

Dossiers : 70.2-2008-01; 70.2-2008-02; Reproduction d’œuvres musicales

Régime

Fixation des redevances dans des cas particuliers

Gestion collective relative aux droits visés aux articles 3, 15, 18 et 21

Loi sur le droit d’auteur, art. 70.2 et 70.15

Commissaires

M. le juge William J. Vancise

Me Claude Majeau

Me J. Nelson Landry

société du droit de reproduction des auteurs, compositeurs et éditeurs au canada c. société radio-canada, et les chaînes télé astral et télétoon

tarif des redevances à percevoir par la sodrac pour la reproduction, au canada, d’œuvres musicales incorporées à des œuvres cinématographiques en vue de la distribution de copies de ces œuvres cinématographiques pour usage privé ou en salle pour les années 2009 à 2012

motifs de la décision

I. INTRODUCTION 1

II. DROITS ET ACTIVITÉS VISÉS; DÉFINITIONS 2

LES ARBITRAGES SODRAC/SRC ET SODRAC/ASTRAL 4

III. PARTIES, POSITIONS ET TAUX PROPOSÉS 4

IV. PREUVE 9

A. SODRAC 9

B. SRC/ASTRAL 10

C. Éléments de preuve fournis et qui ne sont plus nécessaires 12

V. ÉLÉMENTS TECHNIQUES 12

VI. ANALYSE JURIDIQUE 14

A. Principes juridiques généraux 14

B. Principes juridiques contextuels 15

VII. FIXATION DES REDEVANCES 19

A. Quelques propositions générales 19

B. Ajustements de répertoire 20

C. Fixation des taux applicables 24

i. Copies accessoires de radiodiffusion 24

ii. Copies accessoires de télédiffusion 25

iii. Synchronisation – SRC 28

iv. Services audio sur Internet – SRC 33

v. Télévision sur Internet 34

vi. Vente d’émissions aux consommateurs pour usage privé (DVD et téléchargements) 35

vii. Vente ou concession en licence d’émissions de la SRC à des tiers télédiffuseurs et transporteurs – SRC 35

D. Récapitulatif des tarifs homologués, des redevances et de la capacité de payer 36

TARIF 5 DE LA SODRAC 36

VIII. PARTIES, POSITIONS ET TAUX PROPOSÉS 36

IX. PREUVE 38

X. ANALYSE 39

A. Tarif pour les copies sur DVD 39

B. Tarif pour les copies pour usage en salle 40

LE LIBELLÉ DU TARIF ET DES LICENCES 41

XI. TARIF 5 41

XII. LES LICENCES SODRAC/ASTRAL ET SODRAC/SRC 45

A. Ce que les licences ne prévoient pas 46

B. Définitions 46

C. Utilisations que la licence autorise 48

D. Réserves 48

E. Redevances 49

F. Obligations de rapport et de paiement 50

G. Accès au répertoire de la SODRAC 50

H. Registres et vérifications 50

I. Garantie 51

J. Traitement confidentiel 51

K. Avis 51

L. Dispositions transitoires 51

 


I. INTRODUCTION

[1] Les présents motifs portent sur trois questions distinctes. Nous homologuons un tarif qui s’appliquera à toute personne qui procède aux utilisations protégées qui sont visées. Nous délivrons également deux licences à des utilisateurs uniques.

[2] Le 28 mars 2008, conformément au paragraphe 70.13(1) de la Loi sur le droit d’auteur (la « Loi »), [1] SODRAC 2003 inc. et la Société du droit de reproduction des auteurs, compositeurs et éditeurs au Canada (conjointement la SODRAC) déposaient le projet de tarif 5 pour la reproduction, au Canada, d’œuvres musicales incorporées à des œuvres cinématographiques en vue de la distribution de copies de ces œuvres cinématographiques pour usage privé ou en salle pour les années 2009 à 2012. Le projet de tarif a été publié dans la Gazette du Canada. L’Association canadienne des distributeurs et exportateurs de films (ACDEF), la Fédération des associations de propriétaires de cinémas du Canada (MPTAC) et l’Association canadienne des distributeurs de films (maintenant Association cinématographique – Canada) (AC-C) se sont opposées en temps opportun au projet. Le 4 juin 2009, la MPTAC retirait son opposition. Six jours plus tard, l’AC-C faisait de même et demandait de participer comme intervenante; sa demande a été rejetée. L’AC-C a déposé des observations détaillées, comme le permet la directive sur la procédure de la Commission.

[3] Le 14 novembre 2008, s’appuyant sur l’article 70.2 de la Loi, la SODRAC demandait à la Commission de fixer les modalités d’une licence pour la reproduction des œuvres musicales de son répertoire par la Société Radio-Canada (SRC) entre cette date et le 31 mars 2012.

[4] Le 19 décembre 2008, s’appuyant sur la même disposition, la SODRAC demandait à la Commission de fixer les modalités d’une licence similaire pour les chaînes spécialisées exploitées par Les Chaînes Télé Astral autres que MusiquePlus et MusiMax et Teletoon Inc. (conjointement, Astral), entre cette date et le 31 août 2012.

[5] Le 31 mars 2009, la Commission délivrait pour la SRC une licence provisoire qui a été reconduite le 30 avril 2012. [2] Le 14 décembre 2009, la Commission délivrait une licence provisoire pour Astral. [3]

[6] La Commission a regroupé l’examen des deux arbitrages, [4] puis procédé à l’examen du tarif 5 proposé. Les audiences ont commencé le 1er juin 2010 et ont duré 13 jours. Le dossier a été fermé le 5 octobre 2010, après le dépôt des réponses finales aux observations de l’AC-C. Le dossier a exigé des recherches et des rajustements additionnels; il a finalement été mis en état le 13 juillet 2011.

II. DROITS ET ACTIVITÉS VISÉS; DÉFINITIONS

[7] Dans la présente instance, nous fixons des redevances uniquement à l’égard du droit exclusif du titulaire du droit d’auteur sur une œuvre musicale de la reproduire et d’en autoriser la reproduction. Le droit de communiquer l’œuvre n’est pas en cause, non plus que l’utilisation protégée d’un enregistrement sonore musical ou de la prestation musicale d’un interprète.

[8] Nous ne fixons pas de redevances pour l’utilisation protégée d’une émission de télévision, d’un film ou d’une autre œuvre cinématographique (ci-après « œuvre audiovisuelle ») [5] dans laquelle l’œuvre musicale est incorporée ou synchronisée. Cela dit, l’œuvre audiovisuelle occupe une place de premier plan en l’espèce : chaque fois qu’elle est copiée, les œuvres musicales qu’elle contient le sont aussi.

[9] L’arbitrage relatif à la SRC porte sur toutes les reproductions (ci-après « copies ») d’œuvres musicales qu’elle effectue dans le cadre de ses opérations de télévision, conventionnelle ou spécialisée, et de radio, [6] ainsi que des opérations sur Internet précisées plus loin. L’arbitrage concernant Astral porte uniquement sur les copies effectuées dans le cadre des opérations du groupe relatives à la télévision spécialisée et à l’Internet; ses opérations radio ne sont pas en cause. Le tarif 5 vise toute copie d’œuvre musicale effectuée lorsque l’œuvre audiovisuelle à laquelle elle est incorporée est copiée pour être distribuée au détail (par ex., vente et location de DVD) ou présentée en salle (par ex., copie effectuée sur le serveur d’une salle de cinéma). Nous trancherons d’abord les deux arbitrages, puis le tarif 5.

[10] Au préalable, et pour éviter toute confusion, nous estimons nécessaire de préciser ce que nous entendons par certaines expressions auxquelles les parties ont donné plus d’un sens. Ces définitions ne visent que les copies d’œuvres musicales effectuées lorsqu’une œuvre audiovisuelle est produite, créée ou utilisée. La question ne semble pas se soulever à l’égard des copies de musique utilisées dans les produits audio (radio, balados, etc.).

[11] La première série de définitions porte sur les types de copies effectuées. La synchronisation est le processus consistant à incorporer une œuvre musicale dans une œuvre audiovisuelle. [7] La copie de synchronisation, est donc celle réalisée en vue d’incorporer l’œuvre dans la copie finale (maîtresse) d’une œuvre audiovisuelle. Une copie de postsynchronisation de l’œuvre musicale est effectuée chaque fois que l’œuvre audiovisuelle elle-même est copiée, par exemple pour la diffuser, la livrer ou la distribuer.

[12] La copie accessoire est nécessaire ou utile pour arriver à un résultat sans toutefois y être intégrée. La copie accessoire de production est effectuée dans le cadre de la production et de la distribution d’une œuvre audiovisuelle, avant ou après la création de la copie maîtresse : il s’agit d’une forme de copie de synchronisation. La copie accessoire de diffusion vise à faciliter la télédiffusion d’une œuvre audiovisuelle ou à la conserver dans les archives du télédiffuseur, alors que la copie accessoire de distribution a pour objet de préparer ou de conserver le film pour distribution au public : les deux sont des formes de copies de postsynchronisation.

[13] Le tarif proposé vise principalement deux types de copies. Une copie sur DVD de musique est effectuée chaque fois qu’une œuvre audiovisuelle contenant cette musique est copiée sur un DVD pour la vente au détail ou la location. Il s’agit d’une copie de postsynchronisation, non accessoire. Une copie pour usage en salle de musique est effectuée chaque fois qu’on fait une copie du film auquel est incorporée cette musique, en vue de la distribution du film à l’exploitant d’un cinéma ou d’un autre endroit ou de sa présentation en salle. Les copies pour usage en salle incluent celles incorporées à un film-annonce, cette courte publicité du film à venir, consistant d’habitude en quelques extraits de ce film. Toute copie pour usage en salle est une copie accessoire de distribution.

[14] La deuxième série de définitions porte sur les types de licences offertes pour faciliter les opérations décrites au paragraphe 9. Une licence est exigée pour toute copie de synchronisation ou de postsynchronisation, accessoire ou non, d’œuvre musicale protégée. Le producteur d’une œuvre audiovisuelle peut affranchir ou non les droits tant pour le compte des utilisateurs en aval que pour le sien. Il peut acquérir les droits pour tous les marchés ou toutes les utilisations, ou seulement une partie. Toutes ces permutations existent et doivent être prises en compte.

[15] Un producteur obtient parfois une licence libre de tous droitsthrough to the viewer »). Cette licence autorise toute copie d’une œuvre musicale par le producteur ou d’autres personnes servant à livrer l’œuvre audiovisuelle au consommateur dans le marché visé, télévision, cinéma, DVD, Internet ou autre. Une licence libre de tous droits est définitivebuyout ») lorsque les redevances y sont fixées à un prix forfaitaire payable à l’avance. [8] D’autres licences libres de tous droits offrent au producteur une option de reconduction au-delà d’une certaine période, d’un certain territoire ou marché à des prix prédéterminés. Lorsque le producteur exerce une option aux termes d’une telle licence, les droits afférents sont libérés tant pour lui que pour les utilisateurs en aval. Selon les opposantes, les licences libres de tous droits sont les licences les plus courantes sur le marché de l’audiovisuel.

[16] Par contre, une simple licence de synchronisation permet uniquement au producteur d’inclure l’œuvre musicale dans la copie maîtresse d’une œuvre audiovisuelle (ainsi que, d’une manière générale, dans toute copie accessoire de production) : les utilisateurs en aval doivent obtenir leur propre licence pour copier les œuvres musicales incorporées à l’œuvre audiovisuelle. Si sa licence est limitée à certains marchés, comme c’est souvent le cas, le producteur est effectivement empêché d’offrir l’œuvre audiovisuelle sur d’autres marchés à moins qu’il n’obtienne une autre licence pour l’œuvre musicale. Une telle licence comprend souvent des options de reconduction au-delà d’une certaine période, d’un certain territoire ou marché à des prix prédéterminés. Ces options ne transforment pas la licence en licence libre de tous droits. Le producteur est seulement autorisé à effectuer les copies nécessaires à la livraison de l’œuvre audiovisuelle aux utilisateurs en aval (télédiffuseurs, distributeurs) sur d’autres marchés : là encore, ces utilisateurs doivent obtenir leur propre licence pour les copies d’œuvres musicales qu’ils effectuent lorsqu’ils copient l’œuvre audiovisuelle pour leur propre usage. Selon la SODRAC, c’est le type de licence le plus courant sur le marché de l’audiovisuel.

[17] Les œuvres audiovisuelles diffusées à la télévision proviennent habituellement de quatre sources. Les productions internes et les coproductions sont des émissions produites par le télédiffuseur, seul ou avec d’autres producteurs. Les productions commandées sont des émissions que les télédiffuseurs commandent à des producteurs tiers pour leur propre utilisation. Les télédiffuseurs peuvent également acheter des productions déjà diffusées, d’abord produites pour un autre télédiffuseur ou pour une autre plateforme (par ex., le cinéma).

LES ARBITRAGES SODRAC/SRC ET SODRAC/ASTRAL

III. PARTIES, POSITIONS ET TAUX PROPOSÉS

[18] La SODRAC est une société de gestion. Elle gère le droit de reproduction pour les œuvres musicales que détiennent ceux qui l’ont autorisée à agir pour leur compte. Elle représente la majorité des titulaires de droits au Québec et des œuvres de langue française composées par des Canadiens. La SODRAC gère également au Canada le répertoire de nombreuses sociétés de gestion étrangères détentrices de droits analogues.

[19] La SRC est le télédiffuseur public au Canada. Elle exploite des services de radio conventionnelle (Radio One, Radio 2, Première Chaîne, Espace Musique), de télévision conventionnelle (CBC Television, Télévision de Radio-Canada, Radio-Canada North), de télévision spécialisée (RDI, CBC News Network, [9] Bold, Documentary Channel) ainsi que des services de webradio (Radio 3, Bande à part). La SRC offre également des services audio et audiovisuels de webdiffusion, transmission, diffusion simultanée et baladodiffusion. Elle exploite le plus grand système de radiodiffusion audionumérique au monde, comprenant 2000 postes de travail répartis dans 50 emplacements. Ses multiples flux de programmation sont adaptés aux fuseaux horaires et autres contraintes terrestres. Par exemple, les diffusions simultanées de Radio One intègrent le contenu local provenant de 31 villes différentes. Certains produits offerts sur Internet permettent aux utilisateurs de créer des listes de diffusion personnalisées. La SRC produit ou coproduit une part importante du contenu qu’elle diffuse à la télévision.

[20] Jusqu’au 31 mars 2009, deux ententes régissaient les relations entre la SODRAC et la SRC. La première, conclue le 19 mars 1992, autorisait l’utilisation du répertoire de la SODRAC à la radio, à la télévision et pour certaines fins accessoires (« l’entente de 1992 »). En trois ans, les redevances passaient de 475 000 $ à 520 000 $. La seconde, conclue le 29 octobre 2002, autorisait l’utilisation du même répertoire dans des produits dérivés, comme les DVD (« l’entente de 2002 »). Les redevances par minute et par copie variaient de 0,18 ¢ à 0,50 ¢ pour la musique de fond et de 0,45 ¢ à 1,25 ¢ pour la musique de premier plan, [10] sauf quelques exceptions. Les parties ont renouvelé les deux ententes jusqu’à la décision provisoire de la Commission.

[21] Astral exploite des chaînes de télévision spécialisées. Contrairement à la SRC, c’est la première fois qu’Astral est contactée par la SODRAC au sujet d’une licence relative à ses activités de diffusion à la télévision et sur Internet. Contrairement à la SRC, Astral ne produit ou ne coproduit aucune émission.

[22] La SODRAC part du principe que les titulaires de droits sont libres de décider comment (et à qui) accorder des licences sur un marché donné. La SODRAC accorde aux producteurs de simples licences de synchronisation, qui n’autorisent pas les copies en aval. En conséquence, Astral et la SRC ont besoin de licences pour toute copie accessoire de diffusion qu’elles effectuent. La SRC a également besoin d’une licence pour la création, l’utilisation, la distribution et la commercialisation de ses productions internes et de ses coproductions.

[23] La SODRAC propose de calculer les redevances pour les copies accessoires de diffusion et les copies de synchronisation à l’aide de ratios qu’elle obtient en se fondant sur des décisions antérieures de la Commission et sur des contrats de licence existants. Ainsi, puisque la radio commerciale paye pour faire des copies d’œuvres musicales environ le tiers de ce qu’elle verse à la Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SOCAN) pour diffuser les mêmes copies, et que la SRC verse des redevances à l’Agence canadienne des droits de reproduction musicaux (CMRRA) suivant une formule fondée sur le même ratio, le taux de redevance pour toute copie accessoire de radiotélévision visée dans la présente instance (dont les copies faites par Astral) devrait être le tiers du tarif correspondant de la SOCAN. Ces taux seraient rajustés en fonction de l’utilisation du répertoire.

[24] Selon la même logique, la SODRAC propose que le taux pour la synchronisation d’œuvres musicales dans les productions de la SRC soit 1,9 fois plus élevé que celui pour les copies accessoires de diffusion de ces mêmes productions, du fait que les services de musique en ligne paient 1,9 fois plus pour les copies d’œuvres musicales effectuées lors du téléchargement permanent que lors d’une transmission sur demande. Les utilisations sur Internet, les ventes à des tiers et autres utilisations feraient l’objet de calculs distincts ou de suppléments. En fin de compte, [11] la SODRAC propose les redevances qui suivent.

[25] Pour la SRC :

a) copies accessoires de diffusion (radio conventionnelle) : 170 986 $ par année;

b) copies accessoires de diffusion (télévision conventionnelle) : 1 069 078 $ par année;

c) copies accessoires de diffusion (télévision spécialisée) : 0,63 pour cent des revenus bruts de chaque signal, après ajustement de répertoire, soit 0,10 pour cent pour News Network, 0,23 pour cent pour RDI, 0,27 pour cent pour Bold et 0,37 pour cent pour Documentary Channel. La SODRAC estime que les redevances totales s’élèveraient à 216 814 $ en 2009;

d) webdiffusion, transmission et diffusion simultanée audio et audiovisuelle : 4 pour cent des redevances payables suivant les alinéas a) à c), plus 0,63 pour cent des recettes publicitaires associées à la transmission des productions déjà diffusées sur Tou.tv, après ajustement de répertoire; [12]

e) baladodiffusion audio : 3 pour cent des redevances payables suivant l’alinéa a); [13]

f) synchronisation d’œuvres musicales dans les productions internes et les coproductions : 1 381 248 $ pour la télévision conventionnelle, 0,393 pour cent des revenus bruts pour RDI, et 0,124 pour cent des revenus bruts pour News Network;

g) ventes d’émissions aux consommateurs pour usage privé : un taux par minute, par copie, entre 0,28 ¢ et 0,78 ¢ pour la musique de fond et entre 0,71 ¢ et 1,92 ¢ pour la musique de premier plan;

h) vente ou concession en licence d’émissions de la SRC à des tiers télédiffuseurs et transporteurs, 3 pour cent des revenus rajusté en fonction de l’utilisation du répertoire.

