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Copyright Board
Canada

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Commission du droit d’auteur
Canada

 

Date

2020-06-26

Référence

SODRAC 2003 Inc. c SRC, 2020 CDA 001

Commissaires

L’honorable Robert A. Blair, c.r.

Me Claude Majeau

Me J. Nelson Landry

Demande de fixation des redevances pour la reproduction d’œuvres musicales dans le répertoire de la Société du droit de reproduction des auteurs, compositeurs et éditeurs au Canada Inc. et SODRAC 2003 Inc. par la Société Radio-Canada

[Réexamen (2008-2012)]

Motifs de la décision

I. INTRODUCTION

[1] Le 26 novembre 2015, la Cour suprême du Canada a renvoyé à la Commission du droit d’auteur (la « Commission ») pour réexamen une partie de la licence qu’elle avait fixée pour l’utilisation par la Société Radio-Canada (SRC) du répertoire administré par SODRAC 2003 Inc. et la Société du droit de reproduction des auteurs, compositeurs et éditeurs au Canada Inc. (collectivement SODRAC) pour la période 2008- 2012 [1] . La Cour a laissé la licence de la Commission en place pour d’autres aspects des activités de la SRC, mais a demandé à la Commission de réexaminer les redevances qu’elle avait fixées pour les « copies accessoires de diffusion » (CAD) faites par la SRC au cours de la préparation et de la préservation de ses diffusions par télévision conventionnelle et Internet.

[2] La Commission du droit d’auteur a réexaminé la question des CAD dans le cadre d’une audience commune tenue en septembre 2017. L’autre partie de l’audience commune concernait une demande de la part de la SODRAC pour fixer les licences autorisant la SRC à utiliser les œuvres dans le répertoire de la SODRAC aux fins de la production et de la diffusion pour les années 2012 à 2018.

[3] Ces motifs concernent seulement le réexamen.

[4] Pour les motifs qui suivent, nous fixons les redevances de la licence pour l’utilisation des CAD de la télévision pour la période 2008-2012 à un tarif fixe de 396 666 $ par année. En faisant cela, nous avons adopté un modèle historique fondé sur l’accord initial de 1992 conclu entre la SODRAC et la SRC, ajusté en fonction des divers facteurs expliqués ci-dessous. Le tarif pour les CAD de la télévision Internet est fixé à une majoration de 4 pour cent sur le tarif de la télévision, une relation que les Parties ont acceptée.

II. CONTEXTE

[5] La SRC, le télédiffuseur public canadien, fait, aux fins de ses activités de télédiffusion, de radiodiffusion et de diffusion Internet, différents types de copies d’œuvres musicales protégées par le droit d’auteur, y compris les CAD. Celles-ci sont essentiellement des copies faites pour une utilisation interne, conçues pour faciliter le processus de diffusion et préserver l’œuvre dans les archives du diffuseur. Depuis le début du XXIe siècle, ce processus dépend de flux de travail fondés sur la technologie et les fichiers numériques, ce qui entraîne naturellement la création de plusieurs copies.

[6] SODRAC, une société de gestion collective qui administre le droit de reproduire une partie des œuvres utilisées par la SRC dans sa programmation, a demandé à la Commission du droit d’auteur de fixer les redevances reliées à l’autorisation de faire des copies du 14 novembre 2008 au 31 mars 2012.

[7] Jusqu’à ce moment, les relations entre la SODRAC et la SRC étaient régies par des accords, particulièrement celui signé en 1992, qui permettaient l’utilisation du répertoire de la SODRAC dans la programmation radiophonique et télévisuelle et pour certaines fins accessoires. À l’époque, la technologie ne faisait pas appel à des ordinateurs, mais elle comportait tout de même des « copies accessoires de diffusion » pour une utilisation interne, décrites alors comme des « copies éphémères ».

[8] La Commission du droit d’auteur a fixé les redevances pour les CAD de la télévision à 31,25 pour cent des redevances que la SRC verse à la Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SOCAN) pour le droit de communication. Ce ratio 1:3,2 a également été utilisé pour plusieurs tarifs de droits d’auteur, établissant les valeurs relatives des redevances pour la reproduction et la communication dans le contexte de la radio commerciale. En l’espèce, la Commission a conclu que le ratio s’appliquait tout autant au contexte de la télévision. Les redevances pour les CAD de télévision Internet ont été fixées selon une majoration de 4 pour cent [2] .

[9] La SRC a demandé un contrôle judiciaire des redevances et, en bout de compte, une majorité de la Cour suprême a conclu que la méthode d’analyse de la valeur utilisée par la Commission du droit d’auteur pour déterminer les redevances pour les CAD ne s’accordait pas avec le principe de neutralité technologique, puisqu’il n’y avait aucune comparaison entre la valeur tirée de l’utilisation d’une reproduction au moyen de la technologie antérieure et la valeur tirée au moyen de la nouvelle technologie (SRC c SODRAC aux paras 73, 81 et 86).

[10] Comme l’a déterminé la Cour, la Commission du droit d’auteur doit également tenir compte des facteurs qu’elle juge pertinents pour assurer l’équilibre entre les droits des utilisateurs et des titulaires des droits. Les facteurs pertinents incluent notamment : les risques pris par l’utilisateur et l’ampleur de son investissement dans la technologie ainsi que la nature de l’utilisation de l’œuvre protégée par le droit d’auteur dans la nouvelle technologie. La Commission doit évaluer les contributions respectives des risques pris par l’utilisateur et de son investissement, d’une part, et des copies des œuvres protégées par le droit d’auteur, d’autre part, par rapport à la valeur dont profite l’utilisateur (SRC c SODRAC au para 75). Ces considérations relèvent du principe « de mise en équilibre ».

[11] Après avoir examiné la preuve et les arguments des Parties, nous concluons que la technologie numérique offre une valeur ajoutée comparativement à la technologie analogique et que ces avantages sont indissociables de l’utilisation du répertoire de la SODRAC. Par ailleurs, nous concluons que la SRC a investi dans cette technologie avancée et en a assumé les risques inhérents. Enfin, nous confirmons que les copies en question sont de nature accessoire. Les redevances pour les CAD de la télévision conventionnelle reflètent ces conclusions pour les motifs établis ci-après.

III. LES POSITIONS DES PARTIES

[12] La position de la SODRAC est que le ratio 1:3,2 est toujours utilisable, tant que les principes de mise en équilibre et de neutralité technologique sont respectés.

[13] La SODRAC affirme que la preuve indique que, au cours de la transition technologique de l’analogique au numérique de 1992 à 2008, il y a eu : i) une augmentation des avantages liés aux copies accessoires de diffusion; ii) une réduction des investissements en capital; iii) un facteur de risque mineur. De plus, la SODRAC a observé que les copies accessoires de diffusion sont, malgré leur nom, essentielles au processus de diffusion. Toutefois, la SODRAC estime qu’appliquer les deux principes n’entraînerait pas un montant de redevances ou même une méthode pour le calculer. La SODRAC a également reconnu qu’il est difficile de quantifier les gains dus aux technologies de reproduction numériques [3] . Malgré tout, appliquer le ratio au tarif de la SOCAN pour fixer les redevances serait conforme aux directives de la Cour suprême pour plusieurs raisons.

[14] D’abord, le ratio 1:3,2 permet à la Commission d’appliquer les deux principes d’une manière raisonnable et uniforme au moyen de son expérience et de son expertise, puisque les ratios ont été utilisés pour fixer plusieurs redevances, dans plusieurs industries, pendant des années.

[15] Deuxièmement, le ratio 1:3,2 tiendrait compte du principe de mise en équilibre, s’il est clairement accepté dans l’industrie de la télédiffusion hertzienne commerciale. La SRC elle-même a inclus le ratio 1:3,2 dans ses accords avec les sociétés de gestion collective responsables d’accorder des licences pour la reproduction de leurs répertoires. Un prix fixé selon le ratio 1:3,2 qui découle de négociations libres dans le marché de référence pertinent est un indicateur clair d’équilibre entre les utilisateurs et les titulaires de droits.

[16] De même, le ratio respecterait le principe de neutralité technologique puisque les utilisateurs de la même technologie de reproduction sont traités de manière égale. En effet, le ratio s’appliquerait à la télévision d’une manière neutre du point de vue de la technologie puisque : i) le ratio est utilisé dans la radio commerciale et par la SRC; et ii) la radio et la télévision utilisent la même technologie numérique.

[17] En conclusion, le ratio 1:3,2 rendrait possible de fixer des redevances qui tiennent compte de la valeur générée par la technologie de reproduction numérique et de l’augmentation de la valeur des copies comparativement à la technologie analogique.

[18] En revanche, la SRC estime que la SODRAC n’a pas démontré que l’approche par ratio 1:3,2 qui découle des décisions de la Commission sur la radio commerciale s’applique aux principes de mise en équilibre et de neutralité technologique. Elle conteste les hypothèses mises de l’avant par la SODRAC pour appuyer cette méthode.

[19] En termes de valeur pour l’utilisateur, la SRC plaide que la SODRAC n’a pas démontré que les CAD ont une valeur économique indépendante des autres copies faites par la SRC. Le principe de mise en équilibre exige que les ayants droit démontrent un lien de causalité entre les droits qu’ils contrôlent et les redevances qu’ils demandent. Les ayants droit peuvent seulement demander au maximum un paiement équivalent à la contribution de leurs droits à la valeur dont profite l’utilisateur. La valeur générée par les actions propres aux utilisateurs ou par leurs propres investissements échappe aux titulaires de droits. Si aucun lien de causalité n’est établi entre le droit d’auteur et la valeur ajoutée que les utilisateurs tirent de la technologie numérique, alors aucune valeur ne peut être attribuée au droit d’auteur.

[20] La SRC plaide également qu’elle a fait de vastes investissements dans la technologie numérique et en a assumé les risques inhérents.

[21] En termes de comparaison des avantages sous l’ancienne et la nouvelle technologie, la SRC a affirmé que les avantages, le cas échéant, ne sont pas différents d’une technologie à l’autre : les activités de la SRC demeurent fonctionnellement équivalentes à celles entreprises en 1992 et aucune nouvelle valeur n’a été créée par la reproduction numérique des œuvres protégées par le droit d’auteur. Par conséquent, aucune augmentation des redevances n’est justifiée en l’espèce.

[22] Même si les CAD ont une valeur économique indépendante (ce qui est contesté), la SRC a soutenu que la valeur ne peut être établie sans tenir compte des autres redevances versées au titre du droit de reproduction, soit, en l’espèce, les redevances pour le droit de synchroniser la musique et les images lors de création de contenu audiovisuel pour la programmation de télévision conventionnelle et Internet. L’hypothèse est que selon la théorie économique, les entrants (autorisation de synchroniser et de faire des copies accessoires) qui sont nécessaires pour un extrant donné (diffusion) doivent être considérés ensemble et leur prix doit être établi conjointement.

[23] En utilisant l’accord SRC-SODRAC de 1992, lequel fixe un prix pour toutes les reproductions faites par la SRC, et en le modifiant pour projeter sa valeur en 2008-2012, la SRC a observé que la valeur totale mise à jour a déjà été compensée par les redevances pour la synchronisation. Par conséquent, seul un montant minime est dû pour les CAD.

IV. ANALYSE

[24] Selon le cadre fixé dans SRC c SODRAC notre analyse suit deux axes principaux.

[25] D’abord, il s’agit de comparer la valeur que les CAD génèrent lorsqu’elles sont utilisées dans la technologie numérique de la SRC à la valeur que les CAD génèrent lorsqu’elles sont utilisées dans la technologie analogique de la SRC (para 86).

[26] À cet égard, toute valeur ajoutée des CAD numériques « suppose […] des redevances plus élevées » et aucune valeur ajoutée ne suppose que des redevances soient celles des CAD analogiques. La valeur ajoutée peut découler des différences fonctionnelles ou des gains internes en efficacité des technologies, lesquelles peuvent être évaluées de plusieurs façons. Par exemple, des processus de diffusion améliorés ou plus efficients peuvent être mesurés en termes de réduction des coûts, de temps économisé ou de limitation des pertes ; le nombre de CAD n’est pas pertinent et les avantages des CAD ne sont pas proportionnels au nombre de copies faites ; les CAD ne font pas concurrence à l’œuvre musicale et n’influencent pas le marché de l’œuvre musicale (para 79, 84 et 85).

[27] Deuxièmement, la Commission doit tenir compte des contributions relatives des reproductions, ainsi que de l’investissement et du risque des utilisateurs associés à la nouvelle technologie (para 86). En bref, le but est de cerner les facteurs pour établir un équilibre entre les intérêts de la SRC et de la SODRAC : le principe « de mise en équilibre ».

