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Copyright Board Canada

Canada Coat of Arms/Armoiries du Canada

Commission du droit d’auteur
Canada

[Traduction]

 

[CB-CDA 2022-025]

 

DÉCISION INTERLOCUTOIRE DE LA COMMISSION

 

Dossier : Services de musique en ligne (SOCAN: 2007-2018)

 

3 mai 2022

I. introduction

[1] Pandora cherche à divulguer à ses consultants, MM. Marks et Larson, les versions hautement confidentielles de l’énoncé de cause de la SOCAN, les déclarations de témoins de M. James Leacock et Mme Jennifer Brown, et tout autre renseignement hautement confidentiel de la SOCAN (comme dans l’énoncé de cause du défendeur) qui seront déposés par la SOCAN.

[2] Comme il a été prévu dans l'Ordonnance relative aux renseignements pour lesquels un traitement confidentiel peut être demandé (CB-CDA 2018-061) (l’« Ordonnance de confidentialité »), Pandora a remis aux avocats externes de la SOCAN, la CSI et Ré:Sonne (les « sociétés de gestion collective ») une entente de confidentialité exécutée par ses consultants et qu’ils devaient signer avant que les renseignements puissent leur être divulgués.

[3] Comme il est permis dans le cadre de l’Ordonnance de confidentialité, les sociétés de gestion collective se sont opposées à la divulgation.

[4] L’Ordonnance de confidentialité (au paragraphe 9) prévoit que : [traduction] « Si une opposition est formulée, aucun document ni renseignement faisant l’objet de la présente Ordonnance ne sera divulgué à la personne jusqu’à ce que la Commission ait statué sur l’opposition et, par la suite, seulement si la décision de la Commission le permet ».

II. décision

[5] Les oppositions à la divulgation sont maintenues et la divulgation des renseignements aux consultants n’est pas permise pour les raisons suivantes.

III. Contexte

[6] Comme il a été envisagé dans l’Ordonnance de confidentialité, Pandora souhaite retenir les services de MM. Benjamin Marks et Todd Larson comme consultants. Ils sont présentés comme ayant de l’expérience et sont des avocats spécialisés en droit d’auteur bien respectés aux États-Unis (É.-U.), à l’emploi du cabinet Weil, Gotshal & Manges LLP. Les consultants sont des avocats externes de Pandora aux É.-U. et représentent Pandora dans les procédures américaines de la Copyright Royalty Board de ce pays. Ils aideraient Pandora dans la procédure actuelle à titre de consultants, [traduction] « surtout en raison de leur grande expérience en matière d’ententes sur les licences d’œuvres musicales et leur compréhension de l’incidence des négociations et du fonctionnement de la structure et des modalités de telles ententes ».

[7] La SOCAN s’oppose à la demande de Pandora surtout pour deux raisons. Premièrement, l’accès que Pandora cherche à obtenir pour ses avocats américains n’est pas nécessaire pour faire valoir ses arguments; deuxièmement, la divulgation de renseignements hautement confidentiels de la SOCAN aux avocats américains de Pandora présente un risque important de préjudice non seulement pour la SOCAN, mais aussi pour ses contreparties aux ententes – notamment, les concurrents de Pandora.

[8] La CSI s’oppose aussi à la demande de Pandora. À son avis, plusieurs renseignements hautement confidentiels sur lesquels la SOCAN se fonde ont servi aux négociations de la SOCAN et la CSI en parallèle, en réponse à la dynamique du marché qui est décrite dans ces renseignements. Ainsi, les renseignements de la CSI pourraient être facilement découverts par rétro-ingénierie de l’information de la SOCAN et utilisés au détriment des membres de la SOCAN qui sont aussi membres de la CSI, lesquels sont représentés et impliqués dans une instance de fixation de taux de redevances du droit d’auteur aux É.-U., alors que les consultants y représentent Pandora dans un contexte contradictoire.

[9] Ré: Sonne n’a pas déposé d’observations ou fait des représentations.

IV. Plaidoiries orales

[10] En plus d’observations écrites, des plaidoiries orales ont été présentées à l’audience tenue par vidéoconférence le 25 avril 2022.