[26] Pour Astral :

a) copies accessoires de diffusion : 0,63 pour cent des revenus bruts de chaque signal ajusté selon l’utilisation du répertoire. Il en résulte :

– VRAK.TV : 0,32 pour cent;

– Canal D et Séries+ : 0,17 pour cent;

– Canal Vie : 0,14 pour cent;

– Historia, Télétoon (français) et Teletoon (anglais) : 0,13 pour cent;

– ZTélé : 0,09 pour cent;

Teletoon Retro (anglais) : 0,0004 pour cent; [14]

– Télétoon Rétro (français) : 0,0016 pour cent. [15]

La SODRAC estime que les redevances totales s’élèveraient à 380 000 $ pour 2008.

b) tous les services Internet sauf la baladodiffusion : 4 pour cent des redevances payables suivant l’alinéa a).

[27] La SRC et Astral soutiennent qu’il existe déjà un marché opérationnel, puisque les producteurs qui synchronisent la musique dans une œuvre audiovisuelle obtiennent des licences libres de tous droits. Avant 2005, les licences de la SODRAC reflétaient cette réalité. Cette façon de procéder est logique : c’est le producteur, et non le télédiffuseur, qui contrôle le contenu d’une émission. La proposition de la SODRAC perturberait les pratiques actuelles en matière d’octroi de licences. L’efficacité et l’équité réglementaires exigent que nous encouragions, sinon obligions, la SODRAC à transiger ses droits selon les modalités du marché existant. La Commission devrait résister à toute tentative de segmenter les ententes de licence visant à obtenir des revenus supérieurs au prix du marché.

[28] Subsidiairement, la SRC et Astral disent que les redevances payables pour les copies accessoires de diffusion devraient refléter leur faible valeur et que, dans tous les cas, leur prix ne devrait pas être lié aux revenus. Les copies ne sont jamais vendues ni louées, elles ne génèrent aucun revenu et ne contribuent pas à augmenter la part d’auditoire.

[29] La SRC et Astral soutiennent également que la SODRAC exagère l’utilisation qu’elles font de son répertoire : les rapports de contenu musical dénotent un parti pris en sa faveur et les montants qu’elle demande pour les arrangements d’œuvres du domaine public sont trop élevés. Les télédiffuseurs sont déjà autorisés à utiliser certaines œuvres en vertu des licences libres de tous droits que les producteurs obtiennent des titulaires, dont certaines sociétés de gestion étrangères. Il n’est pas tenu compte de l’augmentation des rediffusions et de la diminution subséquente des activités de copie.

[30] Enfin, la SRC et Astral disent que l’adoption de nouvelles technologies ne devrait pas entraîner de paiement supplémentaire pour la reproduction. De leur point de vue, l’efficacité technologique n’est pas pertinente en l’espèce. Le simple fait que l’utilisation de serveurs, logiciels et autres équipements nécessite de copier la musique ne confère pas à la SODRAC le droit de réclamer les bénéfices technologiques qui découlent de cette utilisation. L’évaluation des œuvres musicales en fonction des caractéristiques et des avantages des équipements et des logiciels de radiodiffusion découragera l’adoption de nouvelles technologies.

[31] La SRC admet qu’elle a besoin d’une licence de la SODRAC, mais uniquement pour ses productions internes et coproductions télévisuelles ainsi que pour ses activités liées à la radio. Cette licence de synchronisation devrait être une licence libre de tous droits qui reflète les pratiques du marché; la demande de segmenter la licence constitue une tentative à peine voilée d’augmenter les redevances.

[32] Astral invoque deux arguments additionnels. Premièrement, rien ne justifie sur le plan économique l’attribution d’une valeur distincte aux copies accessoires destinées aux services Internet, qui ne génèrent pas de bénéfices. Deuxièmement, les exigences de rapport que propose la SODRAC sont lourdes et disproportionnées. Il est déraisonnable d’exiger qu’Astral fournisse des documents qu’elle ne reçoit pas dans le cours normal des affaires (rapports de contenu musical), d’autant plus que la SODRAC a un accès direct aux renseignements visés.

[33] La SRC propose des redevances annuelles de 85 000 $ pour sa radio, des redevances annuelles entre 197 000 $ et 298 000 $ pour une licence libre de tous droits pour sa télévision, et des redevances supplémentaires de 2 000 $ chacune pour les productions internes et les coproductions de Bold et de Documentary Channel, ainsi que le renouvellement des taux prévus dans l’entente de 2002 pour ses ventes d’émissions aux consommateurs pour usage privé. Les utilisations Internet et la concession de licences à des tiers télédiffuseurs ne devraient pas entraîner le versement de redevances supplémentaires.

[34] Astral soutient qu’elle n’a pas besoin de licence. Elle demande subsidiairement que les redevances liées à sa licence soient nulles ou très faibles et qu’elles comprennent toutes les utilisations Internet.

IV. PREUVE

A. SODRAC

[35] Michael Murphy, professeur titulaire et chef du département des médias audio et numériques de la School of Radio and Television Arts de l’université Ryerson, a décrit les systèmes de gestion de contenu numérique utilisés par la SRC et Astral. À son avis, la radio et la télévision utilisent des technologies semblables ou identiques; leur utilisation du droit de reproduction et la nature des activités de copie sont comparables. Il n’a pas remarqué non plus de différence importante entre la SRC et Astral quant à la technologie utilisée ou à l’utilisation du droit de reproduction dans le cadre de leurs opérations de télédiffusion.

[36] Marcel Boyer, professeur émérite de sciences économiques à l’Université de Montréal et chercheur associé au Département d’économie de l’École Polytechnique de Paris, a commenté l’utilisation de ratios par la Commission. À son avis, il convient d’utiliser des ratios pour saisir l’intensité et l’importance relatives des utilisations, qu’il s’agisse du même droit dans des marchés distincts ou de droits distincts dans le même marché. Il a fait remarquer que la Commission fait une distinction entre droit principal et accessoire. Le premier est essentiel à la production d’un produit ou d’un service. Le second, bien qu’il puisse être important et utile, n’est pas essentiel; il existe des solutions de rechange. Ainsi, pour une station de radio, diffuser de la musique implique un droit principal (sans diffusion, pas de radio) tandis que le droit de copier cette même musique est accessoire (la station peut opérer sans faire de copies, du moins en théorie). [16] L’inverse est vrai quant aux téléchargements permanents qu’offrent les services de musique en ligne. [17] L’examen des décisions antérieures de la Commission a mené le professeur Boyer à conclure qu’elle privilégie en général un rapport de 3 à 1 entre le principal et l’accessoire, rajusté en fonction des conditions du marché.

[37] Alain Lauzon, directeur général, Me Martin Lavallée, directeur, Licences et affaires juridiques, et Claudette Fortier, ancienne directrice générale, ont témoigné au sujet des pratiques passées et actuelles de la SODRAC en matière d’octroi de licences sur les marchés pertinents. Les témoins ont également formulé des commentaires sur une entente conclue en avril 2009 entre la CMRRA et les services radio de la SRC (« l’entente CMRRA-SRC radio ») et sur la façon dont elle pourrait servir à fixer les redevances en l’espèce.

[38] Me Lavallée, Joël Martin, chef de l’informatique, Clément Baille, chef, Service audiovisuel, et Matthieu Ouellet, ancien employé de la SODRAC, responsable de l’implantation des plus récents systèmes et méthodes de TI, ont expliqué la tenue et la mise à jour du répertoire de la SODRAC. Ils ont également expliqué la façon dont la SODRAC a utilisé les rapports de contenu musical et autres renseignements pour effectuer les analyses d’utilisation de son répertoire par la SRC et par Astral déposés dans le cadre de la présente instance.

[39] Paul Audley de Paul Audley and Associates Ltd a formulé des commentaires sur les éléments de preuve de nature économique déposés par la SRC et par Astral et a discuté des diverses approches possibles. Son témoignage sera analysé plus en détail ci-dessous.

B. SRC/ASTRAL

[40] Yves Lagacé, vice-président principal, Finances, Technologies et opérations, auprès d’Astral, Michel Comtois, directeur principal, Opérations et production, SRC et Chris Bell, vice-président, Technologies, auprès d’Astral, ont témoigné au sujet des opérations passées et présentes de radiodiffusion ainsi que des coûts initiaux et continus d’exploitation des systèmes de radiodiffusion numériques. Les témoins ont déclaré, entre autres, que l’implantation de ces systèmes n’a pas entraîné d’économies ni de gains de productivité.

[41] Pascal Ouimet, Relations d’affaires, ARTV, et Jean Leclerc, producteur, Planète Bleue Télévision inc., ont témoigné au sujet de la production, la concession de licences et la distribution d’œuvres audiovisuelles au Québec et ont formulé des commentaires sur diverses ententes de licence et commerciales, insistant sur l’affranchissement des droits musicaux. Marty Katz, président, Prospero Pictures, Mark Musselman, vice-président, Serendipity, et Jill Meyers, consultante indépendante en musique, ont traité des mêmes questions pour le reste de l’Amérique du Nord; tous ont affirmé que, selon la pratique courante en matière d’octroi de licences pour la musique utilisée dans les œuvres audiovisuelles, le producteur obtient une licence définitive.

[42] Marie-Andrée Poliquin, directrice des opérations, Financement et affaires commerciales, Télévision générale, SRC, et Kathy Markou, directrice, Droits d’auteur, Affaires commerciales, SRC (services anglais), ont décrit les pratiques de la SRC en matière de licences. En se fondant sur son expérience au sein d’une équipe qui acquiert entre 700 et 850 licences musicales par année, Mme Markou a conclu que les pratiques de la SODRAC en matière d’octroi de licences ne concordent pas avec celles dans le reste du secteur.

[43] Me Dany Meloul, vice-présidente, Affaires juridiques et réglementaires et affaires affiliées, Astral, et Tracey Pearce, vice-présidente principale, Affaires juridiques et commerciales, CTVglobemedia, ont témoigné au sujet de la production et de l’octroi de licences relativement au contenu audiovisuel destiné à la diffusion au Canada, ont examiné des ententes types et des ententes commerciales et ont expliqué l’utilisation d’Internet à l’appui des activités conventionnelles de radiodiffusion. Toutes les émissions diffusées par Astral sont commandées ou acquises auprès de producteurs indépendants. Astral n’a aucun contrôle sur la musique incorporée aux émissions qu’elle diffuse. Les investissements dans les technologies sont nécessaires pour que les services demeurent pertinents et que le public continue de les visionner. L’Internet constitue un complément (qui n’est pas rentable actuellement) aux chaînes principales, et n’est qu’un autre moyen de visionner du contenu. La confection de copies accessoires de diffusion fait partie des activités de télédiffusion; les diffuseurs s’attendent à ce que le producteur obtienne les autorisations nécessaires lorsqu’il affranchit les droits de synchronisation.

[44] Michael Mooney, directeur principal, Direction des finances, a témoigné sur la situation financière passée et actuelle de la SRC. Francine Touchette, directrice, Administration, Internet et services numériques, a donné un aperçu des opérations Internet de la SRC et a décrit l’environnement opérationnel des services de webdiffusion Tou.tv et Espace.

[45] Me Chantal Carbonneau, directrice, Stratégie et affaires juridiques, Propriété intellectuelle, a traité de l’utilisation par la SRC du répertoire de la SODRAC, de la nature des émissions concédées sous licence à des tiers, des circonstances ayant donné lieu à l’entente CMRRA-SRC radio, des pratiques de rapport de la SRC au regard des sociétés de gestion de droits d’auteur et des activités des chaînes Bold et Documentary Channel. Son témoignage peut se résumer ainsi. Premièrement, l’entente de 1992 devrait servir de point de départ en l’espèce. L’entente autorise déjà tous les types de copies exécutées par les producteurs et les télédiffuseurs. Ce modèle permettrait à la SRC de conserver une licence générale par laquelle elle acquerrait les droits requis pour toutes ses activités. Deuxièmement, la SOCRAC exagère l’utilisation que la SRC fait de son répertoire. Troisièmement, puisque la SRC acquiert moins d’émissions originales qu’auparavant et qu’elle utilise plusieurs plateformes télévisuelles, le nombre de rediffusions a augmenté sensiblement. Quatrièmement, l’entente CMRRA-SRC radio ne devrait pas servir de point de départ pour fixer les redevances pour l’Internet ou la baladodiffusion.

[46] Les opposantes ont demandé à Gerry Wall et Bernie Lefebvre de revoir les méthodes proposées par la SODRAC et de recommander les droits appropriés. Leurs conclusions se résument comme suit. Premièrement, les propositions de la SODRAC ne cadrent pas avec une analyse économique raisonnable; par exemple, les hausses proposées pour les copies destinées à la radio ne correspondent pas à l’évolution historique des paiements faits à la SOCAN. Deuxièmement, ceux qui affranchissent les droits de synchronisation paient déjà pour les copies accessoires de diffusion; une solution réglementée, imposée par la Commission, n’est donc ni nécessaire ni souhaitable. Troisièmement, les droits pour les copies accessoires de diffusion, s’ils sont fixés, devraient être symboliques pour tenir compte de leur faible valeur inhérente et pour éviter de décourager l’adoption des nouvelles technologies. Appliquée correctement, la méthode d’évaluation fondée sur un ratio proposée par la SODRAC, jugée inappropriée par ces experts, ne ferait que confirmer ce fait. Quatrièmement, il est possible de fixer des droits de licence de synchronisation libre de tous droits d’après les taux du marché, rajustés en fonction des conditions du marché.

[47] En se fondant sur ces principes, MM. Wall et Lefebvre ont examiné divers moyens de fixer les redevances pertinentes. Par exemple, ils ont considéré trois approches pour fixer le prix d’une licence libre de tous droits pour la télévision de la SRC. Ces approches ainsi que d’autres éléments du témoignage de ces experts seront présentés ci-dessous.

C. Éléments de preuve fournis et qui ne sont plus nécessaires

[48] De leur propre chef ou à notre demande, les parties ont fourni des renseignements, parfois abondants, sur plusieurs autres questions, notamment :

  • la part relative du temps d’antenne des productions internes et des coproductions, des productions commandées et des productions déjà diffusées;
  • la part relative du temps d’antenne des rediffusions;
  • la valeur des copies accessoires de diffusion affranchies par une licence libre de tous droits ou par rapport à une simple licence de synchronisation.

[49] En fin de compte, nous n’utilisons pas ces renseignements pour fixer les redevances. Par conséquent, nous ne les examinerons pas.

V. ÉLÉMENTS TECHNIQUES

[50] Nous convenons avec M. Murphy que la télévision effectue et utilise des copies d’œuvres musicales de la même manière que la radio. Les systèmes de gestion de contenu numérique qu’utilisent les stations et réseaux de radio et de télévision pour conserver, formater, arranger et diffuser le contenu sont identiques ou similaires. Il en va de même pour leur dépendance par rapport à cette capacité de copier le contenu.

[51] La Commission a expliqué en détail la façon dont la radio utilise les systèmes de gestion de contenu numérique dans une décision récente concernant la radio commerciale. [18] Il n’est pas nécessaire de reprendre ce qui y est dit. Quelques mots suffiront pour comprendre l’importance de la reproduction de musique dans la production et l’utilisation d’œuvres audiovisuelles, et pour expliquer pourquoi nous rejetons les affirmations voulant que les activités de reproduction aient très peu changé depuis des décennies.

[52] Comme nous l’avons déjà mentionné, le processus de création d’une œuvre audiovisuelle contenant une œuvre musicale suppose l’exécution de plusieurs copies de cette dernière œuvre, notamment aux stades de la production, du montage et du mixage, avant sa livraison au télédiffuseur. M. Leclerc en évalue le nombre entre 12 et 20. [19]

[53] Une dizaine d’années s’est écoulée entre la mise en œuvre de systèmes de gestion de contenu numérique pour la radio et pour la télévision, car cette dernière utilise des fichiers numériques beaucoup plus volumineux, ayant nécessité l’amélioration de la puissance de traitement et de la technologie de compression, l’augmentation de la capacité de mémoire et la réduction des coûts. De nos jours, ces systèmes sont couramment exploités par la télévision. Bien qu’il soit encore possible sur le plan technique de télédiffuser sans recourir à des technologies de reproduction numérique et des serveurs, l’efficacité et la fonctionnalité supplémentaire liées à ces technologies ont fait de leur utilisation la norme plutôt que l’exception.

[54] Chaque fois qu’une station de télévision copie une œuvre audiovisuelle, elle fait également une copie de la musique que l’émission contient. Un télédiffuseur fait plusieurs copies de chaque émission avant, durant et après sa diffusion. En règle générale, on livre l’émission sur un support numérique. On l’incorpore ensuite au système numérique de gestion de contenu de la station et on la formate de manière à la rendre compatible avec le logiciel du serveur du télédiffuseur. On modifie souvent l’émission en vue de satisfaire à des exigences particulières (synchronisation, langue, sous-titres). On peut stocker une seconde copie sur un serveur Web et créer un fichier proxy. On fait également d’autres copies lorsque des éléments nécessaires à la télédiffusion de la journée ou des jours à venir sont copiés à partir des émissions archivées, puis versés dans les disques durs d’un serveur vidéo.

[55] Les télédiffuseurs offrent leur contenu sur Internet, téléphone cellulaire et autres plateformes émergentes. On ne peut déployer ces systèmes de transmission qu’à l’aide d’une technologie de reproduction et de serveurs numériques. Le contenu offert est varié. Le contenu audio peut être diffusé en simultané ou sur demande. La majeure partie du contenu audiovisuel est offert sur demande (lecture continue, balado téléchargeable à partir du site Web de la station, fil RSS vers des abonnés ou services d’agrégation en ligne, comme iTunes d’Apple).

[56] Grâce à Internet, entre autres, la distinction entre contenu audio et audiovisuel, classique ou moderne, s’estompe. L’émission « Q » est accessible sur le réseau terrestre Radio One de CBC, diffusée en simultané sur CBC.ca et sur la bande satellite Radio One de Sirius. Elle est disponible en balado audio ou vidéo. Une version vidéo modifiée est disponible sur demande en lecture continue sur CBC.ca et diffusée sur le canal spécialisé Bold de la CBC.