[28] Les facteurs d’équilibre comprendront, sans toutefois s’y limiter, l’ampleur de l’investissement fait par la SRC dans la nouvelle technologie, le risque pris par la SRC et la nature de l’utilisation des œuvres protégées par le droit d’auteur dans la nouvelle technologie (para 75).

[29] De plus, en abordant ces grands principes, la Cour a observé que, lorsque les risques financiers associés à l’investissement dans la nouvelle technologie et à son implantation étaient assumés par la SRC et que l’utilisation des reproductions d’œuvres protégées par le droit d’auteur était accessoire, le principe de mise en équilibre suppose des redevances « relativement peu élevées » pour l’ayant droit (para 75). La Cour n’a pas expliqué l’expression « relativement peu élevées » et n’avait pas à sa disposition un dossier qui aborde cette notion. Elle a toutefois noté que jamais un investissement important par l’utilisateur dans une technologie ou le risque considérable qu’il a pu prendre n’auront pour effet de rendre nulles les redevances du titulaire du droit d’auteur (para 77).

A. COMMENT LES GAINS ASSOCIÉS À LA TECHNOLOGIE NUMÉRIQUE SE COMPARENT-ILS À LA TECHNOLOGIE ANALOGIQUE ?

[30] Sous la technologie analogique, la Cour suprême du Canada a décrit les copies faites pour faciliter le processus de diffusion comme « extrêmement utiles » : Bishop c Stevens, [1990] 2 RCS 467 à la p 483 [Bishop] ; de telles copies ont assuré la qualité des diffusions, sur cinq fuseaux horaires différents, et ont permis d’économiser des coûts lorsque les programmes étaient rediffusés : Bishop à la p 480.

[31] Du point de vue technologique, ce n’est pas un secret que la numérisation des outils pour gérer et traiter l’information a surpassé la technologie analogique. Une différence clé est la centralisation et l’automatisation accrues des tâches nécessaires pour l’activité économique dans de nombreux secteurs, découlant de l’accélération exponentielle de la vitesse du traitement de l’information et des capacités numériques de stockage de l’information. Dans le contexte de télédiffusion, une partie de cette information est formée d’œuvres musicales.

[32] Un bref rappel de la façon dont diverses copies numériques s’insèrent dans le processus de diffusion est utile ici.

[33] Une fois que la SRC est en possession de la copie maîtresse d’un programme, qu’elle ait été produite à l’interne ou par un producteur indépendant, cette copie est téléchargée dans le système de gestion du contenu numérique de la SRC, une pratique qui est devenue répandue parmi les télédiffuseurs au cours des dernières années. Les systèmes numériques impliquent le stockage des copies sous la forme de fichiers électroniques sur des disques durs, alors que les systèmes analogiques plus anciens entreposaient les copies sur des bandes magnétiques physiques. La SRC utilise son système de gestion du contenu numérique pour exécuter un certain nombre de fonctions qui aident à préparer un programme pour sa diffusion.

[34] Ces processus entraînent la création de plusieurs copies, y compris les CAD. Les CAD sont faites pour plusieurs raisons, comme pour reformater la copie maîtresse afin qu’elle corresponde aux exigences techniques de la SRC ou pour modifier la copie aux fins de la synchronisation, du langage ou du sous- titrage. Une ou plusieurs autres copies peuvent également être faites pour vérification du programme par diverses équipes au sein de la SRC avant la diffusion.

[35] La SODRAC a soumis un rapport technique préparé par Michael Murphy, professeur à temps plein à l’Université Ryerson, comparant les technologies déployées en 1992 et celles au cours de la période 2008- 2012 en fonction de leurs différences fonctionnelles et de leurs gains internes en efficacité [4] .

[36] Le rapport technique a montré d’importants changements dans la production et la distribution en 1992 par rapport à la période 2008-2012, lesquels se sont intensifiés alors que la technologie analogique était remplacée. Le changement fondamental tout au long de cette période était l’abandon de l’utilisation de l’équipement associé aux bandes magnétiques analogiques dans les processus en faveur des médias numériques, des serveurs de vidéos numériques, des systèmes de stockage numérique (« gestion du stockage du contenu ») et des flux de travail axés sur les fichiers [5] .

[37] M. Murphy a fourni les définitions qu’il a adoptées à titre d’expert technique pour les expressions « différences fonctionnelles » et « gains internes en efficacité » utilisées par la Cour suprême. Après avoir décrit en détail ces différences et ces gains en efficacité, il a conclu qu’il y avait en effet d’importantes « différences fonctionnelles » ainsi que de nombreux « gains internes en efficacité » lorsque l’on comparait les technologies numériques déployées au cours de la période 2008-2012 aux technologies analogiques déployées en 1992.

[38] Les différences fonctionnelles qui ont émergé comprenaient une meilleure qualité de la diffusion (HD), une centralisation accrue des ressources, un délai de diffusion réduit et la capacité de joindre des publics partout, en tout temps et de différentes façons au moyen des nouveaux services Internet et mobiles.

[39] M. Murphy est d’avis que le mot « révolutionnaire » était le mot approprié pour décrire la transition à un flux de travail en mode fichier [6] . L’utilisation de la technologie numérique et l’utilisation des copies numériques sur des serveurs ont été au centre de cette révolution, entraînant de nombreux gains en efficacité comme des économies en termes de personnel, d’entretien et de coûts de fonctionnement, ainsi qu’une productivité accrue et de canaux de revenus supplémentaires [7] .

[40] La SODRAC a également soumis un rapport préparé par les économistes Marcel Boyer, professeur émérite en sciences économiques à l’Université de Montréal et chercheur associé au département d’Économie de l’École polytechnique de Paris, et Pierre-Yves Crémieux, président du Groupe d’analyse et professeur associé à l’Université du Québec à Montréal, analysant les facteurs économiques pertinents pour la mise en œuvre des deux principes mentionnés par la Cour suprême.

[41] Ces experts ont examiné les analyses de rentabilisation impliquant la technologie numérique dans différents projets de la SRC. Ils sont d’avis que les analyses de rentabilisation décrivent les avantages associés à la nouvelle technologie dépendante des copies en termes d’économies en coûts, en emplois et en temps, mais, bien que certains soient quantifiés, la plupart sont décrits en termes qualitatifs seulement [8] .

[42] Reconnaissant également les conclusions de M. Murphy concernant les processus entraînant des gains en efficacité et d’autres avantages connexes associés à la technologie numérique comparativement aux systèmes analogiques, les économistes ont reconnu qu’il n’est pas possible de quantifier le « surplus » ou la valeur ajoutée découlant des technologies numériques [9] .

[43] Nous acceptons cette preuve, laquelle est du reste en phase avec la position de la SRC. Par exemple, la SRC explique qu’elle a choisi « […] d’adopter le flux de travail en mode fichier dans toutes ses activités télévisuelles et numériques en vue d’améliorer l’efficacité, de rendre le contenu accessible sur un ensemble de plateformes et de simplifier sa distribution et son archivage » [10] .

[44] En effet, dans son rapport annuel de 2007-2008 (vol. 1), la SRC a indiqué qu’elle avait réalisé « des économies de 82 millions de dollars par an en rationalisant [ses] processus d’exploitation, en mettant en œuvre des technologies numériques et par satellite, en mettant en place des systèmes de distribution de contenu plus rentables et en maximisant l’utilisation de [son] portefeuille immobilier » [11] . Suite à une demande de renseignements sur la ventilation de ces économies, la SRC a fourni ce qui constitue la pièce SODRAC-24 (A023) en réponse. Dans ce document, elle décrit les dépenses et les économies en lien avec une liste de projets et montre qu’elle serait en mesure de récupérer ses dépenses en trois ans approximativement. Certaines de ces économies étaient directement associées à la technologie numérique [12] .

[45] Malgré cela, la SRC plaide qu’il n’y a aucun lien de causalité entre les œuvres protégées par le droit d’auteur et la valeur ajoutée que la SRC a obtenue de son investissement dans la technologie numérique. Par ailleurs, même si c’était le cas, la SRC considère que ce lien concerne les droits d’exécution publique gérés par la SOCAN, pas la SODRAC, ou, à tout le moins, que la valeur des CAD est plus que compensée par la licence de synchronisation existante de la SODRAC.

[46] Nous n’acceptons pas cet argument. MM. Boyer et Crémieux ont expliqué de manière convaincante le lien évident entre l’utilisation du répertoire de la SODRAC et la valeur ajoutée obtenue par la SRC dans la réalisation des CAD. Bien que la SODRAC et ses experts n’aient pas été en mesure d’établir la part de la valeur à l’utilisateur qui découle directement et exclusivement de l’interaction avec le répertoire de la SODRAC en tant que tel, il n’est pas crédible d’affirmer (comme l’a fait la SRC) qu’aucun des avantages et des améliorations technologiques n’interagit avec le répertoire de la SODRAC.

[47] La Cour suprême a clairement indiqué que la copie accessoire constitue une violation si elle est faite sans autorisation : voir SRC c SODRAC au para 16, confirmant sa décision dans l’arrêt Bishop où elle a établi que les reproductions faites pour faciliter la diffusion (c’est-à-dire, les CAD) doivent être autorisées.

[48] Sous les conditions actuelles, sans les CAD contenant le répertoire de la SODRAC, la SRC ne serait pas en mesure de mener ses activités de diffusion de manière efficace. Cela serait toujours vrai si la SRC avait l’autorisation de synchroniser le répertoire de la SODRAC ou si la SODRAC avait été rémunérée pour des actes de synchronisation menés par des tiers. Comme la Cour d’appel fédérale l’avait noté dans Bishop c Stevens (1987) [13] , [TRADUCTION] « [s]i la partie appelante a enregistré l’œuvre de Bishop, elle l’a fait parce que c’était dans son intérêt de le faire. Elle s’est ainsi assurée que ses diffusions seraient de meilleure qualité et pourraient être rediffusées subséquemment à un coût moins élevé ». Comme le montre la preuve de la SODRAC, les avantages d’aujourd’hui surpassent de loin ceux-ci.

[49] Dans les présentes circonstances, le cadre fixé dans SRC c SODRAC exige des redevances accrues. Nous abordons maintenant les autres facteurs associés à l’investissement et au risque.

B. QUELS ÉTAIENT LES RISQUES FINANCIERS ASSOCIÉS À L’INVESTISSEMENT DANS LA NOUVELLE TECHNOLOGIE ET À SON IMPLANTATION ?

[50] La deuxième étape dans l’analyse consiste à évaluer les « contributions des risques pris par l’utilisateur et de son investissement » ou « les risques financiers découlant de l’investissement dans la nouvelle technologie et de son implantation» [14] par rapport à la valeur dont profite l’utilisateur.

[51] La SODRAC a évalué le risque du point de vue d’un utilisateur qui ne convertit pas son infrastructure analogique au numérique. Le risque établi ainsi est le risque d’utiliser une technologie désuète et de ne pas être en mesure de demeurer concurrentiel dans le secteur de la télédiffusion. Il s’agit du risque « d’inaction » [15] .

[52] Certes, ne pas investir dans la technologie numérique peut présenter un risque élevé, mais il ne s’agit pas à nos yeux du point de vue retenu par la majorité de la Cour. Plutôt, elle nous demandait de considérer le lien plus granulaire entre le coût et le risque et de s’assurer que toute redevance de droit d’auteur pour reproduction numérique ne soit pas si élevée qu’elle décourage l’investissement dans cette technologie (voir SRC c SODRAC au para 76).

[53] De ce point de vue, bien que l’inaction ait pu être risquée, on ne peut pas conclure que l’investissement dans une technologie dépendante des copies était sans risque d’un point de vue financier : le rendement du capital investi n’est pas garanti. Il y a un lien évident entre les coûts et les risques. Il est important que l’évaluation d’un tel risque ne soit pas faite en rétrospective. Plutôt, la Cour suprême nous demande d’évaluer ce risque tel qu’il pouvait exister avant que tout investissement soit fait.

[54] À cet égard, nous sommes d’accord avec la SRC que la SODRAC a sous-estimé les investissements dans le système numérique déployé par la SRC et les risques connexes associés à cet investissement.