[11] Pandora cherche à renforcer l’opinion que l’Ordonnance de confidentialité établisse un système fiable visant la protection de renseignements confidentiels ou hautement confidentiels. À son avis, le système n’a jamais été enfreint par le passé même si les procédures de la Commission traitent régulièrement de renseignements hautement confidentiels. Ainsi, Pandora affirme que des critères de mise en équilibre ne sont pas nécessaires puisque le système qui en résulterait existe déjà. Pandora ajoute que les consultants, à titre d’experts chevronnés et habitués aux ordonnances de confidentialité, sont les moins susceptibles de divulguer des renseignements et représentent un risque très faible.

[12] La SOCAN, au contraire, affirme que son opposition nécessite la mise en équilibre des avantages que Pandora peut tirer de l’embauche des consultants et les risques associés à l’utilisation involontaire, inévitable ou inconsciente de renseignements hautement confidentiels en raison de l’étroite relation entre Pandora et ses avocats américains, c.-à-d. les consultants. À son avis, plus le nombre de personnes ayant accès à ces renseignements est élevé, plus le risque de divulgation est grand. La SOCAN réitère que dans l’éventualité où Pandora exercerait ses activités au Canada, il est concevable que cette entreprise cherche à le faire dans le cadre d’une entente avec la SOCAN. Si Pandora avait accès aux ententes de la SOCAN avec les autres fournisseurs de services de musique en ligne et connaissait les préoccupations commerciales principales de la SOCAN, ainsi que ses stratégies de négociation, elle aurait un avantage injuste dans la négociation d’une telle entente.

[13] La CSI se concentre sur les procédures américaines et sur le risque accru d’une divulgation involontaire, inévitable ou inconsciente à Pandora au détriment de la CSI et de ses membres qui sont représentés dans le cadre de ces procédures par la National Music Publishers Association. Elle soutient que les risques sont supérieurs aux avantages du fait que Pandora est bien représentée par des avocats chevronnés au Canada et que la modification de l’Ordonnance aurait peu d’effet sur l’atténuation du risque. La CSI affirme que l’objet de la divulgation est douteux et son utilisation mineure. Elle fait remarquer que l’Ordonnance de confidentialité n’a jamais permis d’envisager – lors des discussions précédant son approbation – l’embauche de consultants américains participant en parallèle à des procédures américaines de fixation de tarifs. Enfin, la CSI indique que, bien que les renseignements hautement confidentiels concernent aussi les concurrents de Pandora, leur consentement hypothétique à utiliser leurs renseignements ne serait pas suffisant pour atténuer le risque encouru par la SOCAN.

[14] Toutes les parties s’entendent sur la nature hautement confidentielle des renseignements en jeu. Elles conviennent également qu’en termes de questions de procédure, comme celle qui nous occupe, la Commission est maître de sa propre procédure et conserve un large pouvoir discrétionnaire à cet égard.

V. analyse

[15] J’aimerais souligner que l’Ordonnance de confidentialité ne crée pas un ensemble statique de règles, dont l’objet serait d’isoler les renseignements commerciaux sensibles, sous réserve d’une divulgation limitée. Elle établit plutôt un cadre permettant de réagir à des situations dynamiques. Il n’y a pas de droit absolu de divulguer des renseignements (hautement) confidentiels à des experts ou des consultants externes. L’Ordonnance de confidentialité est claire : des renseignements hautement confidentiels peuvent être divulgués à des consultants, [traduction] « Sous réserve des paragraphes 8 et 9 » [nous soulignons]

[16] Le paragraphe 9 de l’Ordonnance de confidentialité prévoit ce qui suit :

[traduction] […] Le fournisseur [de renseignements (hautement) confidentiels] peut, pendant ce délai, s’opposer à la divulgation de documents ou de renseignements à la personne ayant signé l’entente. Le fournisseur peut renoncer au délai d’opposition en informant le destinataire. En cas d’opposition, aucun renseignement ni aucun document assujetti à cette ordonnance ne sera divulgué à la personne jusqu’à ce que la Commission ait pris une décision sur l’opposition et, par la suite, seulement si la décision de la Commission le permet.

[17] L’Ordonnance de confidentialité n’est donc pas autosuffisante. Dans certaines circonstances, le cadre exige une décision auxiliaire de la Commission. Le cas échéant, elle doit prendre une décision sur l’opposition à divulguer des renseignements aux consultants. La première question est de déterminer quel critère la Commission devrait appliquer pour sa décision sur l’opposition. La deuxième question porte sur l’application de ce critère à l’affaire en cause.