VI. ANALYSE JURIDIQUE

[57] Avant d’établir les modalités d’une licence, il y a lieu d’examiner deux séries de questions juridiques. La première porte sur des principes généraux qui guident la présente décision comme ils l’ont fait dans beaucoup d’autres cas. La seconde porte sur la vraie nature des ententes de licence qui existent sur les marchés pertinents et d’autres marchés connexes.

A. Principes juridiques généraux

[58] Il convient de reprendre quelques principes qui guident, de manière générale, les décisions de la Commission.

[59] Premièrement, le titulaire de droits est libre de structurer ses rapports avec les utilisateurs comme bon lui semble. Les membres de la SODRAC sont libres de décider comment (et à qui) concéder leurs droits sur un marché donné. Ce principe général connaît des exceptions, dont certaines sont examinées plus loin. L’utilisateur qui ne veut pas traiter avec les titulaires doit éviter les utilisations protégées.

[60] Deuxièmement, le titulaire qui demande à une société de gestion de gérer ses droits n’est plus libre de les négocier comme bon lui semble. Lorsque la Commission est appelée à déterminer la façon dont la société traitera avec les utilisateurs, celle-ci ne peut plus refuser d’autoriser les utilisations sur le marché donné. Pour que le titulaire reprenne le plein contrôle sur ces transactions, il faut que les droits pertinents cessent d’être gérés collectivement.

[61] Troisièmement, dès que la Commission fixe les modalités d’une licence, l’utilisateur concerné peut exiger que la société de gestion traite avec lui en conséquence. Il reste libre d’affranchir les droits par d’autres voies, dans la mesure où cela est possible. Les prix que la Commission fixe tendent donc à plafonner les redevances.

[62] Quatrièmement, la Commission ne peut imputer une responsabilité lorsque la Loi ne le fait pas ou dégager une responsabilité qui existe. [20] Par conséquent, elle ne peut pas déterminer qui doit verser des redevances, mais seulement leur montant et les utilisations assujetties, et uniquement dans la mesure où l’utilisation prévue exige une licence.

[63] Cinquièmement, il existe une distinction importante entre l’examen d’un tarif et un arbitrage suivant l’article 70.2 de la Loi. Dans le premier cas, la Commission impose couramment des obligations aux utilisateurs absents : le tarif constitue une norme prospective d’application générale. Par contre, l’arbitrage ne concerne que les parties en cause. Les licences que nous délivrons en l’espèce ne lient que la SRC et Astral, et non les autres télédiffuseurs. A fortiori, il nous est impossible, par le truchement d’un arbitrage, d’imposer des obligations aux utilisateurs de droits situés en amont ou en aval des opérations pour lesquelles nous fixons un prix : nous ne pouvons pas obliger les producteurs à signer des licences libres de tous droits. Nous ne pouvons pas non plus, dans le cadre de la présente procédure, forcer la SODRAC à traiter avec ces producteurs.

B. Principes juridiques contextuels

[64] La présente affaire exige de comprendre comment sont conçues et octroyées les licences de synchronisation par les titulaires de droits en général, et la SODRAC en particulier. Fait important, il faut s’attacher principalement aux pratiques de la SODRAC. Le fait que d’autres titulaires délivrent des licences libres de tous droits, ou que certains utilisateurs considèrent les pratiques de la société de gestion en matière de licences non conformes à celles suivies dans le reste du secteur, quoique pertinent, n’est pas déterminant. Nous sommes appelés à établir les modalités d’une licence pour l’utilisation du répertoire de la SODRAC et non pour d’autres titulaires. Dans la mesure où les pratiques de la SODRAC en matière d’octroi de licences sont cohérentes et importantes sur le marché pertinent, on ne peut simplement les écarter au motif qu’elles seraient anormales.

[65] Les parties ont des points de vue diamétralement opposés quant aux modalités et aux pratiques du marché dominantes en matière de licences. La SRC et Astral soutiennent que les producteurs obtiennent des licences libres de tous droits pour les œuvres musicales qu’ils synchronisent dans leurs œuvres audiovisuelles. Si elles ont raison, les télédiffuseurs n’ont pas besoin d’une licence pour les copies accessoires de diffusion. La SODRAC soutient, au contraire, que l’octroi de telles licences n’est pas généralisé au Canada. Elle ajoute qu’elle n’a jamais délivré une telle licence et que, même si elle le voulait, elle ne pourrait le faire pour certains répertoires étrangers. En fait, le dossier en l’espèce confirme que les pratiques en matière d’octroi de licences pour l’utilisation de musique dans des œuvres audiovisuelles sont beaucoup plus complexes et variées que ne le laissent entendre l’une et l’autre partie.

[66] Règle générale, un producteur négocie ses licences de synchronisation à la pièce. Les pratiques varient selon le marché. La décision du producteur d’affranchir les droits musicaux en aval, et dans quelle mesure, dépend grandement des montants disponibles pour l’acquisition des licences requises : un producteur d’Hollywood peut consacrer une portion beaucoup plus grande d’un budget de production (beaucoup plus grand) à l’acquisition de droits musicaux que ne le ferait un producteur québécois de documentaires.

[67] Les studios d’Hollywood privilégient les licences définitives : ils paient à l’avance pour tous les droits musicaux dont eux-mêmes et les utilisateurs en aval [21] pourraient avoir besoin. D’autres producteurs préfèrent payer moins au départ; ils obtiendront alors une licence libre de tous droits seulement pour le marché visé, assortie d’options leur permettant de libérer les droits pour d’autres marchés ou pour de plus longues périodes.

[68] L’importance des licences définitives pour la SRC et Astral est difficile à évaluer. Elle augmentera dans la mesure où la musique est affranchie de cette façon dans les productions audiovisuelles américaines qu’elles utilisent. Elle diminuera dans la mesure où les producteurs américains utilisent probablement le répertoire de la SODRAC beaucoup moins que les producteurs canadiens ou québécois.

[69] Nous n’estimons pas que l’octroi de licences libres de tous droits en général, et des licences définitives en particulier, constitue la pratique dominante dans le reste du Canada, malgré les assurances contraires données par plusieurs témoins. À cet égard, nous nous fondons largement sur le témoignage de Mme Markou, qui nous paraît équilibré et instructif. Lorsqu’elle obtient une licence pour la musique, la SRC cherche à acquérir un bouquet de droits aussi large que possible, mais seulement pour les utilisations envisagées au moment de la production. Par exemple, une licence peut ne pas inclure une option DVD si on ne prévoit pas une telle sortie. [22] Parfois, seuls certains droits seront payés à l’avance; la licence établit alors le prix pour chaque option. [23] Les négociations de la SRC porteront sur le territoire, le marché, la durée et le nombre d’utilisations, [24] éléments qu’on n’a pas à négocier si la licence est définitive. L’obtention d’une licence pour une utilisation ultérieure est inutile si la licence est définitive. Réduire la durée, renoncer à un marché, prévoir des options pour réduire les droits payables à l’avance [25] ne sont pas compatibles avec les licences définitives. Un rachat définitif complet n’a pas à être renouvelé. [26]

[70] Nous avons examiné le grand nombre de licences signées par la SODRAC et d’autres titulaires de droits qui ont été déposées dans le cadre de la présente instance. Si une licence de synchronisation semblait ambiguë, nous l’avons interprétée comme accordant au producteur non seulement le droit d’effectuer des copies, mais aussi le droit d’autoriser des tiers à effectuer les copies nécessaires pour réaliser le but premier de la production. En d’autres termes, la licence de synchronisation d’un producteur tiers pour une émission destinée à la télédiffusion par la SRC autorise les utilisations par la SRC mentionnées dans la licence, à moins que la licence prévoie clairement le contraire.

[71] Deux remarques s’imposent. Premièrement, les licences définitives ne constituent pas le modèle dominant au Canada. Les licences libres de tous droits existent, mais elles se limitent en général à des marchés spécifiques, probablement afin de réduire les coûts afférents. Deuxièmement, les licences de la SODRAC ne sont pas ambiguës. Cette société a délivré très peu, s’il en est, de licences libres de tous droits.

[72] L’historique des ententes conclues par la SODRAC avec les télédiffuseurs et les producteurs ne laisse aucun doute. En 1990, la Cour suprême a statué qu’il n’existe pas au Canada d’exemption pour les copies éphémères. [27] À partir de 1992, la SODRAC a octroyé des licences aux principaux télédiffuseurs québécois pour leurs copies accessoires de diffusion de musique, et pour autoriser la synchronisation de musique tant dans leurs productions qu’en amont, dans les émissions qu’ils commandent. Depuis 1993, la SODRAC a avisé les producteurs qu’ils ne peuvent pas autoriser les copies en aval. Avant 1998, la SODRAC ne demandait pas au producteur d’obtenir une licence pour une émission si le télédiffuseur ayant commandé l’émission détenait déjà une licence qu’elle avait délivrée, du fait que le télédiffuseur avait déjà payé pour la licence dont le producteur avait besoin. Par la suite, la SODRAC a commencé à exiger que les producteurs demandent une licence pour ces émissions, apparemment pour obtenir les rapports de contenu musical plus facilement. Mais la licence du producteur était toujours octroyée gratuitement. Vers 2006, la SODRAC a commencé à demander aux producteurs de verser des redevances de synchronisation même pour les émissions commandées. Le témoignage de Mme Fortier selon lequel la SODRAC n’a jamais octroyé de licences définitives aux producteurs ne fait que confirmer ce qui ressort des licences : lorsqu’une licence de la SODRAC autorise l’utilisateur à autoriser les copies faites par un tiers, cet utilisateur est presque toujours le télédiffuseur, pas le producteur.

[73] Pratiquement toutes les licences de la SODRAC qui ont été octroyées à des producteurs et qui ont été déposées dans le cadre de la présente instance indiquent clairement, sous une forme ou une autre, que le producteur ne peut autoriser la confection de copies par un télédiffuseur, un distributeur ou un autre exploitant. Ces licences prévoient, entre autres, ce qui suit :

  • le producteur ne peut autoriser les copies effectuées par des tiers. Parfois, on emploie le mot « tiers », d’autres fois l’expression « tiers exploitant », référence évidente à l’utilisateur en aval qui a l’intention d’utiliser l’œuvre en question; [28]

  • la licence permet une première intégration « en vue de l’exploitation par un tiers ». [29] Lorsque la seule exploitation mentionnée dans la licence vise un seul télédiffuseur, celui-ci sera alors le « tiers »; [30]

  • la licence n’autorise que les copies effectuées par le producteur; [31]

  • la licence n’autorise pas les copies en aval effectuées sur les marchés qu’elle vise; [32]

  • la licence est limitée à la première fixation; [33]

  • la licence est non transférable. [34]

[74] Ces libellés s’harmonisent aux ententes de la SODRAC avec les principaux télédiffuseurs québécois. Puisque la SODRAC autorisait par licence ces derniers à effectuer des copies accessoires de diffusion, il aurait été redondant d’autoriser le producteur à autoriser ces copies.

[75] La SODRAC a délivré quelques licences de synchronisation à des producteurs autorisant expressément les copies en aval. Ces licences sont différentes à deux égards importants. [35] Premièrement, les redevances ne correspondent pas à un montant défini; elles sont fonction des revenus. Deuxièmement, la clause prévoyant que la SODRAC réserve tous les autres droits est supprimée ou modifiée.

[76] La plupart des licences de la SODRAC précisent une durée, un territoire et un marché. Astral et la SRC voient en cela une indication que ces licences autorisent toutes les utilisations en aval sur le territoire et le marché visés, pendant la période prévue. Une telle inférence ne serait utile que si les licences de la SODRAC étaient ambiguës, ce qui n’est pas le cas. De plus, la durée, le territoire et le marché peuvent tout aussi bien servir à limiter ce que le producteur peut faire de la copie maîtresse. Il doit obtenir une autre licence avant de chercher à exploiter l’émission ou le film en dehors de ces paramètres : l’émission qui fait l’objet d’une licence pour diffusion à CTV ne peut être offerte à la SRC à moins que le producteur n’obtienne une autre licence.

[77] En outre, certaines dispositions des ententes collectives signées par les associations de producteurs et de compositeurs suivant la Loi sur le statut de l’artiste [36] sont incompatibles avec l’attribution de licences libres de tous droits aux producteurs. [37] Il en va de même pour le contrat de composition type de la Société professionnelle des auteurs et des compositeurs du Québec (SPACQ). [38]

[78] Le dossier est clair. Sur le marché le plus pertinent, soit la province de Québec, les licences libres de tous droits existent, mais ne constituent pas la norme.

[79] Certains témoins ont déclaré que les télédiffuseurs s’attendent à ce que les producteurs libèrent le droit d’effectuer des copies accessoires de diffusion. De fait, selon le contrat type d’Astral, le producteur fournit des assurances en ce sens. La SODRAC n’est pas liée par les attentes des télédiffuseurs ou les assurances des producteurs.

VII. FIXATION DES REDEVANCES

[80] Nous commencerons par statuer sur certaines propositions générales qui guideront la suite des motifs. Nous déciderons ensuite de la façon d’aborder la question de l’ajustement de répertoire. Nous préciserons enfin comment nous sommes parvenus à fixer les redevances pour chaque utilisation visée dans les présents arbitrages.

A. Quelques propositions générales

[81] La première question porte sur la mesure dans laquelle l’adoption de nouvelles technologies devrait entraîner le paiement de redevances. Selon la SRC et Astral, cela ne justifie pas le versement de redevances supplémentaires même lorsqu’il en résulte la réalisation d’un plus grand nombre de copies. Nous ne sommes pas de cet avis. L’adoption de technologies nécessitant la réalisation de copies permet aux télédiffuseurs de demeurer concurrentiels et de protéger leurs activités principales même lorsque ces copies ne génèrent pas de bénéfices directs. Astral et la SRC ont besoin de ces technologies pour demeurer pertinents et que le public continue de les visionner. [39] Il s’agit de nets bénéfices découlant de technologies nécessitant la réalisation de copies. Puisque ces technologies supposent l’utilisation de copies supplémentaires, certains des avantages associés à ces technologies doivent se refléter dans la rémunération découlant de ces copies accessoires supplémentaires.

[82] La deuxième question porte sur la relation qui devrait exister entre la licence que nous approuverons et le marché existant. Nous ne pouvons statuer que sur la relation qu’établira la licence entre SODRAC d’une part, et Astral et la SRC d’autre part. Nous ne pouvons pas imposer à la SODRAC ou aux producteurs une façon d’interagir, encore moins influencer la manière dont les producteurs traitent avec les titulaires autres que la SODRAC.

[83] La troisième question porte sur l’opportunité d’encourager l’octroi de licences libres de tous droits aux producteurs. Il peut y avoir de bonnes raisons de principe de ne pas concevoir la licence que nous délivrons de manière à encourager ou obliger les producteurs à obtenir de telles licences. Au Québec, les budgets de production sont modestes. Forcer les producteurs à obtenir des licences libres de tous droits, surtout des licences définitives, les obligerait à affecter à l’achat de licences pour la musique une plus grande part d’un budget de production déjà insuffisant. Les producteurs devraient être libres de décider s’ils souhaitent offrir un service clé en main pour les œuvres audiovisuelles à l’égard desquelles ils octroient une licence, ou s’ils souhaitent payer uniquement pour les droits qu’ils utilisent. Le mieux que nous puissions faire est de structurer la licence du télédiffuseur de sorte que celui-ci ne soit pas tenu de verser des redevances lorsque le producteur est en mesure de lui fournir l’autorisation requise. Nous aborderons ce point ci-dessous.

B. Ajustements de répertoire

[84] La SODRAC ne représente pas toute la musique protégée. Par conséquent, certaines méthodes d’évaluation exigent l’ajout d’un ajustement relatif au répertoire dans le calcul du taux de redevance.

[85] L’ajustement de répertoire s’effectue en fonction du pourcentage de musique diffusée. Cette approche convient la plupart du temps, notamment si une évaluation est fondée sur ce que la SOCAN perçoit dans le marché concerné. Les taux de la SOCAN sont déjà rajustés en fonction du temps d’antenne de la musique par rapport au temps d’antenne total. [40] C’est ce qui explique que lorsqu’un tarif de la SOCAN sert à établir un taux de redevance pour la SODRAC (ou pour Ré:Sonne), la musique diffusée plutôt que le temps d’antenne devrait être le dénominateur des ajustements de répertoire.

[86] Il faut procéder à un ajustement de répertoire pour le taux de redevance pour les copies accessoires de radiodiffusion. La SODRAC a effectué une analyse qui l’a amenée à conclure que son répertoire représente 34,5 pour cent de la musique diffusée à la radio. La SRC a proposé d’utiliser plutôt un taux de 33 pour cent, puisque l’entente CMRRA-SRC radio dispose que le répertoire de la CMRRA représente 67 pour cent de la musique diffusée. Le pourcentage porté à l’entente est approximatif. L’analyse de la SODRAC est plus transparente et, à notre avis, plus exacte. Par conséquent, les redevances finales reposent sur l’hypothèse selon laquelle 34,5 pour cent de la musique diffusée à la radio de la SRC fait partie du répertoire de la SODRAC.

[87] Il faut également procéder à un tel ajustement pour les copies accessoires de télédiffusion. La SODRAC a effectué des analyses d’utilisation de son répertoire par la SRC et Astral, fondées en général sur un examen des rapports de contenu musical des émissions. Comme il manquait certains renseignements relativement aux chaînes spécialisées, la SODRAC a demandé à Benoît Gauthier du Réseau Circum inc. d’établir une méthode d’échantillonnage de rechange. La SODRAC est ainsi arrivée à la conclusion que l’utilisation de son répertoire, exprimée en pourcentage de la musique diffusée, se présentait comme suit :

SRC :

– Télévision de la SRC : 46,33 pour cent; [41]

– RDI : 86,66 pour cent;

News Network : 37,06 pour cent;

Bold : 42,64 pour cent;

Documentary Channel : 58,36 pour cent.

Astral :

– VRAK.TV : 51,22 pour cent;

– Canal D : 27,77 pour cent;

– Canal Vie : 21,85 pour cent;

– ZTélé : 13,86 pour cent;

– Historia : 20,29 pour cent;

– Séries+ : 27,81 pour cent;

Teletoon (anglais) : 19,19 pour cent;

– Télétoon (français) : 21,06 pour cent;

Teletoon Retro (anglais) : 0,06 pour cent;

– Télétoon Rétro (français) : 0,26 pour cent.