[55] La SODRAC s’est fortement appuyée sur les analyses de rentabilisation de la SRC pour mesurer l’étendue des investissements de la SRC à ces fins. Toutefois, la SRC nous a convaincus que les analyses de rentabilisation ne révèlent pas tous les coûts relatifs à la technologie, et ce, en raison du seuil de la comptabilité interne de la SRC pour le matériel de technologie de l’information (TI). Les articles de TI en dessous de ce seuil ne sont par conséquent pas inclus dans une analyse de rentabilisation. Cependant, une fois agrégés, ils représentent des investissements importants. Également, nous acceptons la preuve de la SRC que les analyses de rentabilisation se concentrent sur les investissements en capital alors que les coûts des TI sont de plus en plus de nature opérationnelle (par exemple, l’infrastructure infonuagique ; le logiciel comme service ; le stockage ; la gestion de la compatibilité et de la distribution de formats multiples ; le dépannage ; les coûts de numérisation ; et le personnel technique).

[56] De plus, les analyses de rentabilisation produites afin d’appuyer l’analyse du risque de la SODRAC couvrent la période de 2006 à 2012, alors que la SRC fait des investissements dans la technologie numérique depuis le milieu des années 1990 [16] . La SRC souligne, avec raison, que les experts de la SODRAC n’ont pas tenu compte des risques importants que la SRC a dû assumer au cours de sa transition initiale des technologies de diffusion analogiques à celles numériques, une période qui n’est pas couverte par les analyses de rentabilisation [17] .

[57] Il y avait un débat entre les Parties concernant la preuve supplémentaire soumise par la SRC en lien avec les analyses de rentabilisation, laquelle avait été fournie à la SODRAC dans le cadre du processus de demande de renseignements. La SODRAC souligne, avec raison, qu’elle avait demandé, dans ce processus, des documents financiers et économiques concernant l’acquisition par la SRC de technologies pour leur utilisation dans la radiodiffusion, la télédiffusion et la diffusion par Internet et que la SRC l’avait assuré qu’elle avait [TRADUCTION] « une quantité plus que suffisante de renseignements pour le dossier de 2008- 2012 » [18] . La SODRAC affirme que dans ces conditions, la SRC ne devrait pas pouvoir tirer profit de la dépendance lourde de la SODRAC aux analyses de rentabilisation si la SRC n’avait pas communiqué d’autres renseignements disponibles et pertinents.

[58] Bien que la SRC n’ait peut-être pas été aussi ouverte que l’aurait souhaité la SODRAC, la SRC avait le droit de présenter ses propres témoins et sa propre justification concernant ses risques et ses coûts associés à ses investissements en TI. La SODRAC aurait pu contester cette preuve lors d’un contre-interrogatoire, et produire une contre-preuve le cas échéant, mais elle a choisi de ne pas le faire.

[59] Compte tenu de l’ensemble de la preuve, nous sommes convaincus que la SRC a investi dans une technologie numérique sophistiquée dès le début des années 2000 [19] et a nécessairement fait face à des risques en termes de compétitivité et de rendement sur cet investissement.

C. QUELLE EST LA NATURE DES COPIES ACCESSOIRES DE DIFFUSION ?

[60] La SODRAC estime que, bien que les CAD soient accessoires, elles ne sont pas facultatives :

[TRADUCTION]

L’utilisation du mot « accessoire » dans l’expression « copies accessoires de diffusion » induit en erreur. En fait, bien que les CAD soient créées dans le cadre des activités de diffusion de la SRC, et, par conséquent, sont accessoires à celles-ci, elles ne sont pas facultatives. Au contraire, elles sont un élément essentiel aux activités de diffusion de la SRC dans un monde numérique. Sans la capacité de faire appel à la nouvelle technologie dépendante des copies, la SRC éprouverait des difficultés dans le marché de la diffusion, perdant des revenus et des parts de marché au profit de ses compétiteurs. En fait, les analyses de rentabilisation suggèrent que, au fil du temps, la SRC n’aurait pas été en mesure de tout simplement fonctionner. Les analystes de rentabilisation montrent que la nouvelle technologie dépendante des copies est essentielle aux activités de diffusion ainsi que pour répondre à la demande des consommateurs et réaliser de nouvelles stratégies de monétisation [20] .

[61] Nous acceptons cette observation. Les CAD jouent clairement un rôle important pour faciliter des opérations de diffusion plus efficaces. Si une copie facilite le système de diffusion d’une manière importante, mais accessoire, elle pourrait avoir plus de valeur pour l’utilisateur que si elle était seulement accessoire, mais pas importante. Nous avons déterminé précédemment que les CAD ont accru la valeur pour l’utilisateur comparativement à la technologie analogique. Toutefois, nous estimons que, même si les CAD sont « essentielles », leur nature à titre de copies « accessoires » ne change pas. En fait, la Loi sur le droit d’auteur reconnaît que les copies peuvent être à la fois essentielles et accessoires, dans le sens que, bien qu’elles soient essentielles à un processus, leur seul but est de le faciliter [21] . Ici, nous faisons face à des copies accessoires de diffusion ; c’est-à-dire « des copies [qui] […] visent à faciliter la diffusion » (SRC c SODRAC au para 1).

D. LA COMMISSION PEUT-ELLE UTILISER L’APPROCHE DU RATIO ?

[62] Comme il a été expliqué précédemment, dans sa décision de 2012, la Commission avait utilisé l’approche de « ratio » pour fixer le prix des CAD. La SODRAC plaide que les tarifs, lesquels sont calculés au moyen de la méthode du ratio, sont équilibrés et neutres sur le plan technologique. Nous considérons d’abord si nous pouvons de nouveau fixer les tarifs pour les CAD dans ce réexamen au moyen d’un ratio 1:3,2 avec les tarifs de la SOCAN. Nous concluons que nous ne pouvons pas utiliser cette méthode seule. Nous considérons ensuite si les accords qui comprennent l’approche du ratio 1:3,2 avec la SOCAN peuvent justifier un prix fondé sur le ratio 1:3,2.

i. Les critères SRC c SODRAC peuvent-ils être respectés au moyen de l’approche du « ratio » ?

[63] Comme l’a décrit la Cour suprême [22] , la méthode du ratio a ses origines dans la décision CSI — Radio commerciale, 2003 [23] . Dans cette décision, les redevances pour les reproductions d’œuvres musicales faites par les stations de radio commerciales ont été déterminées en acceptant les taux proposés par les parties comme formant l’intervalle dans lequel le taux approprié se trouve : voir Radio commerciale, 2003 à la p 12. La Commission a ensuite considéré divers facteurs et elle a conclu que le taux approprié est approximativement à mi-chemin entre les deux taux proposés par les parties. La Commission a alors observé que ce tarif pour la reproduction des œuvres musicales « équivaut environ au tiers des redevances que les stations [de radio commerciale] versent à la SOCAN » pour l’exécution publique de ces œuvres : voir Radio commerciale, 2003 à la p 14.

[64] Il est utile de souligner que le ratio d’approximativement un tiers était seulement une observation et que le tarif pour la reproduction des œuvres musicales n’était pas fixé en fonction du tarif de la SOCAN. Par conséquent, on ne peut pas dire que ce ratio représente une relation de valeur sous-jacente fondamentale entre les reproductions et les exécutions publiques menées par un utilisateur donné. De plus, ce n’était pas la méthode utilisée pour déterminer le tarif pour CSI. En fin de compte, le tarif d’un pour cent des revenus fixés par la Commission repose non pas sur cet obiter de la Commission, mais sur le raisonnement sous- tendant cette décision, nommément le recours à l’approche à intervalle.

[65] Dans son arrêt, la Cour voit d’un œil défavorable la méthode du « ratio », soulignant que cette méthode et son raisonnement sous-jacent ne correspondent pas aux principes de mise en équilibre et de neutralité sur le plan technologique :

Ni le dossier ni la Décision [2012] sur la licence légale de la Commission – dans laquelle elle a utilisé un ratio basé sur les redevances payées par la SRC à la Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (« SOCAN ») pour les droits d’exécution afin de déterminer les redevances de la SODRAC – n’indiquent qu’elle a pris en considération la mise en équilibre et la neutralité technologique pour effectuer son évaluation de l’œuvre protégée par le droit d’auteur. Rien n’indique que la valeur relative découlant de l’utilisation d’œuvres protégées par le droit d’auteur au moyen de la technologie numérique de la SRC en comparaison avec celle procurée au moyen de la technologie analogique qu’elle utilisait auparavant ou que les contributions relatives de la SRC et de la SODRAC aux technologies analogiques et numériques ont été prises en considération (SRC c SODRAC au para 75).

[66] Après avoir réévalué la méthode du ratio utilisée à l’origine à la lumière des principes d’analyse de la valeur présentés par la Cour suprême, nous concluons qu’utiliser la méthode du ratio dans les circonstances de cette affaire ne correspondrait pas à ces principes. Nous disons cela car nous estimons que le ratio n’offre aucune comparaison des contributions des CAD dans les deux technologies. En fait, le ratio a été fixé pour des nouvelles technologies numériques déjà adoptées par les stations de radio en date de 2003 et il ne tenait pas compte de la comparaison entre le numérique et l’analogique [24] . De plus, le ratio ne mesure pas la valeur ajoutée des CAD de la télévision numérique comparativement à la technologie analogique pour la SRC, ne tient pas compte des différences fonctionnelles ou des gains internes en efficacité, ne tient pas compte des facteurs d’équilibre comme le risque et l’investissement associés à l’implantation de la technologie numérique et n’entraîne pas une réduction des redevances comme l’a indiqué la Cour.

ii. Le ratio 1:3,2 est-il utilisé dans les accords ?

[67] Les Parties reconnaissent toutes deux que les critères établis dans l’arrêt SRC c SODRAC pourraient être intégrés à un prix convenu. Par exemple, M. Reitman affirme que [TRADUCTION] « l’utilisation d’un accord négocié incorpore théoriquement tous les renseignements dont disposent les parties au sujet du risque, des coûts, des investissements et du rendement sur le capital investi, ainsi que du rôle relatif de la musique dans la création de valeur pour les [télé]diffuseurs » [25] .

[68] La SODRAC accepte cette proposition, mais demande à la Commission d’aller un peu plus loin : si la Commission devait conclure que le ratio 1:3,2 est communément utilisé dans le marché, elle pourrait fixer un prix en fonction de ce ratio et supposer que les critères établis dans l’arrêt SRC c SODRAC ont été respectés.

[69] Nous rejetons ce dernier argument pour les motifs suivants.

a. Preuve insuffisante que le ratio est utilisé dans le marché

[70] Puisque la Cour dans SRC c SODRAC a remis en question la validité de l’approche du ratio, nous doutons que les accords conclus avant cette décision, et fondés sur l’approche du ratio 1:3,2 de la Commission, comme l’accord de 2009 entre l’Agence canadienne des droits de reproduction musicale ltée (CMRRA) et la SRC, demeurent des indicateurs valides du marché. Au contraire, nous croyons que, si les parties à ces accords connaissaient l’opinion de la Cour suprême au sujet du ratio et des facteurs à considérer pour fixer le prix des reproductions accessoires, de tels accords auraient été conclus sous des modalités différentes.

[71] Après avoir considéré tous les accords au dossier, nous concluons que, excepté pour la licence de 1992, ils précèdent tous SRC c SODRAC [26] ou qu’une révision est prévue à leur égard en fonction du réexamen de la Commission conformément aux facteurs SRC c SODRAC [27] .

[72] Par conséquent, bien qu’il y ait des preuves que l’approche du ratio est utilisée dans le marché, nous concluons que cette preuve n’est pas fiable.

b. La preuve ne justifie pas un ratio du marché de 1:3,2

[73] La SODRAC affirme que l’accord de 2009 entre la CMRRA et la SRC qui adopte le ratio 1:3,2 pour les reproductions radiophoniques est une référence valide pour les CAD de la télévision. SODRAC affirme également que le fait que les utilisateurs n’ont pas contesté le ratio dans le contexte de la radio commerciale est une indication que le ratio est équilibré.

[74] Toutefois, laissant de côté nos réserves concernant la représentativité du marché de l’accord de 2009 entre la CMRRA et la SRC, nous ne sommes pas convaincus, comme nous l’avons précédemment exprimé, qu’il s’agisse d’une preuve que le ratio entre le prix du marché pour la diffusion d’œuvres musicales et le prix du marché pour la réalisation de CAD est 1:3,2.

[75] Le ratio 1:3,2 vise à mesurer la valeur relative de toutes les reproductions d’œuvres musicales faites par l’utilisateur et la communication de celles-ci par cet utilisateur. En effet, les CAD sont comprises dans le numérateur de ce ratio, mais c’est le cas de toutes les autres reproductions aussi. Pour que les CAD soient égales à l’ensemble du numérateur « 1 », cela exigerait que la valeur de toutes les autres reproductions soit nulle, de manière à ce que le ratio mesure la valeur relative des CAD aux communications. Toutefois, nous n’avons aucune preuve d’une proposition si peu orthodoxe au plan économique.