A. QUEL CRITÈRE PERMETTRAIT DE DÉTERMINER LA DIVULGATION (OU NON) DE RENSEIGNEMENTS SENSIBLES?

[18] Les avocats de Pandora, SOCAN et CSI n’ont pas été en mesure d’identifier un « précédent » de la Commission eu égard à une telle décision. La SOCAN et la CSI favorisent toutes deux une approche équilibrée entre les avantages et les risques de la divulgation. La SOCAN se reporte à la Cour fédérale, qui emploie un critère de mise en équilibre lors de l'examen de l'opportunité d'accorder l'accès à des renseignements confidentiels. Dans le cadre de ce critère, la Cour soupèse tout besoin légitime de protection des renseignements d'une partie et le besoin tout aussi légitime de l'autre partie de donner des instructions adéquates à ses avocats (Guest Tek Interactive Entertainment Ltd. c Nomadix, Inc., 2018 CF 818 au para 23).

[19] Il est entendu que la Commission est libre de formuler sa propre démarche relativement aux décisions sur la divulgation de renseignements sensibles, car « elle jouit d’un pouvoir discrétionnaire pour établir ses propres pratiques et procédures dans chaque cas, sous réserve des règlements qu’elle prend et qui sont approuvés par le gouverneur en conseil » (Société Radio-Canada c SODRAC 2003 Inc., 2015 CSC 57, [2015] 3 R.C.S. 615 au para 94).

[20] La Commission peut néanmoins prendre en compte la pratique de la Cour fédérale qui traite de requêtes d’ordonnances conservatoires par rapport à des renseignements sensibles et des renseignements confidentiels sur le plan commercial, particulièrement lors de litiges en matière de propriété intellectuelle (voir Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada c BNSF Railway Company, 2020 CAF 45 (CanLII), [2020] 3 RCF 124) (ci-après « le CN »).

[21] De telles ordonnances conservatoires établissent des régimes de « consultation réservée aux avocats » ou « réservée aux avocats et aux experts » (voir Arkipelago Architecture Inc. c Enghouse Systems Limited, 2018 CFA 192) (ci-après « Arkipelago ») qui sont similaires à l’Ordonnance de confidentialité de la Commission. Comme l’explique la Cour fédérale :

Les ordonnances conservatoires protègent l’intérêt public en empêchant ou en limitant l’accès à l’information de concurrents (comme certains des renseignements en cause en l’espèce) et en maintenant un environnement concurrentiel approprié. Tout comme d’autres ordonnances semblables, elles sont souvent rendues par le Tribunal de la concurrence pour préserver l’intérêt public qui est mieux servi par une concurrence appropriée. (Paid Search Engine Tools, LLC c Google Canada Corporation, 2019 CF 559 au para 55) (ci-après « Paid Search »).

[22] Dans la présente affaire, le fondement de l’Ordonnance de confidentialité n’est pas contesté, ni la caractérisation des renseignements comme hautement confidentiels. L’accès au dossier de la Commission n’est pas en cause (voir la distinction entre une ordonnance conservatoire et une ordonnance de confidentialité dans CN).

[23] Ce qui est en litige est de savoir si les consultants de Pandora devraient avoir accès aux renseignements hautement confidentiels. Dans de telles situations, le critère pour rendre une ordonnance de « consultation réservée aux avocats » ou « réservée aux avocats et aux experts » ou de faire face à la contestation d'une désignation ou d'une restriction de confidentialité devant les Cours fédérales peut être informatif et utilisé dans le cadre de cette procédure, avec ou sans adaptation (comme l’une qui exclurait les experts ou les consultants. Voir par exemple Merck & Co. c Apotex Inc., 2004 CF 567).

[24] Dans CN, la Cour d’appel fédérale note que la jurisprudence de la Cour fédérale n’est pas constante à l’égard du critère relatif à l’ordonnance conservatoire (qui peut se faire sous forme d’une ordonnance de consultation réservée aux avocats) et utilise l’appel comme un moyen d’établir des balises en la matière. La Cour d’appel a essentiellement réaffirmé le critère relatif à la disponibilité des ordonnances conservatoires connu comme le critère de « l’arrêt AB Hassle ». Ce dernier prévoit qu’une ordonnance conservatoire peut être rendue si la Cour est satisfaite que « le requérant pense que [s]es droits exclusifs, commerciaux et scientifiques seraient gravement compromis par la production des renseignements sur lesquels sont fondés ces droits ».