[88] Me Carbonneau, en se fondant sur sa propre analyse, a conclu que les pourcentages avancés étaient exagérés. Elle a estimé l’utilisation du répertoire par les services anglais de télévision conventionnelle de la SRC à 23,23 pour cent. Elle a également affirmé que l’analyse faite par la SODRAC pour les services français de télévision conventionnelle était incomplète et non fiable.

[89] Les opposantes ont fortement mis en doute les résultats des analyses de répertoire faites par la SODRAC. Ayant affirmé que cette dernière demande un montant excessif pour les arrangements d’œuvres du domaine public, elles n’ont fourni aucune preuve de l’impact qu’une telle exagération pourrait avoir sur le calcul global de l’utilisation du répertoire. Nous n’avons aucun motif de croire que la SRC ou Astral utilisent des arrangements récents d’œuvres du domaine public assez fréquemment pour influencer les calculs que nous devons effectuer pour fixer le montant de redevance pertinent.

[90] Les opposantes ont également affirmé que la SODRAC demandait peut-être des redevances pour des œuvres qui ne faisaient pas partie de son répertoire. Il s’agit d’affirmations générales. Les résultats réels nous portent à conclure le contraire. L’analyse effectuée par Astral pour l’une des trois périodes que la SODRAC a examinées pour établir ses ajustements de répertoire comporte des résultats remarquablement similaires à ceux de la SODRAC. [42] Il en est de même de l’analyse effectuée par Me Carbonneau pour répondre à une question de la Commission. [43] La SODRAC a calculé que l’utilisation de son répertoire pour la télévision francophone était de 59,55 pour cent; les calculs de Me Carbonneau donnent 59,25 pour cent. Pour ce qui est de la télévision anglophone, il y a un écart plus important entre les résultats, soit 38,47 pour cent et 21,67 pour cent; ce dernier chiffre a par la suite été porté à 23,23 pour cent.

[91] La SODRAC a proposé de tenir compte de l’analyse effectuée par Astral en l’incluant dans les calculs de l’utilisation du répertoire pour la période visée. Pour les motifs qui suivent, nous préférons utiliser uniquement la moyenne des résultats de la SODRAC tout en faisant remarquer que la prise en considération des données d’Astral, paradoxalement, tend à accroître le taux. Premièrement, l’utilisation des seules données de la SODRAC fait ressortir davantage les différentes tendances qui se dégagent des données relatives à l’utilisation du répertoire sur certaines chaînes. Deuxièmement, les données sont cohérentes. Troisièmement, le fait d’utiliser les données d’Astral modifie apparemment le montant global des redevances d’à peine un pour cent. Les seules exceptions sont les chaînes Télétoon Rétro (français et anglais) pour lesquelles nous disposions de moins de données; pour ces services, nous utilisons la méthode que propose la SODRAC, soit une combinaison de ses propres données et de celles d’Astral.

[92] En ce qui a trait à la SRC, nous préférons l’analyse de la SODRAC à celle de la SRC. L’analyse de la SODRAC se fonde sur les rapports de contenu musical de toutes les émissions diffusées à la télévision pour une période de trois ans. C’est un recensement et non pas un simple échantillon. À l’inverse, l’analyse de la SRC repose sur un dossier sommaire présenté par la SODRAC pour une semaine d’émissions. Pour plus de la moitié des titres analysés par la SRC, la mention « aucun rapport de contenu musical » est inscrite dans le champ des commentaires. La fiabilité de l’analyse s’en trouve nécessairement diminuée. Enfin, les chiffres proposés par la SRC sont douteux du point de vue méthodologique, pour les raisons énumérées par la SODRAC. [44]

[93] Nous concluons donc que l’utilisation du répertoire de la SODRAC, exprimée en pourcentage de la musique diffusée, se présente comme suit :

SRC :

– Télévision de la SRC : 46,33 pour cent;

– RDI : 86,66 pour cent;

News Network : 37,06 pour cent;

Bold : 42,64 pour cent;

Documentary Channel : 58,36 pour cent.

Astral :

– VRAK.TV : 49,85 pour cent;

– Canal D : 28,23 pour cent;

– Canal Vie : 21,83 pour cent;

– ZTélé : 14,30 pour cent;

– Historia : 18,96 pour cent;

– Séries+ : 27,50 pour cent;

Teletoon (anglais) : 19,18 pour cent;

– Télétoon (français) : 21,03 pour cent;

Teletoon Retro (anglais) : 0,06 pour cent;

– Télétoon Rétro (français) : 0,26 pour cent.

[94] Un ajustement de répertoire n’est pas requis pour les redevances payables pour la vente ou la concession en licence d’émissions de la SRC à des consommateurs ou à des tiers télédiffuseurs ou transporteurs : les deux formules proposées rajustent les redevances en fonction du pourcentage de musique du répertoire utilisé dans chaque émission.

C. Fixation des taux applicables

i. Copies accessoires de radiodiffusion

[95] La SRC et la SODRAC conviennent que la radio de la SRC doit payer des redevances pour les copies accessoires de radiodiffusion.

[96] S’appuyant sur le témoignage de MM. Wall et Lefebvre, la SRC propose d’utiliser l’entente de 1992 comme point de départ. M. Audley n’est pas d’accord, entre autres parce qu’aucune des parties n’avait à l’époque de renseignements à propos de l’utilisation du répertoire de la SODRAC. Nous sommes d’accord avec M. Audley. Qui plus est, l’entente a été conclue à une époque et dans un contexte qui ont beaucoup évolué depuis (voir : Radio de la SRC (2011)). [45]

[97] L’entente CMRRA-SRC radio fixe expressément les redevances pour le droit de reproduction au tiers des redevances de communication, avant ajustement de répertoire. La SODRAC propose de faire de même dans le cas présent. S’appuyant sur le témoignage de MM. Wall et Lefebvre, la SRC soutient que cette approche entraînerait des augmentations qui ne cadrent pas avec l’évolution historique des redevances versées à la SOCAN. Les témoins de la SRC ont soutenu également que l’entente n’est pas une base fiable pour fixer des redevances compte tenu des circonstances dans lesquelles elle a été négociée.

[98] Pour arriver à la conclusion que l’augmentation des redevances ne cadrerait pas avec les augmentations des paiements à la SOCAN, il faut utiliser, aux fins de comparaison, l’entente de 1992 que nous venons de rejeter comme point de départ. Nous estimons qu’il n’y a aucune raison de le faire. Nous estimons également qu’il n’y a aucune raison d’ignorer l’entente CMRRA-SRC radio. C’est le meilleur point de comparaison dont nous disposons en l’espèce. Elle témoigne d’une convergence de vues entre le même utilisateur et une société sœur, précisément pour les mêmes utilisations. À tout le moins, elle confirme que le marché accepte dans une certaine mesure un rapport qui s’apparente à celui que la Commission a utilisé dans d’autres dossiers pour effectuer des comparaisons semblables.

[99] Cela dit, nous préférons utiliser l’entente CMRRA-SRC radio pour valider le rapport de 3,2 à 1 que nous avons appliqué dans Radio commerciale (2010). [46] Utiliser ce rapport fait en sorte que la SRC et la radio commerciale jouissent d’un traitement égal. Nous appliquons ce rapport aux redevances que nous avons fixées récemment dans Radio de la SRC (2011). [47] Pour les motifs énoncés au paragraphe 86, les redevances finales reflètent une utilisation de 34,5 pour cent du répertoire par la radio. Par conséquent, nous homologuons les taux suivants : 174 476 $ pour 2008, 177 251 $ pour 2009, 180 955 $ pour 2010 et 184 574 $ pour 2011.

[100] Les taux que la Commission a homologués dans Radio de la SRC (2011) comprennent un montant de 1,22 pour cent pour les activités de diffusion simultanée de la radio de la SRC. Ce montant a été supprimé du calcul ci-dessus. Les redevances applicables à ces activités et aux autres copies pour Internet sont énoncées ci-dessous.

[101] La Commission n’a pas homologué les redevances que la SRC versera à la SOCAN pour 2012. Afin de maintenir le lien entre les redevances de la SOCAN et celles de la SODRAC, la licence stipule que ces dernières redevances seront calculées selon la formule que nous avons utilisée pour les années 2008 à 2011 :

0,1065 × redevances de la SOCAN pour 2012

où 0,1065 = (1 × 0,345) ÷ (1,0122 × 3,2).

[102] La SRC paiera le même montant qu’en 2011 à titre de redevances provisoires. Le rajustement des redevances de la SODRAC, s’il en est, sera exigible à la date que fixera la Commission pour le rajustement des redevances de la SOCAN pour 2012 au moment de l’homologation de ce dernier tarif.

ii. Copies accessoires de télédiffusion

[103] Chacune des parties a proposé pour l’essentiel une méthode unique pour fixer les redevances applicables aux copies accessoires de diffusion faites par tous les services de télévision à l’étude.

[104] Astral et la SRC réclamaient des redevances nulles ou très faibles en se fondant sur l’hypothèse qu’elles n’ont pas besoin de licence pour ce genre de copies; MM. Wall et Lefebvre ont ainsi proposé que le prix d’une licence pour les copies accessoires de diffusion d’Astral corresponde au plus à 5 pour cent de la valeur totale des licences obtenues par les producteurs dont les émissions sont diffusées sur les chaînes Astral. Nous ne sommes pas d’accord. Comme nous l’expliquons aux paragraphes 69 à 79, la licence libre de tous droits n’est pas aussi répandue dans le marché pertinent que les opposantes l’affirment. La SRC et Astral effectuent des copies accessoires de télédiffusion pour lesquelles elles doivent détenir une licence de la SODRAC; cela comprend les copies faites par la SRC de ses propres productions, pour lesquelles les redevances de synchronisation sont calculées séparément ci-dessous.

[105] S’appuyant sur la conclusion de M. Murphy selon laquelle l’utilisation de copies à la radio et à la télévision est essentiellement la même, la SODRAC a soutenu qu’une analyse de ratios qui est valable pour la radio de la SRC l’est également pour la télévision de la SRC et que toute analyse de ratios qui est valable pour la télévision de la SRC l’est également pour Astral. La SODRAC s’est également appuyée sur une entente qu’elle a conclue avec ARTV pour étayer l’approche qu’elle propose.

[106] MM. Wall et Lefebvre ont affirmé que l’entente conclue avec ARTV n’est pas un point de comparaison approprié, car elle autorise non seulement les copies accessoires de diffusion, mais également celles effectuées dans le cadre des productions internes. Nous sommes d’accord.

[107] Ces experts ont également contesté l’application à la télévision du ratio pour la radio en soulignant des différences qu’ils jugent importantes entre les deux médias. Premièrement, les producteurs sont en mesure d’autoriser les copies accessoires de télédiffusion. Nous avons déjà conclu que ce n’est pas le cas (voir les paragraphes 69 à 79). Deuxièmement, la musique remplit un rôle beaucoup plus important à la radio. À notre avis, l’écart entre les taux de la SOCAN pour la radio (4,4 pour cent) et la télévision (1,9 pour cent) tient déjà compte des différences pertinentes entre ces médias. Troisièmement, les télédiffuseurs n’ont pratiquement aucune influence sur la nature et la quantité de musique diffusée dans la plupart des émissions. Nous n’arrivons pas à voir en quoi cela est pertinent. Nous avons déjà conclu que les télédiffuseurs tirent des bénéfices des copies qu’ils font de la musique synchronisée. Rien ne nous permet de conclure que la valeur relative de la copie et de la communication pour la télévision est différente de celle pour la radio.

[108] Le fait d’établir un lien entre les redevances SODRAC pour les copies accessoires de diffusion et les redevances qu’un télédiffuseur verse à la SOCAN comporte un autre avantage. Les copies accessoires de diffusion n’ont sans doute pas toutes la même valeur. On pourrait soutenir que les redevances à verser pour une diffusion subséquente à la première devraient être moindres que celles exigées pour cette dernière. En général, une rediffusion attire un plus faible auditoire et le producteur reçoit moins. Le rapport entre les droits de licence pour la première diffusion et pour les diffusions subséquentes est impossible à déterminer, comme en témoignent les hypothèses sur lesquelles se sont appuyés les experts des parties pour calculer un tel rapport. Les redevances globales de la SOCAN tiennent compte implicitement de ces écarts de valeur en raison de la façon dont elles sont établies.

[109] Par conséquent, nous appliquerons à la télévision le même ratio que pour la radio. Les redevances applicables à la télévision conventionnelle de la SRC correspondront à 31,25 pour cent des redevances de la SOCAN avant l’ajustement de répertoire. Les autres services de télévision visés paient des taux de redevance de 0,8 ou 1,9 pour cent. En appliquant le ratio, nous obtenons des taux, avant l’ajustement de répertoire, de 0,59375 pour cent pour chaque chaîne spécialisée d’Astral, de 0,59375 pour cent pour Bold et Documentary Channel et de 0,25 pour cent pour RDI et News Network.

[110] Pour les motifs énoncés aux paragraphes 87 à 92, nous préférons les ajustements de répertoire proposés par la SODRAC à ceux proposés par les opposantes. En ce qui a trait à la SRC, nous obtenons ainsi les taux suivants :

  • Télévision conventionnelle : 14,478 pour cent (31,25 % × 0,4633) des redevances que la télévision de la SRC verse à la SOCAN;

  • RDI : 0,217 pour cent (0,25 % × 0,8666) du revenu brut;

  • News Network : 0,093 pour cent (0,25 % × 0,3706);

  • Bold : 0,253 pour cent (0,59375 % × 0,4264);

  • Documentary Channel : 0,347 pour cent (0,59375 % × 0,5836).

[111] Pour les services de télévision d’Astral, les taux sont les suivants :

  • – VRAK.TV : 0,296 pour cent (0,59375 % × 0,4985) du revenu brut;
  • – Canal D : 0,168 pour cent (0,59375 % × 0,2823);
  • – Canal Vie : 0,130 pour cent (0,59375 % × 0,2183);
  • – Ztélé : 0,085 pour cent (0,59375 % × 0,1430);
  • – Historia : 0,113 pour cent (0,59375 % × 0,1896);
  • – Séries+ : 0,163 pour cent (0,59375 % × 0,2750);
  • Teletoon (anglais) : 0,114 pour cent (0,59375 % × 0,1918);
  • Télétoon (français) : 0,125 pour cent (0,59375 % × 0,2103);
  • Teletoon Retro (anglais) : 0,0004 pour cent (0,59375 % × 0,0006);
  • Télétoon Rétro (français) : 0,002 pour cent (0,59375 % × 0,0026).

[112] La SRC et Astral diffusent des émissions de télévision pour lesquelles le producteur a affranchi le droit de faire des copies accessoires de diffusion. La formule de calcul des droits doit en tenir compte. Nous permettrons aux diffuseurs de réduire les redevances qu’il leur faudrait autrement verser à la SODRAC s’ils peuvent prouver que le producteur peut autoriser les copies en aval d’œuvres musicales. Le calcul de l’escompte reposera sur le coût d’acquisition de l’émission comme numérateur et sur les coûts d’acquisition totaux du télédiffuseur comme dénominateur pour toutes les émissions sauf celles produites par la SRC; dans ce dernier cas, le calcul reposera sur les coûts de production de l’émission.

[113] Pour l’instant, nous ne permettrons pas aux télédiffuseurs d’escompter leurs redevances pour les émissions n’utilisant pas de musique de la SODRAC; l’utilisation d’œuvres musicales autres que celles de la SODRAC est déjà prise en compte dans nos ajustements de répertoire.

[114] La SODRAC détient certains droits à titre non exclusif : ses membres titulaires de droits peuvent autoriser directement l’utilisation de copies. La SODRAC affirme que cette forme d’affranchissement n’est pas possible dans les cas où elle offre une licence générale. À cause de la façon dont la SRC et Astral seront autorisées à réduire les redevances dans le cas où un producteur obtient une licence libre de tous droits, il est inutile de se pencher sur cette question.

iii. Synchronisation – SRC

[115] La SRC a besoin d’une licence pour synchroniser des œuvres du répertoire de la SODRAC dans ses productions internes et ses coproductions destinées à la télévision conventionnelle, à RDI et à News Network. La SODRAC part de l’hypothèse que la relation entre une copie de synchronisation et une copie accessoire de diffusion est la même que celle qui existe entre les copies faites pour livrer un téléchargement permanent et une transmission sur demande. Il s’agit d’un droit principal dans le premier cas et d’un droit accessoire dans l’autre.

[116] Le ratio de redevances de reproduction entre le téléchargement permanent et la transmission sur demande est de 1,9 à 1. La SODRAC a proposé d’utiliser ce rapport pour fixer les redevances de synchronisation de la SRC. Les redevances seraient ensuite escomptées pour tenir compte du fait que la SRC devrait payer des redevances de synchronisation uniquement pour ses productions internes et ses coproductions tandis qu’elle paie des redevances pour les copies accessoires de diffusion de toutes les émissions.

[117] MM. Wall et Lefebvre ont invoqué deux motifs pour contester cette approche. Premièrement, il est incongru d’établir la valeur d’un droit principal en fonction d’un droit accessoire. Deuxièmement, les similitudes entre la musique en ligne et la télévision sont loin d’être évidentes, entre autres parce qu’aucune copie de synchronisation n’est faite pour transmettre la musique sur Internet aux fins du téléchargement ou de l’écoute en continu. Nous sommes d’accord.

[118] S’appuyant sur le témoignage de ces experts, la SRC a proposé d’utiliser l’entente de 1992 comme point de départ. Les redevances sont réparties entre la télévision et la radio selon le rapport des paiements de la SRC à la SOCAN, puis rajustées en fonction des changements de l’utilisation du répertoire et de l’inflation. Ensuite, on escompte ce que les producteurs versent présentement à la SODRAC pour tenir compte du fait que la SODRAC, au moment de l’entente de 1992, ne percevait pas de redevances auprès des producteurs. Pour les motifs énoncés au paragraphe 96, nous estimons que cette approche ne convient pas.

[119] Subsidiairement, la SRC a proposé d’utiliser les licences générales de synchronisation convenues entre la SODRAC et certains télédiffuseurs pour établir des redevances comparables pour une licence libre de tous droits. MM. Wall et Lefebvre ont établi des taux par minute implicites qu’ils ont ensuite multipliés pour tenir compte de l’utilisation du répertoire et rajustés pour tenir compte uniquement des productions internes et des coproductions (puisque ces experts ont affirmé que les producteurs affranchissent tous les droits pertinents à l’égard des autres émissions). Selon M. Audley, cette approche ne tient pas compte des écarts quant aux revenus et à l’importance de l’exploitation et suppose des utilisations identiques des répertoires pertinents. Elle suppose, à tort, que chaque télédiffuseur produit certaines émissions à l’interne. Nous sommes d’accord avec M. Audley.