[76] La SODRAC a affirmé que la portée de cet accord et d’autres accords de licence de reproduction semblables entre la radio de la SRC et les sociétés de gestion collective ne comprennent pas les « copies maîtresses », sous-entendant qu’elles couvrent seulement les CAD [28] . Nous ne sommes pas d’accord.

[77] Dans le contexte de la télévision, une « copie maîtresse » est le produit synchronisé final qui est téléversé dans le système de gestion du contenu numérique de la SRC. La SRC utilise son système de gestion du contenu numérique pour exécuter plusieurs fonctions qui aident à préparer un programme pour sa diffusion. Ces processus entraînent la création des CAD.

[78] Dans le contexte de la radio, l’équivalent de la « copie maîtresse », la « copie de source » ou la « copie d’incorporation », est téléversé dans le système de gestion du contenu numérique de la SRC et les CAD sont faites à partir de cette copie de source de la même manière que les CAD sont faites à partir de la « copie maîtresse » dans le contexte de la télévision. De plus, la SRC est décrite comme l’un des plus grands producteurs de contenu radiophonique au Canada. La SRC fait non seulement des CAD, mais également des copies accessoires de production (CAP), comme des programmes préenregistrés et des projets audio, dans le contexte de la radio [29] .

[79] La SRC a souligné que la Commission avait spécifiquement rejeté l’utilisation des contrats de télévision pour fixer les redevances radiophoniques, puisque, « bien qu’il s’agisse du même droit, l’utilisation qui en est faite et le contexte dans lequel il est utilisé sont fort différents » (citant Radio commerciale, 2003 à la p 9). La SRC a affirmé que ces différences vont dans les deux sens : si les accords de télévision ne peuvent pas être fiables pour fixer les redevances de la radio, alors les accords de radio ne peuvent pas être des approximations fiables pour les redevances de la télévision non plus. Nous croyons que cela vaut en l’espèce.

[80] De plus, nous n’avons aucune information concernant la répartition de la valeur entre toutes les catégories de copies couvertes par cet accord de licence [30] . Par conséquent, nous considérons que la référence à l’accord de 2009 entre la CMRRA et la SRC n’est pas une référence suffisante pour justifier un tarif fondé sur le ratio 1:3,2.

[81] La SODRAC plaide également que les accords produits à titre des pièces SODRAC-100A, SODRAC- 100B, SODRAC-100C, SODRAC-100D, SODRAC-100I et SODRAC-100L concernent les télédiffuseurs qui ne produisent pas des programmes audiovisuels à l’interne, suggérant ainsi que, même si le texte des licences permet d’autres copies que des CAD, le prix concerne les CAD seulement.

[82] De nouveau, nous ne sommes pas d’accord. Même si les télédiffuseurs qui sont des parties à ces accords ne produisent pas de contenu à l’interne, rien n’indique que le prix négocié n’inclut pas l’option de le faire [31] . Devoir supposer un prix d’option nul serait une situation très inhabituelle, laquelle n’est pas étayée par la preuve ou l’information à notre disposition.

[83] Après un examen attentif du texte des accords produits par la SODRAC pour appuyer le ratio 1:3,2 et l’argument selon lequel seules les CAD sont visées par la licence, nous concluons qu’aucun de ces accords n’octroie une licence seulement pour les CAD. Bien qu’ils puissent inclure diverses restrictions, aucun ne limite les reproductions aux CAD seulement. Tous les accords permettent des copies de production et tous, particulièrement l’accord de 2009 entre la CMRRA et la SRC, sont rédigés d’une manière si générale que toutes les catégories de copies (par exemple, les copies d’incorporation, les CAP, les CAD) faites aux fins de la diffusion sont permises.

iii. Résumé

[84] Selon cette analyse, nous concluons qu’il n’est pas approprié d’utiliser l’approche de la méthode du ratio pour déterminer les redevances pour les CAD dans le cadre de cette instance. Nous nous tournons maintenant vers l’approche historique.

E. LA COMMISSION DEVRAIT-ELLE UTILISER L’APPROCHE HISTORIQUE ?

i. Aperçu

[85] Notre tâche est de fixer les redevances pour les copies de diffusion qui sont accessoires et facilitantes, tout en gardant à l’esprit l’observation de la Cour que, lorsque les risques liés à l’investissement et à l’implantation de la nouvelle technologie sont pris par la SRC, et que l’utilisation des reproductions est accessoire, le principe de mise en équilibre implique des redevances relativement peu élevées pour le titulaire du droit d’auteur. « Relativement peu élevées » par rapport à quoi et en fonction de quels critères, la Cour ne l’a pas écrit.

[86] Nous reconnaissons que les avantages accrus qu’obtient la SRC par l’utilisation des CAD dans la nouvelle technologie numérique, comparativement à son ancienne technologie analogique, favorisent des redevances accrues, alors qu’en même temps les risques pris par la SRC et ses investissements dans la nouvelle technologie, ainsi que la nature accessoire des CAD, vont dans le sens contraire et favorisent des redevances réduites.

[87] La Cour a remarqué que l’accord de licence de 1992 entre la SODRAC et la SRC découlait de l’arrêt Bishop (SRC c SODRAC au para 17). Cet accord couvre par conséquent les copies accessoires de diffusion avant le passage à la technologie numérique. Le prix est ajusté de diverses façons par les Parties pour le projeter dans la période numérique et cette approche a été appelée la « méthode historique ».

[88] Nous préférons et adoptons cette méthode pour arriver à ce que nous estimons être un prix équilibré et neutre sur le plan technologique pour l’utilisation par la SRC du répertoire de la SODRAC dans les CAD de la télévision de la SRC.

[89] En examinant et en appliquant l’approche historique, nous utilisons comme point de départ un prix de 420 000 $ pour la télévision. Les Parties sont d’accord avec ce prix, lequel est en moyenne 85 pour cent des redevances pour la télévision et la radio fixées dans l’accord originel de 1992 entre la SODRAC et la SRC. Comme il a été mentionné, ce prix comprend la réalisation de toutes les reproductions, pas seulement les CAD.

[90] L’analyse exige que nous apportions des ajustements à ce montant de base : i) pour les changements dans l’utilisation du répertoire de la SODRAC depuis 1992 ; ii) pour l’inflation depuis cette période ; iii) pour tenir compte des gains technologiques accrus qui découlent du passage des systèmes analogiques aux systèmes numériques. Le résultat est un prix pour l’ensemble des copies réalisées dans le cadre de l’activité de télédiffusion. Une analyse approfondie est par conséquent requise pour isoler le prix des CAD et déterminer leur part du prix total.

[91] Enfin, pour conclure notre analyse, nous dépassons les contours du modèle afin d’arriver à un prix pour les CAD qui soit juste et équitable, ainsi que proportionnel au fait que les CAD sont accessoires, bien qu’utiles, au processus de diffusion.

ii. Utilisation du répertoire

[92] Les Parties ont toutes deux mis à jour l’accord de 1992 afin de tenir compte des changements dans l’utilisation du répertoire au cours de la période de 2008-2012. Nous calculons un ajustement qui diffère de celui des Parties et concluons qu’il y a eu une augmentation de 133 pour cent de l’utilisation du répertoire de la SODRAC depuis 1992.

[93] Les calculs de la SRC sont les suivants. Ils commencent par le nombre de 52 289 minutes de musique de la SODRAC utilisées par la SRC en 1992-1994 (la source de cette donnée est la pièce SODRAC-29.A au para 31).

[94] M. Reitman indique (pièce CBC-2 au para 133) qu’il s’appuie sur les données fournies par la SODRAC concernant la quantité de musique utilisée pour 2006-2008. Il calcule 84 054 minutes de musique de la SODRAC. Toutefois ce nombre n’apparaît nulle part dans les données de la SODRAC, laquelle indique plutôt 130 017 minutes (pièce SODRAC-29.A au para 31). De plus, même si ce nombre était exact, il signifierait une croissance de l’utilisation du répertoire de 61 pour cent.

[95] La SRC prend alors la part de 46,33 pour cent du répertoire de la SODRAC de la décision de 2012 et tente de l’utiliser pour calculer la nouvelle part du répertoire.

[96] En somme, l’analyse de la SRC souffre de deux défauts. D’abord, elle semble mélanger l’information sur les parts du répertoire avec l’information sur la croissance de l’utilisation du répertoire. La première est utilisée pour convertir un taux fixé pour l’ensemble du répertoire publié pour un taux qui s’applique à une société de gestion collective représentant une faction de celui-ci. La seconde est utilisée pour mesurer la croissance du répertoire utilisé, comme dans l’approche historique. Deuxièmement, bien que le nombre initial utilisé par la SRC soit exact, le nombre final ne l’est pas. Il ne se trouve nulle part dans la preuve et pourrait simplement être une erreur d’inattention. Le taux de croissance entre un nombre exact et un nombre inexact est en soi inapproprié relativement à un calcul qui utilise deux nombres exacts.

[97] La SODRAC calcule une augmentation de l’utilisation du répertoire de 117 pour cent. Nous utilisons les mêmes données sous-jacentes, mais appliquons une méthode différente pour calculer l’augmentation de l’utilisation du répertoire ; notre résultat est 133 pour cent. Les paragraphes suivants expliquent la différence entre nos calculs et ceux de la SODRAC.

[98] La SODRAC commence en calculant le nombre moyen de secondes d’utilisation de son répertoire par la SRC au cours de deux périodes : de 1992 à 1995 et pour l’année 2008. Le taux de croissance entre la période de 1992-1995 et l’année 2008 est 117 pour cent. Toutefois, ce calcul souffre de deux problèmes.

[99] D’abord, le calcul est une comparaison d’une moyenne de quatre années à une seule année. Si cette seule année représentait une utilisation inhabituellement élevée ou faible du répertoire de la SODRAC, le choix de cette année tendrait à biaiser le calcul.

[100] Deuxièmement, même si la SODRAC avait choisi une période de plusieurs années afin d’effectuer la comparaison avec la période de 1992-1995, cette approche aurait malgré tout été fautive sur le plan mathématique.

[101] Cela est dû au fait qu’il y a deux calculs à faire : le calcul d’une moyenne et le calcul d’un taux de croissance. Puisqu’un taux de croissance n’est pas un calcul linéaire, l’ordre dans lequel les deux calculs sont faits est important. En particulier, le calcul non linéaire doit être fait en premier.

[102] Nous calculons le taux de croissance (net), d’une année à l’autre, pour les années de 1992 à 2008. C’est-à-dire, pour chaque année, nous calculons le pourcentage de changement en secondes du répertoire de la SODRAC utilisé par la SRC relativement à l’année précédente. La moyenne de ces taux de croissance est de 7,4 pour cent. Nous sommes intéressés par une période de 18 ans de 1993 à 2010, puisque 1993 est le milieu de l’accord de 1992 (de 1991 à 1995) et 2010 est le milieu de la licence que la Commission fixe présentement (de 2008 à 2012). La multiplication donne comme réponse : 7,4 × 18 = 133. Autrement dit, nous calculons la moyenne des taux de croissance. La SODRAC calcule le taux de croissance des moyennes.

iii. Inflation

[103] La SODRAC soutient qu’un ajustement pour l’inflation doit être appliqué pour convertir les redevances de 1992 à leur valeur au cours de la période de la licence (2008-2012). La SRC ne conteste pas les calculs de la SODRAC à cet égard, mais affirme que le seul ajustement requis est une augmentation de 9 pour cent, ce qui correspond à l’augmentation des redevances dues à la SOCAN par la SRC de 1992-1995 à 2008-2012. La SRC considère que cette augmentation de 9 pour cent couvre l’inflation ainsi que d’autres facteurs.

[104] Nous concluons qu’un ajustement pour l’inflation est approprié et fixons le taux à 38,2 pour cent.

[105] Contrairement aux observations de la SODRAC, la SRC ne convertit pas les redevances de leur valeur au cours de l’accord de 1992 à leur valeur au cours de la période de la licence (2008-2012). Elle plaide que l’augmentation de 9 pour cent des redevances versées à la SOCAN au cours de la période couvre l’inflation et d’autres aspects de la croissance liée aux progrès technologiques.

[106] Nous rejetons cet argument, car il n’est pas crédible. S’il y avait eu 38,2 pour cent d’inflation au cours d’une période donnée, comme c’est le cas, une augmentation de 9 pour cent ne peut pas tenir compte de cette inflation à moins qu’elle tienne compte d’un autre facteur qui a diminué d’environ 29 pour cent au cours de la même période. La SRC n’a pas identifié un tel facteur. De plus, nous avons conclu qu’il y a une technologie améliorée ; il s’agit d’un autre facteur qui fait croître les taux, et non l’inverse. Toutes les indications que nous avons dans cette affaire suggèrent qu’un taux de 9 pour cent est une sous-estimation de l’inflation subie par la SRC.