[25] Par ailleurs, « [s]i une partie conteste la désignation confidentielle revendiquée par l’autre partie, la Cour, lorsqu’elle est appelée à se prononcer sur le caractère confidentiel de l’information, doit être convaincue que les renseignements ‘[ont] été en tout temps considérés comme confidentiels par l’intéressé’ et ‘selon la prépondérance des probabilités, que la divulgation des renseignements risquerait de compromettre [les] droits exclusifs, commerciaux et scientifiques [de la partie appelée à produire les renseignements]’ (le « critère de l’arrêt AB Hassle ») ». (CN au para 14).

[26] La Cour d’appel fédérale distingue le critère de « l’arrêt AB Hassle » du critère plus rigoureux de Sierra Club (Sierra Club du Canada c Canada (Ministre des Finances), 2002 CSC 41 (CanLII), [2002] 2 RCS 522 au para 53) (ci-après « arrêt Sierra Club ») :

[Ce critère] ne saurait s’appliquer lorsqu’il s’agit de déterminer l’opportunité d’une ordonnance conservatoire, malgré le renvoi au critère de l’arrêt AB Hassle et la remarque de la Cour suprême sur les similitudes entre les deux types d’ordonnances au début du jugement (Sierra au para 14). (CN au para 23)

[27] L’arrêt Sierra Club prévoit qu’une ordonnance de confidentialité peut être accordée lorsque :

    1. elle est nécessaire pour écarter un risque sérieux pour un intérêt important, y compris un intérêt commercial, dans le contexte d’un litige, en l’absence d’autres options raisonnables pour écarter ce risque;
    2. ses effets bénéfiques, y compris ses effets sur le droit des justiciables civils à un procès équitable, l’emportent sur ses effets préjudiciables, y compris ses effets sur la liberté d’expression qui, dans ce contexte, comprend l’intérêt du public dans la publicité des débats judiciaires.

[28] Tant les critères de Sierra Club que ceux de l’arrêt AB Hassle comprennent une évaluation des risques et, bien qu’il y ait eu quelque incertitude jusqu’à la décision relative à CN à savoir quelle norme de risque s’applique aux ordonnances conservatoires, même dans le critère plus rigoureux de Sierra Club, les tribunaux étaient prêts à prendre en compte les risques associés à l’utilisation involontaire ou inconsciente de renseignements sensibles. Un tel risque ne constituerait pas une norme plus faible de risque et est jugé suffisant pour justifier une ordonnance de « consultation réservée aux avocats et aux experts ». (Voir Arkipelago aux paras 15-16).

[29] En conclusion, l’approche sous-jacente consiste à soupeser le besoin légitime de protection de renseignements sensibles d’une partie et celui, également légitime, de l’autre partie en vue de préparer adéquatement son dossier (voir par analogie Depura Partners LLC's c Desjardins Assurances générales Inc., 2020 FC 261 au para 12).

B. LE RISQUE DE PRÉJUDICE JUSTIFIE-T-IL D’INTERDIRE L’ACCÈS DES CONSULTANTS AUX INFORMATIONS?

[30] En termes de risque de divulgation, la SOCAN ne suggère pas que MM. Marks et Larson sont indignes de confiance. La SOCAN reconnaît que les avocats américains sont liés par les mêmes normes éthiques que leurs contreparties canadiennes. Par ailleurs, l'entente de confidentialité signée par MM. Marks et Larson les lie à la juridiction de la Cour fédérale en cas de violation. Cependant, selon la SOCAN, le risque est ailleurs : la relation étroite entre Pandora et MM. Marks et Larson – particulièrement par rapport à la participation de Pandora aux procédures de fixation de tarifs devant la Copyright Royalty Board américaine et vraisemblablement les ententes de licence de Pandora – engendre un risque important de divulgation involontaire, inévitable ou inconsciente dans le cadre de ces travaux.

[31] La SOCAN explique que le risque de divulgation inévitable survient lorsqu’une partie qui possède des connaissances sur des renseignements confidentiels est engagée dans une relation si étroite avec une partie que la divulgation involontaire est essentiellement inévitable. Cette situation se produit dans des circonstances où un agent de la partie destinataire qui connaît des renseignements confidentiels ne peut faire autrement que d’être influencée par ces connaissances dans ses décisions commerciales pour la partie destinataire dans le cadre de l’exercice de ses fonctions habituelles, de manière à nuire à la partie qui communique les renseignements (Pliteq, Inc. c Wilrep Ltd., 2019 CF 158 au para 7, citant Rivard Instruments, Inc. c Ideal Instruments Inc., 2006 CF 1338 au para 39).