[120] En dernier lieu, la SRC a proposé une approche ascendante comportant les étapes suivantes. Premièrement, on détermine la quantité, en secondes, de musique préexistante et de commande figurant dans le répertoire de la SODRAC qu’utilise la SRC dans ses productions internes et ses coproductions au cours d’une année; cela est nécessaire parce que le mode de calcul des redevances de synchronisation est différent pour les deux types de musique. [48] Deuxièmement, il faut fixer un prix pour deux unités de temps (dans le cas présent, 30 secondes et la chanson au complet) de musique utilisée dans chaque catégorie. Troisièmement, on multiplie le premier nombre par le second pour chaque catégorie. C’est l’approche privilégiée par MM. Wall et Lefebvre, car ils estiment qu’elle offre la plus grande concordance avec ce que serait le prix du marché. Elle s’apparente par ailleurs aux calculs effectués par la SODRAC pour valider la redevance qu’elle propose.

[121] Pour les motifs qui suivent, nous sommes d’avis que cette approche fournit la meilleure estimation des redevances que la SRC devrait payer pour ses copies de synchronisation. Premièrement, il s’agit d’une approche transactionnelle. Puisqu’elle s’appuie sur l’utilisation réelle du répertoire par la SRC, il est possible de la rajuster en fonction des habitudes de consommation de musique de la SRC. Deuxièmement, elle applique des prix différents aux œuvres préexistantes et aux œuvres de commande, comme c’est apparemment le cas dans le marché existant. Troisièmement, malgré les lacunes énumérées ci-dessous, nous croyons qu’elle donne des résultats suffisamment fiables et équitables dans les circonstances. C’est l’approche que nous adopterons, sous réserve de certains rajustements et du règlement de certains différends entre les parties.

[122] Il faut d’abord déterminer la quantité, en minutes, d’œuvres musicales préexistantes et de commande figurant dans le répertoire de la SODRAC que la SRC utilise dans ses propres productions au cours d’une année. À cet égard, la SODRAC a déposé des données exhaustives pour les années 2006 à 2008. En utilisant ces données, on est arrivé à deux nombres moyens, annuels que les parties ont utilisés. Le nombre d’unités de 30 secondes de musique préexistante, rajusté en fonction du répertoire, correspond à 2 195,28, tandis que le nombre de minutes de musique de commande est de 40 744.

[123] Ensuite, il faut calculer séparément les redevances pour le droit de synchroniser la musique préexistante et la musique de commande.

[124] En ce qui a trait aux œuvres préexistantes, MM. Wall et Lefebvre s’appuyaient sur les licences délivrées par des titulaires de droits autres que la SODRAC pour parvenir à des redevances de 198 $ par extrait de 30 secondes et de 338 $ par chanson complète. M. Audley a contesté leur approche; pourquoi utiliserait-on uniquement des licences de titulaires autres que la SODRAC pour fixer un prix dans un marché où la SODRAC a une forte présence? Il a dit préférer appliquer le barème de la SODRAC, soit 300 $ par extrait de 30 secondes et 1 200 $ par chanson complète. Pour le premier montant, M. Audley s’appuyait sur le témoignage de Me Lavallée selon lequel les taux du barème correspondent aux moyennes du marché. Pour le second, M. Audley s’appuyait sur la pratique du marché qui consiste à plafonner les redevances pour une chanson complète à quatre fois le taux de redevance pour un extrait de 30 secondes.

[125] MM. Wall et Lefebvre ont refait leur analyse en s’appuyant cette fois sur certaines licences de la SODRAC déposées au dossier de la présente affaire. Ils ont calculé un taux de redevance de 265 $ pour 30 secondes. Nous utilisons ce taux pour deux motifs. Premièrement, il tient compte de la présence de la SODRAC dans le marché. Deuxièmement, il reflète de réelles ententes qui font partie du dossier : un barème de taux agit souvent comme plafond des redevances. [49] Pour les motifs énoncés par M. Audley, nous plafonnons à quatre le nombre d’unités par chanson. L’application de ces taux aux chiffres dont il est question au paragraphe 122 donne des droits de licence de synchronisation annuels moyens de 581 749 $.

[126] En ce qui a trait aux œuvres de commande, MM. Wall et Lefebvre ont utilisé comme point de départ l’entente conclue entre la SPACQ (le syndicat des compositeurs), l’Association des producteurs de films et de télévision du Québec (APFTQ : le syndicat des producteurs audiovisuels) et la SODRAC (« l’entente tripartite »). Cette entente découle de l’entente-cadre conclue entre la SPACQ et l’APFTQ en vertu de la loi fédérale sur le statut de l’artiste. Selon cette entente, lorsqu’une œuvre musicale est commandée pour une émission ou une série non produite à l’intention d’un télédiffuseur titulaire d’une licence générale de la SODRAC l’habilitant à autoriser les producteurs à synchroniser la musique de la SODRAC dans l’émission commandée, la SODRAC doit recevoir des redevances de synchronisation de 100 $ par émission ou de 200 $ par série.

[127] Les experts ont choisi d’utiliser le taux applicable aux séries parce que celles-ci représentent l’essentiel de la production visée par l’entente. Ils ont présumé en outre qu’une série type comporte 13 épisodes, ce qui donne un taux de redevance de 15,38 $ par épisode. Un examen des minutes d’utilisation dans un épisode d’une série type indique que l’utilisation de musique de commande est inférieure à cinq minutes. Les experts ont ainsi déterminé que les droits de synchronisation pour une minute de musique de commande sont d’environ 3 $. Par conséquent, les droits de synchronisation implicites moyens applicables aux œuvres de commande dans les productions de la SRC sont d’environ 122 000 $ par année. [50]

[128] M. Audley a proposé quelques modifications à cette approche. Premièrement, il a fait remarquer que la somme de 200 $ est payée uniquement au nom de l’auteur. Selon la pratique courante au Québec, les redevances sont réparties également entre l’auteur et l’éditeur. C’est la raison pour laquelle il a soutenu que le double du montant payé au compositeur, soit 400 $, serait un point de départ approprié. Deuxièmement, il a souligné que l’entente tripartite, s’appuyant sur l’entente-cadre, définit une série comme une production de deux épisodes ou plus. Dans cet esprit, il a proposé d’estimer le nombre d’épisodes par série comme une moyenne entre 2 et 13, soit 7,5. En maintenant à cinq le nombre de minutes de musique de commande par épisode, M. Audley a calculé que les droits de synchronisation pour une minute de musique de commande étaient d’environ 10,67 $, pour des droits de synchronisation annuels moyens de 434 738 $.

[129] Nous sommes d’accord avec les parties pour utiliser l’entente tripartite comme point de départ. Pour les raisons évoquées par M. Audley, nous concluons que la redevance devrait être le double, soit 400 $. Nous n’appuyons pas l’hypothèse de M. Audley concernant le nombre d’épisodes par série. Son approche plafonne le nombre d’épisodes à 13; or, l’entente autorise des séries beaucoup plus longues, en stipulant entre autres que les saisons subséquentes d’une même série ne donnent pas lieu au paiement de redevances supplémentaires, sauf s’il y a nouvelle commande d’œuvres musicales. À ce sujet, nous préférons l’approche de MM. Wall et Lefebvre. Comme le nombre de cinq minutes de musique de commande par épisode n’est pas contesté, c’est celui que nous appliquons. Nous obtenons ainsi un tarif de 6,1538 $ par minute et des redevances de synchronisation annuelles moyennes de 250 730 $ pour l’utilisation par la SRC d’œuvres musicales de commande faisant partie du répertoire de la SODRAC.

[130] Par conséquent, les droits de licence de synchronisation annuels totaux pour la SRC s’élèvent à 832 479 $ (581 749 $ + 250 730 $) pour la période de 2006 à 2008. Nous avons décidé d’utiliser la moyenne pour la période parce que le résultat obtenu pour chaque année est à toutes fins utiles constant : 833 324 $ en 2006, 841 207 $ en 2007 et 823 091 $ en 2008. C’est le cas malgré un certain déplacement au cours de la période des œuvres préexistantes aux œuvres de commande. Rien n’indique que le résultat pourrait être très différent pour les années 2008 à 2012.

[131] MM. Wall et Lefebvre sont partis du principe que la licence de synchronisation de la SRC serait une licence libre de tous droits. Bien que ce ne soit pas le cas au bout du compte, il ne devrait en découler aucun escompte : les licences libres de tous droits sont manifestement l’exception, et non la règle, pour les propres productions de la SRC.

[132] MM. Wall et Lefebvre ont proposé l’application d’un escompte de 40 pour cent pour tenir compte de la nature d’une licence générale et des économies s’y rattachant. Nous ne sommes pas d’accord. Une licence générale profite aux deux parties. La Commission n’a jamais appliqué un escompte au titre d’une licence générale. En fait, sa seule décision en la matière a majoré le taux pour tenir compte des avantages que procure la licence générale aux stations de radio commerciale à faible utilisation. [51] Ni la SRC ni ses experts n’ont offert de raison convaincante de renier la pratique antérieure.

[133] Les droits de synchronisation pour les webisodes produits aux fins de diffusion sur Internet sont abordés ci-dessous, en même temps que les autres redevances applicables à la télévision sur Internet.

[134] Nous avons opté pour une redevance annuelle unique applicable à toute la musique synchronisée par la SRC. Nous avons fait ce choix en partie parce que les analyses et les arguments des parties ainsi que l’information qu’elles nous ont fournie favorisaient cette approche, et ce, malgré certaines réserves.

[135] Le marché de l’utilisation de musique dans les émissions télévisées se prête bien à l’octroi de licences ponctuelles. Déjà, les licences de synchronisation se négocient largement à la pièce. La nature et l’étendue des droits accordés par chaque licence varient considérablement. Les pratiques varient d’un marché à l’autre et d’un pays à l’autre, et il continuera d’en être ainsi.

[136] Les télédiffuseurs utilisent des œuvres audiovisuelles variées provenant de sources et de pays différents. La SRC a rarement besoin d’une licence de la SODRAC quand elle diffuse un film de Disney. Dans le cas des coproductions avec des télédiffuseurs étrangers, il est impossible de déterminer s’il faut une licence SODRAC sans d’abord lire le contrat et, parfois, sans savoir d’abord si le contrat est respecté.

[137] Une licence générale assortie de redevances fixes, qu’il s’agisse d’un taux ou d’un montant fixe, repose nécessairement sur une analyse incomplète d’hypothèses et de généralités (nombre d’épisodes dans une série, coût moyen des licences ponctuelles de synchronisation, quantité de musique préexistante ou de commande utilisée) tirées de transactions et de faits passés. Elle réduit en partie la liberté dont jouissent les autres acteurs du marché.

[138] Une licence qui rend compte des ententes ponctuelles permet de faire des choix. Elle respecte le principe voulant que la Commission ne puisse imposer une obligation qui n’existe pas ni exempter d’une obligation qui existe. [52]

[139] En outre, nous ne sommes pas certains de l’utilité à long terme de l’entente tripartite comme point de départ pour calculer les redevances de synchronisation pour la musique de commande. Nous aurions préféré en savoir davantage sur le contexte de l’entente. Nous ne saisissons pas tout à fait la raison pour laquelle il a fallu transformer un simple taux par émission ou par série en un taux par minute. Nous saisissons tout aussi mal la raison pour laquelle, si la plupart des émissions utilisent moins de cinq minutes de musique de commande, il faudrait diviser par cinq la redevance par épisode. L’utilisation d’un nombre plus élevé que la moyenne aura tendance à réduire artificiellement le montant total des redevances.

[140] Les parties voudront sans doute revoir ces questions en temps et lieu.

iv. Services audio sur Internet – SRC

[141] La SRC offre différents services audio et audiovisuels sur Internet, notamment la diffusion simultanée du signal radio conventionnel, des services autonomes (Bande à part, CBC Radio 3) et la baladodiffusion.

[142] L’entente CMRRA-SRC radio fixe à 4 pour cent des redevances applicables à la radio conventionnelle les redevances pour la diffusion simultanée et la transmission en continu et à 3 pour cent pour la baladodiffusion, soit une redevance supplémentaire totale de 7 pour cent pour l’Internet. La SODRAC a proposé d’utiliser ces taux. La SRC n’a proposé aucune redevance; elle a plutôt affirmé que les copies Internet n’ont à peu près pas de valeur, que Bande à part et CBC Radio 3 utilisent uniquement de la musique appartenant à des personnes qui assurent n’être membres d’aucune société de gestion, et que la plupart des baladodiffusions de la SRC ne contiennent pas de musique. La SRC a en outre affirmé que l’entente CMRRA-SRC radio ne devrait pas servir de point de comparaison puisqu’elle a été conclue sous toutes réserves afin d’éviter de longues négociations ou des procédures coûteuses.

[143] Nous avons déjà conclu que les copies requises pour faciliter le recours aux nouveaux modes de livraison appellent à une rémunération. Le fait que ces nouveaux modes ne soient pas rentables actuellement peut influer sur le montant des redevances, mais non sur leur existence. L’assurance donnée par des tiers qu’ils ne sont pas membres de la SODRAC ne permet pas de conclure qu’aucune licence n’est requise, bien que nous soyons enclins à convenir que ce pourrait être le cas en général pour Bande à part et Radio 3. Nous ne pouvons pas conclure que les baladodiffusions de la SRC ne contiennent aucune musique de la SODRAC à défaut de preuves concrètes à l’appui de cette affirmation, entre autres parce qu’elle est contraire au sens commun : pourquoi supprimerait-on un indicatif musical d’un balado? [53]

[144] Seulement deux points de référence éventuellement fiables nous ont été fournis. Dans le premier cas, il s’agit des tarifs de la SOCAN applicables à Internet. Conformément aux tarifs 1.C (Radio de la SRC) et 22.E (Internet – SRC) de la SOCAN, la SRC paie un supplément total de 2,72 pour cent pour ses utilisations Internet de musique de la SOCAN. Dans le second, il s’agit de l’entente CMRRA-SRC radio que la SODRAC nous propose d’utiliser. Très peu de données ont servi à établir les taux fixés pour la SOCAN. Le prix qui figure dans l’entente CMRRA-SRC radio est un point de référence aussi fiable pour Internet que pour la radio conventionnelle. C’est l’approche que nous adoptons. La SRC paiera un supplément de 7 pour cent des redevances de la radio conventionnelle pour ses utilisations sur Internet.

[145] La SRC continue d’accroître son offre de musique sur Internet. La pertinence d’imposer des redevances distinctes pour l’offre de musique en ligne ou d’augmenter le supplément pourra être examinée ultérieurement. Durant la période à l’étude, cette offre n’était pas suffisamment importante pour justifier un nouvel examen de la question.

v. Télévision sur Internet

[146] Pour les motifs déjà invoqués, nous concluons que les copies Internet ont une valeur et que des redevances devraient être versées pour celles-ci.

[147] L’entente CMRRA-SRC radio prévoit un supplément de 4 pour cent des redevances de la radio conventionnelle pour la diffusion simultanée et la transmission en continu. La SODRAC propose d’appliquer cette formule à la diffusion audiovisuelle sur Internet. La SODRAC n’a pas demandé de redevances pour la baladodiffusion audiovisuelle.

[148] L’entente CMRRA-SRC radio est la seule preuve dont nous disposons pour fixer un taux. Les motifs qui nous ont amenés à appliquer la même formule aux copies accessoires de radiodiffusion et de télédiffusion sont tout aussi valables dans le cas présent. Il se pourrait même que le taux soit trop bas, car il ne tient pas compte de la valeur ajoutée de l’accès exclusif à la musique de commande.

[149] Certains webisodes sont produits exclusivement pour diffusion sur Internet. On ne nous a pas fourni de données permettant d’estimer les droits de synchronisation pour ce genre de productions. Par conséquent, le moyen le plus simple de régler la question est de stipuler que le taux supplémentaire de 4 pour cent autorise également les copies de synchronisation.

[150] Par conséquent, la SRC paiera un supplément correspondant à 4 pour cent de toutes les redevances applicables à la télévision pour tenir compte de toutes les copies de musique audiovisuelles destinées à l’Internet.

vi. Vente d’émissions aux consommateurs pour usage privé (DVD et téléchargements)

[151] La SRC et la SODRAC conviennent que la SRC devrait continuer de payer des redevances pour ses ventes d’émissions aux consommateurs pour usage privé. Nous sommes d’accord.

[152] En ce qui a trait aux copies de DVD, la SRC demande le statu quo. La SODRAC propose une augmentation de 57 pour cent, sans aucune donnée à l’appui. Vu l’absence de preuve, nous préférons utiliser les taux existants, rajustés en fonction de l’inflation. Comme la licence s’appliquera de novembre 2008 à mars 2012, nous rajustons les taux pour toute cette période en fonction de l’inflation jusqu’à la médiane, soit juillet 2010. D’après les données de l’inflation tirées du site Web de Statistique Canada, l’indice des prix à la consommation est passé de 101,2 à 116,8 entre octobre 2002, quand l’entente de 2002 a été conclue, et juillet 2010. Un rajustement de 15,4 pour cent s’impose donc. Pour la musique de premier plan, les taux par minute, par conséquent, sont de 1,44 ¢ pour les 15 premières minutes, de 0,87 ¢ pour les 15 minutes suivantes et de 0,52 ¢ par la suite. Les taux applicables à la musique de fond correspondent à 0,58 ¢, 0,35 ¢ et 0,21 ¢. La licence reprend les dispositions de l’entente de 2002 traitant des émissions où la musique domine, la musique de commande et les coffrets.

[153] La SODRAC propose d’appliquer aux ventes en ligne le même taux que pour les ventes de DVD. D’après sa compréhension du marché, la SRC affirme que les redevances pour les ventes en ligne devraient être moins élevées que pour les DVD. La SRC n’a pas fourni de données pour étayer cette affirmation. Compte tenu de l’absence de preuve à l’effet contraire, nous estimons qu’il n’y a aucune raison de traiter de façon différente ces types de ventes.

vii. Vente ou concession en licence d’émissions de la SRC à des tiers télédiffuseurs et transporteurs – SRC

[154] La SODRAC propose d’appliquer à la vente ou à la concession en licence d’émissions à des tiers télédiffuseurs et transporteurs la même redevance que celle fixée par la Commission en 2000 pour MusiquePlus, [54] soit 3 pour cent des revenus, ajusté en fonction de l’utilisation réelle du répertoire dans l’émission visée. La SRC propose plutôt que nous nous en remettions à une entente récente entre la SODRAC et un télédiffuseur québécois qui ne paie pas de redevances additionnelles pour de telles copies. Aucune autre preuve n’a été fournie.