[107] La SODRAC soutient qu’un ajustement pour l’inflation doit être appliqué pour convertir les redevances de leur valeur au cours de l’accord de 1992 à leur valeur au cours de la période de la licence (2008-2012).

[108] Le calcul de MM. Boyer et Crémieux concerne les années 1995 à 2010. Cependant, nous refaisons le calcul avec les années 1993 à 2010. Nous faisons cela puisque le calcul du répertoire utilise les mêmes années. Les principes de la statistique suggèrent qu’utiliser les mêmes années pour ces calculs est une « pratique exemplaire ». Nous adoptons cette approche pour les motifs suivants. D’abord, puisque l’inflation est fréquemment mesurée et que l’utilisation du répertoire de la SODRAC par la SRC l’est peu fréquemment, il est naturel de choisir une année pour l’inflation qui correspond à une année du répertoire. Deuxièmement, il n’y a rien dans le modèle historique qui suggère que la correspondance des années serait une description fautive du processus décisionnel de la SRC. Autrement dit, la SRC choisit ce qu’elle diffuse et, implicitement, la quantité du répertoire de la SODRAC qu’elle utilise ; la SRC ne choisit pas et ne fixe pas l’inflation. Cela favorise également l’utilisation d’années correspondantes.

[109] Nous suivons la méthode utilisée par la Commission dans Radio de la SRC, 2011 [32] . L’indice d’ensemble des prix à la consommation (IPC) pour janvier 1993 était de 85,0. L’IPC d’ensemble pour décembre 2010 était de 117,5. Le ratio de numéro subséquent sur le numéro précédent est de 1 382 ; on peut en conclure que l’ajustement pour l’inflation est de 38,2 pour cent. Ce taux est quelque peu plus élevé que celui de 34 pour cent retenu par la SODRAC.

iv. Gains technologiques

[110] Les Parties ont présenté des opinions divergentes concernant la relation entre le changement technologique et la valeur des CAD et la façon de déterminer le facteur à appliquer dans l’ajustement du taux historique pour ce changement. Après une analyse approfondie, nous concluons qu’aucune des approches des Parties n’est utile dans ces circonstances et, plutôt, nous avons adopté une approche fondée sur le concept de productivité totale des facteurs (PTF). Nous avons fait cela après avoir demandé aux Parties leurs observations et les avoir analysées. Cette approche donne un facteur d’ajustement de 17,32 pour cent afin de tenir compte du changement technologique.

a. Mesures des gains technologiques des Parties

[111] Dans le cadre de sa propre approche historique, la SODRAC a proposé l’utilisation d’un ratio 0,8- 0,35 comme facteur pour déterminer l’ajustement approprié. Le ratio provient de la décision du 31 mars 2006 de la Commission qui a fixé un taux marginal de 0,35 pour cent des revenus pour les stations qui ne conservent pas des copies sur un disque dur et un taux marginal de 0,8 pour cent des revenus pour les autres stations [33] . Cette option souffre du fait que la SODRAC elle-même ne croit pas que cette méthode a une fondation empirique robuste [34] . De plus, en raison de la façon dont le ratio 0,8-0,35 ait été établi, il dépend implicitement de l’ajustement du répertoire pour CSI en 2003 [35] . Il n’est pas raisonnable qu’une mesure de l’amélioration technologique dépende des ajustements du répertoire d’une quelconque manière.

[112] Cette option ne sera pas considérée plus avant.

[113] Du point de vue de la SRC, il n’y a aucun lien de causalité entre les œuvres protégées par le droit d’auteur et la valeur ajoutée que la SRC a obtenue de son investissement dans la technologie numérique et, par conséquent, il ne devrait y avoir aucun ajustement. Nous ne sommes pas d’accord et réitérons que les avantages et les améliorations technologiques interagissent nécessairement avec le répertoire de la SODRAC (voir Bishop et les paragraphes 47 à 49 des présentes, ci-dessus).

[114] À titre d’option de rechange, la SRC a proposé de tenir compte de la valeur des CAD pour la SRC en termes d’inflation ainsi que des risques, des investissements et des coûts associés à la conversion aux nouvelles technologies. La mesure de cette valeur agrégée devait être calculée par l’augmentation des paiements de la SRC à la SOCAN entre 1992-1995 et 2008-2012, une augmentation de 9 pour cent. L’hypothèse était que l’incidence des facteurs, comme les gains en productivité, qui déterminent la valeur de la musique pour la SRC, conformément aux principes de mise en équilibre et de neutralité technologique, est incluse dans tout changement dans les profits d’une entreprise du secteur privé ou, dans le cas de la SRC qui est sans but lucratif, dans le changement des redevances versées à la SOCAN.

[115] MM. Boyer et Crémieux critiquent largement cette mesure du changement technologique, affirmant qu’il n’y a rien pour lier la technologie à cette augmentation des tarifs. Même s’il y avait un lien, écrivent-ils, les avantages de cette technologie ne sont pas nécessairement de la même ampleur pour le droit de reproduction que pour le droit de communication [36] .

[116] Ces critiques sont pertinentes et nous ajoutons ce qui suit.

[117] D’abord, les redevances pour la télévision entre la SOCAN et la SRC ont toujours été fixées à un montant fixe plutôt qu’à un pourcentage des revenus. Les sommes fixes ne peuvent pas répondre aux changements dans la technologie tant que les tarifs ne sont pas réévalués et fixés de nouveau.

[118] De plus, l’historique du tarif SOCAN pour la télévision de la SRC est incompatible avec l’hypothèse que le taux de ce tarif a pris en compte les gains technologiques. De 1992 à 2002, le montant dû était de 6 350 000 $ par année. De 2006 à aujourd’hui, le montant dû était de 6 922 586 $ par année. L’augmentation de 9 pour cent, de 6,35 millions de dollars à 6,92 millions de dollars, découlait d’un accord entre la SOCAN et la SRC ; les parties n’avaient fourni aucune explication à l’époque.

[119] L’accord entre la SOCAN et la SRC pourrait avoir tenu compte des gains en efficacité dans les communications qui provenaient du nouveau système d’automatisation de la SRC. Il pourrait avoir aussi tenu compte de gains en efficacité dans la technologie de reproduction. Ou les deux, ou aucun. Il ne s’agit pas de la même chose. Nous ne le savons tout simplement pas.

[120] Deuxièmement, cette option est caractérisée par de l’incertitude, car la croissance des redevances de 9 pour cent du tarif de la SOCAN ne peut pas tenir compte à la fois du changement technologique positif et de l’inflation de 38,2 pour cent. On peut en conclure que l’inflation comprise dans la croissance du prix de 9 pour cent se situe entre 0 et 9 pour cent, mais n’est pas calculée en fonction de l’indice des prix à la consommation (IPC). Il est possible que la SOCAN achète des produits et des services différents de ceux achetés par le consommateur canadien typique, mais il n’y a aucune preuve des produits et des services qu’elle achète. Autrement dit, nous ne savons pas si l’inflation pour la SOCAN était de 3 pour cent, de 6 pour cent, de 8 pour cent ou d’un autre pourcentage. Cette incertitude rend cette option inappropriée à nos fins dans cette affaire.

[121] Par conséquent, nous rejetons également cette approche.

b. Productivité comme mesure des gains technologiques

[122] Afin d’ajuster le prix de 1992 de manière à tenir compte des avantages accrus associés à la technologie numérique, nous considérons l’utilisation de la PTF.

[123] La PTF est une mesure généralisée de la productivité. Elle est formée en mesurant le total des extrants (pour une industrie ou pour l’ensemble de l’économie) et en la divisant par la mesure du total des intrants. La croissance de la productivité est une augmentation des extrants en maintenant fixes les intrants utilisés pour produire les extrants. Au Canada, la PTF était régulièrement calculée par Statistique Canada pour diverses industries. La définition de ces industries est fournie en fonction du Système de classification des industries de l’Amérique du Nord (SCIAN). Le SCIAN est la norme appliquée par les organismes statistiques canadiens, américains et mexicains pour classifier les établissements commerciaux dans le but de recueillir, d’analyser et de publier des données statistiques concernant l’économie des entreprises. Il est utilisé pour mesurer les extrants sectoriels, l’inflation et la productivité, entre autres, ce qui facilite la compréhension des relations intersectorielles et l’application de politiques propres aux secteurs.

[124] Le 7 août 2018, la Commission a sollicité des commentaires concernant l’utilisation possible de la PTF de l’industrie « radiotélévision et télécommunications » (code 513 du SCIAN) de 1993 à 2010 comme approximation pour les gains en efficacité de la SRC associés aux copies accessoires de diffusion de la télévision subséquemment à l’amélioration de la technologie au cours de cette période [37] . Le taux de croissance pour cette industrie est de 26 pour cent. Les Parties ont produit leurs observations.

[125] La SRC a fourni deux réponses principales que nous abordons chacune à leur tour.

[126] D’abord, la SRC a fourni, par l’entremise de son économiste M. Reitman, une proposition pour mesurer la PTF pour l’industrie de la diffusion seule, c’est-à-dire sans inclure l’industrie des télécommunications. Assez naturellement, ce dernier procède à la mesure des intrants et des extrants de l’industrie de la diffusion, ainsi que de leurs prix.

[127] Toutefois, M. Reitman observe que certains de ces calculs sont problématiques.

[TRADUCTION]

La difficulté à calculer les intrants et les extrants réels pour le secteur de la télédiffusion est de trouver les indices de prix appropriés pour l’industrie de la télévision. Du côté des intrants, je fais la supposition que les prix pour les intrants comme la main-d’œuvre et le capital pour l’industrie de la télévision augmentent au même taux que les prix des intrants pour le marché en général [38] .

[128] La supposition par M. Reitman de taux de croissance équivalents pour les prix des intrants est probablement la seule façon logique pour lui de procéder ; toutefois, nous estimons qu’il s’agit d’une approche erronée. Pour s’en rendre compte, il suffit de se pencher sur le marché du travail. Les économistes font fréquemment référence au marché du travail comme s’il s’agit d’un seul ensemble, où les fournisseurs et les demandeurs de travail se rencontrent pour négocier un prix d’une manière compétitive. Il est suffisant d’observer que cette caractérisation est un simplisme. L’économie canadienne est formée de nombreuses industries, dont l’extraction et la transformation des ressources naturelles, la fabrication, le commerce de détail et les services financiers, pour nommer quelques-unes des plus importantes. La nature du travail demandé par chacune de ces industries est plutôt différente et très spécialisée. Une personne qui travaille dans le secteur manufacturier ne possède pas nécessairement les compétences requises pour travailler dans la diffusion et vice versa. Ces considérations rendent l’utilisation d’un indice unique, à l’échelle de l’économie, pour les prix du travail, ou les prix des intrants en général, inapproprié pour le calcul de la PTF d’une industrie particulière.

[129] Pour cette raison, nous ne sommes pas en mesure de retenir la proposition de M. Reitman à cet égard.

[130] La deuxième proposition de la SRC était d’ajuster la PTF pour le SCIAN 513 à la baisse de 50 pour cent afin de tenir compte de plusieurs facteurs. Parmi ces facteurs, deux étaient notables : les changements dans les économies d’échelle et la composition de l’industrie elle-même.

[131] Comme l’explique la SRC, les augmentations dans les économies d’échelle ont tendance à faire croître la PTF. Il s’agit d’une conséquence naturelle du fait que les calculs de la PTF sont réalisés en fonction de l’hypothèse d’une concurrence parfaite. Toute déviation de la concurrence parfaite, y compris les économies d’échelle, est dévoilée par la PTF. Par conséquent, tout changement dans les économies d’échelle apparaît dans la croissance de la PTF.

[132] La SRC a cité un rapport de recherche de Gu et Lafrance (2014) [39] . Ce rapport de recherche, rédigé par deux employés de Statistique Canada, porte sur l’industrie spécifique que la Commission a mentionnée dans son avis. Le rapport de recherche note que les économies d’échelle sont un facteur important de la PTF dans le SCIAN 513.

Bien que les progrès techniques, qui représentent 1,3 à 1,4 point de pourcentage par année, aient été le facteur le plus important dans la croissance globale de la PMF, les économies d’échelle ont aussi apporté une contribution importante d’environ 0,5 point de pourcentage, soit 30 % à 40 % du total. (p 27)

[133] Le tableau 7 du rapport de recherche du Gu et Lafrance montre les détails. De 1984 à 1998, les économies d’échelle comptaient pour 0,5/1,4 de la croissance de la PTF, ou 35,7 pour cent. De 2000 à 2008, les économies d’échelle comptaient pour 0,6/1,9 de la croissance de la PTF, ou 31,6 pour cent. La moyenne pondérée de ces deux taux est de 33,4 pour cent.