[32] Je dois prendre en compte plusieurs considérations pour déterminer si les consultants devraient avoir accès à des renseignements sensibles.

[33] Premièrement, je ne suis pas persuadé que le rôle des consultants est essentiel et que leur exclusion empêcherait Pandora de préparer adéquatement son dossier. En fait, Pandora n’a pas expliqué avec conviction quels conseils supérieurs les consultants fourniraient en comparaison aux conseils fournis par les avocats externes canadiens de Pandora. Par ailleurs, la Commission soutient que les contrats étrangers, y compris les pratiques d’octroi de licences qui ont lieu aux
É.-U., ont très peu d’importance au Canada, qui est assujetti à un cadre réglementaire différent et présente des caractéristiques de marché très distinctes. L'aide d’experts sur les pratiques américaines en matière d'octroi de licences est donc discutable.

[34] Deuxièmement, bien que Pandora ne soit pas une concurrente de la SOCAN ou de la CSI, elle obtiendrait un avantage sur ses concurrents, les fournisseurs de services de musique en ligne, si elle avait un accès indirect à des renseignements commerciaux sensibles qui les concernent (y compris des stratégies et des modèles de gestion, des formules et des structures de prix, ainsi que des données commerciales). Cette préoccupation peut être amplifiée du fait que certains des principaux fournisseurs de services de musique en ligne sont présents sur les marchés canadien et américain. En fait, la plupart des ententes de licence avec les principaux fournisseurs de services musicaux en ligne opérant au Canada et déposées par la SOCAN au dossier, comprennent des clauses de confidentialité comportant une obligation d’obtenir des ordonnances conservatoires ou d’autres outils similaires pour limiter la divulgation et protéger le contenu si l’information était nécessaire dans le contexte de litiges.

[35] Troisièmement, la combinaison des trois faits suivants jette un éclairage défavorable sur l'objet de la demande de Pandora : i) Pandora n’est pas une utilisatrice de tarifs de la SOCAN pour les années en cause; ii) un processus de fixation des taux a lieu aux É.-U. au moment de la demande d’accès à des renseignements hautement confidentiels de la SOCAN par des avocats américains de Pandora qui représentent celle-ci dans cette procédure; iii) les intérêts des membres de la SOCAN ne correspondent pas à ceux de Pandora. Bien que les ententes de confidentialité signées par les consultants exigent que les renseignements hautement confidentiels ne soient divulgués qu’aux personnes autorisées par une ordonnance de confidentialité et que l’information ne soit utilisée qu’aux fins de la procédure en question et non à d’autres fins, le risque de divulgation involontaire à d’autres fins et le préjudice connexe ne peuvent être ignorés. Comme l’expliquent les avocats de Pandora dans leur demande adressée à la Commission le 20 avril 2022, « MM. Marks et Larson conseilleront Pandora et ses avocats externes (McMillan LLP) dans le cadre de cette procédure », le risque de divulgation involontaire à Pandora ne peut être exclu.

[36] En fonction de ce qui précède, je ne suis pas convaincu que les avantages de fournir accès aux consultants l’emportent sur les risques de préjudice liés à une utilisation abusive potentielle, de manière involontaire ou inconsciente, de renseignements confidentiels, particulièrement compte tenu de la nécessité de maintenir une « saine concurrence » dans le marché de services de musique en ligne. Comme la Cour fédérale l’a noté : « Les tribunaux reconnaissent que même avec la bonne foi la plus entière, il peut être impossible pour une personne de supprimer de sa mémoire des renseignements concurrentiels particulièrement précieux » (Paid Search au para 54). Ainsi, la demande de Pandora est rejetée.

VI. Calendrier des procédures

[37] Les délais procéduraux doivent être adaptés en toute équité et à la lumière des dates fixées pour l’audience et pour les observations finales.

[38] Il est à noter que, gracieusement, Pandora est prête à déposer son énoncé de cause dans les 7 jours suivant la décision de la Commission au cas où sa demande serait rejetée.

[39] Un calendrier des procédures mis à jour sera fourni sous peu.

 

Le président de la Commission du droit d’auteur,

L’honorable Luc Martineau

 

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