[155] L’entente récente que la SRC invoque n’est pas une mesure fiable, pour deux motifs. Premièrement, les redevances pour la licence générale sont établies à un pourcentage des revenus, y compris les revenus de production. Les redevances que nous avons établies jusqu’à maintenant ne tiennent aucun compte de ces revenus pour la SRC, qui ne paierait rien pour les copies qu’elle fait pour livrer ses émissions à des tiers. Deuxièmement, la licence semble anormale : règle générale, la SODRAC ne délivre pas une seule licence aux radiodiffuseurs pour leurs copies accessoires de diffusion et pour celles faites pour concéder en licence des émissions à des tiers.

[156] Par contre, le taux établi dans MusiquePlus (2000) est à première vue raisonnable. Compte tenu de l’absence de preuve à l’effet contraire, il n’y a aucune raison de faire une distinction entre télédiffuseurs se livrant à la même activité. Par conséquent, les redevances pour les copies que la SRC fait en relation avec la vente ou la concession en licences d’émissions à des tiers télédiffuseurs sont établies à 3 pour cent des revenus, ajustées en fonction du répertoire.

D. Récapitulatif des tarifs homologués, des redevances et de la capacité de payer

[157] Les tableaux 1 et 2 en annexe récapitulent les tarifs que nous homologuons pour les activités de reproduction de la SRC et d’Astral.

[158] D’après les données qui nous ont été fournies, nous estimons à 2,3 millions de dollars le montant que la SRC devra verser pour toutes ses utilisations du répertoire de la SODRAC en 2008, à l’exclusion des ventes d’émissions aux consommateurs et de la concession en licence d’émissions de la SRC à des tiers télédiffuseurs. Pour Astral, nous estimons à 370 000 $ les redevances payables pour cette même année à l’égard de tous les services visés dans la licence.

TARIF 5 DE LA SODRAC

[159] La présente partie de nos motifs porte sur le projet de tarif 5 de la SODRAC pour la reproduction au Canada d’œuvres musicales incorporées à des œuvres cinématographiques en vue de la distribution de copies de ces œuvres cinématographiques pour usage privé ou en salle pour les années 2009 à 2012. Comme il est mentionné au paragraphe 13, le tarif vise deux types de copies musicales : les copies sur DVD destinées à la vente au détail ou à la location, et les copies pour usage en salle, le film-annonce y compris.

VIII. PARTIES, POSITIONS ET TAUX PROPOSÉS

[160] La SODRAC est décrite au paragraphe 18. L’ACDEF est une organisation professionnelle représentant les distributeurs et exportateurs de films et d’émissions de télévision. L’AC-C est le porte-parole des grands producteurs et distributeurs internationaux de films, divertissements à domicile et émissions de télévision au Canada.

[161] Le tarif 5 de la SODRAC a d’abord été homologué le 24 juin 2005. Il ne visait que les copies DVD d’œuvres cinématographiques destinées aux salles et à la télévision. Les redevances avaient été fixées à 1,2 pour cent des revenus de distribution. Le tarif avait fait l’objet d’une entente préalable entre la SODRAC et l’ACDEF. [55]

[162] Dans la présente affaire, la SODRAC maintient sensiblement la même position que lors des arbitrages. Chaque copie devrait faire l’objet de redevances. La SODRAC ne délivre pas de licences définitives ou de licences libres de tous droits. Les licences définitives sont rares, voire inexistantes, dans le marché pertinent. La SODRAC perçoit depuis des années des redevances sur les DVD, et le marché a entièrement intégré cette pratique.

[163] La SODRAC a d’abord proposé un taux de redevance sur les DVD de 1,2 pour cent des revenus de distribution moyennant une redevance minimale de 8 ¢ par DVD destiné à la vente au détail et de 32 ¢ [56] par DVD destiné à la location aux consommateurs. Ayant étudié l’énoncé de cause de l’ACDEF et pris compte de la préférence de l’association à cet égard, la SODRAC a ensuite proposé d’utiliser plutôt les mêmes barèmes qu’elle proposait à l’égard de la vente par la SRC d’émissions télévisées aux consommateurs. Pour la musique de premier plan, elle proposait un taux de 1,92 ¢ pour les quinze premières minutes, 1,18 ¢ pour les quinze minutes suivantes et 0,71 ¢ par la suite. Les taux applicables à la musique de fond s’établiraient à 0,78 ¢ 0,47 ¢ et 0,28 ¢ respectivement.

[164] La SODRAC a aussi dit souhaiter que le champ d’application du tarif soit étendu à deux égards. Tout d’abord, elle a demandé que le tarif s’applique aussi aux sorties directes en vidéo. Ensuite, elle a réclamé que les distributeurs de films versent 1,2 pour cent de leurs revenus de distribution pour les copies pour usage en salle. D’autres modifications du tarif sont proposées dans le but d’en clarifier le champ d’application.

[165] La position de l’ACDEF correspond de près à celle de la SRC et d’Astral. Les producteurs affranchissent déjà tous les droits requis en aval. La méthode proposée ne correspond pas aux pratiques courantes d’octroi de licences de l’industrie cinématographique nord-américaine et bouleverserait un marché déjà efficient.

[166] Subsidiairement, l’ACDEF a proposé que le tarif soit structuré comme l’entente de 2002 de la SRC, à deux différences importantes près. Le tarif n’établirait pas de distinction entre la musique de premier plan et la musique de fond, et les taux augmenteraient, au lieu de diminuer, avec la quantité de musique utilisée : 0,65 ¢ la minute pour les quinze premières minutes, 1,25 ¢ pour les quinze minutes suivantes, et 2,0 ¢ par la suite. Les redevances seraient plafonnées à 1,2 pour cent des revenus de distribution. Enfin, le tarif établirait une distinction entre les copies produites au Canada et celles produites ailleurs; seules les premières seraient assujetties au tarif.

[167] L’ACDEF a avancé que la Commission ne devrait pas imposer un tarif distinct aux copies pour usage en salle. Les producteurs affranchissent déjà les droits requis. Un film-annonce n’a aucune valeur commerciale et ne produit aucun revenu : les cinéphiles ne paieront pas pour le voir. Il n’est ni sensé ni efficient d’imposer une licence distincte pour des reproductions qui ont peu de valeur intrinsèque, voire aucune. Subsidiairement, l’ACDEF a proposé que toute redevance visant la copie pour usage en salle soit nominale, calculée par film, et escomptable pour ne tenir compte que de la musique provenant du répertoire de la SODRAC. En définitive toutefois, l’ACDEF a préconisé un montant forfaitaire de 100 $ par distributeur, par année et sans égard au nombre de copies pour usage en salle.

[168] L’ACDEF s’est opposée à l’application du tarif aux sorties directes en vidéo, alléguant que la SODRAC n’en a pas communiqué ses raisons. Enfin, l’ACDEF a prétendu que les obligations de rapport que veut imposer la SODRAC sont lourdes et exagérées.

[169] Comme il est mentionné au paragraphe 2, l’AC-C a présenté des observations détaillées, qui concordent en gros avec les arguments de l’ACDEF. L’AC-C a ajouté que la structure tarifaire proposée devrait être associée à l’acte de reproduction et non aux revenus de distribution, et que la musique dont les droits ont été affranchis ou qui n’est pas tirée du répertoire de la SODRAC ne devrait pas être assujettie à des redevances. Toutefois, si la Commission décidait de fonder le tarif sur l’utilisation moyenne de musique sur un DVD, le taux applicable aux œuvres audiovisuelles non canadiennes devrait représenter 10 pour cent du taux applicable aux œuvres canadiennes, pour refléter l’importance relative de l’utilisation du répertoire de la SODRAC dans ces deux types d’œuvres.

IX. PREUVE

[170] Mme Fortier et Me Lavallée ont témoigné pour le compte de la SODRAC. Ils ont décrit les diverses licences, expliqué l’historique des négociations qui ont abouti au tarif 5 de la SODRAC et fourni d’autres renseignements généraux. En ce qui concerne le taux applicable aux DVD, par exemple, la SODRAC s’est largement fondée sur les mêmes arguments et données qu’elle a mis de l’avant relativement aux ventes par la SRC d’émissions aux consommateurs pour usage privé. Elle s’est fondée sur la méthode utilisée dans une autre décision de la Commission [57] pour calculer les redevances minimales à percevoir sur les DVD. Il est inutile d’examiner ici son calcul ou les preuves contraires présentées par les témoins de l’ACDEF, pour des raisons qui s’expliqueront d’elles-mêmes. En ce qui concerne les copies pour usage en salle, la SODRAC a uniquement justifié son taux de 1,2 pour cent en avançant qu’il est le même que celui qu’elle a proposé au départ pour les copies de DVD.

[171] Patrick Roy, président et chef de la direction chez Alliance Atlantis Vivafilm, et Ted East, président de l’ACDEF, ont témoigné pour le compte de cette dernière. Ils ont décrit le marché canadien de la distribution de films et commenté les négociations qui ont donné lieu à l’entente sur le tarif 5 de la SODRAC. Ils ont également évoqué des situations où la SODRAC avait réclamé des redevances au titre d’œuvres musicales dont les droits avaient été affranchis. Ils ont avancé que la licence libre de tous droits était courante dans le marché et qu’il n’était pas justifié de percevoir des redevances additionnelles.

[172] Les témoins de l’ACDEF ont également fait des observations sur les marchés du DVD et des salles de cinéma. Les DVD sont produits sous l’autorité du distributeur. M. Roy a déclaré que très peu de films canadiens sortent directement en DVD. Le film-annonce a fait l’objet d’une attention particulière, puisque la musique y est utilisée soit en contexte, soit hors contexte. L’utilisation en contexte se produit lorsque la musique est interprétée telle que synchronisée dans la scène montrée dans le film-annonce. Toute autre utilisation de musique est hors contexte, que la musique ait déjà été utilisée dans le film ou seulement dans le film-annonce. D’après les témoins de l’ACDEF, la licence de synchronisation du producteur permet généralement les utilisations en contexte uniquement; pour les utilisations hors contexte, le distributeur et non le producteur doit affranchir les droits auprès de l’éditeur de musique.

X. ANALYSE

[173] Pour les raisons évoquées aux paragraphes 69 à 79, les distributeurs canadiens doivent obtenir des licences de la SODRAC, mais pas aussi souvent que celle-ci le dit. Par ailleurs, il nous faut tenir compte de la présence des grands studios hollywoodiens qui est bien plus grande dans ce marché que dans celui de la télédiffusion. À cause de la façon dont ils libèrent les droits musicaux pour leurs productions, les redevances payables à l’égard d’un film donné doivent varier selon la quantité de musique utilisée nécessitant une licence de la SODRAC.

A. Tarif pour les copies sur DVD

[174] En 2005, la Commission avait fait remarquer que rien ne permettait de déterminer si le taux qu’elle avait homologué correspondait à la valeur réelle du droit. [58] Le dossier de la présente affaire ne jette pas plus de lumière sur cette question. Nous abandonnons le taux de 1,2 pour cent en faveur de la structure appliquée aux ventes par la SRC d’émissions aux consommateurs, pour trois raisons. D’abord, cette structure tarifaire semble avoir bien servi la SRC et la SODRAC. Ensuite, les parties acceptent de l’appliquer. Enfin, elle permet d’ajuster les redevances en fonction de la nécessité pour le distributeur d’avoir recours au répertoire de la SODRAC.

[175] La SODRAC nous demande de tout simplement intégrer la structure tarifaire de la SRC dans le tarif. L’ACDEF propose d’établir deux différences importantes. Le tarif ne distinguerait pas la musique de premier plan et la musique de fond et les taux augmenteraient au lieu de diminuer en fonction de la durée de la musique utilisée.

[176] Les parties n’ont pas offert grand-chose pour défendre une formule plutôt que l’autre. Au bout du compte, nous acceptons la proposition des distributeurs pour deux raisons. Premièrement, nous sommes disposés à concéder pour l’heure que le fait de demander aux distributeurs de faire une distinction entre la musique de fond et la musique de premier plan créerait des problèmes d’application du tarif. Nous devons en apprendre davantage sur le modus operandi apparemment satisfaisant dont la SRC et la SODRAC ont convenu avant d’imposer pareilles distinctions. Deuxièmement, nous n’avons aucun moyen d’évaluer l’incidence qu’aurait une structure tarifaire progressive plutôt que dégressive sur l’ensemble des redevances. Ici encore, les données recueillies auprès de la SRC et des distributeurs nous permettront sans doute de le faire dans nos travaux futurs. Le taux est donc fixé à 0,65 ¢ par copie par minute pour les quinze premières minutes, 1,25 ¢ pour les quinze minutes suivantes et 2,0 ¢ par la suite.

[177] Nous ne plafonnerons pas les redevances à 1,2 pour cent des revenus de distribution. Rien ne nous permet de croire qu’un plafond est approprié ou qu’il devrait être fixé à ce niveau.

[178] Nous convenons avec la SODRAC que le tarif devrait s’appliquer aux sorties directes en vidéo. Le fait que peu d’œuvres audiovisuelles canadiennes sont distribuées de cette façon ne justifie pas en soi de laisser cette composante du marché dans l’incertitude.

B. Tarif pour les copies pour usage en salle

[179] Nous homologuons un tarif nominal pour les copies pour usage en salle, pour les films-annonces (à l’exception des utilisations hors contexte) et pour les autres copies accessoires de distribution, de 100 $ par an pour tout distributeur d’un film incorporant de la musique du répertoire de la SODRAC. En voici nos raisons.

[180] Premièrement, nous devons fixer un prix à ces copies. Les licences délivrées aux producteurs par la SODRAC et d’autres titulaires de droits n’affranchissent pas toujours les copies accessoires de distribution. Quelques distributeurs devront certainement obtenir une licence de la SODRAC pour faire ces copies.

[181] Deuxièmement, la SODRAC n’a offert aucune justification du taux proposé de 1,2 pour cent des revenus de distribution. Le taux provient du marché du DVD, dans lequel il a été abandonné. Les marchés du DVD et des salles de cinéma sont structurés de façon très différente.

[182] Troisièmement, la SODRAC n’a pas pu prouver que les copies accessoires de distribution ont une valeur intrinsèque importante. Bien au contraire, le dossier porte à croire que cette valeur est faible. Ainsi, nous ne comprenons pas pourquoi il faudrait payer pour la musique quand un film-annonce est projeté et pas pour la préécoute de téléchargements musicaux. [59]

[183] Quatrièmement, la grande majorité des films présentés dans les salles canadiennes sont des productions américaines. Les producteurs américains libèrent généralement les droits requis pour faire des copies accessoires de distribution, sauf pour les utilisations hors contexte dans les films-annonces.

[184] Il faut établir un tarif à l’égard des copies accessoires de distribution. Toutefois, à la lecture du dossier, force est de constater que la plupart de ces copies sont déjà visées par une licence et que le marché leur accorde peu de valeur, sinon aucune. C’est pourquoi nous établissons un tarif nominal. La SODRAC devra se préparer à présenter dans le cadre d’examens futurs la preuve de l’importance de la quantité aussi bien que de la valeur des copies accessoires de diffusion si elle souhaite faire homologuer un tarif autre que nominal.

[185] L’article 7 du projet de tarif autoriserait l’utilisation hors contexte d’œuvres musicales déjà incorporées à l’œuvre cinématographique qu’un film-annonce a pour but de promouvoir. Rien ne nous semble le justifier. La preuve nous porte à croire que l’utilisation hors contexte fait déjà l’objet de négociations distinctes.

[186] Le tableau 3 en annexe résume les taux que nous homologuons pour le tarif 5 de la SODRAC.

LE LIBELLÉ DU TARIF ET DES LICENCES

[187] Cette fois encore, la Commission a demandé à son avocat général de mener des discussions avec les parties sur le libellé des licences et du tarif. Les discussions se sont révélées longues et ardues, en partie parce que certaines questions qui auraient dû être soulevées pendant les audiences ne l’ont été qu’au moment de ces discussions. À l’avenir, ces questions devraient faire l’objet de discussions pendant les audiences, et non après.

XI. TARIF 5

[188] Les exigences de rapport ont monopolisé une bonne partie des discussions sur le libellé du tarif, en grande partie à cause du changement apporté à la formule de calcul du tarif.

[189] Le tarif homologué par la Commission pour la période de 2004 à 2008 était un pourcentage des revenus d’un distributeur sans égard à l’utilisation du répertoire. À la demande de l’ACDEF, nous abandonnons la formule basée sur les revenus en faveur d’un tarif en cents par minute de musique exigeant une licence de la SODRAC, par DVD vendu. Ainsi, le distributeur doit maintenant savoir la quantité de musique exigeant une licence de la SODRAC que contient chaque film. En soi, ce changement de formule justifie l’accroissement des exigences de rapport.

[190] L’ACDEF a formulé un certain nombre de suggestions (parfois contradictoires) quant à la répartition du fardeau de rapport entre les distributeurs et la SODRAC. Ainsi, l’ACDEF a demandé que les distributeurs ne fassent rapport à la SODRAC que si un film exige une licence de la SODRAC, mais a proposé en même temps de transférer à la SODRAC le fardeau de déterminer quelle musique exige une licence. Au bout du compte, l’ACDEF a proposé que les distributeurs fassent rapport en au moins deux temps. Des informations sommaires seraient d’abord fournies pour permettre à la SODRAC de déterminer si une licence est requise et préciser le montant des redevances par DVD vendu. Si ces informations sont jugées insuffisantes, la SODRAC pourrait demander un complément d’information. L’ACDEF a aussi fait valoir que les distributeurs ne devraient pas être obligés de fournir des renseignements ne servant qu’à la distribution.

[191] L’ACDEF a étayé sa position avec les arguments suivants. Tous les droits sur la musique sont affranchis à la source, sauf pour la SODRAC. La SODRAC est la mieux placée pour déterminer si un distributeur doit avoir une licence de la SODRAC pour un film donné. Ainsi, il devrait incomber à la SODRAC de déterminer les films qui contiennent de la musique exigeant une licence de la SODRAC. En outre, si la majorité des droits sur la musique sont affranchis à la source, la licence de la SODRAC est d’une utilité négligeable, et les exigences de rapport devraient être progressives. Enfin, les distributeurs ne devraient pas être obligés de fournir des renseignements ne servant qu’à la distribution, car les utilisateurs ne devraient pas avoir à faire le travail de la société de gestion.