[134] La composition de l’industrie est un facteur plus problématique à ajuster. Citant de nouveau Gu et Lafrance, la SRC affirme que 90 pour cent des extrants de l’industrie proviennent du sous-secteur des télécommunications [40] . Pourtant, Gu et Lafrance ne font pas cette affirmation.

[135] Il est certain que certaines entreprises de ce secteur œuvrent dans les télécommunications ; idéalement, leur contribution pourrait être retirée de la croissance de la PTF. Cependant, cela n’est pas possible.

[136] Les membres de l’industrie des télécommunications et de l’industrie de la diffusion se présentent souvent devant la Commission. Par conséquent, la Commission suit étroitement les développements dans les deux industries. Nous prenons note des faits suivants.

[137] Les industries des télécommunications et de la diffusion sont toutes deux concentrées.

[138] Il y a eu une importante concentration dans les deux industries au cours de la période en question, soit de 1993 à 2010.

[139] Parmi les entreprises dans les deux industries qui contribuent le plus au PIB propre à leur secteur, de nombreuses appartiennent à des sociétés de portefeuille qui possèdent à la fois une entreprise de télécommunications et une entreprise de diffusion. Cela sous-entend la possibilité de coûts des intrants partagés entre les deux « côtés » de la société de portefeuille.

[140] Compte tenu de ces faits, nous croyons que la PTF pour le SCIAN 513, une fois ses économies d’échelle retirées, a crû au même taux dans les sous-secteurs des télécommunications et de la diffusion. Si le taux de croissance est le même, il importe peu si la taille relative des sous-secteurs est aussi différente que l’affirme la SRC. La linéarité des calculs du taux de croissance rend cette considération redondante.

[141] Compte tenu des points soulevés par la SRC, nous croyons qu’il est approprié et raisonnable d’ajuster la PTF pour le SCIAN 513 à la baisse de 33,4 pour cent pour les économies d’échelle ; aucun autre ajustement n’est requis ou approprié. Cela donne un taux de 17,32 pour cent pour tenir compte des gains en technologie.

c. Résumé

[142] Utiliser la croissance de la PTF pour le SCIAN 513 comme approximation du changement technologique est la meilleure option dont nous disposons. Elle n’est pas spécifique à la SRC, mais aucune des autres options ne l’est non plus. Le modèle de la PTF arbore le moins d’imperfections et les moins prégnantes, comparativement aux autres options. Nous remarquons que la SRC a proposé un certain nombre d’ajustements à la croissance mesurée par la PTF, mais nous en avons retenu un seul. Par conséquent, l’ajustement pour le gain technologique est de 17,32 pour cent.

v. Isoler les CAD

[143] Telle que nous l’avons appliquée, la méthode historique nous mène à un prix ajusté pour toutes les reproductions du répertoire de la SODRAC par la SRC en matière de télévision, sans distinguer les redevances pour les CAD des redevances pour d’autres copies (copies maîtresses et copies accessoires de production). Il s’agit donc d’identifier la part des CAD afin de parachever l’application du modèle.

[144] Le prix ajusté total est de 1 586 665 $ pour la période de 2008-2012. Nous arrivons à ce total en ajustant la part de la télévision de la licence de 1992, que les parties ont convenu de fixer à 420 000 $, de 38,2 pour cent pour l’inflation, accrue de 133 pour cent afin de tenir compte de l’augmentation de l’utilisation du répertoire de la SODRAC et ajustée également de 17,32 pour cent afin de tenir compte des gains technologiques issus du passage des systèmes analogiques aux systèmes numériques.

[145] Deux options existent pour isoler les CAD du prix total pour toutes les reproductions : i) soustraire les montants de redevances payés en fait par la SRC pour l’autorisation de synchroniser de la musique et des images ; ii) établir une répartition interne théorique effectuée par la SRC ou la SODRAC.

a. Frais réels payés par la SRC pour synchronisation

[146] M. Reitman propose une méthode de soustraction qui prend comme point de départ les redevances de synchronisation fixées dans SRC c SODRAC :

[TRADUCTION]

[d]ans cette instance, je comprends que les frais de synchronisation pour la période de 2008-2012 avaient déjà été fixés par la décision de 2010 de la Commission [41] , donc seuls les frais pour les CAD sont en question. Par conséquent, il n’est pas nécessaire de déterminer la répartition optimale entre la synchronisation et les copies accessoires de diffusion pour la SODRAC et la SRC. Plutôt, le principe d’équilibre sous-entend qu’une personne peut utiliser des modèles ou des bases de référence pour déterminer la compensation appropriée que la SRC doit verser à la SODRAC pour tous les droits de reproduction. Ensuite, en soustrayant le montant de la compensation pour les droits de synchronisation, le reste serait la compensation appropriée pour les CAD [42] .

[147] Dans sa décision de 2012, la Commission avait fixé les frais de synchronisation annuels à 832 479 $ [43] . Ces frais visaient uniquement les productions internes et, par conséquent, n’incluaient pas les productions commandées. M. Reitman suppose que les redevances de synchronisation pour ces programmes achetés par la SRC auprès de tiers sont les mêmes que pour ceux réalisés par la SRC et que ces redevances sont transmises intégralement à la SRC lorsqu’elle achète ces programmes. Il divise ainsi par 54,8 pour cent pour obtenir un montant « total » pour synchronisation de 1 519 122 $ [44] . Ce montant tient compte de la synchronisation dans les productions internes de la SRC, dans les productions commandées par la SRC et dans les productions préexistantes. Puisque la licence de 1992 couvrait seulement les productions internes et commandées, nous apportons une correction pour retirer les productions préexistantes. Après correction, le montant total pour la synchronisation serait de 1 467 287 $ [45] .

[148] La méthode par soustraction de M. Reitman peut entraîner un nombre négatif pour les redevances. Un nombre négatif est considéré par la SRC comme un nombre nul ou un prix nominal. Dans ce cas-ci, nous obtenons un montant total de 1 586 665 $ pour l’accord de 1992 projeté pour la période de 2008-2012. Cela sous-entend des redevances pour les CAD de 119 378 $ en appliquant la méthode par soustraction.

[149] Notre principale préoccupation avec la méthode par soustraction est que les deux éléments à soustraire de l’un et de l’autre proviennent de deux modèles différents. Le montant majoré est fondé sur l’accord de 1992, alors que le montant fixé par la Commission pour la synchronisation (y compris la copie maîtresse) n’était pas fondé sur l’accord de 1992. Si nous avions réexaminé le prix de synchronisation dans cette instance, nous serions peut-être arrivés à une conclusion différente selon la méthode que nous utilisons ici.

[150] De plus, utiliser deux méthodes séparées fait croître la marge d’erreur du calcul.

[151] Pour ces raisons, nous refusons d’appliquer la méthode par soustraction pour isoler le prix des CAD du prix pour toutes les reproductions.

b. Frais imputés

[152] Plutôt, nous choisissons d’adopter la deuxième option mentionnée ci-haut soit une répartition imputée ou théorique entre la SODRAC et la SRC. Nos calculs nous permettent d’adopter un montant de 396 666 $ par année pour les redevances relatives aux CAD. Nous obtenons ce montant en appliquant une part de 25 pour cent au prix total ajusté de 1 586 665 $ pour la période de 2008-2012, calculé précédemment. Nous arrivons à une part de 25 pour cent pour les raisons suivantes.

[153] MM. Boyer et Crémieux supposent que la répartition du prix entre les CAD et les copies de synchronisation est 50-50. Ils ne donnent cependant aucune justification pour le choix de 50 pour cent à chacun des types de reproductions. Leur hypothèse est arbitraire. Ce partage 50-50 indique implicitement que les CAD et la synchronisation ont une « importance » égale. Alors que la SODRAC a posé de nombreuses questions à la SRC concernant l’importance relative des divers types de CAD [46] , elle n’a posé aucune question concernant la valeur relative des CAD et des copies de synchronisation.

[154] La Cour a souligné qu’il est important que la Commission tienne compte de la « valeur à l’utilisateur » (SRC c SODRAC au para 79).

[155] Parce que les CAD sont de nature « accessoire », leur valeur à l’utilisateur est évidemment inférieure à celle des copies non accessoires. Dans sa décision de 2012, la Commission a mis en évidence cette caractéristique, notant que « la copie accessoire est nécessaire ou utile pour arriver à un résultat sans toutefois y être intégrée » (para 12). La nature accessoire de ces copies n’est pas cohérente avec l’affirmation que les CAD devraient avoir une valeur identique à la synchronisation. Par conséquent, nous rejetons une répartition 50-50 et la proposition que les CAD devraient représenter 50 pour cent des redevances totales.

[156] Cependant, dans ses observations finales, la SRC présente une façon alternative de déterminer la répartition des redevances pour les CAD à partir des redevances totales [47] :

[TRADUCTION]

Le « 1 » dans le ratio doit être réparti entre trois types de copies : les CAD, les CAP et la synchronisation ou copie maîtresse. La copie maîtresse est clairement la catégorie la plus importante et devrait recevoir 50 % de la valeur. Le 50 % restant devrait être divisé de manière égale entre les CAD et les CAP. Cela permet aux CAD de recevoir 25 % de la valeur totale, alors que les CAP et les copies maîtresses reçoivent 75 %. Cette répartition 25-75 tient compte de plusieurs faits importants concernant la façon dont les droits de reproduction sont utilisés dans l’industrie de la télévision : i) il y a beaucoup plus de copies faites au cours de la production que de la diffusion; ii) les producteurs payent des redevances importantes pour la synchronisation, montrant que la majorité de la valeur se trouve dans la copie de synchronisation; iii) les diffuseurs payent des redevances d’exécution à la SOCAN; iv) le droit de reproduction a un degré d’essentialité plus faible et un caractère facultatif plus élevé dans la télévision comparativement à la radio [48] .

[157] Nous trouvons cette observation convaincante, non seulement d’un point de vue du bon sens, mais également parce que cela peut être justifié en termes économiques en caractérisant l’observation dans le contexte des principes de la négociation de Nash généralisée. Considérons ce qui suit.

[158] Il y a trois joueurs : la copie maîtresse (synchronisation), toutes les CAP et toutes les CAD. Chacun de ces trois joueurs représente nominalement les trois « sections » de la SODRAC dans le jeu. Dans ce jeu, la copie maîtresse est essentielle, alors que les CAP et les CAD ne le sont pas [49] . Avant le début du jeu, la SRC et la SODRAC sont d’accord que le montant total à payer par la SRC à la SODRAC pour toutes les reproductions (de production et de diffusion) est le montant de l’accord de 1992 majoré. Ce surplus (pour utiliser le langage de la négociation de Nash) est négocié de manière séquentielle.

[159] À la première étape, les CAD et les CAP négocient ensemble avec la copie maîtresse (la copie maîtresse est privilégiée comme essentielle). Dans une séance de négociation entre la section de la copie maîtresse et la section de toutes les autres copies, aucune des deux parties n’a un pouvoir de négociation supérieur. L’une ou l’autre partie peut décider de quitter la table des négociations et faire s’effondrer l’accord entre la SRC et la SODRAC. On peut conclure que les deux parties ont des « leviers » symétriques. Le résultat des négociations est immédiat (en raison de Nash) : la copie maîtresse reçoit 50 pour cent et toutes les autres copies reçoivent 50 pour cent.

[160] Dans la deuxième étape, la section de toutes les autres copies se divise en sections des CAD et des CAP. Les CAD et les CAP ont une importance égale. De nouveau, les deux parties ont un pouvoir de négociation égal et des points de menace symétriques. La solution de négociation de Nash donne une répartition 50-50 des 50 pour cent restants, soit 25 pour cent chacun.

[161] Il faut souligner que les experts de la SODRAC et de la SRC ont utilisé les jeux de négociation de Nash dans leurs rapports d’expert. Les jeux qu’ils présentent diffèrent l’un de l’autre et de celui développé ci-dessus. Le jeu de négociation de Nash présenté par la SODRAC est un jeu de négociation entre la SRC et la SODRAC. Comme l’explique M. Boyer :

[TRADUCTION]

La tarte monétaire supplémentaire générée par l’utilisation par la SRC des CAD dans un nouvel environnement technologique devrait être partagée de manière égale entre la SRC et les titulaires de droits. Cette solution est appliquée après que les investissements et les risques pris par la SRC, ainsi que par les titulaires de droits, sont couverts de manière appropriée. C’est la valeur résiduelle qui devrait être partagée 50-50 entre les agents [50] .

[162] Vu la façon dont M. Boyer définit ce jeu, il n’a pas les données pour déterminer la valeur résiduelle [51] . Il ne va pas plus loin avec la négociation de Nash, malgré sa conclusion qu’un jeu de négociation caractérisé de manière appropriée serait idéal.

[163] Dans le même ordre d’idées, M. Reitman définit un certain nombre de variables clés [52] :

  • les revenus gagnés par la SRC pour un produit audiovisuel qui est synchronisé avec la musique de la SODRAC ;

  • les coûts supplémentaires pour la SRC associés à la production et à la diffusion du produit, autre que les paiements à la SODRAC ;

  • les revenus nets gagnés par la SRC avec la meilleure option suivante (une production sans la musique de la SODRAC) si une entente ne peut pas être conclue avec la SODRAC ;

  • les coûts totaux pour la SRC de la production, y compris les coûts d’opportunité ;

  • les coûts d’opportunité pour la SODRAC associés à l’utilisation de son répertoire dans la production de la SRC ;

  • le paiement à la SODRAC pour la synchronisation de la musique dans le produit audiovisuel ;

  • le paiement à la SODRAC pour les copies accessoires de diffusion du produit audiovisuel.

[164] M. Reitman envisage ensuite trois jeux. Dans son premier jeu, les parties négocient au sujet de la synchronisation seulement. Dans son deuxième jeu, les parties négocient au sujet de la synchronisation et des CAD sans aucune contrainte. Dans son troisième jeu, les parties négocient au sujet de la synchronisation et des CAD dans un contexte où le paiement total sera fixé à l’extérieur du modèle. Il résout les trois jeux sous forme algébrique, mais ne calibre pas les valeurs qui en découlent, ni les estime du point de vue économétrique.

[165] Cependant, nous estimons que le « jeu » de Nash que nous avons élaboré peut nous fournir un modèle utile pour calibrer et estimer la part appropriée des redevances totales attribuées aux CAD. En vertu de ce jeu, nous accordons 25 pour cent de la valeur totale, soit 396 666 $, aux CAD. Il n’est pas anodin que ce pourcentage corresponde à l’évaluation de la SRC de la part de la valeur attribuable aux CAD, comme il a été susmentionné [53] .

[166] Nous reconnaissons qu’il pourrait y avoir certains éléments de paiement en double théorique dans cette approche. La somme des redevances fixées pour les CAD et des redevances que la SRC a payées pour la synchronisation sera supérieure à l’évaluation retenue par la Commission du prix pour les CAD et la synchronisation. Cependant, nous ne voyons pas cela comme un résultat donnant lieu à des redevances qui ne soient pas justes et équitables. Le risque d’un paiement en double est toujours présent lorsque la Commission ne tient pas compte de tous les prix pertinents en même temps. Dans ce cas-ci, nous ne considérons pas que l’écart soit suffisamment important pour justifier le rejet de ce modèle.

[167] Comparée aux autres méthodes de répartition avancées par les Parties, nous préférons cette option. Elle représente une évaluation relative des CAD par rapport à toutes les reproductions, reconnaissant ainsi la nature accessoire des CAD, alors que la méthode par répartition arbitraire ne le fait pas. De plus, cela est en adéquation avec notre modèle d’ajustement du prix utilisé dans le reste de notre analyse, alors que ce n’est pas le cas de la soustraction des redevances pour la synchronisation.

[168] Puisque ce prix représente un tarif fixe calculé à partir de l’accord de 1992 mis à jour, y compris l’utilisation du répertoire, il n’exige plus un rabais pour les reproductions accessoires de programmes contenant des œuvres qui font partie du répertoire de la SODRAC et qui sont affranchies à la source.

F. QUE DEVRAIT ÊTRE LE PRIX POUR LES COPIES ACCESSOIRES DE DIFFUSION INTERNET ?

[169] En termes de CAD faites pour la diffusion Internet, dans ce cas en particulier, les Parties ont convenu qu’un taux de 4 pour cent est la relation approximative d’importance de la diffusion Internet par rapport à la télédiffusion conventionnelle. Par conséquent, nous conservons la majoration de 4 pour cent de la licence originale. Le montant annuel exigible est, par conséquent, 15 867 $.

V. LES REDEVANCES RÉVISÉES POUR LES CAD DE LA TÉLÉVISION CONVENTIONNELLE ET INTERNET: CONCLUSION

[170] Puisque la Cour suprême demande à la Commission de comparer les prix pour le numérique et l’analogique et que la licence de 1992 est le seul indicateur de prix pour les copies analogiques au dossier, nous estimons que l’arrêt de la Cour (lequel reconnaît la licence de 1992) exige logiquement que la Commission tienne compte de la licence de 1992 dans son analyse. Pour cette raison, l’approche historique, laquelle utilise la licence de 1992 comme point de référence et y apporte des ajustements afin de tenir compte des différences entre cette licence et la licence en question, est la meilleure approche présentée par les Parties.

[171] Comme nous l’avons indiqué précédemment, nous avons déterminé que l’approche du ratio, telle qu’élaborée par la SODRAC, comportait beaucoup trop de problèmes pour être retenue, soit en termes de conformité aux critères établis dans l’arrêt de SRC c SODRAC, soit d’un point de vue méthodologique. Nous remarquons toutefois, comme l’ont fait les Parties, que les ratios sont fréquemment utilisés dans l’analyse économique et peuvent constituer une approche valide dans certaines circonstances. Par exemple, un tarif dans le marché cible peut être déterminant en tenant compte d’un tarif dans un marché de référence approprié multiplié par le ratio des facteurs d’ajustement fiables dans le marché cible et de référence.

[172] La Commission dispose d’une certaine marge de discrétion pour arriver à des redevances justes et équitables lorsque ces redevances ne peuvent pas faire l’objet d’un calcul précis. Comme la Cour l’a souligné :

Lorsqu’elle procède à l’évaluation d’une licence ou d’un tarif, la Commission arrive à une décision en se servant de son expérience et de son expertise pour soupeser une preuve qui peut ne pas se réduire à une évaluation économique objective. Il ne faut toutefois pas déduire de l’existence de cette difficulté que la Commission ne peut pas examiner soigneusement une preuve d’expert, l’existence d’approximations applicables et d’autres facteurs pertinents pour en arriver à une évaluation raisonnable (SRC c SODRAC au para 93).

[173] Nous avons déterminé que les redevances appropriées pour les CAD de la télévision conventionnelle sont de 396 666 $ par année, avant déduction des redevances payées au titre de la licence provisoire de 2009, le cas échéant, et de l’intérêt (que nous abordons dans la section suivante). Les redevances pour les CAD de la télévision Internet sont de 4 pour cent de ce montant.

[174] La demande pour une licence de la SODRAC couvre la période du 14 novembre 2008 au 31 mars 2012. Par conséquent, nous identifions quatre périodes et leurs redevances :

  • Du 14 novembre 2008 au 13 novembre 2009 : 396 666 $

  • Du 14 novembre 2009 au 13 novembre 2010 : 396 666 $

  • Du 14 novembre 2010 au 13 novembre 2011 : 396 666 $

  • Du 14 novembre 2011 au 31 mars 2012 : 149 972, 50 $ (au prorata de la portion de l’année couverte par cette période)

[175] À notre avis, ces redevances sont justes et équitables et représentatives de la nature accessoire des CAD – « relativement peu élevées » selon les termes de la majorité de la Cour – par rapport à l’entier prix de la synchronisation, pour toutes les reproductions utilisant le répertoire de la SODRAC. En effet, nous estimons que notre utilisation de la théorie de négociation de Nash, appliquée aux CAD, et les pondérations retenues, nous ont permis de trouver une allocation, et donc un montant exprimé en dollar, qui soit cohérente avec cette approche ainsi qu’avec les principes de neutralité technologique et d’équilibre.

VI. L’INTÉRÊT

[176] La Commission reconnaît la valeur temporelle de l’argent et, par conséquent, peut prévoir des facteurs d’intérêt et l’intérêt postérieur à la décision. Les Parties ont été consultées sur ces enjeux.

A. L’intérêt postérieur à la décision

[177] Les Parties se sont entendues sur l’intérêt postérieur à la décision. De consentement, les redevances, minorées, le cas échéant, selon les différences entre la présente décision et la licence provisoire du 31 mars 2009 et majorées par les facteurs d’intérêt établis ci-après, sont dues au plus tard 90 jours après la date des présentes. Tout montant non payé à son échéance porte intérêt à compter de la date à laquelle il aurait dû être acquitté jusqu’à la date où il est reçu. L’intérêt est calculé quotidiennement, à un taux de 1 pour cent au-dessus du taux officiel d’escompte en vigueur le dernier jour du mois précédent (tel qu’il est publié par la Banque du Canada). L’intérêt n’est pas composé.

B. L’intérêt antérieur à la décision

[178] Les Parties ne se sont pas entendues sur l’intérêt antérieur à la décision en ce qui concerne la période qui devrait être couverte. La SRC considère que les 12 années d’intérêt (c.-à-d. du début de la licence jusqu’à la date de la présente décision) représentent une aubaine pour la SODRAC, au lieu d’être un paiement raisonnable pour le temps perdu. La SRC considère injuste le fait qu’elle ait à payer une prime sur le temps écoulé puisque les délais sont majoritairement attribuables à la stratégie de litige de la SODRAC. La SRC note aussi que les délibérations ont été doublement longues : la décision de 2012 et la décision de 2020 ont chacune requis plus ou moins deux années de délibération. La SRC requiert que l’intérêt coure à partir de la décision de la Cour suprême. Ceci répartirait le fardeau de l’intérêt dans chaque délibération à une Partie. La SODRAC assumerait le fardeau de l’intérêt pour la période de la délibération initiale, tandis que la SRC paierait l’intérêt pour la deuxième période de délibération. Ce partage 50/50 des délais institutionnels présente une solution équitable qui n’impose à aucune des Parties d’assumer seule l’entier coût des intérêts courant pendant les délibérations de la Commission.

[179] Nous voyons les choses différemment. En fonction du montant final, soit la SODRAC soit la SRC peut devoir de l’argent. Par exemple, il est possible que la SODRAC n’ait pas reçu des paiements de la SRC depuis 2008 pour les CAD de son répertoire. Il est aussi possible que la SRC ait payé un montant selon la licence provisoire qui dépasse le montant final fixé par la Commission. Dans tous les cas, les occasions d’utiliser la somme dont on attend le versement sont manquées [54] . La seule question pertinente est celle de savoir si un montant est dû. Les stratégies de litige [55] ou les délais institutionnels [56] ne le sont pas. Il est évident que les CAD donnent droit à des redevances qui ne seront jamais nulles (SRC c. SODRAC aux paras 5 et 77).

[180] De plus, la période pour laquelle les coûts de renonciation sont subis devrait être relativement neutre pour la partie qui doit l’argent, si cette partie a placé un montant dont le rendement serait facilement disponible pour compenser le créancier pour ses coûts de renonciation une fois la décision finale rendue. En l’espèce, la SRC était assujettie à la licence provisoire arrêtée par la Commission le 31 mars 2009, laquelle à toute fin pratique reproduit le régime visé à la Convention de 1992, soit un montant forfaitaire annuel de 520 000 $ payé trimestriellement. Cette licence provisoire s’applique jusqu’à ce que la Commission rende sa décision finale, laquelle – en raison de l’ordonnance de renvoi de la Cour suprême – est la présente décision. Si la SRC n’a fait aucun paiement selon la licence provisoire depuis 2009, le montant dû aura théoriquement produit suffisamment d’intérêt pour couvrir les coûts de renonciation de la SODRAC ou ses membres en relation au montant principal que nous fixons. Si la SRC payait les redevances de la licence provisoire, la SODRAC devrait à la SRC de l’intérêt pour tenir compte de la valeur temporelle de l’argent représentant la différence entre les redevances finales et provisoires.

[181] À la lumière de ce qui précède, les facteurs d’intérêt couvrent la période courant du début de la licence (le 14 novembre 2008) jusqu’à la date de la présente décision. Pour calculer les facteurs d’intérêt, nous devons fixer la fréquence des paiements qui auraient été faits, si la licence avait été délivrée le 13 novembre 2008, au lieu de la date de la décision actuelle. Pour être cohérents avec le modèle que nous utilisons (lequel est axé sur la Convention de 1992) et la licence provisoire de 2009, nous fixons les paiements sur une base trimestrielle.