[192] Certains des arguments avancés par l’ACDEF ont du sens. Cela dit, la SODRAC souligne à juste titre qu’elle ne peut pas déterminer si un film exige une licence de la SODRAC, à moins de recevoir des informations sur chaque film. Cette observation, en plus de notre conclusion antérieure selon laquelle la licence de la SODRAC n’est pas d’une utilité aussi négligeable sur le marché pertinent que le prétendent les distributeurs, nous amène à établir les exigences de rapport selon les principes suivants.

[193] Premièrement, et règle générale, il devrait incomber à l’utilisateur de déterminer, à l’avance, quelles utilisations exigent une licence. Dans ces circonstances, cependant, ce principe doit être adapté aux réalités du marché. Par conséquent, nous convenons avec l’ACDEF que la SODRAC est la mieux placée pour déterminer si un distributeur a besoin d’une licence de la SODRAC pour un film donné.

[194] Deuxièmement, si la SODRAC est chargée de déterminer si une licence est nécessaire pour chaque film, elle devrait recevoir certaines informations sur chaque film.

[195] Troisièmement, fournir un renseignement est un fardeau qui devrait incomber à celui qui a le plus de chances de l’avoir. Ainsi, la SODRAC devrait être chargée de déterminer si une œuvre figure dans son répertoire, mais le distributeur soutenant qu’une œuvre fait déjà l’objet d’une licence devrait être invité à fournir cette licence.

[196] Quatrièmement, les utilisateurs devront fournir une quantité raisonnable d’information servant à la distribution.

[197] À partir de ces principes, nous établissons les exigences de rapport du tarif comme suit.

[198] Les distributeurs font rapport à la SODRAC sur chaque film qu’ils distribuent, que le film contienne ou non de la musique exigeant une licence de la SODRAC. Toute autre approche exigerait du distributeur qu’il détermine quels films doivent faire l’objet d’une licence de la SODRAC, une tâche que, de l’aveu de l’ACDEF et de la SODRAC, le distributeur aurait du mal à effectuer. À strictement parler, toutefois, si un distributeur ne distribue aucun film exigeant une licence de la SODRAC pendant la période d’effet du tarif, il n’est pas visé par le tarif et, par conséquent, n’a aucune obligation de faire rapport à la SODRAC.

[199] Dans la plupart des cas, il semble que la SODRAC puisse déterminer le contenu musical d’un film à partir du générique du DVD, de sa pochette et d’un rapport de contenu musical. Des renseignements supplémentaires ne sont requis que dans certains cas. Par conséquent, les distributeurs ne devraient pas être tenus de toujours fournir toutes les informations. La SODRAC devrait plutôt avoir le droit de demander des informations supplémentaires au besoin seulement. Par conséquent, les rapports se feront en plusieurs étapes.

[200] Premièrement, le distributeur fournit les informations dont il dispose facilement : le numéro d’identification que les distributeurs attribuent toujours à un film, la jaquette, le DVD lui-même et, s’il est disponible, le rapport de contenu musical. Pour l’instant, ce rapport ne sera fourni que s’il est disponible; il semble qu’il soit rarement fourni aux distributeurs même s’ils y ont droit aux termes des contrats.

[201] Deuxièmement, la SODRAC tente de déterminer, en fonction des informations qu’elle a reçues et de tout autre élément dont elle dispose déjà, le montant qui lui est dû et la façon de distribuer équitablement les redevances perçues.

[202] Troisièmement, si le rapport de contenu musical n’a pas été fourni, le distributeur devra collaborer avec la SODRAC pour en obtenir un exemplaire. C’est après seulement que la SODRAC aura droit à des informations supplémentaires.

[203] Enfin, les rares fois où toutes ces informations ne suffisent pas pour que la SODRAC puisse établir le montant des redevances et répartir ces dernières équitablement, la SODRAC pourra demander encore plus d’informations, que le distributeur serait plus à même d’obtenir que la SODRAC.

[204] Le tarif ne rendra pas obligatoire la fourniture d’informations qui ne sont pas disponibles pour les distributeurs, du moins pas pour l’instant. La SODRAC convient que les exigences de rapport doivent tenir compte de la réalité des distributeurs.

[205] Le sens du terme « disponible » a soulevé certaines questions, surtout à l’égard des transactions qui ont eu lieu avant l’entrée en vigueur du tarif. Ainsi, même si les informations contenues dans un contrat signé par un distributeur lui sont disponibles, retrouver un contrat signé en 2008 ou 2009 peut se révéler chronophage. Forcer les distributeurs à le faire ne présente aucun intérêt, du moins pendant la période d’effet d’un premier tarif dont l’échéance est prévue pour la fin de l’année. À long terme, cependant, les distributeurs devraient être tenus d’établir des systèmes leur permettant de récupérer, au moment de signer des contrats, de l’information disponible et utile de ces contrats. Le tarif précisera donc dans les dispositions transitoires que le terme « disponible » s’entend de « facilement disponible » en ce qui concerne les transactions effectuées d’ici le 31 décembre 2012. Les distributeurs auront ainsi jusqu’à la fin de l’année pour modifier leurs systèmes de rapport.

[206] Étant donné le faible montant de redevances sur l’utilisation de la musique pour les copies pour usage en salle et les bandes-annonces, la SODRAC ne recevra pas d’informations à cet égard.

[207] La SODRAC a demandé de recevoir des informations sur tout menu, supplément, bande-annonce ou autre élément se trouvant sur le DVD. Les modalités types des contrats de distribution prévoient apparemment que ces informations seront fournies au distributeur. Dans la pratique, toutefois, il semble qu’elles ne le soient pas. Ces informations sont, au mieux, de peu d’utilité, car c’est le film qui importe vraiment au spectateur, pas les éléments supplémentaires. Les distributeurs ne seront pas tenus de fournir ces informations, pour l’instant du moins.

[208] Les distributeurs devront faire rapport sur le nombre d’exemplaires de promotion et non pas seulement certifier, comme l’ACDEF l’a proposé, qu’ils n’ont pas dépassé le nombre maximal d’exemplaires autorisé par le tarif (300). La SODRAC devrait pouvoir confirmer si un distributeur respecte ce nombre à partir des rapports qu’il produit, sans devoir recourir à une vérification.

[209] Le tarif ne prévoit pas de mécanisme permettant aux distributeurs de conserver des réserves de redevances pour les exemplaires invendus. Comme les redevances ne s’appliquent qu’aux exemplaires vendus, la question devrait être sans portée pratique.

[210] Les distributeurs ne seront pas autorisés à effectuer une vérification de la SODRAC; il existe d’autres façons de vérifier si une œuvre doit faire l’objet d’une licence de la SODRAC. Les vérifications ne seront pas non plus limitées à une par année.

[211] Le tarif prévoit des dispositions transitoires rendues nécessaires parce que le tarif prend effet le 1er janvier 2009, mais qu’il est homologué bien après. À la demande de l’ACDEF, les erreurs dans les paiements de redevances commises avant la fin de 2012 ne feront pas l’objet des pénalités habituelles : le changement apporté à la formule tarifaire et la nécessité d’établir de nouveaux systèmes de rapport justifient cette exception. Des intérêts sur le redressement des redevances requis pour la période de 2009 à 2012 ne seront pas exigés non plus, la SODRAC y ayant consenti.

[212] Les réponses que nous avons reçues de l’ACDEF à propos des informations que les distributeurs fournissent aux producteurs ne nous ont pas vraiment éclairés. Il semblerait que les distributeurs ne tiennent pas de dossiers d’inventaire précis. Pourtant, au moins certaines ententes de distribution sont fondées sur un pourcentage des revenus, et nous ne voyons pas comment un distributeur pourrait suivre ses revenus sans suivre ses ventes. Chaque film fait l’objet d’un contrat distinct comportant des avances distinctes, etc., avec chacun des producteurs. Même si le paiement des redevances au producteur est fondé sur le total des revenus, ce total ne peut être obtenu que par l’addition des ventes individuelles de chacun des films.

[213] Néanmoins, si ces énoncés sont vrais, la nouvelle formule tarifaire pourrait causer encore plus de problèmes que la précédente. Par exemple, si les distributeurs prennent seulement en compte les ventes en dollars plutôt que les unités, il ne serait peut-être pas pertinent de recourir à une formule fondée sur le nombre d’unités. Cette question sera certainement traitée au cours des prochaines audiences.

[214] Pendant les discussions sur le libellé du tarif, la possibilité que le tarif autorise les exemplaires produits à l’étranger qui violeraient les règles sur les importations parallèles a été évoquée. L’ACDEF a objecté que le tarif proposé ciblait seulement les exemplaires dont un distributeur avait autorisé la production. La SODRAC n’a pas répondu. Dans les circonstances, nous n’avons pas inclus cette disposition.

XII. LES LICENCES SODRAC/ASTRAL ET SODRAC/SRC

[215] Les discussions portant sur le libellé des licences ont été aussi difficiles, sinon davantage, que pour le tarif SODRAC 5. Comme on le verra plus loin, les parties ont soulevé des questions qu’il aurait été préférable de débattre durant les audiences. Cela dit, le libellé des licences s’inspire dans une large part des principes énoncés aux paragraphes 193 à 205.

A. Ce que les licences ne prévoient pas

[216] Les licences ne visent que les services qu’on y mentionne, et ne prévoient pas de formule permettant d’en étendre l’application aux services qui pourraient venir s’ajouter. Cela n’est pas nécessaire : contrairement à un tarif, une licence ne s’applique pas à titre de mesure provisoire après qu’elle ait expiré. La licence SRC ne vise pas le service Explora, mis en ondes quelques jours avant la date d’expiration de la licence. La Commission a décidé le 30 avril de traiter de l’ensemble des opérations de ce service en même temps que la licence générale SRC pour 2012-2016.

[217] Les opposantes ont demandé d’inclure une clause selon laquelle une modification à la Loi ayant un impact sur les droits conférés par la licence entraînerait automatiquement sa réouverture. Une telle disposition serait inutile, étant donné que les licences expirent avant l’entrée en vigueur des récents amendements à la Loi.

[218] Nous n’incluons pas une disposition, demandée par la SODRAC, prévoyant que la licence est incessible. L’entrée dans le marché est suffisamment réglementée par le CRTC pour ne pas soulever les craintes qui amènent la SODRAC à vouloir prévoir une telle disposition.

B. Définitions

[219] Les licences comportent un certain nombre de définitions dont les termes définis débutent par une majuscule.

[220] La définition de « Diffusion » a été longuement débattue. En bout de piste, nous avons repris la définition de « radiodiffusion » dans la Loi sur la radiodiffusion, [60] ajustée aux besoins de l’instance. Le dernier paragraphe de la définition permet l’accès à la vidéo sur demande accessible gratuitement aux abonnés d’un service (VRAK) mais qui n’entraîne pas de paiement supplémentaire à l’achat de ce service.

[221] La définition d’« Émission de la SRC » établit la distinction entre ce qui est assujetti à la licence SRC de synchronisation télévision et ce pour quoi le droit de synchronisation doit être libéré autrement. Cette disposition a fait l’objet d’un débat long et complexe.

[222] Au départ, la SODRAC proposait ce qui suit :

œuvre audiovisuelle produite par le Réseau SRC/CBC ou coproduite avec un producteur indépendant non affilié au Réseau SRC/CBC, dans la mesure où le Réseau SRC/CBC détient plus de 50 % des droits de propriété et du droit d’auteur sur l’œuvre audiovisuelle et, dans tous les cas, où le Réseau SRC/CBC contrôle la production de cette œuvre audiovisuelle et que cette dernière ne soit pas admissible à un crédit d’impôt ou un financement privé, public ou parapublic (excluant les sommes attribuées au Réseau SRC/CBC par le Conseil du Trésor).

[223] Pendant les discussions sur le libellé de sa licence, la SRC a soutenu que cette définition ne reflétait pas son modèle d’affaires. La licence devrait autoriser la synchronisation dans des émissions que la SRC finance, qu’elle en détienne ou non les droits. La définition devrait englober toute coproduction de la SRC, peu importe le pourcentage de droits détenu par chaque partie ou la source de financement. La césure à 50 pour cent serait artificielle. Les notions de production, de coproduction et de contrôle de la production seraient difficiles à appliquer.

[224] L’avocat général de la Commission a alors avancé, à titre préliminaire, la définition suivante :

Émission de radio ou de télévision dont la SRC a défrayé plus de la moitié des coûts de production, que l’émission ait ou non été produite par la SRC et que cette dernière en détienne ou non les droits d’auteur.

[225] La SODRAC s’est opposée à ce changement pour des motifs qui se résument à ce qui suit. D’abord, il faut que la Commission décide qui est responsable de libérer les droits, ce que la définition modifiée ne permet pas de faire. Ensuite, il faut cesser de permettre à la SRC d’autoriser les copies en amont des producteurs indépendants dont ils financent la production. C’est l’ancien modèle, désormais abandonné. Enfin, la césure à 50 pour cent, si artificielle soit-elle, est le fondement même des calculs que la SODRAC et la SRC semblent avoir opérés pour établir la proportion du temps de diffusion qu’occupent les productions internes de la SRC et ce, même si elles arrivent à des résultats différents (68 pour cent pour la SODRAC, 43 pour cent pour la SRC).

[226] Enfin et surtout, la SODRAC a soutenu qu’il était trop tard pour débattre d’une modification aussi radicale de la définition établissant ce qui est ou non assujetti à la licence de synchronisation télévisuelle. Premièrement, la nouvelle définition modifierait le cadre juridique du débat. Les opposantes ont toujours convenu que le producteur doit obtenir la licence de synchronisation. Le débat a porté sur la part relative des productions internes et sur ce qui constitue une telle production. Il n’a pas porté sur la substitution de cette notion par une autre. Deuxièmement, le dossier ne comporte aucune preuve permettant d’établir la part des émissions correspondant à la définition proposée. Si la licence était modulée en fonction de la consommation réelle, le problème serait moindre : il faudrait classifier chaque émission puis calculer les redevances pour chacune. Or, la licence que la Commission entend adopter est forfaitaire et donc fonction d’hypothèses sur ce qui se qualifie ou non : en changeant la définition, on change les données ayant servi au calcul du montant forfaitaire. Troisièmement, le lien entre le producteur et la licence de synchronisation semble prima facie naturel. Par contre, on n’a pas suffisamment exploré la nature du rapport SRC/producteur lorsque la SRC n’est pas le producteur mais défraie la majorité des coûts de production.

[227] Nous abondons dans le sens de la SODRAC. Avant tout, il s’agit d’une question de fond qui aurait dû être abordée lors des audiences et qui suppose la présence au dossier d’une preuve qui ne s’y trouve pas. Il est possible que la définition crée certaines incertitudes : la façon dont la SRC et la SODRAC s’y sont chacune prises pour ventiler ce qui constitue ou non une production interne ne nous a pas permis de dissiper tous nos doutes à cet égard, loin de là. Cela dit, la place qu’occupe le concept de producteur dans les règlements du CRTC et ailleurs nous amène à conclure que les parties seront en mesure pour l’instant de régler les mésententes minimes qui pourraient subsister à l’égard du passé.

[228] En toute fin, la SODRAC a suggéré de définir ce qui est assujetti à la licence de synchronisation en fonction des règles de certification d’émissions canadiennes du CRTC. La SRC s’y est opposée. Nous partageons ce dernier point de vue. Procéder comme la SODRAC le propose exige qu’on utilise un concept qui n’a pas fait l’objet du débat pendant les audiences.

C. Utilisations que la licence autorise

[229] La disposition a évolué considérablement par rapport à ce que la SODRAC proposait. Le libellé final, s’il ne fait pas l’unanimité, reflète bien davantage les pratiques des usagers.

[230] Nous avons supprimé la référence au droit moral de l’auteur, qui ne semble pas nécessaire dans des licences impliquant des usagers aussi expérimentés.

[231] Nous avons étendu autant que possible le droit de l’usager de se servir de la musique dans l’autopublicité de l’émission ou de la série pertinente. On pourra désormais se servir de la musique utilisée dans une émission d’une série avec les images d’une autre émission de la même série pour annoncer la série. De même, et malgré l’opposition de la SODRAC, on pourra se servir de l’œuvre dans un montage visant à promouvoir le service sur les ondes duquel une émission est diffusée, pour autant que l’œuvre reste associée à des images de la série dont elle est tirée. Il y a là certes une question de droit moral. Cela dit, nous présumons que l’auteur qui consent à ce que sa musique soit incorporée dans une émission s’attend à ce qu’on cherche à la promouvoir.

[232] L’article 2.03 de la licence SRC autorise cette dernière à autoriser un tiers à reproduire une œuvre du répertoire uniquement si elle est déjà synchronisée dans l’émission. Cela devrait éviter qu’on cherche à utiliser la disposition pour autoriser à nouveau la synchronisation en aval par le producteur indépendant d’une émission destinée à être diffusée sur les ondes de la SRC mais dont la SRC ne détient pas les droits.

D. Réserves

[233] Cette disposition énonce expressément certaines limites par rapport à ce que la licence autorise. La disposition est beaucoup plus brève que ce que demandait la SODRAC. À strictement parler, de telles réserves ne sont pas nécessaires. Il est d’ailleurs préférable que la licence soit suffisamment claire pour pouvoir s’en passer. Cela dit, la complexité des enjeux que les parties ont soulevés quant à la véritable portée des licences antérieures et de celles que la présente décision établit démontre l’utilité de telles dispositions, par ailleurs courantes tant dans les licences contractuelles que dans les tarifs de la Commission. Ce que nous avons prévu s’inspire avant tout des cas de figure que la SODRAC semble craindre.

E. Redevances

[234] Comme nous l’expliquons aux paragraphes 112 à 114, les licences permettent à la SRC et à Astral de ne pas payer de redevances pour les reproductions incidentes de diffusion d’émissions contenant des œuvres faisant partie du répertoire de la SODRAC et pour lesquelles les droits ont été libérés à la source.

[235] Les conditions que nous avons attachées à cet escompte sont passablement strictes. Premièrement, il faut que l’émission contienne au moins une œuvre du répertoire; pour les motifs exposés au paragraphe 113, les recettes de l’émission ne contenant aucune œuvre du répertoire demeurent dans l’assiette tarifaire. Deuxièmement, il faut que la SRC remette à la SODRAC la documentation établissant que les droits de reproduction incidente de diffusion ont été libérés à l’égard de toutes les œuvres du répertoire incorporées à l’émission. Cette documentation inclut nécessairement, au minimum, les ententes de licence et le rapport de contenu musical. L’assurance que le producteur ou le distributeur offre à cet égard dans la licence de diffusion ne saurait suffire.