[182] Les facteurs d’intérêt sont les suivants :

Numéro du Paiement

Date du Paiement

Redevances pour les CAD de la télévision

Facteur d’intérêt

Paiement brut

Intérêt

1

le 13 fév. 2009

99 166,58 $

1,134 3

112 484,65 $

13 318,07 $

2

le 15 mai 2009

99 166,58 $

1,132 4

112 296,24 $

13 129,66 $

3

le 14 août 2009

99 166,58 $

1,131 1

112 167,32 $

13 000,74 $

4

le 14 nov. 2009

99 166,58 $

1,129 9

112 048,32 $

12 881,74 $

5

le 13 fév. 2010

99 166,58 $

1,128 6

111 919,40 $

12 752,82 $

6

le 15 mai 2010

99 166,58 $

1,127 4

111 800,40 $

12 633,82 $

7

le 14 août 2010

99 166,58 $

1,125 4

111 602,07 $

12 435,49 $

8

le 14 nov. 2010

99 166,58 $

1,122 5

111 314,49 $

12 147,91 $

9

le 13 fév. 2011

99 166,58 $

1,119 4

111 007,07 $

11 840,49 $

10

le 15 mai 2011

99 166,58 $

1,116 2

110 689,74 $

11 523,16 $

11

le 14 août 2011

99 166,58 $

1,113 1

110 382,32 $

11 215,74 $

12

le 14 nov. 2011

99 166,58 $

1,110 0

110 074,90 $

10 908,32 $

13

le 13 fév. 2012

99 166,58 $

1,106 9

109 767,49 $

10 600,91 $

14

le 31 mars 2012

51 077,58 $

1,103 7

56 374,33 $

5 296,75 $

 

 

Montant total

1 340 243,12 $

 

1 503 928,73 $

163 685,61 $

[183] Il suffit d’ajouter 4 pour cent à chaque paiement brut visé au tableau ci-dessus pour calculer les redevances des CAD de la télévision par Internet.

[184] Enfin, pour éviter toute confusion quant aux parties de la licence originale qui sont modifiées de façon rétroactive, nous avons décidé de ne pas publier une licence révisée. À toutes fins utiles, la présente décision est autosuffisante et les Parties ne se référeront qu’à elle pour identifier leurs obligations respectives.

Motifs certifiés par la secrétaire générale,

Signature

Lara Taylor



[1] Société Radio-Canada c SODRAC 2003 Inc., 2015 CSC 57, [2015] 3 RCS 615. [SRC c SODRAC]

[2] Demande de fixation des redevances et modalités d’une licence (SODRAC c SRC/CBC), 2008-2012 (2 novembre 2012) Commission du droit d’auteur. [décision de 2012]

[3] Pièce SODRAC-1, Exposé de cause de la SODRAC (Réexamen de 2008-2012) aux para 132f) et 133.

[4] Pièce SODRAC-4.

[5] Pièce SODRAC-4 au para 53 : « un flux de travail bout à bout, de l’ingestion à la lecture, où les médias numériques sont contenus dans des fichiers (contrairement aux bandes vidéo numériques qui enregistrent les médias seulement numériquement, mais pas dans un fichier) ». [Notre traduction]

[6] Voir la partie de la pièce SODRAC-4 à la p 21 et l’appendice D : Peggy Dau, « Mettre en œuvre des circuits de travail axés sur les fichiers » (Grass Valley Whitepaper 2011).

[7] Pièce SODRAC-4 au para 125.

[8] Pièce SODRAC-27 aux paras 96ss.

[9] Pièce SODRAC-27 au para 121.

[10] Pièce SODRAC-5A, « Flux de travail en mode fichier », SYNC : Numéro 2 2012 à la p 4.

[12] Pièce SODRAC-27 au para 41.

[13] 80 N.R. 302, 18 C.P.R. (3d) 257, 16 C.I.P.R. 243.

[14] SRC c SODRAC au para 75.

[15] Pièce SODRAC-4, Adoption de la technologie de diffusion numérique à la SRC 1992-2012 et appendices A à D, par M. Michael J. Murphy, 9 mars 2017 au para 127; pièce SODRAC-27, Perspective économique sur le réexamen des redevances pour licence payables pour des copies accessoires de diffusion pour la télévision et Internet, Marcel Boyer, Pierre-Yves Crémieux, Groupe d’analyse, 23 mars 2017 au para 77.

[16] Pièce SODRAC-6A, Rapport sur la technologie contemporaine, par M. Michael J. Murphy, 1er février 2010 aux paras 9, 11, 25, 30 et 61; pièce SODRAC-6A, appendice D : « Le passage de la CBC/Radio-Canada à la diffusion centralisée »; pièce SODRAC-4, Adoption de la technologie de diffusion numérique à la SRC 1992-2012 et appendices A à D, par M. Michael J. Murphy, 9 mars 2017 aux paras 42, 73 et 74.

[17] Pièce SODRAC-6A aux paras 30 et 31, expliquant que la SRC était en 1998 le plus important système numérique audio et de diffusion mis en œuvre dans le monde, utilisant 2 000 postes de travail et serveurs informatiques connectés en réseau partout au Canada. Vu les similitudes des technologies de la télévision et de la radio, il est facile de voir que le risque existait pour la radio, mais également la télévision. Par exemple, concernant la télévision, voir la pièce SODRAC-6A, appendice D : « Le passage de la CBC/Radio-Canada à la diffusion centralisée ».

[18] Pièce SODRAC-17B au para 9.

[19] Voir par exemple la pièce SODRAC-6A, appendice D : « Le passage de la CBC/Radio-Canada à la diffusion centralisée ».

[20] Pièce SODRAC-27, Rapport Boyer Crémieux (Licence 2008-2012) au para 97.

[21] L.R.C. (1985), ch. C-42 à l’article 30.71, Reproductions temporaires pour processus technologiques.

[22] SRC c SODRAC aux paras 88 à 90.

[23] CSI Reproduction d’œuvres musicales (2001-2004) (28 mars 2003), Commission du droit d’auteur [Radio commerciale, 2003]. Voir, en particulier, les pp 12 à 14.

[24] Pièce SODRAC-6A aux paras 19ss.

[25] Pièce CBC-2, Rapport de M. Reitman, au para 128.

[26] L’accord de 2009 entre la CMRRA et la SRC (pièce SODRAC-32A) a été prolongé en août 2015 alors que l’arrêt SRC c SODRAC a été rendu en novembre 2015. Les autres accords radiophoniques (pièces SODRAC-32B, 32C et 32D) précèdent également l’arrêt SRC c SODRAC.

[27] Pour un exemple, voir Lavallée (chef), transcriptions, vol. 7 (H. Conf.) 617:18-25, 618:1-6.

[28] Pièce SODRAC-31, art 2.1 ; pièce SODRAC-32A, art 2.1 ; pièce SODRAC-32B, art 3.1 ; pièce SODRAC-32C, art « Octroi de licence ».

[29] Voir, en général, pièce SODRAC-6A, Rapport sur la technologie de diffusion contemporaine à l’article 4.31 et aux paras 21 à 36 ; pièce SODRAC-6D, Rapport sur la technologie de radiodiffusion contemporaine aux paras 32ss.

[30] On notera que dans sa décision de 2012, au para 117, la Commission a rejeté les références à d’autres marchés (en ligne comparativement à la télévision) en raison du manque de similitudes, notamment l’absence de synchronisation dans le marché de référence : « les similitudes entre la musique en ligne et la télévision sont loin d’être évidentes, entre autres parce qu’aucune copie de synchronisation n’est faite pour transmettre la musique sur Internet aux fins du téléchargement ou de l’écoute en continu. Nous sommes d’accord. »

[31] TV5 a écrit à la Commission le 31 mai 2010, envoyant une copie conforme à l’avocat de la SODRAC, indiquant notamment que « le fait que TV5 ait décidé, pour des raisons qui lui sont propres, d’exercer ou non ce droit de production interne, n’a selon nous aucune incidence sur les droits qui nous sont concédés et sur lesquels la valeur de la redevance a été établie ».

[32] Tarifs 1.C (Radio de la SRC) de la SOCAN et de Ré:Sonne, 2006-2011 (8 juillet 2011), Commission du droit d’auteur au para 82ss.

[33] Tarifs des redevances à percevoir par la CMRRA/SODRAC Inc. pour la reproduction d’œuvres musicales, au Canada, par les stations de radio commerciales (2005 et 2006) (31 mars 2006), Commission du droit d’auteur à la p 9.

[34] Pièce SODRAC-27 au para 138.

[35] Le nombre de 0,8 représente la part du répertoire de CSI, laquelle est la part du répertoire de la CMRRA plus la part du répertoire de la SODRAC moins tout chevauchement. Le nombre de 0,35 est une part de 44 pour cent de 0,8, établi selon l’accord entre CSI et l’Association canadienne des radiodiffuseurs (ACR) que les stations de radio qui ont une faible utilisation du répertoire de CSI devraient payer moins. La Commission a adapté le nombre de 44 pour cent aux stations qui ne font aucune reproduction, à la suggestion de CSI, mais à l’encontre de l’opposition de l’ACR. Si la Commission autorisait deux ensembles de tarifs, un pour la CMRRA et un pour la SODRAC, plutôt qu’un seul tarif commun pour CSI, il n’y a aucune garantie que les ratios seraient les mêmes que ceux pour CSI. En particulier, puisque le répertoire de la SODRAC est relativement petit comparé à celui de la CMRRA, la logique analogue à un tarif minimum aurait probablement créé un motif non linéaire dans le ratio des tarifs pour les stations qui ne font aucune reproduction sur les tarifs pour celles qui en font.

[36] Pièce SODRAC-94 au para 46.

[37] Avis [CB-CDA 2018-178].

[38] Pièce CBC-129 au para 9.

[39] Pièce CBC-129 au para 5, note 5.

[40] Pièce CBC-129 au para 5, note 5, citant Gu et Lafrance à la p 7.

[41] M. Reitman parle de la décision de la Commission de 2012, et non 2010.

[42] Pièce CBC-2 au para 61.

[43] Décision de 2012 de la Commission du droit d’auteur au para 130.

[44] Pièce CBC-2 au para 142.

[45] Selon la preuve de la SRC concernant les parts des productions internes et « externes » dans la SRC et la CBC (pièce CBC-48), M. Reitman a conclu que 54,8 pour cent des productions de la SRC sont internes et que le reste (45,2 pour cent) est externe (pièce CBC-2 au para 142). Cependant, cette production interne comprend la production commandée par la SRC et la production « immédiatement disponible » (c’est-à-dire les productions sans aucune participation de la SRC). La part des productions « immédiatement disponibles » est 13 pour 100 des programmes francophones de la SRC et 3 pour cent pour le réseau anglophone (SRC, Observations finales [Réexamen 2008- 2012] à la note de bas de page 216). Selon cette preuve, nous avons déduit le contenu immédiatement disponible de la SRC pour calculer les parts des productions internes et « commandées » à la SRC et à la CBC. Après cet ajustement, nous avons estimé que 58,2 pour cent des productions de la SRC sont internes (plutôt que le 54,8 pour cent de M. Reitman) et le reste (41,8 pour cent) est commandé (plutôt que le 45,2 pour cent de M. Reitman). Par conséquent, nous avons obtenu 832 479 $ × 41,8/58,2 = 634 808 $ pour les paiements de synchronisation de la SRC pour la production commandée.

[46] Voir la pièce SODRAC-59, appendice I.

[47] SRC, Observations finales (réexamen de 2008-2012) aux paras 137 à 140.

[48] SRC, Observations finales (Réexamen de 2008-2012) au para 139.

[49] Dans Nash, un intrant est essentiel s’il ne peut pas être substitué par un autre intrant, peu importe le coût (y compris la perte d’efficacité, entre autres).

[50] Pièce SODRAC-27 au para 27.

[51] Pièce SODRAC-27 au para 103.

[52] Pièce CBC-2 au para 18.

[53] CBC, Observations finales (Réexamen de 2008-2012) au para 139.

[54] Banque d’Amérique du Canada c Société de Fiducie Mutuelle, [2002] 2 R.C.S. 601, 2002 CSC 43 au para 22.

[55] Les intérêts antérieurs à la décision ne sont pas des dépens ; leur fonction vise à compenser une partie et non la punir. Voir par analogie Banque d’Amérique du Canada c Société de Fiducie Mutuelle, [2002] 2 R.C.S. 601, 2002 CSC 43 au para 36.

[56] Les délais liés aux délibérations ne sont normalement pas exclus de la période couverte par les intérêts. Voir par analogie R. c K.G.K., 2020 CSC 7 au para 56.

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