[236] L’escompte est fonction des coûts de production pour une Émission de la SRC, et des coûts d’acquisition pour toute autre émission diffusée sur les ondes de la SRC ou d’Astral.

[237] La SODRAC n’a pas opposé de fin de non-recevoir à l’escompte. Par contre, elle a soulevé plusieurs questions à première vue légitimes portant sur l’encadrement des coûts de production et sur les obligations de rapport qui devraient baliser l’escompte. On pourrait sans doute en soulever d’autres, dont la possibilité d’imposer une prime à l’option, comme c’est le cas pour les redevances que la télévision verse à la SOCAN en vertu de la licence générale modifiée. Cela dit, les conditions que nous imposons sont suffisamment strictes, d’autant qu’il s’agit de licences régissant essentiellement des conduites passées. Pour reprendre l’expression utilisée par les opposantes, nous préférons « laisser vivre » la licence un certain temps avant de décider si elle a besoin d’être ajustée. [61]

[238] La SODRAC demandait de recevoir à l’avance tous les renseignements financiers et autres utilisés pour calculer l’escompte. L’accès à cette documentation relève de la vérification. Exiger de l’usager qu’il fournisse les licences établissant que les droits ont été libérés suffit.

[239] Les opposantes ont demandé que l’escompte s’applique au service qui ne fait pas usage du répertoire durant tout un mois. La façon dont l’escompte s’applique rend le débat caduc : l’escompte s’applique uniquement aux émissions qui contiennent des œuvres du répertoire, pour les motifs exposés au paragraphe 113. Comme le souligne la SODRAC, les taux que la licence établit sont des moyennes qui tiennent déjà compte de la possibilité que le répertoire ne serve pas durant certaines périodes.

F. Obligations de rapport et de paiement

[240] La SODRAC voulait recevoir tout ce qu’Astral ou la SRC transmettent à la SOCAN. Cela serait excessif. L’usager doit rendre compte à la SOCAN à l’égard de bien des œuvres qui ne relèvent pas de la SODRAC. Cela dit, l’usager doit nécessairement fournir à la SODRAC un renseignement pertinent qui a été remis à la SOCAN.

[241] La SODRAC demandait que la licence autorise la SOCAN à transmettre à la SODRAC ce qu’elle reçoit. Nous préférons trancher la question lors de l’examen du prochain tarif de la SOCAN.

G. Accès au répertoire de la SODRAC

[242] La SODRAC s’entend pour un accès public au répertoire et à la liste des sociétés de gestion étrangères qu’elle représente. Elle demande toutefois que l’accès soit sécurisé pour ce qui est de la part des droits qu’elle administre. Nous ne sommes pas d’accord. La part de droits que la SODRAC détient est un renseignement que cette dernière devrait fournir en vertu d’une demande déposée conformément à l’article 70.11 de la Loi.

H. Registres et vérifications

[243] Les dispositions pertinentes comportent certains éléments inhabituels, ajoutés à la demande des usagers : recours à un vérificateur externe, préavis de 10 jours. Nous acceptons d’inclure ces éléments, à titre exceptionnel, parce qu’il s’agit d’une licence et non d’un tarif et que la SODRAC semble ne pas s’y opposer. Par contre, il aurait été excessif d’exiger que le vérificateur indépendant et externe s’engage par écrit à se conformer à la disposition sur le traitement confidentiel. Nous n’avons pas non plus étendu le droit à vérification aux opposantes ni limité le nombre de vérifications.

I. Garantie

[244] La SODRAC accepte de garantir l’usager contre certaines actions. Tout comme les opposantes, nous préférons parler de réclamation. Cela reflète davantage la façon dont ces dispositions opèrent en pratique : la SODRAC a intérêt à prendre fait et cause pour un titulaire de licence dès qu’un tiers se manifeste (réclamation) et sans attendre que le processus judiciaire soit enclenché (action), de façon à minimiser ses frais.

[245] Les licences ne précisent pas ce qui devrait advenir si une opposante a payé des redevances à un représentant ou sous-éditeur d’un ayant droit de la SODRAC. De telles situations devraient être régies par les ententes pertinentes. Dans la mesure où elles posent problème, les opposantes auront le loisir de soulever la question dans le cadre de l’examen des prochaines licences.

J. Traitement confidentiel

[246] À la demande des opposantes, la disposition précise que la divulgation de renseignements confidentiels « à la SODRAC » ne vise que les membres du conseil et les employés. Nous acceptons d’inclure cette précision, à titre exceptionnel, parce qu’il s’agit d’une licence et non d’un tarif et que la SODRAC semble ne pas s’y opposer. Par contre, ce serait trop exiger que de prévoir que la communication de renseignements à la personne qui demande le versement de redevances ne se fasse que si l’intéressé s’engage par écrit à respecter le caractère confidentiel de certains renseignements : à cet égard, nous préférons nous en remettre au bon sens de la société de gestion.

K. Avis

[247] La SODRAC aurait voulu que tous les renseignements lui soient obligatoirement transmis électroniquement et dans un seul format (Excel). Nous n’imposons pas cette exigence sauf pour ce qui concerne la radio de la SRC et que la SRC consent à ainsi transmettre. Pour le reste, la transmission électronique se fait uniquement dans la mesure du possible parce qu’il s’agit d’une licence rétroactive. Pour l’avenir, toutefois, les usagers devraient s’attendre à devoir ajuster leurs systèmes pour harmoniser le tout.

L. Dispositions transitoires

[248] Les dispositions que comportent les licences sont différentes de ce qu’on retrouve dans les tarifs entre autres parce que les licences ne continuent pas de s’appliquer en tant que mesure provisoire après qu’elles aient pris fin.

Le secrétaire général,

Signature

Gilles McDougall

ANNEXE

Tableau 1 – Récapitulatif des taux homologués pour la SRC

Éléments du tarif

Taux

Copies accessoires de radiodiffusion

 

2008

174 476 $

2009

177 251 $

2010

180 955 $

2011

184 574 $

2012

0,1065 × redevances de la SOCAN pour 2012

Copies accessoires de télédiffusion

 

Télévision conventionnelle

14,478 pour cent de ce que la SRC paie à la SOCAN

RDI

0,217 pour cent des revenus bruts

News Network

0,093 pour cent des revenus bruts

Bold

0,253 pour cent des revenus bruts

Documentary Channel

0,347 pour cent des revenus bruts

 

Il est possible de réduire les redevances si le droit de faire des copies accessoires de télédiffusion était déjà libéré par le producteur

 

Synchronisation

 

Œuvres musicales préexistantes, par année

581 749 $

Œuvres musicales de commande, par année

250 730 $

Internet

 

Audio (services Internet + baladodiffusion)

4 pour cent + 3 pour cent des redevances applicables à la radio conventionnelle

Télévision

4 pour cent de toutes les redevances applicables à la télévision

Vente d’émissions aux consommateurs pour usage privé – vente de DVD, par

 

Minute

 

musique de premier plan

 

Pour les 15 premières minutes

1,44 ¢

Pour les 15 minutes suivantes

0,87 ¢

Par la suite

0,52 ¢

Musique de fond

 

Pour les 15 premières minutes

0,58 ¢

Pour les 15 minutes suivantes

0,35 ¢

Par la suite

0,21 ¢

 

Pour la musique que la SRC a commandée, un escompte de 40 pour cent s’applique

Vente ou concession en licence d’émissions de la src à des tiers télédiffuseurs et transporteurs

3 pour cent des revenus, rajusté en fonction du répertoire

Total

832 479 $

Tableau 2 – Récapitulatif des taux homologués pour Astral

Éléments du tarif

Taux

Copies accessoires de télédiffusion

 

VRAK. TV

0,296 pour cent du revenu brut

Canal D

0,168 pour cent du revenu brut

Canal Vie

0,130 pour cent du revenu brut

Ztélé

0,085 pour cent du revenu brut

Historia

0,113 pour cent du revenu brut

Séries+

0,163 pour cent du revenu brut

Teletoon (anglais)

0,114 pour cent du revenu brut

Télétoon (français)

0,125 pour cent du revenu brut

Teletoon Retro (anglais)

0,0004 pour cent du revenu brut

Télétoon Rétro (français)

0,002 pour cent du revenu brut

 

Il est possible de réduire les redevances si le producteur a déjà affranchi le droit de faire des copies accessoires de télédiffusion

Télévision sur internet

4 pour cent de toutes les redevances applicables à la télévision

Tableau 3 – Récapitulatif des taux du tarif 5

Éléments du tarif

Taux

Copies sur dvd, par copie, par minute

 

Pour les 15 premières minutes

0,0065 $

Pour les 15 minutes suivantes

0,0125 $

Par la suite

0,0200 $

Copies pour usage en salle, par distributeur, par année

100 $

 

 



[1] L.R.C. 1985, ch. C-42.

[2] Demande de fixation des redevances et modalités d’une licence (SODRAC c. SRC) (31 mars 2009) décision provisoire de la Commission du droit d’auteur, modifiée le 13 octobre 2009; Demande de fixation des redevances et modalités d’une licence (SODRAC c. SRC) (30 avril 2012) décision provisoire de la Commission du droit d’auteur.

[3] Demande de fixation des redevances et modalités d’une licence (SODRAC c. Les chaînes Télé Astral et Teletoon Inc.) (14 décembre 2009) décision provisoire de la Commission du droit d’auteur.

[4] Demande de jonction de deux arbitrages : SODRAC c. Société Radio-Canada et SODRAC c. Les chaînes Télé Astral et Teletoon (27 août 2009) décision de la Commission du droit d’auteur.

[5] La Loi qualifierait toutes ces œuvres d’œuvres cinématographiques. Toutefois, tout comme les parties, nous utilisons l’expression « œuvre audiovisuelle » pour indiquer clairement que la décision vise les œuvres destinées à la télévision ainsi qu’au cinéma.

[6] Nous utilisons le terme « radio » uniquement pour la diffusion de contenu audio sur les ondes hertziennes, même si on l’emploie désormais couramment pour désigner l’offre de contenu audio sur d’autres plateformes comme le câble ou l’Internet.

[7] La SODRAC utilise l’expression « première intégration ».

[8] M. Ted East, président de l’ACDEF, a qualifié de « définitive » la licence suivant laquelle [TRADUCTION] « il incombe au producteur d’effectuer les paiements subséquents pour la contribution créative de la personne ou des personnes concernées » : Transcriptions, vol. 2 (SODRAC 5) à la p. 278. Bien que cette distinction n’ait aucune incidence en l’espèce, elle illustre la confusion que nous avons mentionnée.

[9] Antérieurement NewsWorld.

[10] Le taux diminuait à mesure que la quantité de musique utilisée dans l’émission augmentait. Pour la musique que la SRC a commandée, un escompte de 40 pour cent s’applique.

[11] Bien que les taux proposés aient varié au fil du temps, il n’est pas nécessaire d’examiner en l’espèce les taux proposés antérieurement.

[12] Tou.tv ne faisait pas partie de la demande initiale de la SODRAC et a été ajouté par la suite. La SODRAC estime que les redevances associées à l’utilisation des productions internes et des coproductions sont incluses dans le « supplément » de 4 pour cent pour la webdiffusion, la transmission et la diffusion simultanée.

[13] La licence proposée ne vise pas les balados audiovisuels.

[14] La pièce SODRAC-1, para. 74 indique 0,004 pour cent en raison d’une erreur de calcul.

[15] La pièce SODRAC-1, para. 74 indique 0,016 pour cent en raison d’une erreur de calcul.

[16] CMRRA/SODRAC inc. (Stations de radio commerciales) pour les années 2001 à 2004 (28 mars 2003) décision de la Commission du droit d’auteur à la p. 14.

[17] SOCAN – Tarif 22.A (Internet – Services de musique en ligne) pour les années 1996 à 2006 (18 octobre 2007) décision de la Commission du droit d’auteur aux paras. 162-3.

[18] Tarif pour la radio commerciale (SOCAN : 2008-2011; Ré:Sonne : 2008-2011; CSI : 2008-2012; AVLA/SOPROQ : 2008-2011; ArtistI : 2009-2011) (9 juillet 2010) décision de la Commission du droit d’auteur. [Radio commerciale (2010)]

[19] Transcriptions, volume 8 à la p. 1515:l-8.

[20] CMRRA/SODRAC inc. (Services de musique en ligne) pour les années 2005 à 2007 (16 mars 2007) décision de la Commission du droit d’auteur au para. 119. [CSI – Services de musique en ligne (2007)]

[21] Les producteurs arriveraient même parfois à affranchir directement auprès du compositeur ou de l’éditeur les droits gérés par une société de gestion sur une base exclusive.

[22] Transcriptions, volume 9 à la page 1863:2-10.

[23] Ibid. aux pp. 1786:19-1787:11.

[24] Ibid. à la p. 1783:17-20.

[25] Ibid. à la p. 1786:14-18.

[26] Ibid. à la p. 1788:11-25.

[27] Bishop c. Stevens, [1990] 2 R.C.S. 46. [Bishop]

[28] Pièce DEF-58 en général; voir la licence Télé # 144450 du 19 janvier 2006, art. 12 pour la notion de tiers exploitant.

[29] Pièce SODRAC-99A (2006) (licence 151363, 13 juillet 2006); pièce SODRAC-99C (2006) (licence 151339, 13 juillet 2006); pièce DEF-4 (licence C.18-184680, 20 mars 2008).

[30] Contrairement aux arguments d’Astral et de la SRC, quiconque n’est pas partie à un contrat est un tiers, y compris le télédiffuseur désigné dans la licence de synchronisation d’un producteur.

[31] Pièce SODRAC-99A (2005) (licence du 9 août 2005, art. 13).

[32] Pièce SODRAC-99C (2006) (licence 155795, 20 octobre 2006, art. 13); pièce DEF-4 (licence 161773, 8 février 2007, art. 12).

[33] Pièce SODRAC-99A (2005) (licence 131492, 20 août 2005, art. 10).

[34] Pièce SODRAC-99C (2007) (licence CAT18#171183, 11 juillet 2007, clause « autorisation »).

[35] Pièce SODRAC-99A (2007) (licence 164501, 9 mai 2007; licence 16452, 19 juin 2008; licence 166553, 9 mai 2007).

[36] L.C. 1992, ch. 33.

[37] Voir par exemple, Pièce SODRAC-36A, p. 23, art. 6; pièce SODRAC-37A, art. 4.04 et 9.13; pièce SODRAC-38A, art. 4.03 à 4.05, et annexe C, art. 4.

[38] Pièce SODRAC-101C, art. 16 à 18.

[39] Témoignage de Me Meloul, transcriptions, volume 10 aux pp. 1990:20-1991:4.

[40] Voir, par exemple, Tarif SOCAN-Ré:Sonne à l’égard de la radio de la SRC, 2006-2011 (8 juillet 2011) décision de la Commission du droit d’auteur au para. 98. [Radio de la SRC (2011)]

[41] Il s’agit d’une moyenne de 59,55 pour cent pour la télévision francophone et de 38,47 pour cent pour la télévision anglophone, pondérée d’après les dépenses de programmation.

[42] Comparer les deuxième et troisième colonnes du tableau qui figure dans la pièce SODRAC-1, para. 63.

[43] Lettre datée du 28 décembre 2010, réponse à la question 1.

[44] Lettre datée du 21 janvier 2011. La SODRAC soutient que l’analyse de la SRC porte sur une seule semaine que rien n’indique être représentative de l’ensemble de la diffusion et que le traitement des segments français et anglais de la SRC est incohérent, ne faisant pas référence aux mêmes bases de données.

[45] Radio de la SRC (2011), supra note 40 aux paras. 66-74.

[46] Radio commerciale (2010), supra note 18 aux paras. 217-223.

[47] Radio de la SRC (2011), supra note 40 aux paras. 114 (sans diffusion simultanée) et 122 (avec diffusion simultanée).

[48] Une redevance de synchronisation préétablie unique s’applique à toute la musique commandée pour une émission ou une série. Les redevances applicables aux œuvres musicales préexistantes varient en fonction de la quantité utilisée : Pièce SODRAC-1, para. 201.

[49] L’utilisation d’un prix fixe par unité, sans égard à la taille du télédiffuseur ou à l’importance de l’auditoire de l’émission, pourrait nécessiter davantage d’explications. Il en est de même du fait d’utiliser uniquement les licences de la SODRAC. Étant donné que les parties ont convenu de poursuivre dans la même voie, nous avons décidé de ne pas soulever ces questions.

[50] D’après notre compréhension du dossier, ceci comprend la synchronisation en direct différée, à l’égard de laquelle la SODRAC estime (à juste titre) qu’il y a lieu de verser des redevances : voir Bishop, supra note 27.

[51] SOCAN – Divers tarifs pour l’année 1991 (31 juillet 1991), décision de la Commission du droit d’auteur, (1990-1994) Recueil des décisions de la Commission du droit d’auteur 284 à la p. 303.

[52] CSI – Services de musique en ligne (2007), supra note 20 au para. 119.

[53] Il se peut que les émissions que la SRC offre en balados contiennent moins de musique que la moyenne, mais c’est à la SRC d’en faire la preuve.

[54] Demande de fixation des redevances et modalités d’une licence (SODRAC c. MusiquePlus inc.) (16 novembre 2000) décision de la Commission du droit d’auteur. [MusiquePlus (2000)]

[55] Tarif 5 de la SODRAC (Vidéocopies) pour les années 2004 à 2008 (24 juin 2005) décision de la Commission du droit d’auteur à la p. 1. [SODRAC 5 (2005)]

[56] Le taux initial de 36 ¢ a été ramené à 32 ¢ dans un courriel daté du 31 mai 2010.

[57] CSI – Services de Musique en ligne (2007), supra note 20.

[58] SODRAC 5 (2005), supra note 55 à la p. 5.

[59] CSI – Services de musique en ligne (2007), supra note 20 au para. 140.

[60] L.C. 1991, ch. 11.

[61] La SODRAC soutient que la licence ne peut s’appliquer à une Émission de la SRC. Nous ne sommes pas d’accord. La SRC pourrait libérer les droits de synchronisation en se fondant sur sa licence SODRAC, mais libérer à la source les droits de reproduction incidente auprès des titulaires.

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